Date : 20190710
Dossier : T-2194-18
Référence : 2019 CF 913
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 10 juillet 2019
En présence de madame la juge Heneghan
ENTRE :
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KASIRYE KABALA
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demandeur
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et
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SA MAJESTÉ LA REINE
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défenderesse
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ORDONNANCE ET MOTIFS
[1]
Par un avis de requête écrite déposé le 18 avril 2019 en vertu des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106) (les Règles), M. Kasirye Kabala (le demandeur) demande une prorogation du délai pour interjeter appel de l’ordonnance par laquelle la protonotaire Milczynski a rejeté sa deuxième déclaration modifiée sans autorisation de modification.
[2]
Sa Majesté la Reine (la défenderesse) s’oppose à cette requête au motif que le demandeur ne satisfaisait pas aux critères permettant d’obtenir une prorogation de délai et qu’il ne serait pas dans l’intérêt de la justice d’accueillir la requête.
[3]
Par une ordonnance datée du 1er mars 2019, la protonotaire Milczynski a accueilli une requête déposée par la défenderesse et a annulé la deuxième déclaration modifiée du demandeur sans autorisation de modification. Cette ordonnance prévoit entre autres ce qui suit :
[traduction]
La deuxième déclaration énonce les préoccupations du demandeur concernant la façon dont ses demandes ont été traitées et dont lui‑même a été traité par le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario. Aucun fait important n’est allégué contre le gouvernement du Canada, la Reine du chef du Canada ou tout autre organisme fédéral. Comme la défenderesse l’indique, la demande semble également être une tentative de plaider de nouveau une question qui a déjà été tranchée par le Tribunal des droits de la personne et la Cour fédérale (dossier de la Cour no T‑1738‑18) dans le cadre d’un litige où l’action intentée par le demandeur contre le Tribunal des droits de la personne et un vice‑président désigné a été rejetée pour les motifs suivants :
La Cour fédérale est un tribunal créé par l’article 101 de la Loi constitutionnelle. Pour qu’elle ait compétence, la demande doit être fondée sur une loi fédérale existante et applicable, et la Cour fédérale doit avoir compétence à l’égard des parties. Le Tribunal des droits de la personne et son vice‑président ne sont pas des parties à l’égard desquelles la Cour a compétence, et l’objet de la demande n’est pas une question que la Cour peut trancher.
Dans la présente action, le simple fait de nommer Sa Majesté la Reine comme défenderesse et de mentionner la Charte canadienne des droits et libertés ou des lois fédérales ne fait pas en sorte que l’action relève de la compétence de la Cour fédérale. Le contenu de la présente demande est essentiellement le même que celui de l’affaire no T‑1738‑18. Le demandeur veut obtenir des dommages‑intérêts pour la façon dont il a été traité par le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario, son personnel et ses arbitres ainsi que contre CanLII pour la publication en ligne des décisions du Tribunal. En conséquence, l’action doit être rejetée. Quant aux dépens, compte tenu des circonstances, je suis convaincue qu’un certain montant devrait être adjugé à la défenderesse.
[4]
Le demandeur a déposé un affidavit daté du 18 avril 2019. Il déclare n’avoir reçu l’ordonnance que le 18 avril 2019.
[5]
Pour sa part, la défenderesse a déposé l’affidavit de Mme Theresa Bennett, daté du 29 avril 2019. Mme Bennett a déclaré que, selon les dossiers de la Cour, l’ordonnance du 1er mars 2019 a été envoyée au demandeur par courriel la journée même et qu’il en a accusé réception.
[6]
Dans ses observations écrites, la défenderesse soutient que le demandeur ne satisfaisait pas aux critères permettant d’obtenir une prorogation de délai qui sont énoncés dans l’arrêt de la Cour d’appel fédérale Alberta c. Canada (2018), 425 D.L.R. (4th) 366 (C.A.F.), 2018 CAF 83.
[7]
La défenderesse fait également valoir qu’il serait contraire à l’intérêt de la justice d’accorder une prorogation de délai puisque les motifs d’appel proposés par le demandeur ne sont pas fondés compte tenu de la norme de contrôle applicable à un appel d’une décision d’un protonotaire, telle qu’elle est décrite dans l’arrêt Hospira Healthcare Corporation c. Kennedy Institute of Rheumatology (2016), 487 N.R. 208 (C.A.F.), 2016 CAF 215.
[8]
La défenderesse soutient que la protonotaire n’a pas commis d’erreur en annulant la deuxième déclaration modifiée.
[9]
Dans sa deuxième déclaration modifiée, le demandeur a intenté une action contre la défenderesse pour des actes répréhensibles qu’aurait commis le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario. Il a réclamé des dommages-intérêts de 15 500 500 $.
[10]
Dans l’arrêt Alberta, précité, au paragraphe 44, la Cour d’appel fédérale s’est penchée sur le critère permettant d’obtenir une prorogation de délai énoncé dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly (1999), 244 N.R. 399 (C.A.F.), [1999] A.C.F. no 846, déclarant ce qui suit :
[traduction]
Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly (1999), 244 N.R. 399 (C.A.F.) (Hennelly), la Cour a énoncé quatre questions touchant l’exercice du pouvoir discrétionnaire afin d’accorder une prorogation de délai en vertu de l’article 8 :
(1) La partie requérante avait-elle une intention continue de poursuivre la procédure?
(2) La procédure est-elle fondée?
(3) Le défendeur a-t-il subi un préjudice en raison du retard?
(4) La partie requérante a-t-elle une explication raisonnable pour justifier le retard?
[11]
Je suis en accord avec les observations de la défenderesse concernant le fait que le demandeur n’a pas démontré pourquoi le délai devrait être prorogé afin qu’il puisse interjeter appel de l’ordonnance de la protonotaire Milczynski.
[12]
Le demandeur n’a pas fourni d’explication raisonnable concernant son retard à déposer un avis d’appel dans le délai prévu par les Règles.
[13]
La preuve démontre que l’ordonnance a été envoyée au demandeur le 1er mars 2019. De plus, le répertoire des inscriptions enregistrées indique qu’il a accusé réception de celle-ci.
[14]
Le demandeur n’a pas démontré que son appel était fondé.
[15]
La protonotaire a adéquatement exercé le pouvoir discrétionnaire que lui confèrent les Règles pour annuler la deuxième déclaration modifiée. Le critère applicable à un appel de l’ordonnance d’un protonotaire est énoncé dans l’arrêt Hospira, précité.
[16]
Selon cet arrêt, l’ordonnance d’un protonotaire ne peut être infirmée que si une erreur manifeste et dominante a été commise relativement aux conclusions de fait, aux questions de droit ou aux questions mixtes de fait et de droit. Lorsqu’un principe de droit est en jeu, la norme de contrôle de la décision correcte s’applique.
[17]
Le critère applicable à une requête en radiation d’un acte de procédure est énoncé dans l’arrêt Hunt c. Carey Canada Inc., [1990] 2 R.C.S. 959. Il s’agit de celui de savoir s’il est évident et manifeste que la déclaration du demandeur ne révèle aucune demande raisonnable. Selon la décision Bérubé c. Canada (2009), 348 F.T.R. 246, 2009 CF 43, au paragraphe 24, pour qu’une déclaration comprenne une cause d’action raisonnable, elle doit présenter les trois éléments suivants :
i. alléguer des faits susceptibles de donner lieu à une cause d’action;
ii. indiquer la nature de l’action qui doit se fonder sur ces faits;
iii. préciser le redressement sollicité qui doit pouvoir découler de l’action et que la Cour doit être compétente pour accorder.
[18]
La protonotaire a appliqué les principes de droit appropriés pour annuler la deuxième déclaration modifiée du demandeur.
[19]
La protonotaire a indiqué que le demandeur semble essayer de plaider de nouveau une question qui a déjà été tranchée par le Tribunal des droits de la personne et la Cour fédérale dans le dossier no T‑1738‑18.
[20]
Le fait de tenter de remettre en instance le même litige constitue un abus de procédure : voir la décision Oleynik c. Canada (Procureur général) (2014), 464 F.T.R. 114, 2014 CF 896.
[21]
À mon avis, l’ordonnance de la protonotaire Milczynski ne contenait aucune erreur et l’intervention de la Cour n’est pas justifiée.
[22]
La requête est rejetée avec dépens de 250 $ en faveur de la défenderesse.
ORDONNANCE
LA COUR STATUE que la requête est rejetée avec dépens de 250 $ en faveur de la défenderesse.
« E. Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Ce 22e jour de juillet 2019.
Claude Leclerc, traducteur
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
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DOSSIER :
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T‑2194‑18
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INTITULÉ :
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KASIRYE KABALA c SA MAJESTÉ LA REINE
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REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE À OTTAWA (ONTARIO) CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES
ORDONNANCE ET MOTIFS :
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LA JUGE HENEGHAN
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DATE DE L’ORDONNANCE
ET DES MOTIFS :
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LE 10 JUILLET 2019
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COMPARUTIONS :
Kasirye Kabala
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LE DEMANDEUR
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Marilyn Venney
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POUR LA DÉFENDERESSE
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LA DÉFENDERESSE
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