Date : 20040226
Dossier : IMM-3207-03
Référence : 2004 CF 269
ENTRE :
OLEG VOLOVICH
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 9 avril 2003 rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) dans laquelle la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention ni une « personne à protéger » selon la définition donnée respectivement aux articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] En 1991, Oleg Volovich (le demandeur) a émigré de Russie en Israël où il a reçu la citoyenneté israélienne car son grand-père maternel était juif. Le demandeur est un chrétien pratiquant.
[3] Le demandeur allègue craindre avec raison d'être persécuté du fait de son origine russe de foi chrétienne, de ses opinions politiques et du fait qu'il ne veut pas servir dans l'armée de réserve israélienne.
[4] Dans cette affaire, la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention parce qu'il n'avait aucune raison de craindre la persécution pour un des motifs visés par la Convention. De plus, la Commission a conclu que le demandeur n'avait pas qualité de « personne à protéger » car son renvoi en Israël ne l'exposerait pas personnellement à une menace à sa vie ou au risque de torture, de traitements ou de peines cruels et inusités.
[5] Le demandeur allègue notamment qu'il craint de retourner en Israël parce qu'il ne veut pas servir dans l'armée de réserve israélienne. En Israël, une loi d'application générale impose aux citoyens de servir dans les forces armées. Le demandeur n'a pas fait la preuve que la loi revêt un caractère de persécution pour un motif visé par la Convention (voir Zolfagharkhani c. Canada (M.E.I.), [1993] 3 C.F. 540 (C.A)). Les tribunaux ont établi que le service militaire obligatoire n'équivaut pas à de la persécution et que l'aversion du conflit ou la peur de servir dans l'armée ne peut justifier la crainte de persécution fondée sur une loi d'application générale (Garcia c. Canada (Secrétaire d'État), [1994] A.C.F. no 147 (1re inst.) (QL)). De plus, la Commission relève que, malgré sa crainte alléguée, le demandeur n'a pas tenté d'effectuer un service militaire de remplacement et qu'il n'a jamais manifesté son opposition au service militaire. En conséquence, la Commission n'a commis aucune erreur en concluant que les allégations du demandeur sur ce point étaient sans fondement.
[6] Le demandeur prétend que la Commission n'a pas tenu compte du fait que le fondement de sa demande d'asile était son refus de participer au massacre de civils et à la destruction délibérée de maisons. Le demandeur allègue que, dans la mesure où l'armée israélienne rudoie les Palestiniens, la loi d'application générale sur le service militaire obligatoire revêt un caractère de persécution puisque l'objet de la loi n'est plus de protéger l'État, mais de tolérer des activités illégales. Un examen de la preuve indique que la Commission a bien tenu compte du fait que le demandeur s'était opposé à la politique israélienne à l'égard des Palestiniens. La Commission n'a pas omis de tenir compte de cet élément de la demande. La Commission a plutôt conclu que le demandeur n'avait ni exprimé son opposition à la politique israélienne, ni prouvé que cette opposition avait provoqué sa propre persécution. Le demandeur a présenté une preuve abondante de la condamnation par la communauté internationale de la politique israélienne à l'égard des Palestiniens; par contre, il n'a présenté aucune preuve qu'il sera personnellement ciblé à cause de cette condamnation. Par conséquent, je conclus que la Commission n'a pas omis de tenir compte de cet aspect de la demande du demandeur. En fait, la Commission a examiné cette allégation du demandeur et l'a jugée sans fondement parce que ce dernier n'avait pas établi qu'il faisait personnellement face à un risque.
[7] Le demandeur prétend que le raisonnement qui a amené la Commission à conclure que le traitement réservé aux objecteurs de conscience dans les prisons israéliennes était normal et acceptable n'est pas très clair. Le demandeur semble avoir mal compris l'approche de la Commission sur cette question. La question est de savoir si le demandeur risque la persécution ou est exposé à une menace à sa vie ou au risque de torture, de traitements ou de peines cruels et inusités en Israël. La Commission a apprécié la preuve afin d'établir la punition éventuelle à laquelle le demandeur s'expose pour avoir violé la loi sur la conscription en Israël. La Commission a conclu que le demandeur risque en moyenne une peine d'emprisonnement de deux mois, ce que la Commission juge raisonnable compte tenu la violation de la loi. Je conclus que la Commission n'a commis aucune erreur dans son analyse de ce point.
[8] Le demandeur prétend que la Commission a minimisé sa crainte de persécution du fait de son origine russe de foi chrétienne. Le demandeur relève qu'il a soumis une preuve à l'appui de l'allégation selon laquelle les Russes, en tant que groupe social, étaient persécutés en Israël et que certaines lois israéliennes revêtaient un caractère de persécution envers les citoyens non juifs. Selon le demandeur, ces lois ainsi que la discrimination quotidienne en Israël devraient être réputées de la persécution. Bien qu'il soit possible que les Russes de foi chrétienne soient victimes de discrimination en Israël, les faits allégués par le demandeur n'étaient pas assez graves pour constituer une forme de persécution (voir en général Chan c. Canada (M.E.I.), [1995] 3 R.C.S. 593). Le demandeur n'a pas été en mesure de donner un exemple précis d'une situation où il avait été personnellement visé et persécuté du fait de son origine russe de foi chrétienne. En conséquence, la décision de la Commission, selon laquelle la discrimination alléguée n'était pas assez grave pour équivaloir à une forme de persécution, était raisonnable.
[9] Finalement, le demandeur prétend que la Commission a fait preuve de partialité en prenant sa décision. Cependant, le demandeur n'a produit aucune preuve claire de son allégation de partialité. De plus, une lecture de la transcription des notes n'a révélé aucune trace de partialité que ce soit. Je conclus donc que cette allégation est sans fondement.
[10] Pour ces motifs, je suis d'avis que le demandeur n'a pas prouvé que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle dans sa décision. La présente demande de contrôle est par conséquent rejetée.
« Yvon Pinard »
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
Le 26 février 2004
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-3207-03
INTITULÉ : OLEG VOLOVICH
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 20 JANVIER 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 26 FÉVRIER 2004
COMPARUTIONS :
Oleg Volovich POUR SON PROPRE COMPTE
Peter Bell POUR LE DEMANDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Oleg Volovich POUR SON PROPRE COMPTE
Burnaby (Colombie-Britannique)
Morris Rosenberg POUR LE DEMANDEUR
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario)