Date : 20030730
Dossier : IMM-5333-03
Référence : 2003 CF 933
Toronto (Ontario), le 30 juillet 2003
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY
ENTRE :
GALINA FIRSOVA, VLADIMIR FIRSOV et ALEXANDR FIRSOV
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Le ministre a ordonné que les membres de la famille Firsov soient renvoyés du Canada vers leur pays d'origine, le Kazakhstan, le 3 août 2003. Ils m'ont demandé de surseoir à l'exécution de cette ordonnance pendant qu'ils sollicitent un contrôle judiciaire. Plus particulièrement, ils désirent porter à l'attention de la Cour qu'un agent d'immigration n'a pas examiné en priorité leur demande de prise en compte de circonstances d'ordre humanitaire.
[2] Les Firsov se sont vu refuser la demande du statut de réfugié qu'ils avaient plus tôt présentée. En outre, un agent d'immigration a examiné quelle était la possibilité qu'ils soient maltraités s'ils étaient renvoyés au Kazakhstan et il a conclu que les risques de mauvais traitements étaient minimes. Ils ont ensuite demandé d'être exemptés pour des raisons d'ordre humanitaire de l'exigence habituelle selon laquelle la demande de résidence permanente doit être présentée depuis l'étranger. Cette demande a été présentée en octobre 2002. Le ministre a délivré une mesure de renvoi contre eux et un agent chargé des renvois a refusé d'en différer l'exécution. Toutefois, M. le juge O'Keefe a octroyé un sursis d'exécution de la mesure de renvoi eu égard à la demande d'autorisation et de contrôle judiciaire introduite par les Firsov contre la décision de cet agent. La Cour a refusé aux Firsov l'autorisation de poursuivre la procédure de contrôle judiciaire, ce qui a entraîné la mesure de renvoi pour laquelle les Firsov demandent maintenant un sursis d'exécution.
[3] Le 26 juin 2003, l'avocat de la famille a envoyé une lettre au Centre d'Immigration Canada. Il y exposait les circonstances d'ordre humanitaire qui militaient en faveur des demandeurs et qualifiait leur demande de [traduction] « bien étoffée » . Il demandait aussi qu'elle soit traitée en priorité. Dans la réponse qu'il donne à cette lettre, M. Dexter Jones affirme : « Nous avons un grand nombre de ces dossiers et nous les traitons sur la base du "premier arrivé, premier servi" » .
[4] Les Firsov affirment que la lettre de M. Jones constitue une « décision » de ne pas traiter leur demande en priorité. C'est cette « décision » qu'ils contestent par voie de contrôle judiciaire et ils demandent à la Cour de surseoir à l'exécution du renvoi pour le temps que cette procédure est en instance.
[5] Je ne crois pas qu'il y ait eu quelque « décision » que ce soit pouvant faire l'objet d'un contrôle judiciaire. Les Firsov allèguent que M. Jones a « décidé » que le traitement de leur demande ne peut pas être accéléré. Le ministre allègue que les Firsov ont simplement été informés de la politique générale suivant laquelle les demandes sont traitées dans l'ordre de leur arrivée.
[6] Les Firsov s'appuient sur l'article 233 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui prévoit un sursis à l'exécution d'un renvoi lorsqu'une demande de prise en compte de circonstances d'ordre humanitaire a été accueillie. Les Firsov affirment que cette disposition signifie donc que les agents d'immigration ont le pouvoir discrétionnaire de traiter les demandes de prise en compte de circonstances d'ordre humanitaire sur demande avant le renvoi. Je ne suis pas d'accord. La disposition ne fait qu'établir que les personnes qui se sont vu accorder l'exemption ne doivent pas être renvoyées avant qu'une décision ait été prise quant à leur demande de résidence permanente. La disposition reconnaît que les agents ont souvent à traiter des demandes de prise en compte de circonstances d'ordre humanitaire alors que les demandeurs sont encore au Canada. Elle ne donne pas en soi aux agents d'immigration le pouvoir discrétionnaire d'accorder à certains demandeurs une priorité de traitement de leur demande.
[7] Il se peut très bien que le ministre, dans certaines circonstances, accorde effectivement la priorité à certaines demandes. L'avocat des Firsov a fait mention d'un cas où le ministre avait accordé une attention spéciale à un groupe d'Algériens. Selon moi, les demandeurs tirent de cet exemple une interprétation qu'il ne peut avoir.
[8] En effet, les Firsov ont simplement demandé, sans fournir de justifications, que leur demande soit traitée en priorité. Ils affirment que leur demande entraîne une cascade de conséquences : une « décision » de la part d'un agent d'immigration; le droit à un contrôle judiciaire; et la possibilité d'un sursis d'exécution du renvoi dans l'intervalle. Ils affirment que, forcément, il en serait ainsi pour tout demandeur qui demanderait à ce que son dossier soit traité en priorité.
[9] Sans qu'il me soit nécessaire de prendre en considération les difficultés administratives qui pourraient survenir le cas échéant, je conclus que la réponse d'un agent d'immigration donnée à une personne qui demande, sans fournir de justifications, de passer avant les autres n'équivaut pas à une décision susceptible de contrôle judiciaire. On n'y statue pas sur les droits de cette personne et, comme M. Jones le dit dans sa lettre, elle n'implique l'exercice d'aucun pouvoir discrétionnaire.
[10] Au cas où j'aurais tort sur cette question préalable, je conclus subsidiairement que les Firsov n'ont pas démontré que leur affaire comporte une question juridique grave à faire trancher. Madame le juge Simpson a récemment tiré la même conclusion relativement à un argument similaire, dans la décision Banik c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, 3 juillet 2003, (dossier IMM-4861-03), où elle a rejeté une demande de sursis.
[11] Par conséquent, la requête en sursis d'exécution de la mesure de renvoi sera rejetée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. La requête en sursis d'exécution de la mesure de renvoi est rejetée.
« James W. O'Reilly »
Juge
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5333-03
INTITULÉ : GALINA FIRSOVA, VLADIMIR FIRSOV
et ALEXANDR FIRSOV
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO, ONTARIO
DATE DE L'AUDIENCE : 28 JUILLET 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LE JUGE O'REILLY
DATE : 30 JUILLET 2003
COMPARUTIONS : Ron Poulton
Mario D. Bellissimo
Pour les demandeurs
Negar Hashemi
Pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Ormston, Bellissimo, Younan
Avocats
Toronto (Ontario)
Pour les demandeurs
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Pour le défendeur
COUR FÉDÉRALE
Date : 20030730
Dossier : IMM-5333-03
ENTRE :
GALINA FIRSOVA, VLADIMIR FIRSOV
et ALEXANDR FIRSOV
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE