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Date : 20020307

Dossier : IMM-5212-00

Référence neutre : 2002 CFPI 259

Toronto (Ontario), le jeudi 7 mars 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

                                               UMER ALI

                                                                                                  demandeur

                                                    - et -

                                                                                                                   

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                    défendeur

        MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]    M. Umer Ali est un citoyen du Pakistan qui a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention, prétendant craindre avec raison d'être persécuté au Pakistan du fait de sa religion et de son appartenance à un groupe social, nommément des sunnites convertis à la foi chiite. Il sollicite en l'espèce le contrôle judiciaire de la décision du 5 septembre 2000 dans laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SSR) a conclu qu'il n'était pas un réfugié au sens de la Convention.


[2]    Bien que M. Ali ait soulevé un certain nombre de questions, il est à mon avis seulement nécessaire d'en examiner une : la SSR a-t-elle commis une erreur en rejetant la demande d'ajournement de M. Ali et en procédant ensuite à l'audience même si M. Ali n'était pas représenté?

LES FAITS

[3]    M. Ali est arrivé à Montréal le 7 janvier 1999 et a revendiqué le statut de réfugié le même jour. M. Ali a par la suite demandé l'aide juridique et en a bénéficié. Le 12 janvier 1999, il avait informé la SSR qu'il avait retenu les services d'un avocat. Son Formulaire de renseignements personnels (le FRP) a été préparé le 20 février 1999 et il a été soumis à la SSR le 22 février 1999.


[4]                 L'avocat de M. Ali a demandé avec succès à la SSR que son dossier soit transféré de Montréal à Toronto. Le 7 juin 1999, M. Ali a demandé que son dossier soit de nouveau transféré à Montréal. Cette deuxième demande a été rejetée, et l'audience devant la SSR a été fixée au 10 novembre 1999. M. Ali a alors changé d'avocat et, à la demande de celui-ci, une nouvelle date d'audience a été fixée de façon péremptoire au 22 novembre 1999. Le nouvel avocat a fait cette demande parce qu'il n'était pas libre le 10 novembre 1999. Presqu'immédiatement après la fixation de la nouvelle date d'audience, l'avocat de M. Ali a demandé un autre ajournement, affirmant qu'il avait commis une erreur dans l'établissement de son emploi du temps. On a fait droit à sa demande et, le 15 novembre 1999, une nouvelle date d'audience a été fixée au 6 décembre 1999, encore une fois de façon péremptoire.

[5]                 Par la suite, M. Ali a une fois de plus changé d'avocat, rencontrant son nouvel avocat le ou vers le 20 novembre 1999. Plus tard, le vendredi 3 décembre 1999, le nouvel avocat a faxé une demande d'ajournement de l'audience à la SSR. Cette demande n'est parvenue à la SSR qu'au début de l'audience le lundi 6 décembre 1999.

[6]                 M. Ali s'est alors présenté à l'audience sans avocat et a demandé un ajournement parce qu'il ne voulait pas comparaître sans avocat. Après avoir entendu M. Ali, la SSR a refusé d'ajourner l'audience et a procédé. M. Ali a pris part à l'audience sans l'assistance d'un avocat. La SSR a conclu que M. Ali n'était pas un réfugié au sens de la Convention.

LA DÉCISION DE LA SSR

[7]                 En ce qui concerne la décision de ne pas ajourner l'audience, le tribunal a conclu que M. Ali n'avait pas préparé sa demande de façon diligente et que les motifs qu'il a invoqués pour remplacer son deuxième avocat par un troisième n'étaient ni raisonnables ni acceptables. La SSR a fait remarquer que M. Ali « a tenu ses avocats responsables » du retard, mais n'a pris aucune part de responsabilité.


[8]                 Selon la SSR, M. Ali a justifié ce changement d'avocat en invoquant l'insuffisance des services d'interprétation et des difficultés de communication avec son deuxième avocat. La SSR a noté que la majorité des demandes dont la SSR est saisie sont présentées par des revendicateurs qui ne peuvent pas communiquer avec leur avocat dans leur propre langue et qui, par conséquent, doivent avoir recours à des services d'interprétation. Elle a également souligné que les avocats qui pratiquent le droit des réfugiés prennent des dispositions en vue d'obtenir des services d'interprétation, dont le coût est assumé par l'Aide juridique.

[9]                 Dans ses motifs exposés à l'audience, la SSR a affirmé qu'elle avait conclu que M. Ali était moins que sincère quant aux motifs pour lesquels il voulait un ajournement et a fait ressortir les divergences du témoignage qu'a produit M. Ali sur la question de savoir s'il avait informé la SSR de son dernier changement d'avocat et sur les motifs pour lesquels le troisième avocat a demandé un ajournement. La SSR a également noté qu'une fois qu'il a appris que l'audience aurait lieu, M. Ali a pu produire les documents qu'il a déclaré ne pas avoir.

[10]            La SSR a ensuite conclu :

Le tribunal estime qu'il incombe au revendicateur de préparer sa cause consciencieusement. Étant donné les 14 années d'études du revendicateur et les raisonnements poussés dont il s'est montré capable, le tribunal est d'avis qu'il a invoqué l'absence de toute aide, notamment celle de ses avocats, comme un prétexte pour ne pas s'acquitter de ses obligations.


Le tribunal reconnaît qu'un revendicateur a le droit de choisir son avocat. Dans le cas actuel, M. Berger était le troisième avocat à représenter le revendicateur, ce dernier ayant changé d'avocat à deux reprises pour une raison que le tribunal ne juge pas raisonnable. Si le troisième avocat choisi par le revendicateur est, pour une raison quelconque, dans l'impossibilité de comparaître à la date d'audience prévue, il n'est pas raisonnable de la part du revendicateur de s'attendre que la Commission se plie aux exigences de l'avocat. S'il le faisait, il entraverait indûment les travaux de la Section du statut de réfugié, qui a comme mandat de veiller au déroulement rapide des audiences tout en assurant l'efficacité du processus et en faisant preuve d'équité envers les revendicateurs. Le revendicateur devrait choisir son conseiller parmi des avocats (travaillant ou non pour un même cabinet) qui sont disposés et en mesure de le représenter à la date prévue. Compte tenu de ce qui précède, le tribunal estime que les agissements du revendicateur n'indiquent pas qu'il se soit acquitté de ses obligations de façon consciencieuse. Au contraire, le tribunal est d'avis que le revendicateur ne souhaitait pas que l'audience ait lieu et qu'il a changé d'avocats afin de gagner du temps. Le tribunal estime que le refus d'accorder un ajournement et l'obligation, pour le revendicateur, de comparaître sans la présence de son avocat ne constituent pas une violation de la justice naturelle.

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[11]                         La Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi) et les Règles de la section du statut de réfugié, DORS/93-45 (les Règles) comportent des dispositions traitant des ajournements.

[12]                         Le paragraphe 69(6) de la Loi est rédigé en ces termes :


La section du statut ne peut ajourner une procédure que si elle est convaincue que l'ajournement ne causera pas d'entrave sérieuse.

The Refugee Division shall not adjourn any proceedings before it, unless it is satisfied that an adjournment would not unreasonably impede the proceedings.


[13]             Le paragraphe 13(4) des Règles se lit comme suit :



Pour déterminer si elle fera droit à une demande de remise de l'audience ou pour déterminer, conformément au paragraphe 69(6) de la Loi, si l'ajournement de l'audience causera ou non une entrave sérieuse à la procédure, la section du statut peut prendre en considération, le cas échéant :

a) les efforts déployés par les parties pour procéder avec célérité;

b) la nature et la complexité des questions qui se rapportent à la procédure;

c) la nature des éléments de preuve devant être présentés et le risque de causer une injustice à l'une ou l'autre des parties en procédant en l'absence de ces éléments de preuve;

d) les connaissances et l'expérience

du conseil en ce qui concerne les procédures du même genre;

e) le délai déjà accordé aux parties pour la préparation de l'affaire;

f) les efforts déployés par les parties pour être présentes à l'audience;

g) les efforts déployés par les parties pour demander à la première occasion la remise ou l'ajournement de l'audience;

h) le nombre de remises ou d'ajournements antérieurs accordés, ainsi que les motifs les justifiant;

i) le fait que l'audience a été ou non fixée de façon péremptoire;

j) tout autre fait pertinent.

The Refugee Division, in determining whether a hearing shall be postponed, or in determining pursuant to subsection 69(6) of the Act whether an adjournment of a hearing would unreasonably impede the proceeding, may take into consideration, where applicable,

(a) the efforts made by the parties to proceed expeditiously;

(b) the nature and complexity of the issues relevant to the proceeding;

(c) the nature of the evidence to be presented, and the likelihood of causing an injustice to any party by proceeding in the absence of the evidence;

(d) counsel's knowledge of, and experience with, similar proceedings;

(e) the amount of time already

afforded the parties for preparation of the case;

(f) the efforts made by the parties to be present at the hearing;

(g) the efforts made by the parties to make an application for a postponement or adjournment of the hearing at the earliest opportunity;

(h) the number of, and reasons for, any previous postponements or adjournments granted;

(i) whether the hearing was set peremptorily; and

(j) any other relevant facts.


ANALYSE

(i) La norme de contrôle

[14]       Dans Mangat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1301 (C.F. 1re inst.), le juge Gibson a examiné la norme de contrôle applicable à l'exercice par la SSR de son pouvoir discrétionnaire d'accorder un ajournement, et il a conclu que la norme de contrôle applicable était celle de la décision raisonnable simpliciter. Il a ensuite conclu que, compte tenu des conséquences énormes qui pourraient découler d'un refus, lorsque l'octroi d'un ajournement n'est pas interdit par le paragraphe 69(4) de la Loi, la SSR devrait exercer de façon généreuse son pouvoir discrétionnaire de l'accorder dans des circonstances où rien n'indique que la partie qui en a fait la demande a agi de mauvaise foi.


[15]       Compte tenu des principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, je suis également convaincue que la décision devrait être contrôlée au regard de la norme de la décision raisonnable simpliciter, et que la SSR devrait exercer de façon généreuse son pouvoir discrétionnaire quand rien n'indique qu'il y a eu mauvaise foi.

(ii) Était-il raisonnablement loisible à la SSR de refuser l'ajournement?

[16]       Les facteurs dominants sur lesquels s'est fondée la SSR pour refuser l'ajournement sont les conclusions suivantes : M. Ali n'a pas été sincère quant aux motifs qu'il a donnés à l'appui de sa demande d'ajournement et, au lieu de préparer sa cause de façon diligente, il changeait d'avocats « afin de gagner du temps » .

[17]       S'il était raisonnablement loisible à la SSR de tirer ces conclusions sur le vu de la preuve dont elle était saisie, on ne peut pas dire que sa décision de refuser l'ajournement était déraisonnable et elle ne devrait pas être annulée.


[18]       Pour ce qui est de la conclusion de la SSR selon laquelle M. Ali n'a pas été sincère, le premier des trois motifs donnés par la SSR à l'appui de cette conclusion est le suivant : M. Ali a dit qu'il n'avait pas informé la SSR du changement d'avocat, mais cette déclaration est contredite dans une lettre au dossier de la SSR dans laquelle M. Ali informe la SSR du changement d'avocat. Le dossier de la SSR contenait un avis de changement d'avocat, apparemment signé par M. Ali et faxé à la SSR. Toutefois, M. Ali a dit ce qui suit dans son témoignage devant la SSR : [Traduction] « Jusqu'ici, je n'ai envoyé aucun renseignement. Tout ce qui a été fait l'a été par ma fille » . Compte tenu de ce témoignage et de l'absence d'éléments de preuve contredisant M. Ali lorsqu'il affirme que c'est sa fille qui a envoyé le fax, cette « divergence » ne justifie pas une conclusion selon laquelle il y a eu manque de sincérité. Il est difficile d'attribuer les remarques de M. Ali à quoi que soit d'autre qu'à la confusion parce qu'il n'y a aucune raison de tergiverser sur ce point.

[19]       La deuxième indication de manque de sincérité sur laquelle s'est fondée la SSR est sa conclusion selon laquelle même s'il a dit au départ qu'il n'avait aucun document d'identité parce que son premier avocat les avait toujours en sa possession, M. Ali a pu produire les documents en question quand il a appris que la SSR allait procéder.

[20]       La transcription indique que lorsqu'on a attiré l'attention de M. Ali sur cette divergence apparente, il a expliqué que les pièces dont il avait parlé au départ étaient toujours en la possession de son avocat et que les documents qu'il avait produit à la SSR étaient des documents différents qu'il avait obtenus du Pakistan. Même s'il lui était loisible de rejeter cette explication, la SSR était tenue de motiver son refus d'accepter l'explication de M. Ali. Elle ne pouvait tout simplement n'en tenir aucun compte.


[21]       Enfin, la SSR a conclu que M. Ali n'était pas sincère parce que quand on lui a demandé pourquoi son nouvel avocat n'était pas présent à l'audience, M. Ali a répondu que celui-ci voulait au préalable qu'une deuxième demande d'aide juridique soit acceptée. La SSR a conclu que cette déclaration était contredite par une lettre dans laquelle son avocat demandait un ajournement au motif qu'il ne pouvait être présent en raison d'un conflit d'horaire.

[22]       La SSR était saisie d'une lettre de l'Aide juridique de l'Ontario datée du 22 novembre 1999 indiquant qu'à cette date il restait certaines questions à traiter pour que soit réglée la demande d'aide juridique de M. Ali. En conséquence, certains éléments de preuve montraient qu'il y avait des questions relatives à l'aide juridique qu'on n'avait pas encore traité. Compte tenu de cela, du fait que M. Ali a témoigné qu'il n'était pas certain si son avocat était occupé ailleurs parce qu'il avait parlé à son assistant et du fait que l'avocat en question peut fort bien avoir eu plus d'une raison pour demander un ajournement, je ne crois pas que la conclusion de manque de sincérité tirée par la SSR était, sur ce point, bien fondée.

[23]       Comme aucun des motifs énoncés par la SSR pour conclure que M. Ali mentait n'était bien étayé par la preuve, la conclusion de la SSR à cet égard était déraisonnable.


[24]       Pour ce qui est du deuxième facteur sur lequel s'est appuyée la SSR, soit le manque de diligence et le fait que M. Ali a changé d'avocat, M. Ali a témoigné sous serment que comme la première date d'audience approchait, son premier avocat lui a dit qu'il devrait retenir les services d'un nouvel avocat. Cette explication est confirmée dans la lettre que son deuxième avocat a écrite à la SSR quand ses services ont été retenus pour demander le premier ajournement. Dans cette lettre, il note que son prédécesseur n'a jamais présenté de revendication à partir du Pakistan, de sorte que, réflexion faite, le premier avocat et M. Ali sont arrivés à la conclusion qu'il était préférable que M. Ali retienne les services d'un nouvel avocat.

[25]       Selon la transcription de l'audience, après avoir entendu le témoignage de M. Ali sur ce point, le président de l'audience a dit : [TRADUCTION] « M. Umer Ali, ... il vous incombe ... Vous n'avez absolument pas fait preuve de diligence dans la préparation de votre cause ... » .

[26]       Pour ce qui est du deuxième changement d'avocat, M. Ali a témoigné qu'il était incapable de communiquer avec son deuxième avocat en raison de difficultés de langue, que son deuxième avocat n'avait pas d'interprète présent pour l'aider, et qu'il s'était fait accompagner au bureau de l'avocat d'un ami ou d'une connaissance qui lui servirait d'interprète, mais que cette personne n'a pas pu l'aider en raison du trop long délai d'attente requis avant de rencontrer l'avocat.

[27]       Le président de l'audience a répondu comme suit à cette explication :

[TRADUCTION] Monsieur, vous avez bénéficié des services de deux avocats. Il vous incombe de donner suite à votre demande. D'après ce que vous nous avez dit, il est très clair que vous n'avez absolument rien fait pour vous assurer que vous aviez les documents requis et que vous étiez préparés pour procéder; en outre, votre deuxième avocat a représenté devant la Commission de nombreux revendicateurs qui ne parlaient pas l'anglais. Les avocats peuvent toujours s'arranger pour obtenir les services d'un interprète et vous me dites que vous ne pouviez venir avec votre deuxième avocat parce qu'il n'y avait pas de services d'interprétation. Il est très difficile de croire que, monsieur, que votre deuxième avocat ne pouvait mettre à votre disposition des services d'interprétation.


[28]       Le deuxième commissaire l'a alors interrompu pour dire que le deuxième avocat avait déjà comparu devant la SSR [TRADUCTION] « pour représenter des revendicateurs pakistanais » .

[29]       Une lettre envoyée par le deuxième avocat à la SSR confirme que ses services ont été retenus le ou vers le 25 octobre 1999. M. Ali avait encore une fois décidé de changer d'avocat au 17 novembre 1999 quand il a signé un avis de changement d'avocat.

[30]       La SSR n'a jamais tenu compte du témoignage de M. Ali selon lequel le délai d'attente a contrarié son ami, qui lui servait d'interprète, de sorte qu'il ne l'a plus accompagné chez son deuxième avocat. La SSR a choisi de ne pas croire le témoignage de M. Ali au sujet des difficultés de communication avec le deuxième avocat parce que celui-ci avait déjà représenté des [TRADUCTION] « revendicateurs pakistanais » dans le passé et que les avocats peuvent [TRADUCTION] « toujours s'arranger pour obtenir les services d'un interprète » . La SSR a par la suite conclu que M. Ali changeait d'avocat pour gagner du temps.


[31]       À mon avis, la conclusion de la SSR selon laquelle M. Ali changeait d'avocats pour retarder la procédure n'est pas étayée par des motifs qui résistent à un examen assez poussé. La preuve directe dont était saisie la SSR n'appuie pas cette conclusion et la SSR n'était pas habilitée à inférer que, comme les avocats peuvent généralement s'arranger pour obtenir les services d'un interprète, le deuxième avocat était effectivement en mesure de faire de même au cours de la période relativement courte durant laquelle il a agi pour le compte de M. Ali, dans des circonstances où l'interprète dont M. Ali se servait ne pouvait continuer de l'aider.

[32]       M. Ali a déclaré dans son témoignage qu'il avait décidé de changer d'avocat quand il avait lu dans les journaux une annonce de son troisième avocat, selon laquelle celui-ci avait un assistant pakistanais. La SSR n'a formulé aucun commentaire sur cette partie du témoignage. Le dernier changement d'avocat peut autant être attribué à un désir de faciliter les communications qu'à une intention de retarder la procédure.

[33]       Je note également qu'en refusant l'ajournement, la SSR n'a donné aucune indication qu'elle avait tenu compte de deux facteurs très pertinents énoncés par la Cour d'appel fédérale dans Siloch c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 10 (C.A.F.) : la durée de l'ajournement sollicité et la question de savoir si un ajournement de cette durée n'entravera pas indûment le déroulement de la procédure.

[34]       En conséquence, pour les motifs exposés ci-dessus, j'estime que la SSR a refusé l'ajournement sans tenir compte de l'ensemble de la preuve dont elle était saisie, sans tenir compte de tous les facteurs pertinents et en n'ayant à l'appui de sa décision aucun motif susceptible de résister à un examen assez poussé.


[35]       Ayant conclu que dans les circonstances de l'espèce la SSR a commis une erreur en refusant l'ajournement demandé pour permettre à l'avocat d'assister à l'audience, M. Ali a été privé de son droit à une audition impartiale. Pour accorder une réparation appropriée, il faut ordonner la tenue d'une nouvelle audience. Voir l'arrêt Siloch,précité.

[36]             En conséquence, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

(iii) Existe-t-il des raisons spéciales justifiant l'adjudication des dépens?

[37]       L'avocat de M. Ali a sollicité les dépens sur la base avocat-client et, subsidiairement, il a demandé les dépens partie-partie.

[38]       De simples erreurs ne constituent pas des raisons spéciales justifiant une adjudication des dépens en application de l'article 22 des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d'immigration, DORS/93-22. Je ne suis pas convaincue qu'une adjudication des dépens soit justifiée en l'espèce.

[39]       Les avocats n'ont soulevé aucune question à certifier découlant du bien-fondé du refus de l'ajournement et aucune question n'est certifiée.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.    La décision que la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SSR) a rendue le 5 septembre 2000 est annulée et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la SSR pour qu'il rende une nouvelle décision.

2.    Aucune question n'est certifiée.

« Eleanor R. Dawson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                  Avocats inscrits au dossier

  

DOSSIER :                                                           IMM-5212-00

INTITULÉ :                                                          UMER ALI

                                                                                                  demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                    défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :                                 LE MARDI 5 FÉVRIER 2002

LIEU DE L'AUDIENCE :                                   TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                           LE JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :                           LE JEUDI 7 MARS 2002

  

COMPARUTIONS :                                        M. Rocco Galati

pour le demandeur

M. Ian Hicks

pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :       Galati, Rodrigues and Associates

Avocats

637, rue College, bureau 203

Toronto (Ontario)

M6H 1B5

pour le demandeur

                                                                          Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                                                                    

pour le défendeur


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

            Date : 20020307

        Dossier : IMM-5212-00

ENTRE :

UMER ALI

                                              demandeur

   

- et -

    

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                défendeur

                                                                                

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                                

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