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                                                                                                                                           T-2377-94

 

 

 

HALIFAX (NOUVELLE-ÉCOSSE) le mercredi 14 mai 1997

 

 

EN PRÉSENCE DU JUGE ROTHSTEIN

 

 

ENTRE :

 

 

                                                           ROBERT MURPHY,

 

                                                                                                                                            requérant,

 

                                                                             et

 

                                      LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

 

                                                                                                                                                 intimé.

 

 

 

                                                               ORDONNANCE

 

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

                                                                                                MARSHALL ROTHSTEIN     

                                                                                                                        Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme                                                                       

 

                                                                                                C. Delon, LL.L.


 

                                                                                                                                           T-2377-94

 

 

EN PRÉSENCE DU JUGE ROTHSTEIN

 

 

ENTRE :

 

 

                                                           ROBERT MURPHY,

 

                                                                                                                                            requérant,

 

                                                                             et

 

                                      LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

 

                                                                                                                                                 intimé.

 

 

 

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

 

LE JUGE ROTHSTEIN

 

            Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire relative à une décision en date du 7 septembre 1994 par laquelle le chef d'état-major de la Défense (CEMD) a approuvé le renvoi du requérant des Forces armées canadiennes.

 

            Le requérant était un maître de deuxième classe de la marine.  En 1989, il a suivi le cours de niveau de qualification 6 (NQ 6) dans le domaine de la mécanique navale, mais ne l'a pas réussi.  En février 1992, il a à nouveau échoué ce cours.  Après le deuxième échec, un conseil de révision des carrières (CRR) a examiné le cas du requérant.  En septembre 1992, le CRR a recommandé que le requérant suive un cours de rattrapage scolaire avant de passer un autre test.  En juillet 1993, le requérant a échoué un test NQ5 et n'a pas satisfait à d'autres exigences.  En juillet 1993, après avoir examiné le cas du requérant, un autre CRR a recommandé le renvoi de celui-ci.  Un avis de renvoi a été acheminé au requérant en septembre 1993.  Le 7 décembre 1993, le requérant a déposé une opposition au renvoi dans un document comportant plus de cinquante pages d'arguments et de pièces.  Le 14 décembre 1993, un transfert professionnel a été envisagé pour le requérant, mais rejeté.  Le 22 décembre 1993, le directeur - Carrières militaires (personnel non officier) (DCMP) a approuvé le renvoi du requérant.  Pour des raisons d'ordre médical, le renvoi du requérant a été reporté par des décisions prises à l'occasion jusqu'au 10 juillet 1994.

 

            Dans une lettre datée du 20 juillet 1994 qu'il a envoyée au bureau du chef de l'état-major, l'avocat du requérant a soutenu que le DCMP n'était pas habilité à approuver le renvoi du requérant et que des mesures devaient être prises en vue de rétablir celui-ci dans ses fonctions et de lui permettre de se présenter à une audience impartiale devant l'instance décisionnelle compétente.

 

            Par suite de la lettre de l'avocat du requérant, le CEMD, l'instance décisionnelle compétente en l'espèce, a examiné l'affaire.  Il appert de la note qu'il a fait parvenir le 2 août 1994 au sous-ministre adjoint du personnel (SMAPers) que le CEMD était préoccupé par le fait que le requérant devait être renvoyé parce qu'il n'était pas admissible à une promotion, laquelle décision lui semblait «sévère».  Dans une note datée du 10 août 1994, le SMAPers a répondu que le requérant était renvoyé parce qu'il ne possédait pas les compétences techniques nécessaires pour exercer son emploi et non parce qu'il ne respectait pas les exigences prescrites pour être promu au rang suivant.  Voici le texte de cette note :

 

[TRADUCTION] La qualification CERT 3 que le m2 Murphy n'a pu obtenir aurait fait de lui une personne pouvant être employée en mer comme officier mécanicien de quart.  S'il avait obtenu cette qualification, il aurait été admissible à une promotion au rang suivant, mais c'est la qualification technique elle-même que la personne concernée doit obtenir pour pouvoir continuer à exercer ses fonctions en mer à son rang actuel de m2.  Il n'y a pas d'officier m2 CERT 2A en mer, sauf ceux qui sont désignés en vue d'une formation qui leur permettra d'atteindre le niveau CERT3, la qualification qu'il n'a pu obtenir.

 

            Le CEMD semble avoir jugé cette explication satisfaisante, puisqu'il a approuvé, le 7 septembre 1994, le renvoi du requérant rétroactivement au 10 juillet 1994, date à laquelle les différentes remises de son renvoi ont pris fin.  Dans cette décision, le CEMD a reconnu que l'approbation antérieure du renvoi par le DCMP ne constituait pas une approbation donnée par une autorité compétente :

 

[TRADUCTION] Sur réception de votre (avocat du requérant) note du 20 juillet 1994, j'ai fait réexaminer l'affaire du renvoi du maître de deuxième classe (m2) Murphy.  Même si d'autres Ordonnances et règlements royaux s'appliquent à cette situation en plus de ceux que vous avez cités, il semble que le renvoi du m2 Murphy n'a pas été approuvé par l'autorité compétente.

 

            La décision se poursuit en ces termes :

 

[TRADUCTION] Après avoir examiné les documents concernant ce renvoi, y compris l'opposition s'y rapportant, j'estime que le renvoi devrait être approuvé.  Par conséquent, j'ai approuvé le renvoi du m2 Murphy de façon rétroactive au 10 juillet 1994.  Cette approbation a été donnée conformément au paragraphe 15.01(3) et à l'article 15.03 des Ordonnances et règlements royaux.

 

            Le requérant invoque deux décisions de la Cour fédérale, soit les arrêts Diotte c. Canada et al, [1992] 54 FTR 376, et Duncan c. Canada (ministre de la Défense nationale), [1990] 3 C.F. 560, pour soutenir qu'il n'a pas pu plaider sa cause directement auprès de l'instance décisionnelle, en l'espèce, le CEMD.  Cependant, le requérant a déposé une opposition au renvoi qui renfermait des arguments étoffés et à laquelle étaient joints plusieurs documents.  Le CEMD allègue qu'il a examiné les documents concernant le renvoi du requérant.  Celui-ci répond qu'il n'a pas eu la possibilité de présenter des arguments au deuxième CRR, mais la recommandation de celui-ci n'est pas la décision visée par la demande de contrôle judiciaire.  Le requérant n'a pas démontré que le CEMD n'a pas examiné les arguments qu'il a invoqués.  Bien au contraire, il est évident que le CEMD avait été saisi du matériel du requérant.  D'après la note qu'il a envoyée au SMAPers, il est évident qu'il a examiné au fond la raison du renvoi du requérant.  La présente affaire est bien différente de celle de l'arrêt Duncan, puisque, en l'espèce, le requérant ne s'est pas vu refuser l'accès direct à l'instance décisionnelle.  De plus, à mon avis, les circonstances en l'espèce diffèrent de celles de l'affaire Diotte, où la Cour a jugé que la décision de l'instance décisionnelle était un «fait accompli» avant que le requérant ait la possibilité de formuler des observations.

 

            Le requérant fait valoir qu'il n'a pas eu la possibilité de répondre à l'avis que le SMAPers a donné au CEMD quant au motif de son renvoi.  Il est vrai qu'il n'a pas vu la note du SMAPers.  Cependant, la raison que celui-ci a invoquée au soutien du renvoi du requérant était énoncée dans d'autres documents que celui-ci a vus et auxquels il a eu la possibilité de répondre.  Ainsi, dans une note datée du 2 octobre 1992, le commandant de l'École navale des Forces canadiennes à Halifax s'exprime comme suit :

 

[TRADUCTION]

3.Le m2 Murphy a accumulé de l'expérience dans le domaine des DDH-280 après avoir suivi le cours d'opérateur de pupitre de commande.  Malheureusement, il n'a pas ajouté une qualification 2D à son certificat 2A.  Inévitablement, comme il n'avait qu'une qualification 2A, le m2 Murphy ne pourra être affecté qu'à un nombre décroissant de destroyers à vapeur Y100.

 

4.Il est recommandé que le m2 Murphy soit contraint de suivre les cours de rattrapage scolaire nécessaires en temps opportun pour être en mesure de réussir le test du cours NQ6.

 

            Sur ce point, l'affaire est semblable à celle de l'arrêt Miller c. Directeur de l'affectation générale et des officiers de carrière et al 1994, 76 FTR 15 (C.F. 1re inst.), où il a été décidé que l'omission de remettre une note d'information n'était pas fatale, parce que les renseignements que la note renfermait avaient déjà été communiqués.  Je suis convaincu que le requérant n'a nullement été lésé par le fait qu'il n'a pas vu la note du SMAPers.  Même si je doute qu'il ait été nécessaire, à tout événement, de divulguer l'avis reçu du personnel du CEMD, il n'est pas obligatoire d'examiner cette question en l'espèce.

 

            L'état de santé du requérant a été mentionné à maintes reprises dans les documents qui ont été soumis au CEMD.  Plus précisément, il a été mentionné que le requérant s'était vu offrir la possibilité de suivre d'autres cours pour cette raison.  Dans la mesure où l'état de santé était pertinent, cette question a été soumise au CEMD.  Le requérant soutient que différentes évaluations positives n'ont pas été soumises au CEMD, mais il en parle lui-même dans son opposition  au renvoi ainsi que dans les pièces qui y sont jointes.  Néanmoins, l'élément crucial réside dans l'omission du requérant d'obtenir la qualification NQ6 et c'est la raison pour laquelle il a été renvoyé.

 

            Lorsque le CEMD a mentionné [TRADUCTION] «d'autres Ordonnances et règlements royaux» dans sa décision, il faisait allusion à la procédure inappropriée qui a été suivie lorsque le DCMP a approuvé la décision.  Le requérant a eu gain de cause devant le CEMD sur ce point et ne peut alléguer maintenant qu'il n'a pas reçu les renseignements qui ont été utilisés contre lui.

 

            Le requérant s'est représenté lui-même.  Avant le début de l'audience, il a demandé un ajournement pour obtenir les services d'un avocat.  Cependant, il avait retenu plus tôt les services d'un avocat qui n'agissait plus au dossier.  Sa demande d'aide juridique a été refusée.  Même si un appel de cette décision était possible, après avoir interrogé le requérant, je n'étais pas convaincu que des motifs d'appel existaient.  L'avocat de l'intimé a aidé le requérant dans les limites du possible.  L'affaire a déjà été ajournée une fois et est en cours depuis plus de deux ans et demi.  J'ai donc refusé la demande d'ajournement du requérant.

 

            Le requérant a formulé des arguments mesurés et cohérents et, somme toute, il a très bien présenté sa cause.  Certains documents qu'il cite renferment des commentaires très élogieux au sujet de son service militaire.  Cependant, la Cour n'a pas la compétence voulue pour substituer son pouvoir discrétionnaire à celui du CEMD au sujet du renvoi du requérant.  La compétence de la Cour est énoncée à l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale.  Compte tenu de ces restrictions, je ne puis en arriver à la conclusion que le CEMD a commis une erreur lorsqu'il a décidé d'approuver le renvoi du requérant ou qu'il y a eu manquement aux principes de justice naturelle.

 

            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

                                                                                                Marshall Rothstein     

                                                                                                                        Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme                                                                       

 

                                                                                                C. Delon, LL.L.


                                               COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                           SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


 

                           AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

 

No DU GREFFE :T-2377-94

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :Robert Murphy

c.

Le procureur général du Canada

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

 

DATES DE L'AUDIENCE :12 et 13 mai 1997

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE ROTHSTEIN

 

EN DATE DU :14 mai 1997

 

 

 

 

ONT COMPARU :

 

 

M. Robert Murphypour le requérant

 

 

Me A. Pringlepour l'intimé

 

 

 

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Robert Murphypour le requérant

Dartmouth (N.-É.)

 

 

Me George Thomsonpour l'intimé

Sous-procureur général

  du Canada

Ottawa (Ontario)

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