Date : 19990826
Dossier : IMM-6307-98
ENTRE :
MASAMI HARA,
demanderesse,
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L"IMMIGRATION,
défendeur.
MOTIFS D"ORDONNANCE
LE JUGE REED
[1] La demanderesse cherche à obtenir une ordonnance en annulation d"une décision dans laquelle une agente des visas a conclu qu"elle n"avait pas les compétences requises pour travailler au Canada en tant qu"agente du personnel et recruteuse parce qu"elle ne satisfaisait pas aux exigences professionnelles liées à ce poste.
[2] Le guide de la Classification nationale des professions (CNP) prévoit que les employeurs exigent habituellement que le détenteur d"un tel poste ait un diplôme d"études universitaires ou collégiales dans un domaine lié à la gestion du personnel (tels la gestion des affaires, les relations industrielles, le commerce ou la psychologie) ou encore qu"il ait suivi avec succès un programme de perfectionnement professionnel en administration du personnel.
[3] L"avocat de la demanderesse soutient que l"agente des visas a commis une erreur en considérant que ces exigences en matière d"éducation étaient obligatoires. Il souligne que le sens qu"il convient d"attribuer à l"expression " est habituellement exigé " paraît à la p. ix de l"introduction du guide de la CNP. Elle décrit un emploi à l"égard duquel les employeurs exigent normalement, bien que pas toujours, que les programmes de formation mentionnés aient été suivis :
Quelques professions ont des exigences bien définies. Pour d"autres, soit qu"il n"existe aucun concensus [sic ], soit qu"il puisse exister un éventail d"exigences acceptables. Afin de refléter ces variations dans le marché du travail, cette section décrit les conditions d"accès à la profession en utilisant la terminologie suivante : |
" " ... est exigé " (pour indiquer une exigence précise); |
" " ... est habituellement exigé " (pour indiquer que les employeurs exigent habituellement, mais pas nécessairement, que les candidats répondent aux exigences); |
" " ... peut être exigé " (pour indiquer que certains employeurs peuvent exiger que les candidats répondent aux exigences, mais sur une base moins fréquente). |
[4] L"avocat souligne que les descriptions qui se trouvent en page 23 du Guide sur les carrières, dans lequel l"expression " est habituellement exigé " équivaut à l"expression " est exigé ", et l"expression " peut être exigé " équivaut à l"expression " n"est pas exigé ", sont des descriptions qui servent spécifiquement à attribuer des numéros aux diverses professions pour fins de comparaison et non des descriptions d"exigences professionnelles réelles.
[5] L"avocat de la demanderesse fait également remarquer que le Ministère de la Citoyenneté et de l"Immigration avait transmis une note de service à tous les agents des visas avisant ceux-ci que l"expression " est habituellement exigé " devait être interprétée comme signifiant que [TRADUCTION] " le demandeur DOIT SATISFAIRE à cette exigence, à moins qu"il n"existe d"importants facteurs qui, de l"avis de l"agent des visas, font en sorte que le demandeur surmontera probablement une telle exigence ". L"avocat dit que si les agents des visas se considèrent liés par cette directive, ils se trouvent à entraver l"exercice de leur pouvoir discrétionnaire (voir Tam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration) (1997), 38 Imm. L.R. (2d) 116 (C.F. 1re inst.), et Ho c. Ministre de l"Emploi et de l"Immigration (1990), 11 Imm. L.R. (2d) 12 (C.A.F.)).
[6] L"avocate du défendeur fait valoir que l"interprétation qu"il convient de donner à l"expression " est habituellement exigé " est effectivement celle qui est énoncée dans la note de service ministérielle. J"accepte l"argument de l"avocat de la demanderesse selon lequel il est peut-être erroné de dire que l"expression " est habituellement exigé " signifie que l"exigence en matière d"éducation doit être remplie , sauf lorsque des facteurs importants convainquent l"agent des visas que les exigences professionnelles peuvent être surmontées. Il se peut qu"une telle interprétation soit trop stricte. Néanmoins, il doit y avoir une quelconque raison convaincante qui permette de penser que le demandeur sera capable de se trouver un emploi dans le domaine qu"il entend intégrer, malgré le fait qu"il ne possède pas les compétences " habituelles " en matière d"éducation.
[7] Examinons maintenant la décision de l"agente des visas en cause. Dans sa lettre de refus, l"agente dit que les exigences en matière d"éducation " doivent être remplies ". Elle remarque que la demanderesse est détentrice d"un diplôme en littérature japonaise du Sugiyama Women"s College et qu"elle ne détient pas l"un ou l"autre des diplômes " habituellement exigés ". Dans ses notes CAIPS, l"agente des visas mentionne que la demanderesse a travaillé en tant que commis de bureau pendant un certain temps à Vancouver (un emploi pour lequel elle paraissait qualifiée) et que, malgré le fait qu"elle a déclaré avoir travaillé en tant qu"agente des ressources humaines pendant quatre ans au Japon, elle occupait cet emploi au sein de l"entreprise de son père et que c"est celui-ci qui avait signé sa lettre de recommandation. Je souligne également que la description, dans la lettre de recommandation, de l"emploi qu"elle occupait, est brève, vague, et pas très convaincante (plusieurs des tâches qui y sont décrites sont des tâches du type de celles qu"accomplit un commis ou une réceptionniste).
[8] J"ai décidé que, malgré le fait que l"agente des visas a pu mettre trop d"accent sur le caractère obligatoire des exigences professionnelles décrites dans le guide de la CNP, il n"y a pas suffisamment d"éléments de preuve permettant à un agent des visas de parvenir à une décision autre que celle qui a été prise. À mon avis, il n"y a pas d"éléments de preuve qui étayeraient une conclusion selon laquelle il existe une raison convaincante de penser que la demanderesse pourrait obtenir un emploi dans le domaine en question, alors qu"elle ne possède pas les compétences professionnelles " habituellement exigées ". Dans de telles circonstances, je ne suis pas convaincue qu"il convient de renvoyer l"affaire pour qu"il soit de nouveau statué sur celle-ci.
[9] Pour ces motifs, la demande est rejetée.
(Signé) " B. Reed "
juge
Vancouver (Colombie-Britannique)
Le 26 août 1999.
Traduction certifiée conforme
Bernard Olivier, B.A., LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
NO DU GREFFE : IMM-6307-98
INTITULÉ DE LA CAUSE : Masami Hara c. MCI
LIEU DE L"AUDIENCE : Vancouver (C.-B.)
DATE DE L"AUDIENCE : le vendredi 24 août 1999
MOTIFS D"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR LE JUGE REED
EN DATE DU : 26 août 1999
ONT COMPARU :
Peter Chapman pour la demanderesse
Pauline Anthoine pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Peter Chapman pour la demanderesse
Chapman and Company
Law Corporation
Morris Rosenberg pour le défendeur
Sous-procureur général
du Canada