Date : 20050210
Dossier : IMM-1916-04
Référence : 2005 CF 213
ENTRE :
SITHY AZEEMA NAJEEBDEEN
NUZRAN NAJEEBDEEN
NUSHTAQ NAJEEBDEEN
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PHELAN
APERÇU
[1] La demanderesse et ses enfants ont été déboutés dans leur demande de statut de réfugié et de personne à protéger parce qu'un membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR) a estimé que la preuve soumise n'était pas crédible. La demanderesse a prétendu qu'elle était persécutée à la fois par l'armée sri lankaise et les par les Tigres tamouls après le départ de son mari du Sri Lanka.
[2] Le mari de la demanderesse est entré au Canada en 1998 où il a déposé une demande d'asile fondée sur l'allégation que l'armée sri lankaise pensait qu'il travaillait pour les Tigres et que ces derniers croyaient qu'il soutenait l'armée sri lankaise. Sa demande a été rejetée par manque de crédibilité.
LES ANTÉCÉDENTS
[3] La demanderesse déclare qu'après le départ de son mari du Sri Lanka, les forces sri lankaises sont venues deux fois chez elle, ont fouillé la maison et l'ont menacée si son mari ne se rendait pas aux autorités. En conséquence, elle a pris son nom de jeune fille, a retiré ses enfants de l'école et s'est cachée en changeant d'emplacement au moins deux fois.
[4] La demanderesse a affirmé que le fait culminant a été une recherche menée par la police à la maison d'une amie pendant l'absence de celle-ci. Les amis ont été agressés et l'un d'eux a été détenu, interrogé, torturé et relâché seulement après le paiement d'un pot-de-vin.
[5] La CISR met en doute de nombreuses particularités du récit de la demanderesse. L'incapacité de la demanderesse d'expliquer de manière convaincante pourquoi elle n'avait pas informé les autorités du fait que son mari était au Canada revêt une importance particulière. Sa seule réponse a été que les autorités l'auraient battue.
[6] Le mari a été appelé à témoigner. La CISR l'a décrit comme « encore plus évasif que sa femme » . La CISR a jugé que la preuve relative à ses communications avec son épouse pendant que lui était au Canada n'était pas conforme au témoignage de celle-ci. La CISR a également jugé insensées les réponses du mari invité à dire pourquoi il avait dit à son épouse de ne révéler à personne sa présence au Canada.
ANALYSE
[7] La demanderesse soumet deux questions. 1) Les conclusions de la CISR sur la crédibilité étaient-elles manifestement déraisonnables? 2) La CISR a-t-elle erré dans son évaluation de certaines preuves documentaires?
[8] La demanderesse soutient que la CISR a erré, non pas en évaluant le témoignage, mais en présumant que les autorités sri lankaises l'auraient laissée tranquille dès qu'on leur aurait révélé la présence de son mari au Canada.
[9] La conclusion de la CISR repose surtout sur la question de savoir si la demanderesse a vraiment fait ce qu'elle dit avoir fait : aller se cacher. Les questions concernant ce qu'elle craignait, pourquoi elle n'a pas dit où se trouvait son mari et la teneur de ses communications avec ce dernier constituaient toutes matière à investigation.
[10] Le défaut de répondre de façon convaincante à ces questions fait ombrage à la prémisse centrale de son récit : le fait qu'elle se soit cachée par crainte des autorités sri lankaises.
[11] Après avoir examiné la transcription de la CISR et compte tenu du fait que le commissaire était en meilleure position que la Cour pour évaluer la crédibilité des témoins, je ne trouve rien de manifestement déraisonnable dans les conclusions de la CISR relatives à la crédibilité. Les domaines soumis à l'examen étaient pertinents, les réponses n'étaient manifestement guère utiles, et il y avait d'autres éléments de crédibilité (par exemple, l'incapacité de la demanderesse de répondre aux forces sri lankaises parce qu'elle n'avait pas de documents permettant de confirmer où se trouvait son mari, étant donné qu'elle ne pouvait le joindre), éléments qui, aussi bien individuellement que cumulativement ont donné à la CISR des fondements raisonnables pour conclure à un manque de crédibilité.
[12] La demanderesse soutient que la CISR a erré dans son évaluation de deux éléments de preuve documentaire : une lettre de l'avocat de la famille et un affidavit du père de la demanderesse.
[13] La CISR a clairement accordé plus d'importance au témoignage verbal de la demanderesse et de son mari, et aux faiblesses de cette preuve qu'à la preuve documentaire. La lettre de l'avocat, bien que confirmant en partie le récit du mari (qui avait auparavant été rejeté par la CISR) ne répondait pas à la question de savoir pourquoi la famille avait été prise pour cible, après le départ du mari.
[14] La CISR n'est pas tenue d'accepter la lettre d'un avocat comme véridique. Il est remarquable que l'avocat n'ait pas déposé d'affidavit, particulièrement du fait que le Sri Lanka a un système de droit très semblable à celui du Canada.
[15] On a accordé peu d'importance à l'affidavit du père parce qu'il ne traitait pas non plus des questions essentielles de la demande.
[16] La CISR avait des motifs raisonnables pour traiter la preuve documentaire comme elle l'a fait.
CONCLUSION
[17] Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.
_ Michael L. Phelan _
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-1916-04
INTITULÉ : SITHY AZEEMA NAJEEBDEEN, NUZRAN NAJEEBDEEN, NUSHTAQ NAJEEBDEEN
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto, Ontario
DATE DE L'AUDIENCE : le 26 janvier 2005
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : le juge Phelan
DATE DES MOTIFS : le 10 février 2005
COMPARUTIONS :
Maureen Silcoff POUR LES DEMANDEURS
Ladan Shahrooz POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Maureen Silcoff POUR LES DEMANDEURS
Toronto (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)
Date : 20050210
Dossier : IMM-1916-04
OTTAWA (ONTARIO), LE 10 FÉVRIER 2005
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PHELAN
ENTRE :
SITHY AZEEMA NAJEEBDEEN
NUZRAN NAJEEBDEEN
NUSHTAQ NAJEEBDEEN
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE QUE la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.
_ Michael L. Phelan _
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.