Date : 20040226
Dossier : IMM-2829-03
Référence : 2004 CF 267
ENTRE :
ROMEO JANUARIO DE SOUZA
RENEE VICTORIA DE SOUZA
MELISSA GEORGINA LUCILLE DE SOUZA
ALVIN PHILLIP DE SOUZA
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) datée du 18 mars 2003, dans laquelle la Commission a conclu que quatre des cinq demandeurs n'avaient pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de « personne à protéger » au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).
[2] Romeo Januario De Souza, sa femme Elena Sabina De Souza ( « Mme De Souza » ) et leurs enfants adultes, Melissa Georgina Lucille De Souza, Renee Victoria De Souza et Alvin Phillip De Souza sont entrés au Canada en provenance du Zimbabwe le 8 mars 2002. Les demandeurs ont demandé qualité de réfugié au sens de la Convention le 13 mars 2002. Les demandeurs craignent pour leur vie en raison de leur race.
[3] Les demandeurs sont des asiatiques originaires de Goa. Ils sont tous nés au Zimbabwe et y ont grandi; ils ont travaillé dans ce pays jusqu'à récemment lorsque des bouleversements politiques et les différends ethniques ont fait en sorte que les demandeurs sont devenus la cible d'actes de violence et de persécution.
[4] Quatre membres de la famille ont la citoyenneté portugaise. Toutefois, Mme De Souza n'a pas la citoyenneté portugaise.
[5] La Commission a conclu que les demandeurs pourraient être soumis à la persécution et à la torture et exposés à une menace à leur vie ou au risque de peines cruelles et inusitées s'ils retournaient au Zimbabwe.
[6] La Commission a conclu que Mme De Souza avait qualité de réfugié au sens de la Convention. Toutefois, la Commission a conclu que parce que les quatre autres membres de la famille avaient la citoyenneté portugaise, ils n'étaient ni des réfugiés au sens de la Convention, ni des personnes à protéger. La Commission a écrit, au soutien de sa décision :
J'estime que vous êtes tous crédibles. Je reconnais la véracité de vos allégations telles que vous les avez exposées. Si vous n'étiez citoyens que du Zimbabwe, je vous aurais également reconnu la qualité de réfugié au sens de la Convention. Toutefois, selon la loi, si vous avez la citoyenneté d'un autre pays, vous devez présenter des preuves contre cet autre pays aussi pour que vous soyez considérés réfugiés de cet autre pays. Aucune preuve présentée aujourd'hui ne permet de croire que vous seriez persécutés au Portugal ou que vous n'y jouiriez pas d'une protection. Pour cette raison, je conclus que vous pourriez vivre au Portugal, libres de toute persécution[...].
[7] L'avocat des demandeurs soulève deux questions. Examinons d'abord la deuxième. L'avocat des demandeurs prétend que la Commission a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de la perte potentielle de la citoyenneté zimbabwéenne des demandeurs. Le défendeur prétend que la perte potentielle de la citoyenneté zimbabwéenne n'était pas pertinente relativement à la décision de la Commission de rejeter la demande. Je suis d'accord. La crainte des demandeurs que le gouvernement du Zimbabwe leur enlève leur citoyenneté était pertinente afin d'établir la crainte de persécution au Zimbabwe. Toutefois, la demande a été rejetée parce que les demandeurs étaient des citoyens portugais et leur crainte de perdre la citoyenneté zimbabwéenne n'avait aucun lien avec leur situation au Portugal (Chavarria c. Canada (M.C.I.), [1995] A.C.F. no 17 (1re inst.) (QL)). Par conséquent, je suis d'accord avec le défendeur, cet élément n'était pas pertinent relativement au rejet de la demande et la Commission n'a donc commis aucune erreur sur ce point.
[8] Pour ce qui concerne la première question, l'avocat des demandeurs allègue que la Commission a violé les principes de justice naturelle et d'équité procédurale en ne permettant pas à l'avocat de présenter ses observations avant de prendre une décision. Aux termes de l'alinéa 170e) de la Loi, « [d]ans toute affaire dont elle est saisie, la Section de la protection des réfugiés : [...] donne à la personne en cause et au ministre la possibilité de produire des éléments de preuve, d'interroger des témoins et de présenter des observations » .
[9] Selon moi, les demandeurs ont eu la possibilité raisonnable de produire des éléments de preuve et de présenter des observations. Il est important de souligner que plusieurs jours avant l'audition des demandes d'asile, l'avocat des demandeurs a déposé d'abondantes observations écrites auprès de la Commission concernant la citoyenneté des demandeurs et les implications de leurs demandes d'asile. En outre, puisque la commissaire a limité la question à celle de la citoyenneté portugaise dès le début de l'audience et qu'elle a, par la suite, maintes fois fait part de ses préoccupations aux demandeurs, j'en arrive à la conclusion qu'en l'espèce, les demandeurs ont eu la possibilité raisonnable de présenter une preuve et des observations à la Commission.
[10] Pour les motifs ci-dessus, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
[11] Les demandeurs ont proposé la question suivante à des fins de certification :
[traduction] Le retrait de la citoyenneté d'un demandeur d'asile peut-il constituer de la persécution même si le demandeur est citoyen d'un autre pays?
[12] Pour les motifs susmentionnés, il est clair que la question proposée par les demandeurs n'est pas une question grave de portée générale parce qu'elle n'est pas déterminante en l'espèce. Il n'y a donc aucune certification.
« Yvon Pinard »
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
le 26 février 2004
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2829-03
INTITULÉ : ROMEO JANUARIO DE SOUZA, RENEE VICTORIA DE SOUZA, MELISSA GEORGINA LUCILLE DE SOUZA, ALVIN PHILLIP DE SOUZA
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 20 JANVIER 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET
ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 26 FÉVRIER 2004
COMPARUTIONS :
Marvin Klassen POUR LES DEMANDEURS
R. Keith Reimer POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Marvin Klassen POUR LES DEMANDEURS
Vancouver (Colombie-Britannique)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)