Date: 20000713
Dossier: IMM-742-00
ENTRE :
EDUARDO MANUEL MELO
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA
CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
LE JUGE CAMPBELL
[1] M. Melo, qui a fait l'objet d'une mesure d'expulsion le 10 novembre 1994, a perdu l'appel qu'il avait interjeté pour des motifs liés à l'équité devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (section d'appel) (la SA) par une décision en date du 20 août 1997. Le 30 septembre 1999, conformément à la règle 27 des Règles de la section d'appel de l'immigration, M. Melo a demandé à la SA de rouvrir l'appel. Par une décision datée du 21 janvier 2000, la SA a rejeté la demande. Pour les motifs ci-après énoncés, je conclus que cette décision est erronée et qu'elle est susceptible de révision.
[2] En ce qui concerne la présente demande, la SA a conclu que les principes à appliquer sont les suivants :
[TRADUCTION]
La SA a un pouvoir discrétionnaire continu de rouvrir l'audition d'un appel de façon à permettre au demandeur de présenter des éléments de preuve additionnels. [Grillas c. Canada (Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration), [1972] R.C.S. 577; 23 D.L.R. (3d) 1 (C.S.C.)]. La réouverture d'un appel sur lequel il a été statué ne devrait être accordée que si la SA est convaincue qu'il aurait été impossible d'obtenir lors de l'audience initiale la preuve que l'on cherche à présenter même si l'on avait fait preuve d'une diligence raisonnable : [Sandhu c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1987) 78 N.R. 236, aux pages 237 et 238], ou si la SA reconnaît qu'elle a de quelque façon omis d'observer les règles de justice naturelle. [Gill c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1987) 80 N.R. 1, à la p. 3]. Le critère à satisfaire pour faire rouvrir l'affaire consiste à déterminer s'il existe une possibilité raisonnable que les nouveaux éléments de preuve puissent amener la SA à modifier sa décision initiale. [Castro c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1988), 5 Imm. L.R. (2d) 207 (C.A.F.)]. Les nouveaux éléments de preuve doivent être examinés et une décision doit être rendue, et ce, indépendamment de la question de savoir s'ils ont suffisamment d'importance par rapport aux autres éléments de preuve présentés dans l'affaire pour justifier l'exercice par la SA de son pouvoir discrétionnaire et la réouverture de l'affaire [Fleming c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1987), 4 Imm.L.R. (2d) 207 (C.A.F.)].
[3] Il est reconnu que chacun des principes mentionnés est individuellement juste, mais à mon avis, la SA a commis une erreur en appliquant ces principes.
[4] Les principes mentionnés se rapportent à deux types distincts de nouveaux éléments de preuve : la preuve qui était disponible lors de l'audition de l'appel, mais qui n'a pas été présentée, et la preuve postérieure à la décision rendue en appel. La demande que M. Melo a présentée devant la SA était uniquement fondée sur une preuve postérieure à la décision du 20 août 1997[1]. Toutefois, en décidant de rouvrir la demande, la SA a erronément tenté d'appliquer le principe à la preuve qui était disponible lors de l'audition de l'appel, mais qui n'avait pas été présentée. Somme toute, dans sa décision, la SA a apprécié d'une façon erronée une preuve qui est clairement postérieure à la décision du 20 août 1997 en se demandant si, en faisant preuve d'une diligence raisonnable, il était possible de présenter cette preuve lors de l'audience.
[5] Par suite de cette analyse défectueuse, la SA a tiré la conclusion suivante :
[TRADUCTION]
Je suis convaincu que, dans l'ensemble, la preuve que le demandeur cherche à présenter ne constitue pas une nouvelle preuve ou une preuve qu'il n'aurait pas pu obtenir lors de l'audience initiale, et ce, même s'il avait fait preuve d'une diligence raisonnable. La nouvelle preuve et la jurisprudence de la Cour que le demandeur a présentées, lorsqu'elles sont soupesées, examinées et appréciées par cette formation, n'ont pas suffisamment d'importance par rapport aux autres éléments de preuve présentés dans l'affaire pour établir qu'il est raisonnablement possible que cette preuve amène la SA à modifier sa décision.[2]
[6] Par conséquent, selon le raisonnement précité, la preuve fournie par M. Melo a dans l'ensemble essentiellement été rejetée pour le motif qu'elle n'était pas pertinente, quelques éléments seulement ayant été pris en compte dans le processus d'appréciation nécessaire.
[7] À mon avis, par suite de l'application erronée des principes se rapportant à la réouverture, la conclusion que la SA a tirée était erronée en droit, de sorte qu'elle peut être révisée[3].
ORDONNANCE
[8] Par conséquent, j'infirme la décision que la SA a rendue le 21 janvier 2000 et je renvois la demande de M. Melo pour réouverture à une formation différente de la SA, qui devra effectuer un réexamen eu égard aux faits existant au moment de ce réexamen.
« Douglas R. Campbell »
J.C.F.C.
Toronto (Ontario),
le 13 juillet 2000.
Traduction certifiée conforme
Martine Brunet, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : IMM-742-00
INTITULÉ DE LA CAUSE : EDUARDO MANUEL MELO
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
DATE DE L'AUDIENCE : LE MARDI 11 JUILLET 2000
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge Campbell en date du 13 juillet 2000
ONT COMPARU :
Barbara Jackman pour le demandeur
Marianne Zoric pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Jackman, Waldman et associés
Avocats
281, avenue Eglinton est
Toronto (Ontario)
M4P 1L3 pour le demandeur
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada pour le défendeur
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date: 20000713
Dossier: IMM-742-00
ENTRE :
EDUARDO MANUEL MELO
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE