Date : 20030930
Dossier : T-1089-03
Référence : 2003 CF 1118
Ottawa (Ontario), le 30 septembre 2003
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD
ENTRE :
SCOTT EDGELOW
demandeur
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
Introduction
[1] M. Scott Edgelow (le demandeur) introduit une requête, en application de la règle 51(1) des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106 (les Règles), pour valoir d'appel à l'encontre de la décision du 12 août 2003 du protonotaire Hargrave qui avait radié la déclaration du demandeur parce qu'elle ne révélait pas une cause d'action valable. La règle 51(1) prévoit qu'il peut être fait appel de l'ordonnance d'un protonotaire par requête adressée à un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale.
Les faits
[2] Le demandeur a déposé le 26 juin 2003 une déclaration. Le 14 juillet 2003, la défenderesse introduisait une requête visant à faire radier la déclaration en application de la règle 221(1)a), parce qu'elle ne révélait pas une cause d'action valable.
[3] Par une ordonnance datée du 12 août 2003, le protonotaire Hargrave a fait droit à la requête et rendu une ordonnance qui radiait la déclaration parce qu'elle ne révélait pas une cause d'action valable. En concluant ainsi, le protonotaire a estimé que la déclaration renfermait de simples affirmations, se référait à de nombreux textes législatifs, tant canadiens qu'étrangers, et alléguait préjudice, discrimination, abus de pouvoir et abus de procédure. Dans son ordonnance radiant la déclaration, le protonotaire raisonnait ainsi :
[traduction] La déclaration ne renferme absolument aucun élément factuel, que ce soit pour mettre les simples affirmations dans un contexte qui se rapporte au demandeur et par lequel le demandeur pourrait avoir une apparence de réclamation, ou pour donner à la défenderesse la plus petite idée de ce à quoi se rapporte la réclamation.
[4] Le protonotaire a aussi radié la déclaration parce que, selon lui, il s'agissait d'une procédure vexatoire et embarrassante ne renfermant aucun fait qui eût permis à la Cour de réguler l'instance ou qui eût permis à la défenderesse de réagir et de donner suite à telles affirmations et conclusions.
[5] Finalement, le protonotaire a conclu que, puisque la déclaration ne renfermait pas ne fût-ce qu' « un soupçon de cause d'action » , aucune modification évidente de la déclaration ne pouvait venir en aide au demandeur.
Norme de contrôle
[6] Les ordonnances discrétionnaires des protonotaires ne doivent pas être modifiées en appel à moins qu'elles ne soient entachées d'une erreur flagrante, en ce sens que le protonotaire aurait exercé son pouvoir discrétionnaire sur le fondement d'un mauvais principe ou d'une mauvaise appréciation du droit, ou à moins qu'elles ne soulèvent des questions essentielles pour la décision finale sur le fond. Dans un tel cas, le juge doit exercer son propre pouvoir discrétionnaire en reprenant l'affaire depuis le début : Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd., [1993] 2 C.F. 425. La décision contestée ici soulève des questions qui sont manifestement essentielles pour la décision finale sur le fond. J'exercerai donc ma faculté de reprendre l'affaire depuis le début.
Analyse
[7] Dans ses conclusions écrites et orales, le demandeur soutient que les pièces annexées à sa déclaration suffisent à établir une cause d'action. Selon lui, la défenderesse aurait pu solliciter des détails complémentaires si elle le jugeait nécessaire. Il a produit des copies de certains documents, notamment le « rapport Bagley » , qui traite des infractions sexuelles contre les enfants et adolescents. S'agissant de la déclaration, le demandeur néglige dans ses conclusions de mettre les faits relatés tout au long de ces rapports dans un contexte qui intéresse le demandeur et qui lui permettrait de fonder une réclamation. Le demandeur n'aborde pas les points particuliers soulevés par le protonotaire dans son ordonnance radiant la déclaration. Il semble ne pas comprendre la distinction entre le fait d'invoquer des circonstances matérielles et le fait d'énoncer de simples affirmations. Au paragraphe 2 de la déclaration, le demandeur affirme que « la défenderesse a été négligente dans sa manière de répondre aux abus sexuels » . La déclaration est par ailleurs avare de détails sur les présumés abus.
[8] J'ai scrupuleusement examiné la déclaration et scrupuleusement étudié les conclusions orales comme les conclusions écrites du demandeur. Je suis d'avis que la déclaration ne renferme aucune circonstance matérielle qui puisse fonder une cause d'action. Je suis d'avis qu'il est manifeste et évident que la déclaration du demandeur ne révèle aucune cause d'action valable. J'ai aussi le sentiment que la déclaration est si lacunaire qu'aucune possible modification ne saurait l'améliorer. Je souscris à l'ordonnance du protonotaire Hargrave. Je suis d'avis que le protonotaire a appliqué les bons principes de droit et qu'il a bien appliqué ces principes aux circonstances dont il était saisi, lorsqu'il a décidé de radier la déclaration.
Conclusion
[9] Pour les motifs susmentionnés, la requête en réformation de l'ordonnance du 12 août 2003 du protonotaire Hargrave sera rejetée.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. La requête déposée par le demandeur en application de la règle 51(1) des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, pour que soit réformée la décision du 12 août 2003 du protonotaire Hargrave est rejetée.
« Edmond P. Blanchard »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE OF CANADA
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-1089-03
INTITULÉ : Scott Edgelow
c.
Sa Majesté la reine du chef du Canada
LIEU DE L'AUDIENCE : Calgary (Alberta)
DATE DE L'AUDIENCE : le jeudi 18 septembre 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD
DATE DES MOTIFS : le 30 septembre 2003
COMPARUTIONS :
M. Scott Edgelow pour le demandeur
Calgary (Alberta)
Me Barry Benkendorf pour la défenderesse
Edmonton (Alberta)
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Scott Edgelow pour le demandeur
en son propre nom
Morris Rosenberg pour la défenderesse
Sous-procureur général du Canada
Edmonton (Alberta)
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Dossier : T-1089-03
ENTRE :
SCOTT EDGELOW
demandeur
- et -
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA
défenderesse
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE