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Date : 20000331


Dossiers : IMM-2294-96

IMM-2296-96

IMM-2297-96



ENTRE :

     ATLANTIC PRUDENCE FUND CORPORATION,

     ATLANTIC GROWTH FUND CORPORATION LIMITED,

     AB CAPITAL CORPORATION,

     KLC CAPITAL CORPORATION LIMITED,

     MOUNT ROYAL CAPITAL CORPORATION,

     PEI GROWTH FUND CORPORATION,

     ATLANTIC PRUDENCE MANAGEMENT CORPORATION,

     GRT MANAGEMENT CORPORATION,

     ABT MANAGEMENT CORPORATION,

     KLC MANAGEMENT LTD., MTR MANAGEMENT CORPORATION

     et PEI GROWTH MANAGEMENT CORPORATION LTD.

     demanderesses


     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON


[1]      J'ai devant moi une requête présentée par les demanderesses en vue d'obtenir l'autorisation de modifier les avis de demande de façon à solliciter un jugement déclaratoire à la place du bref de mandamus et à ajouter aux motifs de leurs demandes de contrôle judiciaire des allégations selon lesquelles le Ministre a tenu compte de choses non pertinentes et a pris sa décision de mauvaise foi et à des fins non prévues par la Loi sur l'immigration (L.R.C. (1985), ch. I-2) ou les Règlements. Les demanderesses sollicitent en outre que l'instance soit gérée à titre d'instance à gestion spéciale et que la Cour fixe un échéancier pour la poursuite de l'affaire.

[2]      Le défendeur consent à ce que les demanderesses soient autorisées à modifier les avis de demande afin de solliciter un jugement déclaratoire, mais il s'oppose à toute modification concernant les motifs.

[3]      Le défendeur consent au prononcé d'une ordonnance pour que l'instance soit gérée à titre d'instance à gestion spéciale et à ce que la Cour impose, avec quelques changements mineurs, un échéancier à l'instance, ainsi que le suggèrent les demanderesses dans l'annexe B de leur avis de requête.

[4]      Les demanderesses avaient antérieurement présenté une requête afin d'élargir le fondement de leurs demandes de manière à y inclure des allégations de partialité administrative. Cette requête a été entendue par le juge Nadon qui l'a rejetée (AB Capital Corp. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 44 Imm.L.R. (2d) 150 (C.F. 1re inst.)).

[5]      En rejetant la requête, le juge Nadon a conclu qu'il n'y avait pas d'éléments de preuve devant lui pour soutenir les allégations dont les demanderesses avaient demandé l'ajout. Il a déclaré ce qui suit, au paragraphe 14 de ses motifs :

De toute évidence, les requérantes n'ont pas, à ce stade-ci de l'instance, la charge de me convaincre selon la prépondérance des probabilités. Elles doivent toutefois produire des éléments de preuve de nature à me convaincre qu'il serait juste dans les circonstances de les autoriser à ajouter un motif supplémentaire à leurs demandes de contrôle judiciaire.

[6]      Depuis qu'elles ont présenté cette requête, les demanderesses ont reçu des documents pertinents à la présente instance par suite de demandes faites en vertu de la Loi sur l'accès à l'information (L.R.C. (1985), ch. A-1). De plus, deux particuliers liés avec certaines des demanderesses ont été accusés d'avoir commis une infraction criminelle et une enquête préliminaire a été tenue concernant cette accusation. D'autres documents ont été divulgués lors de l'enquête préliminaire.

[7]      Par conséquent, au soutien de cette requête pour modifier les actes de procédure, les demanderesses ont présenté à la Cour des éléments de preuve non disponibles lors de la présentation de la requête antérieure. En outre, les modifications présentement demandées diffèrent quant au fond de celles sur lesquelles la Cour s'était déjà prononcée.

[8]      Un avis de demande peut être modifié en tout temps. Selon le principe dominant, en l'absence de préjudice causé à la partie adverse, il faudrait faire droit aux modifications si elles permettent de trancher les véritables questions en litige qui opposent les parties : Scottish & York Insurance Co. c. Canada, [1999] A.C.F. no 277; dossier de la Cour no A-34-98, jugement en date du 1er mars 1999 (A.C.F.).

[9]      J'ajouterais à ce qui précède, ainsi que l'a déclaré le juge Nadon dans l'instance antérieure mettant en cause les parties, que les demanderesses doivent produire des éléments de preuve de nature à convaincre la Cour qu'il serait juste dans les circonstances de les autoriser à ajouter un motif supplémentaire à leurs demandes de contrôle judiciaire.

[10]      J'en suis venue à la conclusion qu'il existe maintenant des éléments de preuve pour convaincre la Cour qu'il est juste de permettre aux demanderesses de modifier leurs demandes. Il y a notamment des éléments de preuve selon lesquels des représentants du Ministre auraient, à peu près à l'époque où les décisions qui font l'objet de la présente instance ont été prises, répandu des rumeurs selon lesquelles une des personnes liées avec les demanderesses avait tenté de soudoyer un représentant du défendeur et que deux des personnes liées avec les demanderesses avaient des relations avec le « Triad » , un élément du crime organisé chinois. Selon un autre élément de preuve, sensiblement à la même époque, un fonctionnaire du ministère chargé d'administrer le Programme d'immigration des investisseurs aurait expédié un courriel à un directeur général lui suggérant l'adoption d'un plan d'action qui [TRADUCTION] « [...] serait beaucoup plus efficace, à notre avis, et serait davantage susceptible de porter atteinte au groupe là où cela compte » .

[11]      Je n'ai pas tenu compte des éléments de preuve contenus dans la pièce no 1 se rapportant à l'affidavit de M. Stratas produit au soutien de la requête. Au début de l'audition de la requête, le défendeur a soulevé une objection préliminaire quant à l'admissibilité de la pièce en preuve. Pour les motifs prononcés à l'audience, j'ai ordonné l'exclusion de la pièce no 1.

[12]      À la lumière des éléments de preuve maintenant devant la Cour et en l'absence d'une preuve fournie par le défendeur quant à un préjudice, je conclus qu'il y a lieu d'autoriser les demanderesses à modifier les demandes ainsi qu'elles le sollicitent.

[13]      J'ai examiné avec soin la question de savoir s'il y avait ou non lieu d'assortir l'autorisation de procéder aux modifications de conditions. Le défendeur a demandé l'imposition d'une condition selon laquelle, après avoir été notifié du dépôt des éléments de preuve au soutien de la demande modifiée, il lui serait permis de présenter, si on le lui conseillait, une demande non contestée pour que l'instance soit instruite comme s'il s'agissait d'une action tel que le prévoit le paragraphe 18.4(2) de la Loi sur la Cour fédérale (L.R.C. (1985), ch. F-7). Le défendeur a sollicité la délivrance de ce type d'ordonnance préventive parce qu'il n'est présentement pas en mesure de juger si les éléments de preuve à fournir au soutien des allégations sont tels qu'ils soulèveront des questions de crédibilité de sorte que l'affaire, en toute justice, devrait être décidée sur la base de témoignages.

[14]      D'ici à ce que les éléments de preuve à fournir au soutien des demandes soient disponibles, il est impossible pour quiconque de décider s'il est approprié ou non que l'affaire soit instruite comme s'il s'agissait d'une action. En l'occurrence, je ne suis pas disposée à assortir l'autorisation de modifier d'une condition selon laquelle les demanderesses ne s'opposent pas à une requête présentée pour que les demandes soient instruites comme s'il s'agissait d'une action.


[15]      Pour ces motifs, autorisation est donnée de modifier les avis de demande de façon à ce qu'ils respectent la forme énoncée aux annexes A, B et C jointes à l'avis de requête déposé dans la présente instance.


[16]      Il est ordonné que l'instance soit gérée à titre d'instance à gestion spéciale.


[17]      Il est également ordonné que l'affaire soit instruite selon l'échéancier qui figure à l'annexe B de l'avis de requête, sauf qu'aux points 1 et 2, les parties auront huit semaines pour signifier et déposer leurs affidavits et leurs pièces documentaires.


[18]      Il subsiste, dans le dossier de la Cour, une requête déposée par le défendeur le 5 juin 1998 par laquelle celui-ci demandait à la Cour de rendre une ordonnance afin de fixer un échéancier quant aux étapes à franchir. L'ordonnance décidera de l'issue de cette requête.


[19]      Dans les dix jours du prononcé des présents motifs, l'avocat des demanderesses rédigera un projet d'ordonnance qui intégrera les points énoncés dans les présents motifs et il fera parvenir cette ordonnance à l'avocat du défendeur pour que celui-ci en approuve la forme et le dépôt. Si les avocats ne peuvent s'entendre, ils pourront débattre le libellé de l'ordonnance.




     « E.R. DAWSON »

                                             J.C.F.C.

OTTAWA (Ontario)

Le 31 mars 2000

Traduction certifiée conforme

Suzanne Gauthier, LL.L., Trad. a.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                      IMM-2294-96, IMM-2296-96 et IMM-2294-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :          AB Capital Corp. et autres c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :              Ottawa

DATE DE L'AUDIENCE :              le 20 mars 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

PRONONCÉS PAR :              LE JUGE DAWSON

EN DATE DU :                  31 mars 2000

ONT COMPARU :                 
                         MM. Greenspan et Brady
                             pour les demanderesses
                         M. Lestor
                             pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     
                         Hicks, Morley, Hamilton, Stewart et Storie
                         Avocats
                         Toronto (Ontario)
                             pour les demanderesses
                         M. Morris Rosenberg
                         Sous-procureur général du Canada
                             pour le défendeur
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