Date : 19990819
Dossier : T-2303-98
ENTRE :
BLAKE WRIGHT,
demandeur,
- et -
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,
défendeur.
MOTIFS DE L"ORDONNANCE
LE JUGE REED
[1] Lors de la préparation d"un rapport pour le directeur et le sous-directeur de l"établissement de Mission, terminé le 20 mai 1998, les auteurs du rapport ont renvoyé à
l"ex-fiancée du demandeur comme étant sa victime. Le demandeur conteste la validité de cette déclaration. Le demandeur a déposé à cet effet un grief du détenu. C"est la décision qui a été rendue lors de l"examen du grief au troisième palier qui doit être l"objet de la présente instance, même si la demande de contrôle judiciaire du demandeur identifie la déclaration du 20 mai 1998 comme en étant l"objet. Le défendeur a raison cependant de dire que cette déclaration n"est pas une " décision " rendue par un office fédéral.
[2] La décision qui a suivi l"examen du grief au troisième palier a rejeté la demande par laquelle le demandeur visait à obtenir la rétractation de la déclaration et des excuses au motif que le rapport en question n"était qu"à des fins internes et qu"il n"avait pas été versé au dossier de gestion du cas du demandeur. Le rapport était une vérification interne du travail qui avait été fait par l"équipe de gestion du cas du demandeur parce qu"il était lié à sa classification de sécurité.
[3] Le demandeur et son ex-fiancée se sont rencontrés par l"entremise d"un autre détenu alors qu"il était incarcéré dans l"établissement de Mission suite à sa condamnation pour sodomie et agressions sexuelles commises en 1984. Il purgeait une peine d"emprisonnement pour une période indéterminée. Un mariage était prévu. Ces préparatifs ont été annulés. Le demandeur indique que ceci est arrivé de sa propre initiative. Suite à cela, l"ex-fiancée s"est plainte à la G.R.C. que le demandeur l"avait menacée et qu"elle craignait pour sa sécurité. Le demandeur allègue que ces plaintes étaient rancunières et qu"elles consituaient une tentative pour lui rendre la vie difficile après qu"il a rompu leur relation (à cette époque, une possibilité de transfert de Mission " où il avait été classé " risque de sécurité moyen " " à Ferndale " le demandeur ayant été reclassé " risque de sécurité minimum " " était envisagée). L"ex-fiancée n"a jamais porté plainte par écrit à la police et a, par la suite, refusé de collaborer avec celle-ci lors de toute enquête relative à sa plainte verbale contre le demandeur. Les services correctionnels cependant avaient en leur possession des copies des lettres qui formaient la base des assertions de l"ex-fiancée. Le demandeur indique que celles-ci devraient être mises dans le contexte des lettres qu"il a reçues d"elle et que les lettres ont mutuellement un contenu sexuel explicite.
[4] Le mot " victime " est défini à l"article 2 de la Loi sur le système correctionnel, la mise en liberté sous condition et le maintien en incarcération , L.R.C 1992, ch. 20, comme étant la personne qui a subi des dommages corporels ou moraux par suite de la perpétration d'une infraction. Le paragraphe 26(1) de la Loi exige la communication de certains renseignements à la victime à sa demande. Cela comprend par exemple, l'emplacement du pénitencier où le délinquant est détenu, la date de sa mise en liberté au titre d'une permission de sortir escorté ou non ou de sa libération conditionnelle. Le paragraphe 26(3) indique que de tels renseignements sont également communiqués à la personne qui convainc le commissaire qu"elle a subi un dommage corporel ou moral par suite de la conduite du délinquant qui a été l"objet d"une plainte déposée auprès de la police, même si le délinquant a été ou non poursuivi ou condamné pour cette conduite.
[5] Tel que je comprends la position du demandeur, son ex-fiancée, Mme McKim, n"était pas une victime vu qu"il n"avait pas été condamné pour avoir commis une quelconque infraction à son égard, et rien ne devait être communiqué à cette dernière en vertu de l"article 26, à moins que ne soit donné au demandeur la possibilité de contester l"assertion qu"elle a subi un dommage suite à un acte qu"il aurait posé et qui aurait fait l"objet d"une plainte à la police. De plus, malgré l"assertion que le rapport de mai 1998 ne serait pas versé au dossier de gestion du cas du demandeur, le défendeur concède que suite à une faute de copiste, le rapport a été versé au dossier de gestion des cas du demandeur, mais en a été plus tard retiré.
[6] Un réexamen de la classification de sécurité du demandeur, daté du 29 avril 1998, comprend la déclaration qu"il lui appartient de démontrer aux décideurs que le risque qu"il porte à la collectivité peut être contrôlé dans un environnement de sécurité minimale, [TRADUCTION] " malgré sa désignation de délinquant dangereux et les inquiétudes soulevées par sa victime ex-fiancée ". Tel qu"indiqué, les agents des services correctionnels avaient connaissance des inquiétudes de Mme McKim et des lettres que le demandeur lui avait écrites. Ce renseignement fait proprement partie du dossier de gestion de son cas. L"existence des lettres a entraîné une demande d"évaluation psychologique approfondie du demandeur et une réévaluation de sa classification de sécurité. Ces conséquences sont cependant indépendantes du rapport du 20 mai 1998. Le renvoi dans la réévaluation de sa classification de sécurité aux " inquiétudes soulevées par sa victime ex-fiancée " n"est pas fondé sur les déclarations qui figurent dans le rapport et, en fait, il crée une distinction entre la victime du demandeur et son ex-fiancée.
[7] Il semblerait que la déclaration qui figure dans le rapport de mai 1998 est incorrecte puisque l"ex-fiancée n"était pas une victime au sens de l"article 2 de la Loi ; par ailleurs je ne peux pas conclure qu"à ce stade, le commissaire (ou son représentant) avait déterminé que les conditions prévues au paragraphe 26(3) de la Loi avaient été remplies afin de permettre Mme McKim d"obtenir des renseignements relatifs au délinquant. En effet, il n"y a aucune indication que Mme McKim ait jamais demandé d"être informée des allées et venues du demandeur et de sa date de mise en liberté en vertu de l"article 26 de la Loi . Si elle fait une demande, et seulement à ce moment-là, une décision sera prise quant à savoir si elle remplit les conditions de l"article.
[8] Alors que l"examen du grief au premier palier visait à étayer la conclusion que Mme McKim était une victime, ni le deuxième, ni le troisième ont essayé de le faire. Ces décisions étaient fondées sur la conclusion que, que la déclaration ait été vraie ou fausse, cela ne faisait aucune différence parce qu"aucune conséquence n"affectait le demandeur en raison de celle-ci. Cette conclusion est clairement correcte. Le fait d"avoir versé le rapport par erreur au dossier du demandeur n"avait aucune conséquence pour lui. De plus, le demandeur sait que Mme McKim n"a jamais demandé à être enregistrée aux fins de l"article 26 de la Loi . Il fait valoir cela comme un fait dans son affidavit. Aucune conséquence juridique n"a découlé de l"allégation erronée qui figure dans le rapport de mai 1998.
[9] Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire du demandeur est rejetée. |
(Signé) " B. Reed "
juge
Le 19 août 1999
Vancouver (Colombie-Britannique)
Traduction certifiée conforme
Philippe Méla
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
DE LA COUR FÉDÉRALE DU CANADA
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : T-2303-98 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : BLAKE WRIGHT |
c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
REQUÊTE TRAITÉE SUR DOCUMENTS SANS COMPARUTION DES AVOCATS.
MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE REED
EN DATE DU : 19 août 1999 |
OBSERVATIONS ÉCRITES :
M. Blake Wright En son propre nom |
Mme Donnaree Nygard Pour le défendeur |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Morris Rosenberg Pour le défendeur |
Sous-procureur général du Canada