Date : 20000907
Dossier : T-639-93
ENTRE :
PETER DALE et BERNARD DALE
demandeurs
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
(énoncés oralement à l'audience
à Vancouver le mercredi 6 septembre 2000)
LE JUGE HUGESSEN
[1] Les demandeurs voudraient obtenir la production de certains documents énumérés à l'annexe 2 de l'affidavit de documents de la défenderesse, c'est-à-dire de documents visés par une allégation de privilège. Le privilège allégué est celui du secret professionnel de l'avocat.
[2] Deux moyens sont avancés pour lesquels je devrais conclure que ces documents ne sont pas privilégiés. Le premier concerne l'exception classique des communications échangées avec un conseiller juridique pour la perpétration d'un crime ou d'une fraude. Le deuxième concerne la renonciation au privilège. À mon avis, les deux moyens sont irrecevables dans la présente requête.
[3] D'abord, il ne m'a nullement été démontré dans la présente requête, que ce soit à titre de commencement de preuve ou autrement, que la défenderesse a dans cette affaire commis un crime ou une fraude. La lecture des actes de procédure ne révèle pas même une allégation de crime ou de fraude de la part du ministre. Si je comprends bien les actes de procédure, il est allégué que le ministre a contrevenu à l'article 225 de la Loi de l'impôt sur le revenu en instituant une procédure de mise en recouvrement alors qu'un appel était en instance. Il n'est pas allégué dans les actes de procédure qu'il s'agit là d'un crime, et je doute très sérieusement que l'application de l'article 126 du Code criminel fasse véritablement de cette mesure un crime comme l'avocat des demandeurs a très habilement tenté de m'en convaincre. Toute violation d'une obligation imposée par la loi n'est pas nécessairement un acte criminel, mais uniquement celle qui est commise volontairement et sans excuse légitime, et la rareté même des poursuites engagées en vertu de l'article 126, sans compter la quasi-absence de précédents (l'avocat n'a pu en citer aucun), indique qu'il ne s'agit pas là d'un crime auquel on a souvent affaire.
[4] Naturellement, la légalité de la mesure prise par le ministre est la question même dont est saisie la Cour dans le procès concernant ladite mesure. Mais, même si cette question est résolue d'une manière satisfaisante pour les demandeurs, on ne pourra pas conclure, à mon avis, à une activité criminelle de la part du ministre.
[5] Il n'est pas non plus question ici à mon avis de renonciation à un privilège. Dans sa défense, la défenderesse a simplement plaidé la légalité de ses actes. Il ne s'agit pas là d'une allégation qui jette un doute sur l'état d'esprit de la défenderesse, et il ne s'agit certainement pas de la renonciation à quelque privilège que ce soit protégeant le secret professionnel de l'avocat.
[6] Il peut y avoir des cas où la renonciation à un privilège peut résulter implicitement des circonstances, et les avocats en ont trouvé quelques-uns qu'ils m'ont indiqués, mais nous n'avons manifestement pas affaire à un cas semblable.
[7] En conséquence, je dois rejeter la requête. Les dépens seront établis de la manière habituelle.
Le 7 septembre 2000 (Signé) « James K. Hugessen »
Vancouver (Colombie-Britannique) Juge
Traduction certifiée conforme.
Jacques Deschênes
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : T-639-93 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Peter Dale et Bernard Dale |
c.
Sa Majesté la Reine
LIEU DE L'AUDIENCE : Vancouver (Colombie-Britannique) |
DATE DE L'AUDIENCE : le 6 septembre 2000 |
MOTIFS DE L'ORDONNANCE du juge Hugessen
EN DATE DU 7 septembre 2000 |
ONT COMPARU :
Laurence Armstrong, pour les demandeurs |
Heather Hill et
Carl Januszczak, pour la défenderesse |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Armstrong Nikoliich
Avocats
Victoria (C.-B.) pour les demandeurs |
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada pour la défenderesse |