Date : 20010420
Dossier : IMM-2571-99
Référence neutre : 2001 CFPI 362
ENTRE :
LI XIN
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LE JUGE HANSEN
Introduction
[1] Li Xin sollicite le contrôle judiciaire de la décision du 20 avril 1999 par laquelle un agent des visas du consulat général du Canada à Hong Kong a rejeté sa demande de résidence permanente sous la catégorie d'immigrant indépendant.
[2] En 1996, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au Canada, requérant d'être évalué en tant que spécialiste en matériel informatique selon le code 2183 154 de la Classification canadienne descriptive des professions (CCDP).
[3] Lors de l'entrevue du 19 avril 1999, l'agent a évalué les compétences du demandeur en anglais sur le plan oral, écrit et de la lecture, et lui a ensuite posé une série de questions relatives à son expérience professionnelle. L'agent des visas a jugé floues les réponses du demandeur, ce dernier n'ayant fourni aucun renseignement autre que ses réponses initiales. Même si l'agent des visas a tenté d'obtenir davantage de précisions de la part du demandeur, celui-ci ne lui en a fourni aucune et l'agent des visas lui a fait part de ses réserves au sujet de sa présumée expérience professionnelle, notamment du fait que ses descriptions étaient imprécises et ne faisaient pas ressortir la connaissance technique à laquelle on s'attendrait de la part d'un spécialiste en matériel informatique expérimenté. Le demandeur a répondu à ces réserves en fournissant des photos le montrant au travail pendant qu'il effectuait ce que l'agent des visas a considéré comme des fonctions élémentaires, comme être assis devant un clavier : cette photo est intitulée [traduction] « élimination des virus pour les clients » ; une autre photo montre le demandeur travaillant à un ordinateur en marche : la photo est intitulée [traduction] « réparation de matériel informatique » ; une troisième photo le montre assis avec trois personnes à une table où il y a deux ordinateurs, et cette photo est intitulée [traduction] « discussion de projets » .
[4] L'agent des visas n'était pas convaincu que le demandeur avait de l'expérience dans sa profession envisagée, de sorte qu'il l'a examiné relativement aux autres professions suivantes figurant dans la CCDP : technicien-spécialiste en génie électronique, CCDP 2165 130; ingénieur électronicien en général, CCDP 2144 122; programmeur en informatique des sciences et d'ingénierie, CCDP 2183 122. Le demandeur n'a pas satisfait aux critères de sélection de ces professions.
[5] L'agent des visas a alors évalué le demandeur relativement aux professions suivantes figurant dans la Classification nationale des professions (CNP) : analyste de systèmes informatiques (CNP 2162); programmeur (CNP 2163); électronicien d'entretien (CNP 2242); technologue en génie électronique et électrique (CNP 2241.1). Encore une fois, le demandeur n'a pas reçu le nombre minimal de points d'appréciation.
[6] Lors de l'entrevue, l'agent des visas a fait part de son évaluation au demandeur et lui a expliqué ses motifs de refus de la demande. Le refus a été confirmé par lettre datée du 20 avril 1999.
[7] La lettre de refus de l'agent des visas indique que le demandeur a reçu 65 points d'appréciation relativement à la profession de technicien-spécialiste en génie électronique, CCDP 2165 130, de sorte qu'il n'a pas obtenu les 70 points d'appréciation minimaux requis. L'agent des visas a informé le demandeur qu'il l'avait aussi évalué relativement à sa profession envisagée de spécialiste en matériel informatique, CCDP 2183 154, mais qu'il n'était pas convaincu que ce dernier avait l'expérience nécessaire pour satisfaire aux exigences. L'agent des visas a dit qu'il avait également évalué le demandeur relativement à d'autres professions, mais qu'il avait conclu en fin de compte que : [traduction] « Votre demande n'indique aucune autre profession dans laquelle vous ou votre épouse êtes qualifié et expérimenté et relativement à laquelle votre demande serait acceptée. »
[8] Le demandeur a soulevé quatre questions dans la demande de contrôle judiciaire.
Question # 1
[9] Le demandeur affirme que l'agent des visas a commis une erreur de droit et de fait en concluant qu'il n'était pas qualifié pour exercer la profession de spécialiste en matériel informatique, CCDP 2183 154, et que l'agent a commis une autre erreur de droit en ne l'évaluant pas relativement aux autres professions figurant dans la CCDP pour lesquelles il était qualifié et expérimenté.
[10] Le demandeur fait valoir que la CCDP décrit ainsi les principales fonctions d'un spécialiste en matériel informatique : « Élabore, met en oeuvre, évalue et maintient le matériel informatique afin de répondre aux besoins de l'utilisateur » . Le demandeur avance que, dans le cadre de son travail, il a exercé les fonctions suivantes d'un spécialiste en matériel informatique : planification de projets, analyse de systèmes, élaboration d'applications de matériel informatique, conception de composants, installation de matériel de réseau informatique, instructions aux clients et formation sur la manière d'installer et d'utiliser des microordinateurs et élimination des virus pour les utilisateurs. Par conséquent, le demandeur prétend que l'agent des visas a commis une erreur de droit et de fait en concluant qu'il n'était pas visé par la définition de spécialiste en matériel informatique figurant dans la CCDP.
[11] Le défendeur prétend qu'il était raisonnable que l'agent des visas évalue le demandeur principal relativement à la profession de spécialiste en matériel informatique étant donné que la question fondamentale se posant dans l'évaluation de l'agent des visas était l'incapacité du demandeur de décrire son expérience professionnelle avec une précision suffisante pour convaincre l'agent des visas qu'il avait de l'expérience dans la profession de spécialiste en matériel informatique. Les réponses fournies par le demandeur étaient floues et ne faisaient pas ressortir la portée de la connaissance à laquelle on s'attend de la part d'un spécialiste en matériel informatique. Au paragraphe 9 de son affidavit, l'agent des visas mentionne : [traduction] « Je lui ai demandé de décrire en détail la manière dont il a conçu ce composant, mais, encore une fois, ses réponses étaient floues : il a seulement dit qu'il avait conçu un petit composant à l'aide d'un papier et d'un crayon, sans fournir des précisions ou des renseignements techniques sur les facteurs pris en considération dans la conception du composant, sur ses spécifications et sur la procédure d'utilisation. »
[12] En outre, l'agent des visas a étudié l'affidavit du demandeur et a remarqué que la version de l'entrevue de ce dernier ne comportait aucune précision sur les questions complémentaires qu'il lui avait posées en vue d'obtenir une description détaillée de son expérience professionnelle. Au paragraphe 10 de son affidavit, l'agent des visas indique que : [traduction] « J'ai alors fait part à M. Li de mes réserves relatives à sa présumée expérience professionnelle. Je l'ai informé que la description de son expérience professionnelle était imprécise et ne faisait pas ressortir la connaissance technique d'un spécialiste en matériel informatique expérimenté. Il n'a fourni aucune précision sur la manière dont les spécifications de performance étaient déterminées, sur la manière dont les systèmes étaient conçus, planifiés et mis en oeuvre et sur la manière dont les problèmes techniques étaient résolus malgré mes questions visant l'obtention de ces renseignements. En réponse à mes réserves, M. Li a présenté des photos de lui au travail. Ces photos le montraient en train de réparer du matériel informatique, d'appliquer un logiciel antivirus et d'installer et de tester des périphériques. Les photos laissaient voir que ses fonctions étaient assez élémentaires et qu'elles comportaient la simple réparation et le simple entretien d'ordinateurs de bureau. »
[13] Dans la présente affaire, l'agent des visas a posé au demandeur de nombreuses questions au sujet de son expérience en vue d'obtenir un portrait plus précis de son expérience professionnelle. Malgré ses questions répétées, auxquelles ses notes du STIDI (intégrées dans son affidavit) et l'affidavit lui-même font référence, l'agent des visas a été incapable de soutirer du demandeur quelque précision que ce soit de nature à étayer son expérience professionnelle.
[14] L'agent des visas a évalué le demandeur relativement à un certain nombre d'autres professions figurant dans la CCDP et la CNP en vue de lui faire bénéficier de tout avantage qui pourrait en découler. Le demandeur n'a toutefois pas reçu les points minimaux requis pour ces professions. Le demandeur prétend avoir l'expérience nécessaire pour la profession de programmeur en informatique des sciences et d'ingénierie. Relativement à cette profession, l'agent des visas a indiqué ce qui suit dans les notes du STIDI : [traduction] « J'ai demandé au demandeur s'il avait de l'expérience en tant que programmeur. Il m'a dit qu'il en avait un peu et qu'il avait conçu des petits programmes d'interface. Il aurait moins d'un an d'expérience en tant que programmeur avec cette expérience. »
[15] Le demandeur soutient également que, l'ayant évalué comme électronicien d'entretien (CNP 2242), l'agent des visas était tenu de l'évaluer relativement à la profession équivalente visée par la CCDP. Dans sa plaidoirie, l'avocate du demandeur a avancé que la profession de réparateur-représentant de services techniques visée par le code 8589 110 de la CCDP était la profession équivalente dans la CCDP et que si une évaluation avait été faite relativement à cette profession, le demandeur aurait reçu 69 points d'appréciation. Je souligne que dans la table de conversion de la CNP à la CCDP, il y a au moins trente titres de professions mentionnés sous le titre de groupe de base d'électronicien d'entretien figurant sous le code 2242 de la CNP. Étant donné que le demandeur n'a pas fourni à la Cour la définition prévue par la CCDP pour réparateur-représentant de services techniques, rien ne permet à la Cour de déterminer s'il s'agit d'une profession équivalente. Puisque cet argument ne repose sur aucun fondement factuel, la Cour n'examinera pas la question de l'équité soulevée par le demandeur.
[16] Il est bien établi qu'il incombe au demandeur d'établir l'admissibilité à immigrer au Canada, comme cela a été formulé dans Hajariwala c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1989] 2 C.F. 79 (1re inst.). Bien que le demandeur soutienne qu'il a de l'expérience dans l'exercice des principales fonctions de spécialiste en matériel informatique et que l'agent des visas a commis une erreur en concluant différemment, les notes du STIDI et l'affidavit de l'agent des visas montrent que le demandeur n'a tout simplement pas relevé le fardeau de prouver qu'il avait de l'expérience dans sa profession envisagée.
Question # 2
[17] Le demandeur prétend également que l'agent des visas a commis une erreur de fait et de droit en évaluant sa personnalité puisqu'il ne lui a pas donné crédit pour avoir changé de profession : il a travaillé pendant huit ans pour la Chendu Electronic research Institute, mais il a ensuite été transféré au Sichuan College of Finance and Trade Management. Le demandeur avance que l'agent des visas a eu tort de ne pas lui avoir attribué davantage de points relatifs à sa personnalité en raison de ce changement étant donné que celui-ci démontrait qu'il avait fait preuve d'esprit d'initiative de faculté d'adaptation.
[18] En l'espèce, il n'est pas déraisonnable que le transfert du demandeur d'un poste à un autre n'ait pas été considéré par l'agent des visas comme un indicateur positif de faculté d'adaptation. Ce n'est pas le demandeur qui a décidé de passer d'un poste à un autre; il a plutôt été transféré. Cela ne reflète pas non plus, contrairement à ce que soutient le demandeur, l'existence d'un préjugé défavorable au fait que l'expérience professionnelle du ait été dictée par l'État.
[19] Comme l'a dit le juge Dubé dans Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 1080, au paragraphe 6 : « L'appréciation de la personnalité est laissée entièrement au domaine d'expertise de l'agente des visas et ne devrait pas être modifiée, à moins que la conclusion ne soit abusive ou arbitraire ou que l'agente des visas n'ait commis une erreur de droit » . Je ne peux voir aucune erreur susceptible de contrôle en l'espèce.
Question # 3
[20] Le demandeur soutient également que l'agent des visas a commis une erreur en interprétant le Règlement sur l'immigration, DORS/78-172 (le Règlement), comme comportant un facteur supplémentaire ne s'y trouvant pas lorsqu'il a évalué sa personnalité.
[21] Le facteur 9 de l'annexe I du Règlement prévoit qu'à la lumière de l'entrevue, des points d'appréciation doivent être attribués selon la capacité de la personne et de ses personnes à charge de réussir leur installation au Canada, déterminée en fonction de la faculté d'adaptation de la personne, de son esprit d'initiative, de son ingéniosité et d'autres qualités semblables. À cet égard, les notes du STIDI de l'agent des visas indiquent ce qui suit : [traduction] « Personnalité 4. Le demandeur s'est fait assigner des emplois, il n'a aucune expérience dans un marché de l'emploi libre et il cherche du travail. Connaissance limitée du Canada, aucun effort significatif pour se préparer à l'immigration. La faculté d'adaptation du demandeur paraît limitée, celui-ci n'ayant aucune expérience au sein de multinationales et à l'étranger. » Le demandeur soutient que la mention de [traduction] « la faculté d'adaptation au marché du travail au Canada » faite par l'agent des visas dans la réponse # 131 lorsqu'il a été contre-interrogé sur son affidavit intègre un critère ne figurant pas au facteur 9 de l'annexe 1 du Règlement.
[22] Invoquant la décision rendue par le juge Campbell dans Lau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 543, le demandeur avance également que l'agent des visas a entravé son pouvoir discrétionnaire en intégrant à son évaluation une directive de 1995 en matière de politique envoyée à tous les bureaux des visas. J'estime que le demandeur n'a pas réussi à établir un fondement factuel pour cette affirmation. Aucun élément de preuve n'indique que l'agent des visas a pris en considération la teneur de la directive en matière de politique dans son évaluation de la personnalité du demandeur. Si on craignait cela, il fallait aborder cette question lors du contre-interrogatoire de l'agent des visas.
[23] En outre, quant à l'utilisation par l'agent des visas de l'expression « la faculté d'adaptation au marché du travail au Canada » dans le contexte des questions environnantes et des notes du STIDI relatives à l'évaluation de la personnalité, je ne suis pas convaincue que l'agent des visas ait ajouté un critère par interprétation, comme cela est allégué.
Question #4
[24] Le demandeur prétend également que l'agent des visas a contrevenu à l'obligation d'équité procédurale en ne faisant pas enquête sur l'authenticité de ses lettres de référence, qu'il a trouvées d'une similitude frappante, de sorte que l'agent des visas ne s'est pas informé convenablement sur la crédibilité et la véracité de sa présumée expérience.
[25] Je souligne qu'en contre-interrogatoire sur son affidavit, l'agent des visas a fait son observation voulant que la similitude entre les deux lettres constituait [traduction] « un élément pris en considération » . Dans les circonstances de la présente affaire, où la principale réserve de l'agent des visas était l'incapacité du demandeur de démontrer à l'entrevue qu'il avait de l'expérience dans sa profession envisagée et dans les autres professions, il n'y a pas eu violation de l'obligation d'équité.
[26] Je suis d'avis que l'agent des visas a fait une évaluation complète et équitable du demandeur. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
« Dolores M. Hansen »
J.C.F.C.
OTTAWA (ONTARIO)
Le 20 avril 2001
Traduction certifiée conforme
Pierre St-Laurent, LL.M., trad. a.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : IMM-2571-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : LI XIN C. MCI
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO
DATE DE L'AUDIENCE : LE 16 AOÛT 2000
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MADAME LE JUGE HANSEN
EN DATE DU : 20 AVRIL 2001
ONT COMPARU
Mme Mary Lam POUR LE DEMANDEUR
M. Marcel Larouche POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Cecil L. Rotenberg, c.r. POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
M. Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Date : 20010420
Dossier : IMM-2571-99
Référence neutre : 2001 CFPI 362
OTTAWA (ONTARIO), le 20 avril 2001
EN PRÉSENCE DE : Madame le juge Dolores M. Hansen
ENTRE :
LI XIN
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
ORDONNANCE
VU la demande de contrôle judiciaire de la décision du 20 avril 1999 par laquelle un agent des visas du consulat général du Canada à Hong Kong a rejeté la demande de résidence permanente sous la catégorie d'immigrant indépendant;
APRÈS avoir lu les documents déposés et entendu les observations des parties;
ET pour les motifs de l'ordonnance prononcés en ce jour;
LA COUR ORDONNE :
1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
2. Aucune question n'est certifiée.
« Dolores M. Hansen »
J.C.F.C.
Traduction certifiée conforme
Pierre St-Laurent, LL.M., trad. a.