Date : 20050207
Dossier : IMM-1651-04
Référence : 2005 CF 191
Toronto (Ontario), le 7 février 2005
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL
ENTRE :
ABDULLAH NERGIZ
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La présente demande de contrôle judiciaire concerne un musulman kurde au sujet duquel la Section de la protection des réfugiés (la SPR) a formulé la détermination de fait suivante :
[...] En outre, le demandeur n’est pas objecteur de conscience et a quitté la Turquie simplement pour se soustraire à son service militaire. S’il y retourne, il sera vraisemblablement arrêté et on lui infligera la peine que prévoit la loi turque à l’égard de ceux qui tentent d’échapper au service militaire. [...]
(Décision du tribunal, p. 18 et 19)
Étant donné la preuve au dossier, nul ne conteste le fait que la loi turque exigerait du demandeur qu’il serve dans l’armée.
[2] Dans son formulaire de renseignements personnels, le demandeur a formulé la prétention suivante :
[traduction]
Je crains particulièrement d’être persécuté en tant que musulman fervent si on me force à servir dans l’armée. Dans l’armée turque, il n’y a aucune tolérance envers la pratique religieuse.
(Demande du demandeur, p. 35)
[3] Dans le dossier de la présente demande, il y a de nombreux éléments de preuve selon lesquels, dans l’armée turque, les musulmans sont restreints dans la pratique de leurs croyances religieuses. Par conséquent, les questions dont était nettement saisie la SPR étaient : selon la preuve en l’espèce, les restrictions dégagées constituent‑elles, en soi, de la persécution et, de ce fait, y aurait‑il plus qu’une simple possibilité que le demandeur soit victime de persécution pour des motifs religieux s’il devait retourner en Turquie et être obligé de servir dans l’armée?
[4] Plutôt que de s’attaquer à ces difficiles questions, et de trouver des réponses, la SPR s’est déchargée de la responsabilité en invoquant le contenu du dossier avec la déclaration suivante :
Toujours d’après ce rapport, ce sont les commandants d’unité qui autorisent ou non les conscrits à effectuer leurs prières rituelles. Si le tribunal devait accepter que l’armée turque impose certaines restrictions en matière de croyances religieuses, aucune preuve documentaire ne permet pour autant de croire que ces restrictions donnent lieu à de la persécution.
[Non souligné dans l’original.]
(Décision du tribunal, p. 12)
[5] À mon avis, la SPR n’a pas fait ce que l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR) exigeait d’elle et, en conséquence, je conclus que sa décision contient une erreur susceptible de révision.
ORDONNANCE
Par conséquent, j’annule la décision de la SPR et je renvoie l’affaire à un tribunal différemment constitué pour qu’il statue à nouveau sur celle-ci.
J’ordonne toutefois que, lorsqu’elle statuera à nouveau sur l’affaire, la SPR soit tenue de répondre seulement aux deux questions qui sont actuellement laissées sans réponse, comme je l’ai déjà mentionné.
J’ordonne en outre qu’il soit statué à nouveau sur le dossier existant, lequel pourra néanmoins être complété par des éléments de preuve additionnels que les avocats du demandeur ou du défendeur estimeront nécessaires.
« Douglas R. Campbell »
Juge
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-1651-04
INTITULÉ : ABDULLAH NERGIZ
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
LIEU DE L’AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L’AUDIENCE : LE 7 FÉVRIER 2005
MOTIFS DE L’ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE CAMPBELL
DATE DES MOTIFS : LE 7 FÉVRIER 2005
COMPARUTIONS :
Mordechai Wasserman POUR LE DEMANDEUR
David Tyndale POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Mordechai Wasserman POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous‑procureur général du Canada
Toronto (Ontario)