Date : 20050511
Dossier : T-1911-03
Référence : 2005 CF 669
ENTRE :
CHRISTOPHER CLARKE
demandeur
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL
DU CANADA
défendeur
Officier taxateur
[1] Le demandeur, qui est un détenu, a demandé le contrôle judiciaire de la décision par laquelle un tribunal disciplinaire l'avait déclaré coupable d'avoir refusé d'obéir à un ordre en prison et condamné à une amende de 15 $. La Cour a rejeté sa demande avec dépens. J'ai fixé un échéancier aux fins du règlement sur dossier du mémoire des dépens du défendeur.
La position du demandeur
[2] Le demandeur a fait valoir en s'appuyant sur Graham c. Pénitencier de Millhaven, [2004] A.C.F. no 1639 (C.F.), et Hiebert c. Canada, [2002] A.C.F. no 1452 (C.F.), deux décisions portant sur le contrôle judiciaire de condamnations infligées par un tribunal disciplinaire, que les circonstances justifiaient l'adjudication d'une somme globale. En ce qui a trait à l'alinéa 400(3)c) (l'importance et la complexité des questions en litige), il ressort de la preuve que le demandeur est un délinquant primaire qui fait de véritables efforts, avec le soutien de la collectivité et de sa famille, en vue de sa réadaptation. Cette transgression est la seule infraction disciplinaire grave qu'il a commise jusqu'à maintenant. La demande de contrôle judiciaire de la condamnation disciplinaire a entraîné des conséquences graves relativement à une demande de mise en liberté sous condition. En ce qui a trait à l'alinéa 400(3)a) (le résultat de l'instance), la Cour confirme dans ses motifs que ce manquement s'est produit par inadvertance et de façon involontaire. Les ressources limitées du demandeur, combinées à une mise en liberté d'office d'ici quatre ans, écartent la possibilité d'offres de règlement comme facteur à prendre en compte en application de l'alinéa 400(3)e). En ce qui a trait aux alinéas 400(3)h) et o) (intérêt public et toute autre question jugée pertinente), le contrôle judiciaire a tranché la question sérieuse de la surveillance des détenus sans chercher à saper l'autorité de l'établissement. On a plutôt cherché à réduire au minimum les effets négatifs potentiels sur la réadaptation du demandeur et son dossier en vue d'une libération conditionnelle.
[3] Le demandeur a admis que ses moyens financiers et les chances que les dépens taxés soient payés ne sont pas des facteurs pertinents. Toutefois, le montant des dépens réclamés en l'espèce, qui nuit à la capacité du demandeur de subvenir aux besoins de sa famille et, par ailleurs, au rôle que celle-ci joue dans sa réadaptation, minerait l'intention législative positive du paragraphe 71(1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la LSCMLC), qui vise à favoriser les rapports entre les détenus et la collectivité. Les dépens taxés devraient être minimaux et se situer entre 100 et 250 $ si l'on veut être cohérent avec les décisions Graham et Hiebert, précitées. Dans Graham, la Cour a noté que la demande soulevait de nouvelles questions d'interprétation législative et elle a accordé une somme globale de 100 $ à titre de dépens. Dans Hiebert, la Cour, en rejetant la demande de contrôle judiciaire, a souligné au paragraphe [39] que « les principes juridiques applicables aux questions soulevées sont bien établis » et elle a condamné le demandeur à payer des dépens fixés à 250 $. Le résultat en l'espèce est plus cohérent avec Graham, précité, et, par conséquent, les dépens devraient être de l'ordre de 100 $.
La position du défendeur
[4] Le défendeur a fait remarquer que la Cour n'a pas prononcé l'ordonnance « contraire » prévue à l'article 407 et que, par conséquent, les dépens sont taxables en conformité avec la colonne III. La capacité du demandeur à payer en tout ou en partie les dépens qui, en l'espèce, sont équitables et raisonnables, compte tenu de l'effort requis et des conclusions de la Cour, n'est pas pertinente. La conduite du défendeur ne justifie pas que les dépens soient réduits en vertu de l'article 409 et du paragraphe 400(3). Le défendeur a demandé, en se fondant sur le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 408(3), 3 unités pour l'article 26 (de 2 à 6 unités sont possibles) pour la taxation des dépens, compte tenu du travail nécessaire pour préparer le mémoire des dépens et les documents justificatifs.
Taxation
[5] Dans ses observations, le demandeur a cherché à mettre en évidence le choix du défendeur de porter contre lui une accusation en vertu de l'alinéa 40a) de la LSCMLC (désobéissance à un ordre) plutôt qu'en vertu de l'alinéa 40l) (refus de fournir un échantillon d'urine) et il a laissé entendre que même les observations du défendeur reflétaient cette incohérence par un renvoi au mauvais alinéa. Essentiellement, la Cour a conclu que, compte tenu du fait que le dossier révélait que le demandeur avait accepté de fournir un échantillon d'urine mais que, entre-temps, il était tombé endormi, l'accusation ne pouvait être portée en vertu de l'alinéa 40l) et que, par ailleurs, l'accusation fondée sur l'alinéa 40a) était appropriée. Je ne crois pas que le résultat en l'espèce avantage la position du demandeur concernant les dépens. Je crois qu'il est difficile pour une partie au litige qui n'a pas avancé d'offres de règlement de prétendre que sa position quant aux dépens est renforcée. Je ne crois tout simplement pas que l'intérêt public soit un facteur en l'espèce. En supposant que les affirmations du demandeur concernant sa réadaptation soient sincères, je reconnais l'effet négatif potentiel d'une condamnation disciplinaire sur la concrétisation d'une libération conditionnelle anticipée, mais l'établissement avait un grand intérêt dans le maintien de l'intégrité de son régime disciplinaire.
[6] J'ai conclu au paragraphe [7] dans Starlight c. Canada, [2001] A.C.F. no 1376 (O.T.), qu'il n'est pas nécessaire d'utiliser le même nombre d'unités pour chaque service prévu par le tarif, puisque chaque article correspondant aux services rendus par l'avocat est distinct et doit être évalué en fonction des circonstances qui lui sont propres. De plus, il se peut qu'il faille établir d'importantes distinctions entre le minimum et le maximum du barème offert. Compte tenu du fait que le présent litige a été simple du début à la fin, je n'autorise que le minimum pour les honoraires d'avocat dont le montant réclamé correspond au nombre d'unités maximales de l'article 2 (réponse) et à un nombre quelque peu inférieur au maximum pour les articles 13a) (préparation de l'audience) et 14a) (présence). Il ressort clairement de la preuve que les débours, qui se chiffrent à 254,55 $, étaient raisonnablement nécessaires. Je les autorise tels qu'ils sont présentés. Le défendeur a dû faire du travail pour la procédure de taxation : j'accorde le minimum de 2 unités pour l'article 26.
[7] Le mémoire des dépens du défendeur, totalisant 1 990,35 $, est taxé et alloué au montant de 1 464,55 $. Les observations du demandeur relativement à l'adjudication d'une somme globale visaient une procédure ou pratique dont est investie la Cour en vertu du paragraphe 400(4), mais non un officier taxateur.
« Charles E. Stinson »
Officier taxateur
Traduction certifiée conforme
Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-1911-03
INTITULÉ : CHRISTOPHER CLARKE
c.
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES
MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS : CHARLES E. STINSON
DATE DES MOTIFS : LE 11 MAI 2005
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
John Dillon POUR LE DEMANDEUR
Kingston (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada