Date : 20021128
Dossier : IMM-2005-01
OTTAWA (Ontario), le 28 novembre 2002
En présence de Monsieur le juge MacKay
ENTRE :
JOSE CIPRIAN GONZALES GONZALES
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
VU la demande du demandeur visant à obtenir un contrôle judiciaire et une ordonnance annulant la décision de la Section du statut de réfugié en date du 30 mars 2001, laquelle a rejeté la demande du statut de réfugié au sens de la Convention du demandeur;
APRÈS avoir entendu les avocats des deux parties à St. John's (Terre-Neuve et Labrador), le 26 avril 2002, la Cour a sursis à sa décision, et après examen des observations alors faites;
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE que la présente demande soit rejetée.
« W. Andrew MacKay »
______________________________
JUGE
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
Date : 20021128
Dossier : IMM-2005-01
Référence neutre : 2002 CFPI 1229
ENTRE :
JOSE CIPRIAN GONZALES GONZALES
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LE JUGE MacKAY
[1] Le demandeur, un citoyen de Cuba, vise à obtenir le contrôle judiciaire et une ordonnance annulant une décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) en date du 30 mars 2001, laquelle a rejeté la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention du demandeur, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, dans sa forme modifiée (la Loi).
[2] Deux questions sont soulevées comme motifs de la demande. La première est de savoir si la Commission a privé le demandeur de l'équité procédurale lorsqu'elle a décidé de tenir l'audience relative à la revendication du demandeur au moyen de la vidéoconférence. La deuxième est de savoir si la décision de la Commission a été rendue sans prise en considération de la totalité de la preuve ou si elle était fondée par erreur sur des conclusions de fait tirées de façon abusive ou arbitraire sans tenir compte des éléments dont elle disposait.
L'ÉQUITÉ PROCÉDURALE D'UNE AUDIENCE PAR VIDÉOCONFÉRENCE
[3] L'audience tenue par la Commission a été organisée par vidéoconférence, les membres de la Commission et l'interprète étant à Ottawa et le demandeur et son avocate étant à St. John's (Terre-Neuve). Au début de l'audience, l'avocate du demandeur s'est opposée à ce que l'on procède par vidéoconférence et elle a fait référence à une lettre expédiée la veille par télécopieur à la Commission dans laquelle l'objection était mentionnée, accompagnée d'une demande pour que l'affaire soit entendue lors d'une comparution personnelle devant la Commission. Les membres de la Commission n'avaient pas pu prendre connaissance de la lettre avant l'audience. Après avoir entendu l'objection, la Commission l'a rejetée et a procédé à la tenue de l'audience. Dans sa décision, elle a déclaré croire que « ce mode de communication ne porte pas atteinte aux règles de justice naturelle » et que le demandeur pouvait témoigner et répondre clairement aux questions qui lui étaient posées. À la fin de l'audience, la Commission a accueilli une demande de l'avocate du demandeur et lui a accordé deux mois pour faire des observations par écrit après l'audience.
[4] Le demandeur a fait valoir que les installations de vidéoconférence ne permettent pas une appréciation adéquate du comportement d'un revendicateur, en particulier lorsque la culture et la langue du revendicateur sont différentes. Aucune précision n'a été donnée quant à la manière dont l'objet de ces préoccupations générales a pu affecter de façon négative l'audience dans cette cause, quoique des lacunes précises concernant les arrangements administratifs au sujet de la conférence soient décrites dans les observations. Bien qu'elles puissent avoir créé une certaine confusion et, en raison des différences de fuseaux horaires, certains inconvénients pour le demandeur, une fois que la conférence eut débuté, il semble que le tout s'est bien déroulé jusqu'à la fin sans effet négatif précis pour le demandeur.
[5] Je ne suis pas convaincu que, dans les circonstances de l'espèce, la tenue de l'audience au moyen de la vidéoconférence ait eu un effet négatif quant au respect de l'obligation d'équité procédurale qu'avait la Commission envers le revendicateur.
LES CONSTATATIONS DE LA COMMISSION ET LA PREUVE
[6] Le demandeur fait valoir que la Commission n'a pas tenu compte d'éléments de preuve pertinents sur deux points importants. Elle a invoqué une réponse à une demande de renseignements, datée de juin 1999, laquelle mentionnait qu'il n'y avait aucun cas récent d'arrestation de personnes retournant à Cuba après avoir échoué dans leur tentative d'établir leur revendication du statut de réfugié à l'étranger. À la lumière de cela, la Commission a écarté la déclaration du demandeur selon laquelle il craignait d'être arrêté et emprisonné s'il était renvoyé à Cuba.
[7] Le demandeur fait valoir que d'autres éléments de preuve documentaire, datés postérieurement au rapport que la Commission a invoqué, lui ont été présentés, lesquels mentionnaient que des revendicateurs du statut de réfugié qui ont échoué peuvent être arrêtés à leur retour. La Commission a conclu que le demandeur, un mécanicien d'expérience servant dans la flotte de pêche cubaine, ne semblait pas, à partir de la preuve documentaire, avoir le profil des personnes arrêtées, lesquelles étaient des leaders de l'opposition, des critiques, des avocats, des journalistes, des militants des droits de la personne et des universitaires. Cette appréciation était corroborée par les éléments de preuve dont disposait la Commission et elle justifiait la conclusion selon laquelle le demandeur n'était pas susceptible d'être arrêté s'il était renvoyé.
[8] Le demandeur fait valoir également que la décision de la Commission semble ne pas avoir tenu compte des observations et de la preuve documentaire transmises après l'audience par l'avocate du demandeur. Cette observation est fondée sur l'omission de la Commission d'y faire référence dans la décision relativement brève qu'elle a rendue. Il est pourtant bien établi que l'omission de faire référence à des éléments de preuve ou à des observations ne constitue pas en soi le fondement d'une inférence selon laquelle la Commission n'a pas tenu compte de ces éléments de preuve ou de ces observations lorsqu'elle a formulé sa conclusion (Hassan c. M.E.I. (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.)).
[9] Le demandeur a prétendu craindre d'être persécuté du fait des opinions politiques qu'on lui attribue, en se basant sur sa croyance qu'un organisme gouvernemental cubain observait et faisait rapport concernant des particuliers, contrôlant en fin de compte leur vie, mais il n'a donné aucun exemple d'un effet négatif particulier sur lui. Sa prétention selon laquelle sa crainte était liée aux opinions politiques qu'on lui attribue vient du fait qu'il s'était dressé contre le capitaine de son navire au sujet des conditions de travail ainsi que du contrat d'emploi pour lui et les autres membres d'équipage. Lors de l'audience, il a laissé entendre qu'il était un porte-parole pour l'équipage, mais lorsque questionné sur la raison pour laquelle cela n'était pas énoncé dans sa réponse écrite dans son Formulaire de renseignements personnels, il n'a pas répondu directement, mais il a plutôt mentionné qu'il n'était pas leur porte-parole et qu'il n'était pas au courant de leurs intérêts particuliers.
[10] Lorsque la Commission lui a demandé de parler des événements injustes dont il aurait été victime à Cuba, il a refusé de répondre à la question, bien qu'on lui eût fait remarquer que le but de l'audience était de faire en sorte qu'il ait l'occasion de bien expliquer sa revendication. La Commission n'a pas été convaincue qu'il avait éprouvé des difficultés importantes, puisque aucune difficulté précise n'avait été démontrée et que, de plus, il occupait un emploi de mécanicien pour la flotte cubaine depuis de nombreuses années.
[11] L'avocate du demandeur a fait valoir que les circonstances ressemblaient à celles que l'on retrouve dans l'arrêt Klinko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 3 C.F. 327 (C.A.), et également à celles de la décision Dieguez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 764 (Q.L.) (1re inst.).
[12] Dans la première cause, la Cour d'appel a conclu que la crainte invoquée par le demandeur d'être persécuté en raison de ses opinions politiques avait été établie parce qu'elle découlait du dépôt par le demandeur d'une plainte officielle dénonçant la corruption des représentants de l'État, conclusion basée sur des éléments de preuve selon lesquels le gouvernement du pays en cause était engagé dans les activités faisant l'objet de la plainte du demandeur. Il n'existe pas de tels éléments de preuve en l'espèce justifiant la conclusion selon laquelle la plainte du demandeur contre son capitaine serait vue comme une opposition politique au gouvernement cubain. Dans la deuxième cause, Mme le juge Tremblay-Lamer a conclu que l'utilisation sélective de la preuve documentaire invoquée par la Commission ne tenait pas compte d'autres éléments de preuve pertinents et que la preuve dans son ensemble ne justifiait pas la conclusion de la Commission. À mon avis, on peut distinguer la cause Dieguez d'avec la présente affaire parce qu'en l'espèce, les conclusions de la Commission pouvaient s'appuyer sur la preuve dont elle disposait.
CONCLUSION
[13] À mon avis, il n'existe aucun fondement permettant à la Cour d'intervenir et d'annuler la décision de la Commission. Dans la mesure où elle a écarté le témoignage du demandeur en refusant de l'accepter, ses commentaires étaient justifiés, vu les motifs qu'elle a exprimés et la preuve dont elle disposait. Il n'existe aucun motif pour renverser son appréciation des parties du témoignage du demandeur qu'elle a jugées non crédibles. Compte tenu de la preuve dont elle disposait, la Commission pouvait en venir à la conclusion selon laquelle la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention du demandeur en raison d'une persécution perçue fondée sur des motifs politiques n'avait pas été établie.
[14] Pour ces motifs, une ordonnance rejetant la demande de contrôle judiciaire sera rendue. Aucune partie n'a proposé de question pour examen en vertu du paragraphe 83(1) de la Loi et aucune question n'est certifiée.
« W. Andrew MacKay »
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JUGE
OTTAWA (Ontario)
Le 28 novembre 2002.
Traduction certifiée conforme
Christian Laroche, LL.B.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2005-01
INTITULÉ : JOSE CIPRIAN GONZALES GONZALES
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : ST. JOHN'S (TERRE-NEUVE)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 26 AVRIL 2002
ORDONNANCE ET MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MONSIEUR LE JUGE MacKAY
DATE DES MOTIFS : LE 28 NOVEMBRE 2002
COMPARUTIONS :
JOAN DAWSONPOUR LE DEMANDEUR
LOR RASMUSSENPOUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
JOAN DAWSONPOUR LE DEMANDEUR
ST. JOHN'S (TERRE-NEUVE)
MORRIS ROSENBERGPOUR LE DÉFENDEUR
SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA