Date : 20020926
Dossier : IMM-2121-01
Référence neutre : 2002 CFPI 1009
Toronto (Ontario), le jeudi 26 septembre 2002
EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge Kelen
ENTRE :
MARINA GOLUBYATNIKOVA
YULIYA GOLUBYATNIKOVA
demanderesses
- et -
LE MINISTRE DE
LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La demanderesse adulte sollicite le contrôle judiciaire d'une décision rendue le 19 mars 2001 par la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) selon laquelle les demanderesses n'étaient pas des réfugiées au sens de la Convention.
[2] La seule question en litige est celle de savoir si la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a conclu que la demanderesse adulte n'était pas digne de foi.
[3] La demanderesse, Marina Golubyatnikova, et sa fille mineure, Yuliya, sont citoyennes du Kazakhstan. La demanderesse revendique le statut de réfugiée au sens de la Convention au motif qu'elle est une personne qui craint avec raison d'être persécutée du fait de son appartenance à des groupes sociaux, soit celui des lesbiennes russes du Kazakhstan et celui des femmes victimes de violence de la part de leur mari.
[4] La Commission a reconnu que les revendicatrices étaient des Russes du Kazakhstan, mais n'était pas convaincue que la demanderesse était une lesbienne ou qu'elle risquait d'être persécutée par son mari au Kazakhstan.
[5] La demanderesse a prétendu qu'elle a subi, à partir de 1990, de la violence physique et verbale de la part de son mari. Son mari a refusé de divorcer et l'a menacée de violence si elle entamait des procédures de divorce. Elle a déclaré qu'en 1995 elle a rencontré Galina avec qui elle a par la suite eu une relation amoureuse. Son mari a soi-disant découvert l'orientation sexuelle de la demanderesse en janvier 1998 et a alors dévoilé ce renseignement aux collègues de travail de la demanderesse. Les collègues de travail de la demanderesse ont par la suite commencé à la harceler. La demanderesse a prétendu qu'un groupe de Kazakhs, parmi lesquels se trouvait un collègue de travail qu'elle a reconnu, les ont attaquées, elle et Galiana, en mai 1998. Elle prétend que Galina est décédée des suites de l'agression et que pour sa part elle a subi une blessure au cerveau.
[6] La Commission a conclu, pour les motifs ci-après énoncés, que la demanderesse n'était pas digne de foi lorsqu'elle affirme craindre d'être persécutée :
a) En janvier 1998, la demanderesse a rempli un formulaire de demande d'immigration à titre d'immigrant indépendant et elle a inscrit son mari comme personne à charge. La demande d'immigration a été rejetée. Peu après, la demanderesse a rendu visite à sa soeur au Canada et a revendiqué le statut de réfugiée. La Commission a conclu qu'il était peu vraisemblable, compte tenu du fait que la demanderesse l'avait inclus dans sa demande d'immigration, que le mari de la demanderesse lui ait fait subir de la violence physique et ait découvert qu'elle était lesbienne.
b) La Commission n'a pas cru l'explication de la demanderesse selon laquelle son mari avait menacé de ne pas consentir à ce que leur fille l'accompagne s'il n'était pas inclus dans la demande.
c) Lorsque la Commission a demandé à la demanderesse de quelle façon elle avait obtenu de son mari la permission de rendre visite à sa soeur après que sa demande d'immigration à titre d'immigrant indépendant eut été refusée, elle a répondu qu'elle lui avait transféré tous ses biens en échange de sa renonciation à tous les droits de garde à l'égard de leur fille. La demanderesse a fourni un certificat de divorce daté du 12 mai 1999, approximativement une semaine après qu'elle eut reçu son visa de visiteur pour venir au Canada. Elle n'avait pas de documents relatifs à la garde de sa fille ou de preuve que ses biens avaient été transférés à l'exception d'une procuration qu'elle avait donnée à son mari. Le tribunal a jugé que la procuration n'était pas suffisante pour prouver que la demanderesse avait obtenu de son mari une renonciation au droit de garde de leur fille en échange de ses biens.
d) Les demanderesses n'ont pas quitté leur pays avant 1999, après que leur demande d'immigration à titre d'immigrant indépendant eut été refusée.
e) La demanderesse a fourni une preuve qu'elle avait une tumeur au cerveau, mais aucun élément de preuve n'établissait un lien entre la tumeur de la demanderesse et sa crainte de persécution.
[7] La demanderesse prétend que la Commission a commis une erreur lorsqu'elle a conclu qu'elle n'était pas digne de foi. Elle allègue qu'il existe une présomption selon laquelle un témoignage verbal rendu sous serment est véridique à moins qu'il existe un motif valable d'en mettre en doute la véracité. La demanderesse allègue en outre que, en l'espèce, sa preuve était vraisemblable et logique et que le tribunal n'avait pas de motif de mettre en doute son témoignage.
[8] La Commission est un tribunal spécialisé qui a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage et pour jauger la crédibilité d'un récit et tirer les inférences qui s'imposent. Voir Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 1993 A.C.F. no 732 (QL) (C.A.F.), Rajaratnam c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] A.C.F. no 1271 (QL) (C.A.F.), Razm c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 373 (QL) (C.F. 1re inst.), Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 1425 (QL) (C.F. 1re inst.).
[9] En l'espèce, les inférences tirées par la Commission ne sont pas déraisonnables au point de justifier l'intervention de la Cour. Il ressort des motifs de la Commission qu'elle a fondé sa décision sur la crédibilité de la revendicatrice. La Commission n'a pas accepté le témoignage de la revendicatrice et les motifs de sa décision quant à la crédibilité et la plausibilité sont énoncés de façon détaillée et dans des termes clairs et non équivoques. La Cour n'est pas autorisée à substituer son opinion quant aux faits à celle de la Commission. La Commission avait l'avantage de voir et d'entendre les témoins et elle possède, en tant que tribunal spécialisé, l'expertise nécessaire pour apprécier la preuve quant aux faits. La Cour n'est pas convaincue que, en l'espèce, la Commission a tiré une conclusion quant à la crédibilité ou quant à la plausibilité qui est manifestement déraisonnable.
ORDONNANCE
La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats ont déclaré n'avoir aucune question à soumettre aux fins de la certification. Aucune question n'est certifiée.
« Michael A. Kelen »
Juge
Traduction certifiée conforme
Danièle Laberge, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Avocats inscrits au dossier
DOSSIER : IMM-2121-01
INTITULÉ : MARINA GOLUBYATNIKOVA
YULIYA GOLUBYATNIKOVA
demanderesses
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET
DE L'IMMIGRATION
défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE JEUDI 26 SEPTEMBRE 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
DATE DES MOTIFS : LE JEUDI 26 SEPTEMBRE 2002
COMPARUTIONS : Robin Morch
Pour les demanderesses
Marcel LaRouche
Pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER : Robin Morch
Avocat
1137 Royal York Road
Bureau 1010C
Toronto (Ontario) M9A 4A7
Pour les demanderesses
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Pour le défendeur
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20020926
Dossier : IMM-2121-01
ENTRE :
MARINA GOLUBYATNIKOVA
YULIYA GOLUBYATNIKOVA
demanderesses
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE