IMM-1736-96
OTTAWA (ONTARIO), LE 4 AVRIL 1997
EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE MARC NOËL
Entre :
TOMOKO KODA,
requérante,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
intimé.
O R D O N N A N C E
La demande est rejetée.
Marc Noël
Juge
Traduction certifiée conforme
François Blais, LL.L.
IMM-1736-96
Entre :
TOMOKO KODA,
requérante,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
intimé.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE NOËL
Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision d'un agent d'immigration en date du 19 avril 1996, par laquelle le droit d'établissement a été refusé à la requérante.
I LES FAITS
La requérante est une citoyenne japonaise. Le 30 août 1995, elle a présenté une demande de résidence permanente à l'ambassade du Canada à Tokyo. Le 15 septembre 1995, sa demande a été évaluée à l'étape administrative dans la catégorie des immigrants indépendants. Elle a été évaluée en fonction des exigences applicables à la profession de secrétaire de direction[1]. Après avoir examiné les renseignements contenus dans sa demande, l'agent d'immigration a conclu qu'une entrevue s'imposait.
L'entrevue a eu lieu le 23 janvier 1996. Étant donné que la requérante avait demandé la résidence permanente dans la catégorie des immigrants indépendants, l'accent de l'entrevue a porté sur ses antécédents de travail et ses titres de compétence, les fonctions et les responsabilités qui lui avaient été confiées dans ses emplois antérieurs en rapport avec le poste de secrétaire de direction qu'elle comptait exercer. Après l'entrevue, l'agent d'immigration lui a accordé 2 points supplémentaires sous le facteur «Expérience», pour un total de 4 points, et 5 points sous le facteur «Personnalité» pour un total de 5 points. Une fois ces points ajoutés aux points qui lui avaient déjà été attribués, il ne lui en manquait plus qu'un pour atteindre le minimum de 70 points.
IILA QUESTION EN LITIGE
L'agent d'immigration désigné a-t-il commis une erreur de fait équivalant à une erreur de droit dans l'étude de la demande d'établissement de la requérante?
IIIANALYSE
A) Expérience
La requérante fait valoir que l'agent d'immigration a commis une erreur de fait et de droit en ne lui attribuant que 4 points d'appréciation sous le facteur 3, Expérience, qui figure à l'Annexe 1 du Règlement sur l'immigration :
Des points d'appréciation sont attribués pour l'expérience acquise dans la profession au regard de laquelle le requérant est apprécié d'après l'article 4 [...] de la façon suivante : [...]
c)plus d'un an, sans dépasser quatre ans, 2 points pour chaque année d'expérience jusqu'à 3 années.
Dans son affidavit, l'agent d'immigration déclare ce qui suit :
[TRADUCTION]
J'ai essayé de déterminer le type d'expérience pour savoir s'il s'agissait d'une expérience de «secrétaire de direction». En fait, j'ai considéré son expérience tant chez I.B.M. que chez W.I.L.L. Eigokai Corporation comme une expérience de secrétaire de direction et je lui ai attribué deux points pour chacun de ces postes en fonction de la durée de l'emploi à plein temps qu'elle a exercé dans chaque compagnie. Par conséquent, j'ai accordé un total de 4 points à la requérante au titre de l'expérience.[2]
La requérante prétend que l'agent d'immigration désigné a commis une erreur de droit en interprétant les critères d'expérience comme désignant une expérience à plein temps. Selon la requérante, cette exigence est exprimée simplement en fonction des années, et toute l'expérience de travail doit donc être prise en compte, qu'il s'agisse d'une expérience à plein temps ou à temps partiel. Il s'ensuit que l'agent d'immigration a commis une erreur en ne tenant pas compte de l'expérience professionnelle globale de la requérante puisqu'il n'a pas tenu compte de sa période de travail à temps partiel à la W.I.L.L. Eigokai Corporation. En outre, l'agent d'immigration a commis une erreur en ne tenant pas compte de l'expérience de la requérante chez Nippon Life Insurance Co.
L'intimé prétend qu'une «année d'expérience» est une année d'emploi à plein temps ou son équivalent. Selon l'intimé, il était loisible à l'agent d'immigration de conclure que les 11 mois de travail à temps partiel de la requérante chez W.I.L.L. Eigokai Corporation ne constituaient pas une «année d'expérience». La conclusion de l'agent d'immigration laisse tout simplement entendre qu'il n'a pas jugé que l'expérience à temps partiel de la requérante était l'équivalent d'une expérience à plein temps; cela ne signifie pas qu'il n'a pas tenu compte de la totalité de son expérience professionnelle.
Pour ce qui a trait à l'emploi de la requérante à la Nippon Life Insurance Co., l'intimé prétend que l'agent d'immigration n'a pas ignoré cette expérience, mais qu'il a estimé que les fonctions de [TRADUCTION] «créer de nouveaux formulaires de contrat de même que les vérifier et les évaluer [...] être responsable de la création des documents, de la gestion des horaires et répondre aux appels téléphoniques» étaient celles d'une secrétaire, mais non d'une secrétaire de direction. Par conséquent, cette expérience ne pouvait compter au regard de l'attribution des points d'appréciation à la requérante en tant que secrétaire de direction.
Dans la décision Rajpaul c. Canada[3], la Cour a maintenu la décision de l'agent d'immigration ne pas accorder de point d'appréciation pour un emploi à temps partiel. Cette décision est logique dans ce sens qu'un travail à temps partiel sur une année ne peut équivaloir à un travail à plein temps sur la même période. Je suis d'accord avec la conclusion de l'agent d'immigration selon laquelle l'analyse doit être faite en fonction de l'expérience sur une année complète ou l'équivalent afin de respecter les exigences applicables l'attribution d'un point d'appréciation.
Quant à l'emploi à la Nippon Life Insurance Co., je conclus qu'il était loisible à l'agent d'immigration de juger que cette expérience professionnelle ne justifiait pas l'octroi de points d'appréciation supplémentaires pour le poste de secrétaire de direction. Je conclus donc que l'évaluation de l'agent d'évaluation au titre de l'expérience de la requérante ne démontre aucune erreur susceptible de révision.
B)Personnalité
La requérante soutient également que l'agent d'immigration a «doublement pris en compte» les points d'appréciation attribués au titre de la langue et de l'expérience professionnelle sous le facteur «Personnalité» et qu'en agissant ainsi il a commis une erreur de droit. À l'appui de son argument, elle cite les notes suivantes prises à l'entrevue :
[TRADUCTION]
EXAMINÉ DOSSIER ET ACCORDÉ 5 POINTS D'APPRÉCIATION AU SUJET POUR LA PERSONNALITÉ ... BIEN QUE LE SUJET PARLE COURAMMENT L'ANGLAIS ... A DES MOYENS FINANCIERS ET UNE EXPÉRIENCE DE SECRÉTAIRE LIMITÉS ... DEPUIS OBTENTION DU DIPLÔME DE L'ÉCOLE DE SECRÉTARIAT ... ENVOYÉ ND1 REFUS INCLUS PAR. (E)
L'intimé prétend que ces notes d'entrevue ne doivent pas être lues comme une seule déclaration, mais plutôt comme une série de points notés dans l'ensemble de l'appréciation de la demande. Selon l'intimé, il n'a pas doublement pris en compte le critère de la langue ou du manque d'expérience professionnelle, mais simplement évalué les critères appropriés au titre de la personnalité, c'est‑à‑dire : [TRADUCTION] «le degré de motivation, d'adaptabilité, d'initiative et d'ingéniosité et autres qualités semblables de la requérante». Cet argument est tout à fait conforme à la décision de la Cour dans Vasilev c. Canada[4], et règle définitivement la question.
C) Le critère préliminaire
La requérante soutient que l'agent d'immigration désigné a imposé un critère préliminaire non justifié en exigeant qu'elle dispose de fonds dont le montant n'est pas précisé. À l'appui de sa prétention, la requérante soutient que l'agent d'immigration a commis une erreur en tenant compte des «moyens financiers limités» de la requérante, ce qui laisse entendre que la requérante n'a pas suffisamment d'argent pour subvenir à ses besoins au Canada. En outre, la requérante fait valoir que l'agent d'immigration n'a pas tenu compte de sa valeur réelle étant donné qu'il a laissé de côté son actif non financier qui est évalué à 9 375 $[5]. Finalement, la requérante soutient qu'en évaluant sa personnalité l'agent d'immigration a commis une erreur en ne tenant pas compte de l'offre d'emploi qui lui a été faite par une société canadienne.
L'intimé fait tout d'abord valoir qu'en prenant sa décision il a examiné la totalité de l'actif de la requérante et que la note ayant trait à ses moyens financiers limités avait simplement pour but d'indiquer en termes généraux la situation financière de la requérante. L'intimé fait aussi valoir que l'agent d'immigration a tenu compte de l'offre d'emploi de la requérante, mais il a noté que celle-ci n'avait pas été validée.
Je ne peux trouver d'erreur susceptible de révision dans les conclusions qu'a tirées l'agent d'immigration au regard de la situation financière de la requérante. Il n'a pas été établi que l'agent a imposé un critère préliminaire comme le prétend la requérante. En outre, il n'a pas été établi que l'agent d'immigration avait omis de tenir compte de l'offre d'emploi.
Pour ces motifs, la demande est rejetée.
Marc Noël
Juge
Ottawa (Ontario)
le 4 avril 1997
Traduction certifiée conforme
François Blais, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
N° DU GREFFE :IMM-1736-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :TOMOKO KODA c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE :Vancouver (Colombie-Britannique)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 25 mars 1997
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE NOËL
DATE : Le 4 avril 1997
ONT COMPARU :
Richard Kurland POUR LA REQUÉRANTE
Jennifer Tobe
David Hansen POUR L'INTIMÉ
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Goldman Mathiesen Lakhani Seligman POUR LA REQUÉRANTE
Vancouver (Colombie-Britannique)
George Thomson POUR L'INTIMÉ
Sous-procureur général du Canada