Date : 20050506
Dossier : IMM-4344-04
Référence : 2005 CF 613
ENTRE :
RICHARD MUSANGO
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 23 avril 2004 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que demandeur n'est ni un réfugié au sens de la Convention ni une « personne à protéger » au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] Richard Musango (le demandeur) est un citoyen de la République du Burundi. Le 9 octobre 2003, il est arrivé au Canada via le Kenya, les Pays-Bas et les États-Unis et il a présenté une demande d'asile le même jour. Il affirme craindre avec raison d'être persécuté dans son pays du fait de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social.
[3] La Commission a fondé sa décision sur une conclusion défavorable quant à la crédibilité. Lorsqu'il est question de crédibilité, notre Cour ne peut substituer son opinion à celle de la Commission que si le demandeur réussit à démontrer que la décision de la Commission repose sur une conclusion de fait erronée que la Commission a tirée de façon arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont elle disposait (paragraphe 18.1(4) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7). La Commission est un tribunal spécialisé qui est en mesure d'apprécier la plausibilité et la crédibilité d'un témoignage, dans la mesure où les inférences qu'il en tire ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. M.E.I., (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et dans la mesure où ses motifs sont exprimés en termes clairs et explicites (Hilo c. M.E.I. (1991), 130 N.R. 236 (C.A.F.))
[4] Il existe des contradictions entre le témoignage du demandeur, son formulaire de renseignements personnels (FRP) et les notes au point d'entrée (NPE). Le demandeur a allégué dans sa déclaration écrite avoir été incarcéré du 26 novembre 2002 au 3 avril 2003, mais il a répondu « non » dans les NPE à la question « Avez-vous déjà été détenu ou incarcéré ? » Il a également répondu dans les NPE qu'il avait peur de la famille de sa femme sans toutefois mentionner la police, contrairement à ce qu'il avait fait dans son FRP. Il a également omis de mentionner dans les NPE que sa maison avait été attaquée et que sa femme avait été tuée. Ces facteurs minent sa crédibilité.
[5] De plus, le demandeur a la charge d'établir le bien-fondé de sa demande selon l'article 7 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228, qui porte :
7. Le demandeur d'asile transmet à la Section des documents acceptables pour établir son identité et les autres éléments de sa demande. S'il ne peut le faire, il en donne la raison et indique quelles mesures il a prises pour s'en procurer. |
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7. The claimant must provide acceptable documents establishing identity and other elements of the claim. A claimant who does not provide acceptable documents must explain why they were not provided and what steps were taken to obtain them. |
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[6] J'estime que la Commission n'a pas imposé un fardeau excessif au demandeur en déclarant, à la page 4 de sa décision, « il lui appartient également de prouver qu'il était au pays et qu'il y vivait au moment de la persécution alléguée. » Par ailleurs, la Commission n'a pas retenu l'explication du demandeur suivant laquelle il avait préféré s'exiler au Canada plutôt qu'aux États-Unis, où il avait séjourné deux mois avant de venir au Canada pour présenter sa demande. Il n'était pas déraisonnable de la part de la Commission de considérer que ce fait minait la crédibilité du demandeur, étant donné qu'un retard à demander l'asile est incompatible avec une crainte subjective de persécution.
[7] L'article 7 des Règles exige également que le demandeur produise des documents qui démontrent le bien-fondé de sa demande, à défaut de quoi il doit fournir des explications valables. Or, en l'espèce, le demandeur n'a produit qu'un certificat de mariage à l'appui de ses allégations de persécution. La Commission l'a obligé à produire son « registre de commerce » , son permis de conduire et divers documents relatifs au viol et au décès de sa femme pour établir le bien-fondé de sa demande. La Commission n'a pas accepté les diverses explications du demandeur, d'autant plus qu'il avait réussi à se faire envoyer son certificat de mariage au Canada. Compte tenu du manque de crédibilité du demandeur, il n'était pas manifestement déraisonnable de la part de la Commission de conclure qu'à l'époque, le demandeur aurait dû faire plus d'efforts pour se faire envoyer d'autres documents.
[8] La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée.
JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 6 mai 2005
Traduction certifiée conforme
Suzanne Bolduc, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4344-04
INTITULÉ : RICHARD MUSANGO c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 6 AVRIL 2005
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 6 MAI 2005
COMPARUTIONS:
Anthony Kako POUR LE DEMANDEUR
Diane Dagenais POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Anthony Kako POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada