Date : 20010125
Dossier : T-1632-99
OTTAWA (ONTARIO), LE 25 JANVIER 2001
EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE J.E. DUBÉ
ENTRE :
PETER HUDGIN
demandeur
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
(MINISTRE DES TRANSPORTS)
défendeur
ORDONNANCE
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
Date : 20010125
Dossier : T-1632-99
ENTRE :
PETER HUDGIN
demandeur
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
(MINISTRE DES TRANSPORTS)
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE DUBÉ
[1] Le demandeur, Peter Hudgin, sollicite le contrôle judiciaire d'une décision du comité d'appel du tribunal de l'aviation civile (le comité d'appel). Dans cette décision, datée du 9 septembre 1999, le comité d'appel rejetait son appel de la décision du premier niveau du Tribunal de l'aviation civile (le tribunal), et confirmait la décision du ministre des Transports portant que M. Hudgin avait contrevenu au paragraphe 801.01(2) du Règlement de l'aviation canadien [1] (le Règlement) et au paragraphe 2.5, article 821, chapitre 1 des Normes d'espacement du contrôle de la circulation aérienne de l'intérieur canadien (les Normes). L'amende a été fixée à 250 $.
1. Les faits
[2] M. Hudgin était contrôleur de la circulation aérienne à l'aéroport de Dorval. Le 16 décembre 1997, il devait assurer la surveillance d'un apprenti contrôleur au service de Nav Canada.
[3] À 21 h 53 min 11 s, l'apprenti a autorisé un aéronef (ROY 921) à utiliser la voie de circulation B2, et ensuite à traverser la piste no 28. Peu de temps après, l'apprenti a donné l'autorisation à un deuxième aéronef (AAQ 249) de décoller à partir de la même piste. Le pilote du premier aéronef a constaté l'erreur et communiqué avec le contrôle au sol pour indiquer qu'il n'allait pas pénétrer sur la piste no 28, puisqu'il pouvait voir qu'un autre aéronef décollait de cette piste. La présence d'esprit de ce pilote a permis d'éviter la collision.
[4] Suite à cet incident, le ministre des Transports a décidé que M. Hudgin avait contrevenu au paragraphe 801.01(2) du Règlement, ainsi qu'au paragraphe 2.5, article 821, chapitre 1 des Normes. Ces textes sont rédigés comme suit :
Sous-partie 1 - Services de la circulation aérienne
Sous-partie 1 - Services de la circulation aérienne -Généralités
801.01(1) Il est interdit à toute personne d'agir en qualité de contrôleur de la circulation aérienne ou de spécialiste de l'information de vol dans les circonstances suivantes :
a) dans les huit heures qui suivent l'ingestion d'alcool;
b) lorsqu'elle est sous l'effet de l'alcool;
c) lorsqu'elle est sous l'effet d'une drogue ou de toute autre substance qui affaiblit ses facultés au point où la sécurité aérienne est compromise.
(2) Il est interdit au contrôleur de la circulation aérienne d'émettre une autorisation du contrôle de la circulation aérienne ou une instruction du contrôle de la circulation aérienne, à moins que celles-ci ne soient émises conformément aux Normes d'espacement du contrôle de la circulation aérienne de l'intérieur canadien.
Article 821, chapitre 1, paragraphe 2.5 desNormes d'espacement du contrôle de la circulation aérienne de l'intérieur canadien
2.5 Espacement d'un aéronef en circulation au sol par rapport à un autre aéronef utilisant la piste
Les aéronefs en circulation au sol doivent être tenus à l'écart jusqu'à ce que le trafic qui utilise la piste ait franchi le point d'attente de l'aéronef :
a) à un point d'attente de circulation, si un de ces points a été établi;
b) à au moins 200 pieds du bord de la piste, à moins que d'autres points d'attente de circulation soient établis par des marques ou des panneaux indicateurs; ou
c) à une distance suffisante du bord de la piste pour avoir la certitude que les aéronefs à l'arrivée ou au départ ne courent aucun risque s'il n'est pas possible de respecter la condition stipulée en a) ou en b).
[3] M. Hudgin a interjeté appel au Tribunal de la décision du ministre. Le Tribunal a conclu qu'il y avait eu contravention au Règlement et aux Normes et il a confirmé l'amende.
[4] M. Hudgin a fait appel de cette décision à un comité d'appel de trois conseillers du Tribunal. Le comité d'appel a conclu que la décision prise suite à l'examen était fondée et il a donc confirmé la décision du ministre et l'amende. Le comité d'appel a notamment confirmé l'obligation de M. Hudgin de surveiller l'apprenti qui lui était confié. Il a conclu qu'il aurait dû exercer une plus grande prudence, puisqu'il savait que l'équipement était défectueux, et qu'il n'aurait pas dû s'occuper d'autres tâches au moment où l'apprenti sous sa surveillance exerçait la fonction principale d'un contrôleur, qui est de contrôler la circulation aérienne.
2. La question en litige
[5] La question en litige consiste à savoir si le comité d'appel a commis une erreur en concluant que M. Hudgin avait contrevenu au Règlement et aux Normes, et en confirmant l'amende, même si ce n'était pas M. Hudgin qui avait donné la directive mais l'apprenti.
3. La norme de contrôle
[6] Au vu de tous les facteurs pertinents, y compris la clause privative qui porte que la décision rendue en appel par le Tribunal de l'aviation civile en vertu la Loi sur l'aéronautique[2] est définitive, je veux exprimer mon accord avec le point de vue énoncé par mon collègue le juge Gibson dans Killen c. Canada (Ministre des Transports)[3] que la norme de contrôle applicable en l'espèce « se situe au milieu du spectre, entre la décision ‘manifestement raisonnable' et la décision ‘correcte' » .
4. Analyse
[7] M. Hudgin soutient que le comité d'appel a confirmé la contravention et maintenu l'amende alors qu'il n'était saisi d'aucune preuve qu'il avait émis une instruction de contrôle de la circulation aérienne qui n'était pas conforme aux Normes. La seule preuve qui a en fait été présentée porte qu'il était l'instructeur et que c'est l'apprenti qui a émis la directive. Selon M. Hudgin, il n'y a aucune disposition législative ou aucun autre document qui le rend responsable des gestes posés par l'apprenti.
[8] Selon moi, il est très clair à la lecture de la transcription que M. Hudgin a admis qu'il était le contrôleur de la circulation aérienne en devoir à la position air à l'époque pertinente. M. Hudgin a admis qu'en définitive, il était responsable de cette position en tant que contrôleur de la circulation aérienne. Il a aussi reconnu qu'il avait l'obligation de contrôler les gestes posés par l'apprenti. Finalement, il a déclaré qu'il n'avait pas « compris » le message transmis à 21 h 53 min 11 s, qui a failli être fatal, d'abord parce qu'il faisait beaucoup d'autres choses en même temps et, ensuite, parce que ses écouteurs n'étaient pas très bons.
[9] Au vu de ces admissions, le comité d'appel n'avait pas à examiner d'autre preuve. Par conséquent, je me range à l'avis du défendeur que ces admissions font qu'il n'est pas nécessaire d'examiner la norme de diligence qui s'impose à un contrôleur de la circulation aérienne par rapport à un apprenti qui est sous son contrôle, non plus que la notion de « responsabilité du fait d'autrui » . Le comité d'appel n'a abordé que de façon générale les principes de droit portant sur la diligence raisonnable et la conduite de l'homme raisonnable.
[10] Les admissions de M. Hudgin, précitées, ainsi que la preuve non contredite de M. Carlsen, superviseur - Contrôle de la circulation aérienne, m'amènent à conclure que la décision du comité d'appel n'était pas déraisonnable. Il est clair que M. Hudgin était responsable de l'apprenti qu'on lui avait confié.
6. Dispositif
[11] En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
OTTAWA (Ontario)
Le 25 janvier 2001
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : T-1632-99
INTITULÉ DE LA CAUSE : PETER HUDGIN c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE LUNDI 18 DÉCEMBRE 2000
MOTIFS DE JUGEMENT DE M. LE JUGE DUBÉ
EN DATE DU : JEUDI 25 JANVIER 2001
ONT COMPARU
M. Sean McGee POUR LE DEMANDEUR
M. R. B. (Robin) Carter POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Nelligan Power
Ottawa (Ontario) POUR LE DEMANDEUR
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada POUR LE DÉFENDEUR
Ottawa (Ontario)