Dossier : IMM-5510-01
Montréal (Québec), le 3 avril 2003
En présence de : L'HONORABLE JUGE SIMON NOËL
ENTRE :
BRUNO BADY-BADILA
Partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La présente est une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié ("SSR"), rendue le 6 novembre 2001, concluant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention.
[2] Le demandeur est né en République Démocratique du Congo ("RDC") d'une mère guinéenne et d'un père congolais. Il allègue une crainte de persécution basée sur ses opinions politiques imputées du fait que son père et son oncle, membres de l'U.P.A.D.S., étaient "Féticheurs" et soignaient des hommes politiques influents. Après la guerre civile, ceux qui travaillaient de près avec les personnes au pouvoir de l'ancien régime étaient apparemment persécutés.
[3] La SSR a rejeté la revendication du demandeur pour le motif qu'il avait la nationalité de la Guinée et pouvait donc obtenir la protection nécessaire de ce pays. Le demandeur prétend comme premier argument que la SSR a erré en concluant ainsi.
[4] La décision de la SSR résulte d'une analyse détaillée de la preuve documentaire qui était devant le tribunal et est basée sur son interprétation des dispositions du Code civil guinéen relatives à l'acquisition et à la perte de nationalité de ce pays.
[5] Essentiellement, la SSR a conclu que le demandeur était Guinéen parce qu'au moment de sa naissance en 1970, sa mère était Guinéenne. La SSR a déterminé qu'il n'avait pas perdu cette nationalité du seul fait que sa mère avait obtenu la nationalité congolaise en se mariant avec le père du demandeur en 1980, dix ans après la naissance du demandeur. La SSR a également conclu que le demandeur n'avait pas acquis volontairement une autre nationalité (celle du Congo) du fait qu'il était né au Congo d'un père congolais et qu'il n'avait donc pas perdu sa nationalité guinéenne en vertu de l'article 95 du Code civil guinéen.
[6] Le demandeur allègue que la SSR a erré parce qu'en vertu des lois de la RDC et de la Guinée, il n'est pas possible pour un ressortissant du Congo, ni un ressortissant de la Guinée d'avoir la double nationalité. Conséquemment, il prétend avoir perdu automatiquement sa nationalité guinéenne au moment de sa naissance.
[7] Je suis de l'avis du défendeur à l'effet que le demandeur ne peut avoir perdu la nationalité guinéenne qui lui a été transmise à la naissance, en vertu du Code civil guinéen, par sa mère, du seul fait qu'il est né au Congo et non en Guinée ou encore que sa mère ait obtenu la citoyenneté du Congo après sa naissance. Je désire rajouter que si tel était le cas, la disposition 32 du Code civil guinéen n'aurait aucune utilité.
[8] Vu la preuve au dossier, et en particulier, les dispositions législatives sur la nationalité des deux pays en question, je ne peux affirmer que l'analyse et la conclusion de la SSR sont erronées. De plus, l'appréciation de la SSR des faits en l'espèce n'est pas non plus manifestement erronée puisqu'elle est basée sur le témoignage du demandeur, son Formulaire de renseignements personnels ("FRP") et la correspondance que le demandeur a eue avec sa mère vivant en Guinée. Je suis d'avis que les conclusions tirées de la preuve sont tout à fait raisonnables.
[9] En ce qui concerne son deuxième argument à l'effet que la SSR ne cessait de l'interrompre dans son témoignage, et de ce fait, aurait violé un principe de justice naturelle, le demandeur allègue que la SSR l'empêchait de fournir des explications et de présenter sa preuve de manière adéquate. Il soumet que la SSR a violé son obligation d'agir équitablement en vertu du Guide des points saillants du droit des réfugiés à l'intention des commissaires de la SSR, Services juridiques de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, novembre 2000.
[10] Il est établi par la jurisprudence que les membres du tribunal peuvent intervenir lors de l'audience et poser des questions au demandeur, même de façon énergique, pour vérifier les allégations des revendicateurs. (Voir Mahendran c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration) 14 Imm. L.R. (2d) 30 au paragraphe 5 et Ithibu c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) [2001] A.C.F. no 499 aux paragraphes 52, 53 et 54.) J'ai tenu compte de la transcription de l'audition, ainsi que de l'extrait spécifique exposé par le défendeur, et quoiqu'il y a certaines interruptions, je ne crois pas que celles-ci étaient intimidantes ou auraient empêché le demandeur de faire sa preuve. En fait, l'un des extraits de l'interrogatoire démontre que les commissaires ont confronté le demandeur avec une contradiction évidente dans sa preuve au sujet des prétendues relations peu cordiales avec sa mère et que le demandeur a eu la chance de s'expliquer sur cette question.
[11] Pour les raisons qui précèdent, je suis d'avis que les arguments du demandeur ne justifient aucunement l'intervention de cette Cour, étant donné que la SSR n'a commis aucune erreur de fait, ni de droit.
[12] Les procureurs n'ont pas proposé de question à certifier.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE QUE:
Le présent pourvoi est rejeté et aucune question n'est à certifier.
« Simon Noël »
juge
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20030403
Dossier : IMM-5510-01
Entre :
BRUNO BADY-BADILA
Partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-5510-01
INTITULÉ : BRUNO BADY-BADILA
Partie demanderesse
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
Partie défenderesse
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : Le 3 avril 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE :
L'HONORABLE JUGE SIMON NOËL
DATE DES MOTIFS : Le 3 avril 2003
COMPARUTIONS:
Me Stéphanie Valois POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Me Steve Bell POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
Me Stéphanie Valois POUR LA PARTIE DEMANDERESSE
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE
Sous-procureur général du Canada
Montréal (Québec)