Date : 20190723
Dossier : T-1903-17
Référence : 2019 CF 968
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 23 juillet 2019
En présence de monsieur le juge James W. O’Reilly
ENTRE :
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MARY KWAN
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demanderesse
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et
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BANQUE AMEX DU CANADA
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défenderesse
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
Madame Mary Kwan a déposé une plainte au Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (le CPVP) à l’encontre d’Amex. Elle a allégué qu’Amex avait : obtenu illégalement ses renseignements personnels à des fins autres que sa demande de carte de crédit; négligé de tenir un registre exact de ces renseignements; et fabriqué des transcriptions de ses conversations téléphoniques avec des représentants de la société.
[2]
En 2016, le CPVP a mis fin à son examen de la plainte après qu’il a conclu qu’Amex était légalement tenue d’obtenir les renseignements personnels de Mme Kwan, que les mesures qu’Amex avait prises pour vérifier l’identité de Mme Kwan étaient nécessaires et que les transcriptions étaient essentiellement exactes.
[3]
Dans la présente demande, Mme Kwan réclame des dommages‑intérêts de 250 000 $ pour violation de son droit à la vie privée (au titre de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, LC 2000, c 5, par. 14(1) et al. 16c). Les dispositions citées sont reproduites à l’annexe).
[4]
Rien ne me permet d’accorder à Mme Kwan la réparation qu’elle demande. Amex a légalement recueilli ses renseignements personnels pour une raison valable et a tenu des registres raisonnablement exacts. La demanderesse n’a pas droit à des dommages‑intérêts. Par conséquent, je me dois de rejeter la présente demande.
[5]
Il y a quatre questions en litige en l’espèce :
1 Amex a‑t‑elle recueilli les renseignements personnels de Mme Kwan à des fins étrangères à sa demande de carte de crédit?
2 Amex a‑t‑elle recueilli illégalement les renseignements personnels de Mme Kwan?
3 Amex a‑t‑elle tenu des registres exacts?
4 Mme Kwan a‑t‑elle droit à des dommages‑intérêts?
[6]
Mme Kwan a aussi soulevé un certain nombre de questions dans la présente demande qui ne faisaient pas partie de sa plainte au CPVP. Je n’ai donc pas tenu compte de ces questions puisque je n’en ai pas été dûment saisi.
II.
Contexte
[7]
En 2015, Mme Kwan a téléphoné à Amex pour demander une carte de crédit. On lui a lu une entente relative à la protection des renseignements personnels, qu’elle a acceptée verbalement. Amex a ensuite pris des mesures pour vérifier l’identité de Mme Kwan, mais elle n’a pas été en mesure de le faire à partir de sources publiques. Amex a fait une nouvelle tentative par l’intermédiaire du questionnaire sur la sécurité de TransUnion, mais Mme Kwan n’a pas réussi à répondre aux questions correctement. Celle‑ci a ensuite tenté de confirmer son identité à un bureau de Postes Canada, en vain. Elle est parvenue à prouver son identité en se rendant dans un bureau d’Amex, et elle a reçu sa carte de crédit quelques jours plus tard.
[8]
Au cours des quelques mois qui ont suivi, Mme Kwan a présenté un certain nombre de demandes d’accès à l’information à Amex, laquelle a répondu aux demandes et a fourni les transcriptions des conversations téléphoniques entre ses représentants et la demanderesse. Mme Kwan a affirmé que ces transcriptions étaient fausses et a réclamé des dommages‑intérêts pour humiliation et violation de son droit à la vie privée, mais Amex a rejeté sa demande.
[9]
Mme Kwan a ensuite porté plainte au CPVP. Celui‑ci a ouvert une enquête, mais y a mis fin parce que la plainte n’était pas fondée.
A.
Première question — Amex a‑t‑elle recueilli les renseignements personnels de Mme Kwan à des fins étrangères à sa demande de carte de crédit?
[10]
Mme Kwan soulève plusieurs allégations à l’encontre d’Amex. Premièrement, elle soutient qu’Amex n’est pas assujettie aux lois sur le recyclage des produits de la criminalité et qu’elle n’est donc pas tenue de rendre compte au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (le CANAFE). Par conséquent, affirme‑t‑elle, la société n’est pas obligée de respecter les règles relatives à la vérification de l’identité qui régissent les autres types d’institutions financières. Deuxièmement, elle prétend qu’une personne travaillant dans un centre d’appels en Inde a communiqué avec elle pour essayer d’obtenir des renseignements non nécessaires au traitement de sa demande. Troisièmement, Mme Kwan fait valoir qu’elle n’a pas donné son consentement exprès à la collecte, à l’utilisation et à la divulgation de ses renseignements personnels.
[11]
Mme Kwan n’a pas établi le fondement de ses allégations. Le CPVP a conclu, après avoir fait une vérification directement auprès du CANAFE, qu’Amex devait respecter les exigences de ce dernier. En outre, il ne fait aucun doute qu’Amex est aussi assujettie aux lois et règlements sur le recyclage des produits de la criminalité, lesquels exigent une vérification de l’identité (Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, LC 2000, c 17, al. 5a) et art. 6.1; Règlement sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, DORS/2002‑184, art. 54.1).
[12]
Qui plus est, bien que Mme Kwan prétende que les transcriptions de ses conversations téléphoniques, ainsi que les bandes audio sous‑jacentes, ont été modifiées par Amex, il n’existe aucun élément de preuve fiable à l’appui de cette allégation. La preuve démontre par ailleurs que les renseignements ont été recueillis au su et avec le consentement de Mme Kwan aux fins de la vérification de son identité et du respect des exigences prévues par la loi.
[13]
Par conséquent, je ne puis conclure qu’Amex a recueilli les renseignements personnels de Mme Kwan à des fins étrangères à sa demande de carte de crédit.
B.
Deuxième question — Amex a‑t‑elle recueilli illégalement les renseignements personnels de Mme Kwan?
[14]
Mme Kwan affirme qu’Amex a eu recours à des tactiques inappropriées pour obtenir d’elle des renseignements personnels dont elle n’avait pas besoin.
[15]
Rien n’étaye pareille allégation.
[16]
Comme il a été mentionné précédemment, Amex était tenue par la loi de vérifier l’identité de Mme Kwan. Elle a fini par y parvenir après un certain nombre de tentatives infructueuses. L’allégation de Mme Kwan, selon laquelle Amex s’était lancée dans une recherche à l’aveuglette, n’est pas fondée.
C.
Troisième question — Amex a‑t‑elle tenu des registres exacts?
[17]
Mme Kwan accuse Amex d’avoir falsifié les bandes audio et les transcriptions.
[18]
Il n’existe aucun fondement à cette affirmation. Mme Kwan n’a fourni aucun élément de preuve au CPVP pour étayer son allégation, non plus qu’elle ne m’en a présenté.
D.
Quatrième question — Mme Kwan a‑t‑elle droit à des dommages‑intérêts?
[19]
Comme Mme Kwan n’a pas pu démontrer que sa plainte contre Amex était fondée, il s’ensuit qu’elle n’est pas admissible à des dommages‑intérêts.
III.
Conclusion et dispositif
[20]
Mme Kwan n’a pas démontré qu’Amex avait recueilli ses renseignements personnels de manière illégale ou irrégulière ni que la société n’avait pas tenu de registres exacts. Par conséquent, je me dois de rejeter la demande avec dépens.
JUGEMENT DANS LE DOSSIER T‑1903‑17
LA COUR STATUE que la demande est rejetée avec dépens.
« James W. O’Reilly »
Juge
Traduction certifiée conforme
Ce 31e jour de juillet 2019.
Claude Leclerc, traducteur
ANNEXE
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COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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T‑1903‑17
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INTITULÉ :
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MARY KWAN c BANQUE AMEX DU CANADA
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AUDIENCE TENUE PAR ÉCRIT SUR CONSENTEMENT DES PARTIES À OTTAWA (ONTARIO), CONFORMÉMENT AUX DIRECTIVES DE LA COUR DATÉES DU 25 MARS 2019
JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE O’REILLY
DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS : LE 23 JUILLET 2019
OBSERVATIONS ÉCRITES :
Mary Kwan
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LA DEMANDERESSE
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W. David Rankin
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POUR LA DÉFENDERESSE
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Osler, Hoskin & Harcourt S.E.N.C.R.L./s.r.l.
Avocats
Toronto (Ontario)
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POUR LA DÉFENDERESSE
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