IMM-1098-96
E N T R E :
MAGANBHAI K. PATEL,
requérant,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION,
intimé.
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
LE JUGE SUPPLÉANT HEALD
INTRODUCTION
Il s’agit de la demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle Blair Fraser, agent d’immigration du Haut-commissariat du Canada à New Delhi (l’agent des visas) a rejeté, le 11 janvier 1996, la demande de visa d’immigration de deux enfants adultes du requérant, au motif qu’ils n’étaient pas à la charge de celui-ci, contrairement à ce que le requérant avait déclaré dans sa demande de droit d’établissement.
LA DÉCISION DE L’AGENT DES VISAS
L’agent des visas a souligné que le paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration de 1978 prévoyait qu’un enfant à charge devait soit (a) être âgé de moins de 19 ans et ne pas être marié, (b) suivre des cours à temps plein dans un établissement d’enseignement et être à la charge financière du requérant depuis la date de ses 19 ans ou (c) être entièrement à la charge financière du requérant en raison d’une incapacité.
La prétendue fille à charge du requérant était âgée de 22½ ans au moment du dépôt de la demande de droit d’établissement. Elle a déclaré ne pas avoir fréquenté d’établissement d’enseignement depuis les quatre dernières années. Sur ce fondement, l’agent des visas a conclu qu’elle n’était pas à la charge du requérant. Le prétendu fils à charge, né le 27 août 1974, a eu 19 ans le 27 août 1993, avant la date du dépôt de la demande de droit d’établissement (le 5 mai 1994). Il a déclaré, lors de l’entrevue qu’il a eue avec l’agent des visas, ne pas avoir fréquenté d’établissement d’enseignement depuis 1991 mais avoir plutôt étudié à la maison. Sur ce fondement, l’agent des visas a conclu qu’il n’était pas à la charge du requérant.
LES FAITS
Les affidavits déposés par les deux enfants adultes du requérant établissent les faits suivants : la fille du requérant a dix années de scolarité alors que son fils en a neuf. Elle n’a pas suivi de cours en 1992 et 1993. Elle a commencé à suivre des cours en juin 1994. Elle prétend avoir suivi un cours de dactylographie en 1992 et 1993. Cependant, elle était incapable de dactylographier son nom à la demande de l’agent d’immigration. Le fils du requérant a suivi un cours de formation professionnelle en 1992 et 1993. Depuis la date de ses 19 ans, en 1993, jusqu’à celle du dépôt de la demande de résidence permanente neuf mois plus tard, il n’a suivi aucun cours, restant tout simplement à la maison. Il a commencé à suivre un autre cours en juin 1995. Ils n’ont jamais vécu avec quiconque autre que leurs parents et sont à la charge de ces derniers aux plans émotif et financier. Ils n’ont jamais travaillé. Ils affirment que la seule personne leur étant apparentée en Inde est leur oncle qui vit à 40 milles de leur demeure. Cet oncle, un agriculteur ayant la charge de sa propre famille, est incapable de subvenir à leurs besoins.
L’agent des visas déclare avoir tenu compte des considérations humanitaires avant de rejeter leur demande.
Le 16 février 1996, le requérant a demandé une prorogation du délai applicable au dépôt d’une nouvelle demande de contrôle judiciaire, demande qui ne mentionnerait pas les enfants adultes et comporterait de nouveaux éléments.
QUESTIONS EN LITIGE
1. La Cour est-elle dûment saisie des nouveaux éléments?
2. L’agent des visas a-t-il commis une erreur lorsqu’il a omis de tenir compte des considérations humanitaires que lui a présentées le requérant?
3. L’agent des visas a-t-il commis une erreur en concluant que le fils du requérant n’était pas à la charge de celui-ci?
ANALYSE
1. Nouveaux éléments
À mon avis, l’agent des visas ne disposant pas des affidavits supplémentaires déposés par les deux enfants adultes au moment de rendre sa décision, la Cour ne doit pas en être saisie dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire. Comme le mentionne le juge Gibson dans Lemiecha c. M.E.I. (1993) 72 F.T.R. 49, le contrôle judiciaire d’une telle décision doit être fondé sur les éléments de preuve dont l’agent des visas était saisi au moment de rendre sa décision. À mon avis, la seule exception à une telle règle survient lors de la présentation d’une preuve d’une nouvelle situation, par exemple une preuve de partialité lors de l’audience. Le présent dossier ne contient aucune preuve de cette nature. Par conséquent, la règle susmentionnée énoncée par le juge Gibson s’applique en l’espèce et les affidavits supplémentaires déposés ne sont pas admissibles dans le cadre de la présente demande.
Ayant tiré une telle conclusion, je n’ai pas à traiter cette question davantage. Cependant, même si les affidavits supplémentaires étaient admissibles, il ne s’agirait pas, à mon avis, d’éléments de preuve me permettant d’annuler la décision de l’agent des visas.
2. Considérations humanitaires
Le requérant prétend avoir droit à ce qu’il soit tenu compte de toute la preuve pertinente dans le cadre de sa demande invoquant des considérations humanitaires. Je suis d’accord. Cependant, le fardeau de la preuve à cet égard incombe alors au requérant. Il a la responsabilité de porter à l’attention de l’agent des visas toute preuve pertinente relative à des considérations humanitaires[1].
Le requérant prétend également que l’agent des visas n’a pas tenu compte de la politique portant sur les «Derniers membres de la famille» énoncée dans le Guide de l’Immigration. En vertu de cette politique, il faut tenir compte des problèmes d’ordre financier ou émotif que le requérant pourrait avoir sans le soutien financier ou émotif de la cellule familiale qui a immigré au Canada. Il ressort du présent dossier que ces enfants ont plusieurs autres tantes et oncles vivant toujours en Inde, et rien n’indique qu’ils seraient incapables, le cas échéant, de fournir un soutien financier ou émotif ou les deux. Il incombait au requérant de fournir de tels renseignements.
3.Fils à charge
À mon avis, il est évident que l’agent des visas pouvait conclure, comme il l’a fait, que le fils du requérant avait 19 ans au moment du dépôt de la demande de droit d’établissement.
CERTIFICATION
En l’espèce, aucun avocat n’a proposé la certification d’une question grave de portée générale. Je souscris à ce point de vue. En conséquence, aucune question ne sera certifiée.
CONCLUSIONS
Par ces motifs, j’ai conclu que l’agent des visas n’a commis aucune erreur susceptible de faire l’objet d’un contrôle, dans le présent dossier.
La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.
«Darrel V. Heald, J.S.
Juge
Toronto (Ontario)
Le 17 janvier 1997
Traduction certifiée conforme _________________________
Bernard Olivier, LL. B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats et procureurs inscrits au dossier
NO DU GREFFE : IMM-1098-96
INTITULÉ DE LA CAUSE : MAGANBHAI K. PATEL
- c. -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION
DATE DE L’AUDIENCE : LE 14 JANVIER 1997
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DE L’ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE SUPPLÉANT HEALD
EN DATE DU : 17 JANVIER 1997
ONT COMPARU :
Max Chaudhary
Pour le requérant
John Loncar
Pour l’intimé
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Max Chaudhary
Avocat
255, chemin Duncan Mill, bureau 812
North York (Ontario)
M3B 3H9
Pour le requérant
Ministère de la Justice
2, First Canadian Place
bureau 3400, Exchange Tower
boîte postale 36
Toronto (Ontario)
M5X 1K6
George Thomson
Sous-procureur général
du Canada
Pour l’intimé
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
No du Greffe : IMM-1098-96
Entre :
MAGANBHAI K. PATEL,
requérant,
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION,
intimé.
MOTIFS DE L’ORDONNANCE