Date : 20031127
Dossier : IMM-6312-02
Référence : 2003 CF 1396
ENTRE :
ISABEL PEDRO ADAO
demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LE JUGE O'KEEFE
[1] Il s'agit d'une requête présentée par Isabel Pedro Adao, la demanderesse, en vue de l'obtention d'une ordonnance de sursis à son renvoi du Canada, qui doit avoir lieu le 18 décembre 2002.
[2] La demanderesse est une citoyenne de l'Angola qui est entrée au Canada le 25 octobre 1999 et qui a revendiqué le statut de réfugié le 27 octobre 2001. Sa demande a été rejetée le 24 janvier 2001.
[3] La demanderesse vit en union de fait avec Francisco Da Silva. La demanderesse et M. Da Silva ont une fille, Lolena Pedro Da Silva, qui est née le 8 février 2002.
[4] La fille de la demanderesse est née avec une anomalie congénitale majeure, l'ensemble de de ses viscères abdominaux étant à l'extérieur de son corps à sa naissance. Selon un rapport médical daté du 20 juin 2002, elle a besoin d'être suivie de près dans un grand hôpital pour enfants au cours de la prochaine année (durée approximative). Selon l'affidavit de la demanderesse, elle doit subir une opération en octobre 2003.
[5] Dans son affidavit, la demanderesse déclare que le traitement médical dont a besoin sa fille n'est pas offert en Angola.
[6] La demanderesse a soumis une demande dans la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (DNRSRC) en vertu de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, ce qui, dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, et le Règlement, est devenu une demande d'examen des risques avant renvoi (ERAR).
[7] La demande d'ERAR de la demanderesse a été refusée. La décision défavorable quant à la demande d'ERAR et la date prévue pour le renvoi du Canada ont été communiquées à la demanderesse le 5 décembre 2002.
[8] L'avocate de la demanderesse, au paragraphe 3 de ses observations écrites, affirme que le rapport médical du 20 juin 2002 qui porte sur l'état de santé de la fille de sa cliente et sur les traitements nécessaires a été soumis à l'appui de la demande d'ERAR de sa cliente. L'agent d'ERAR dit dans ses « notes au dossier » que la demanderesse ne lui a soumis aucun argument. La demanderesse déclare dans son affidavit que sa présente demande est bien fondée en fait et en droit.
[9] Dans son affidavit, la demanderesse déclare que si elle est renvoyée en Angola, elle sera incarcérée, torturée et tuée. La demanderesse ajoute qu'en Angola, sa fille n'aura pas accès aux soins médicaux dont elle a besoin et sera exposée à un environnement dangereux.
[10] Je note que la demanderesse parle de son renvoi en Angola, alors que la mesure de renvoi indique qu'elle doit être renvoyée aux États-Unis.
[11] Question en litige
La Cour doit-elle surseoir à l'exécution de la mesure de renvoi?
Analyse et décision
[12] Pour accorder un sursis à l'exécution de la mesure de renvoi, je dois être convaincu que :
1. La demanderesse a soulevé une question sérieuse à trancher.
2. La demanderesse subira un préjudice irréparable si elle est renvoyée du Canada.
3. La prépondérance des inconvénients penche en faveur de la demanderesse.
La demanderesse doit satisfaire aux trois volets du critère (voir l'arrêt Toth c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.)).
[13] Question sérieuse à trancher
Il y a une question sérieuse à trancher et il s'agit de savoir si l'agent d'ERAR a tenu compte de la preuve médicale que la demanderesse prétend avoir soumise à l'appui de sa demande d'ERAR.
[14] Préjudice irréparable
La fille de la demanderesse, qui est née à Toronto le 8 février 2002, a de graves problèmes de santé parce que ses viscères abdominaux étaient à l'extérieur de son corps à sa naissance. Elle a subi une opération quatre jours après sa naissance. Elle a besoin d'un suivi médical étroit et constant et d'une autre opération. Son médecin a dit qu'elle avait besoin d'être [traduction] _ suivie de près dans un grand hôpital pour enfants [...] » . La demanderesse affirme que de tels soins ne sont pas offerts en Angola. En outre, la demanderesse déclare dans son affidavit que si elle était expulsée en Angola, elle [traduction] « serai[t] encore une fois incarcérée parce qu['elle] [s']étai[t] échappée la première fois, et [elle] serai[t] certainement torturée et tuée » . J'estime que la demanderesse subirait un préjudice irréparable.
[15] Prépondérance des inconvénients
Je suis d'avis que la prépondérance des inconvénients penche en faveur de la demanderesse. La demanderesse ne constitue pas un danger pour la sécurité publique et, s'il s'avère nécessaire de la renvoyer dans le futur, le défendeur pourra prendre les mesures nécessaires à ce moment-là.
[16] La Cour sursois donc au renvoi de la demanderesse du Canada jusqu'à ce que sa demande d'autorisation de contrôle judiciaire soit rejetée ou, si l'autorisation est accordée, jusqu'à ce que la Cour statue sur la demande de contrôle judiciaire.
« John A. O'Keefe »
Juge
Ottawa (Ontario)
Le 27 novembre 2003
Traduction certifiée conforme
Julie Boulanger, LL.M.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-6312-02
INTITULÉ : ISABEL PEDRO ADAO
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE LUNDI 16 DÉCEMBRE 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE O'KEEFE
DATE DES MOTIFS : LE JEUDI 27 NOVEMBRE 2003
COMPARUTIONS :
Rose L. Legagneur POUR LA DEMANDERESSE
Andrea Hammell POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Rose L. Legagneur POUR LA DEMANDERESSE
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada