Date : 20020110
Dossier : IMM-1335-01
Référence neutre : 2002 CFPI 22
Entre :
RONY HILAIRE
Demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD :
[1] La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 20 février 2001 par la Section du statut de réfugié statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2.
[2] Le demandeur est citoyen d'Haïti. Il allègue qu'il a été persécuté dans ce pays en raison de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social particulier.
[3] La Section du statut de réfugié a refusé de reconnaître au demandeur le statut de réfugié, concluant fondamentalement que ce dernier n'était pas crédible et qu'il n'est pas raisonnable de croire qu'il serait persécuté advenant son retour dans son pays de nationalité.
[4] La Section du statut de réfugié est un tribunal spécialisé qui a le pouvoir d'apprécier la plausibilité d'un témoignage dans la mesure où les inférences qu'il tire ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et les motifs, énoncés de façon claire et compréhensible (Hilo c. Canada (M.E.I.) (1991), 15 Imm.L.R. (2d) 199 à la page 201 (C.A.F.)).
[5] En l'espèce, la Section du statut, de façon claire et non équivoque, a conclu à l'absence de crédibilité du demandeur et a offert dans ses motifs des exemples concrets de contradictions et d'invraisemblances reflétées dans son Formulaire de renseignements personnels, son témoignage oral et dans la preuve documentaire. Après avoir considéré les arguments du demandeur et après avoir relu la transcription de son témoignage, je ne suis pas satisfait que la décision de la Section du statut est fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve à sa disposition (paragraphe 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7).
[6] Le demandeur, par ailleurs, allègue que la Section du statut n'a pas fait l'examen de l'ensemble de la preuve documentaire à l'appui de sa revendication. Il faut présumer, en l'absence d'une preuve claire et convaincante au contraire, que la Section du statut a considéré la totalité de la preuve (Florea c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (11 juin 1993), A-1307-91). En général, le fait que la preuve documentaire n'est pas mentionnée dans les motifs ne rend pas la décision viciée (Hassan c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (22 octobre 1992), A-831-90).
[7] En l'espèce, la Section du statut indique de façon explicite dans ses motifs ce qui compose la preuve documentaire et énonce que cette preuve lui permet de dégager certaines conclusions, telles l'absence de crédibilité et le manque de crainte subjective du demandeur.
[8] Faut-il rappeler ce qu'enseigne l'affaire Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238, à la page 244 :
Le concept de la crédibilité des éléments de preuve et celui de la crédibilité du demandeur sont évidemment deux choses différentes, mais il est évident que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être, les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l'égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le second palier d'audience pour faire droit à la demande.
[9] Ainsi, la perception de la Section du statut que le demandeur n'est pas crédible peut équivaloir en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible pouvant justifier sa revendication du statut de réfugié. Je ne suis pas convaincu en l'espèce, compte tenu de l'absence de crédibilité du demandeur, que la Section du statut a ignoré de la preuve ou que ses conclusions étaient déraisonnables.
[10] Le demandeur soumet en outre que la Section du statut a erré en concluant qu'il n'y a pas de lien avec la Convention en se basant uniquement sur le fait qu'il n'est pas une personnalité politique. Je ne suis pas convaincu qu'il s'agisse là d'une bonne interprétation de la décision. Il est clair à la lecture de ses motifs que la Section du statut énumère simplement plusieurs contradictions entre le témoignage oral et le récit écrit du demandeur pour finalement conclure à son manque de crédibilité.
[11] Le demandeur prétend enfin que la décision du tribunal viole la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Je considère cet argument prématurépuisque la décision en cause ne constitue pas l'étape finale de l'expulsion du demandeur (Barrera c. Canada (M.E.I.), [1993] 2 C.F. 3 (C.A.F.)).
[12] Par ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 10 janvier 2002
COUR FÉDÉRALE DU CANADA SECTION DE PREMIERE INSTANCE
NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DE LA COUR: IMM-1335-01
INTITULÉ: RONY HILAIRE c. MCI
LIEU DE L'AUDIENCE: MONTRÉAL, QUÉBEC DATE DE L'AUDIENCE: 22 NOVEMBRE 2001 MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE PINARD EN DATE DU 10 JANVIER 2002
COMPARUTIONS
Me STEWART ISTVANFFY POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me THI MY DUNG TRAN POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Me STEWART ISTVANFFY POUR LA PARTIE DEMANDERESSE MONTRÉAL (QUÉBEC)
M. Morris Rosenberg POUR LA PARTIE DEMANDERESSE Sous-procureur général du Canada