Date : 20030703
Dossier : IMM-2970-02
Référence : 2003 CF 829
Toronto (Ontario), le 3 juillet 2003
EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HENEGHAN
ENTRE :
PUSHPARANY (PUSHPARANI) SRICHANDRADAS
KANTHAIYA SRICHANDRADAS
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] Mme Pushparany (Pushparani) Srichandradas et M. Kanthaiya Srichandradas (les demandeurs) demandent le contrôle judiciaire de la décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) en date du 5 juillet 2002. Dans sa décision, la Commission a conclu que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention.
[2] Les demandeurs sont mari et femme. Ils sont citoyens du Sri Lanka et ont quitté ce pays avec leur unique enfant, soit leur fille, Abiramy, en novembre 2001. Ils ont tenté d'obtenir le statut de réfugié au sens de la Convention au Canada en raison de leur race, de leur appartenance à un groupe social et des opinions politiques qu'on leur prête.
[3] La Commission a conclu que la fille des demandeurs était une réfugiée au sens de la Convention au motif qu'elle était visée et risquait d'être persécutée par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (les TLET) et l'armée sri-lankaise. Bien que la Commission ait reconnu que la crainte des demandeurs en ce qui a trait à la sécurité de leur fille les a motivés à quitter le Sri Lanka, elle a conclu que cette crainte ne constituait pas une crainte fondée de persécution en ce qui concerne les demandeurs eux-mêmes s'ils devaient rentrer au Sri Lanka. Par le fait même, la Commission n'a tiré aucune conclusion sur la crédibilité en ce qui a trait aux demandeurs.
[4] À mon avis, la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en ne tenant pas compte des conséquences pour les demandeurs, une foi au Sri Lanka, de la conclusion selon laquelle leur fille est une réfugiée au sens de la Convention et ne les accompagnerait pas au Sri Lanka. La Commission n'a pas pris en considération le fait que cette conclusion pourrait exposer les demandeurs à la persécution par l'armée sri-lankaise et par les autorités sri-lankaises, basée sur le soupçon que leur fille avait été recrutée par les TLET. La Commission n'a pas appliqué la règle de droit qui exige qu'une décision sur le statut de réfugié au sens de la Convention tienne compte de l'avenir. Voir Mileva c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] 3 C.F. 398 (C.A.). La conclusion de la Commission selon laquelle l'armée sri-lankaise ne les soupçonnerait pas d'appuyer les TLET à l'avenir constitue une erreur susceptible de contrôle, si l'on tient compte du fait que les demandeurs seraient renvoyés au Sri Lanka sans leur fille. Il s'agit là d'une situation qui pourrait alimenter les soupçons de l'armée sri-lankaise selon lesquels la fille s'est jointe aux TLET.
[5] De plus, l'armée sri-lankaise avait déjà soupçonné le demandeur de détenir de l'information concernant les TLET et il avait été détenu, interrogé et relâché uniquement après le paiement d'un pot-de-vin. La Commission a commis une erreur en n'examinant pas comment, dans l'éventualité où les demandeurs rentraient au Sri Lanka sans leur fille, l'absence de cette dernière affecterait leur situation eu égard au fait que le demandeur avait déjà été détenu et interrogé par l'armée sri-lankaise concernant les activités des TLET.
[6] La Commission avait trouvé crédible le témoignage des demandeurs au sujet des tentatives des TLET de recruter leur fille. Elle n'a tiré aucune conclusion défavorable sur la crédibilité en ce qui concerne le reste du témoignage des demandeurs. À mon avis, la Commission n'a pas tenu compte du bien-fondé de la demande des demandeurs dans le contexte de toute la preuve qui lui a été soumise. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section de la protection des réfugiés pour que celui-ci procède à une nouvelle audition et statue à nouveau sur l'affaire. Aucune question n'est formulée pour certification dans cette demande.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l'affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section de la protection des réfugiés pour que celui-ci procède à une nouvelle audition et statue à nouveau sur l'affaire. Aucune question pour certification n'est formulée.
« E. Heneghan »
Juge
Traduction certifiée conforme
Caroline Raymond, LL.L.
COUR FÉDÉ RALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2970-02
INTITULÉ : PUSHPARANY (PUSHPARANI) SRICHANDRADAS
KANTHAIYA SRICHANDRADAS
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 25 JUIN 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LA JUGE HENEGHAN
DATE DES MOTIFS : LE 3 JUILLET 2003
COMPARUTIONS:
Lani Gozlan POUR LES DEMANDEURS
Brad Gotkin POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Max Berger et associés POUR LES DEMANDEURS
Toronto (Ontario)
Morris Rosenberg, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20030703
Dossier : IMM-2970-02
ENTRE :
PUSHPARANY (PUSHPARANI) SRICHANDRADAS
KANTHAIYA SRICHANDRADAS
demandeurs
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE