Date : 20050519
Dossiers : T-2456-03 & T-2457-03
Référence : 2005 CF 707
AFFAIRE INTÉRESSANT l'article 56 de
la Loi sur les marques de commerce
et l'alinéa 300d) des
Règles de la Cour fédérale (1998)
ENTRE :
VIVAT HOLDINGS LIMITED
demanderesse
et
LEVI STRAUSS & CO.
défenderesse
[1] On appelle ARC DOUBLE (DOUBLE ACURATE) la surpiqûre apparaissant sur les poches arrière des jeans Levi. La Commission des oppositions des marques de commerce (la COMC) a été appelée à déterminer si les surpiqûres apparaissant sur les jeans de la demanderesse devraient être enregistrées à titre de marque de commerce. La Cour est en l'espèce saisie d'appels à l'encontre de la décision rendue par la COMC rejetant les deux demandes de marques de commerce déposées par la demanderesse.
INTRODUCTION
[2] La société prédécesseure de la demanderesse a déposé des demandes d'enregistrement de deux marques de commerce représentées par des dessins symétriques d'arc double surpiqués sur la poche des vêtements. Je désignerai la demanderesse par « Vivat » , et ses surpiqûres, les « marques de Vivat » . Les demandes étaient fondées sur l'emploi projeté au Canada en liaison avec des vêtements et des chaussures. Les marques de Vivat sont reproduites ci-dessous.
|
[3] La défenderesse Levi Strauss & Co. (Levi) s'est opposée aux demandes au motif que les marques de Vivat créaient de la confusion avec la marque de commerce dessin d'ARC DOUBLE de Levi antérieurement enregistrée, employée et ayant fait l'objet d'une demande au Canada. En outre, l'opposition de Levi se fondait sur l'absence de caractère distinctif, en ce que les marques de Vivat ne distinguaient pas ou n'étaient pas adaptées à distinguer ses services de la marque de commerce dessin d'ARC DOUBLE de Levi. L'ARC DOUBLE, que j'appellerai la « marque de Levi » , apparaît ci-dessous :
|
[traduction] Un dessin d'arc double appliqué à la poche-revolver de vêtements comme la salopette.
Il s'agit de deux demandes d'appel parallèles et les présents motifs valent pour les deux demandes.
LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES
[4] Le libellé des dispositions législatives applicables se trouve à l'annexe A joint aux présents motifs. Levi s'est opposée aux demandes de Vivat sur le fondement de l'alinéa 12(1)d) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi) - qui dispose qu'une marque de commerce est enregistrable dans la mesure où elle ne crée pas de la confusion avec une marque de commerce déposée. L'opposition de Levi se fonde également sur les alinéas 16(3)a) et b) de la Loi qui prévoient qu'un requérant qui a produit une demande en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce a le droit d'en obtenir l'enregistrement, à moins qu'à la date à laquelle la marque a été employée ou révélée, elle n'ait créé de la confusion avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne, ou à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement a été antérieurement produite au Canada par une autre personne. Il s'agissait donc de savoir si les marques de Vivat créaient de la confusion avec la marque de Levi.
[5] La question de la confusion entre deux marques est régie par l'article 6 de la Loi. Cet article prévoit que l'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées ou vendues par la même personne, que ces marchandises soient ou non de la même catégorie générale. Le paragraphe (5) de l'article 6 énonce que, pour décider s'il y a confusion, on doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris (en ce qui a trait à la présente affaire) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues, la période pendant laquelle elles ont été en usage, le genre de marchandises, la nature du commerce et le degré de ressemblance entre les marques de commerce dans la présentation ou dans les idées qu'elles suggèrent.
LA PREUVE DEVANT LA COMC
[6] Levi a soumis cinq affidavits au soutien de son opposition. Mme Lynn Downey, bibliothécaire et historienne, a déposé des éléments de preuve portant sur l'emploi de la marque de Levi aux États-Unis. M. Herbert McPhail, qui fait de la recherche de marques de commerce, a produit une copie de l'enregistrement de la marque de commerce de Levi pour un emploi en liaison avec des « salopettes » , et donné des détails sur une demande pendante d'enregistrement de la marque Levi pour un emploi en liaison avec d'autres articles.
[7] M. John Chambers, auteur et professeur de linguistique à l'Université de Toronto, a témoigné que le mot « salopette » était utilisé dans les années 50 pour désigner des pantalons que l'on appellerait aujourd'hui des « jeans » ou du « velours côtelé » . M. Chris Yaneff, concepteur graphique professionnel comptant 40 ans d'expérience, a créé des logos et des dessins qui ont été enregistrés à titre de marques de commerce et a prononcé de nombreuses allocutions sur la création et la conception de marques de commerce. Il a déclaré que la marque dessin de Levi était un [traduction] « identificateur de marque mémorable » .
[8] Mme Ellen Baker, une spécialiste des marques de commerce à l'emploi de Levi, a démontré que Levi a vendu plus de 120 millions d'articles vestimentaires au Canada arborant la marque de Levi par l'entremise de magasins et de réseaux de vente au détail. En outre, la marque de Levi est mise en évidence dans la majeure partie de la publicité de Levi.
[9] Vivat a produit trois affidavits et un échantillon de vêtements arborant les marques de Vivat au soutien de ses demandes. Les affidavits ont été souscrits par M. Cedric Lam, M. Alan Jeffrey Richards et Mme Louise MacLean.
[10] En 1996, M. Lam a acheté huit marques de jeans différentes - lesquelles arboraient toutes des surpiqûres sur les poches arrière - dans divers magasins du centre-ville de Toronto. Des photographies des poches arrière ont été jointes à son affidavit. M. Richards, secrétaire et administrateur de Vivat Holdings PLC au Royaume-Uni, a produit une preuve de l'emploi et de l'enregistrement des marques de Vivat au Canada et dans d'autres pays. La preuve déposée par Mme MacLean portait sur l'état du registre en ce qui a trait aux enregistrements et aux demandes concernant les marques surpiquées sur des vêtements. Elle a également produit des copies de plusieurs déclarations déposées en Cour fédérale par Levi, alléguant que la vente de jeans par d'autres contrefaisait la marque de Levi. En octobre 1998, Mme McLean a acheté huit marques de jeans de différents magasins du centre ville de Toronto. Des photographies des surpiqûres apparaissant sur les poches arrière des jeans ont été jointes à son affidavit.
[11] En réponse aux affidavits de Mme MacLean et de M. Lam, Levi a soumis un second affidavit souscrit par Mme Baker. Celle-ci a donné des renseignements sur les mesures prises par Levi pour protéger sa marque.
LA DÉCISION
[12] La COMC n'a pas jugé toute la preuve utile. Elle a mentionné que la preuve déposée par Mme Downey était peu probante en l'espèce. La portion pertinente de la preuve déposée par M. Yaneff portait sur les caractéristiques distinctives de la marque de Levi - la combinaison d'un arc double et d'une double couture (double arc-double couture). La preuve déposée par M. Richards a été en grande partie jugée peu utile étant donné qu'il s'agissait soit de ouï-dire, non admissible en preuve, soit d'information peu pertinente dans le cas du Canada.
[13] La preuve produite par Mme MacLean en ce qui a trait au contenu du registre n'a pas démontré que l'utilisation de dessins arc double - couture double, comme dans la marque de Levi, était répandue sur le marché. La Commission a conclu qu'il y avait trop peu d'enregistrements ou de demandes pertinents (pour les marques composées d'un double arc-double couture) mis en preuve par Vivat pour permettre de tirer l'inférence que le dessin est répandu. Sur les huit poches de jeans dont les photographies ont été jointes à l'affidavit de Mme MacLean, seules trois pourraient être décrites comme arborant le dessin double arc-double couture, et l'un de ces dessins ressemblait davantage aux marques de Vivat qu'à celle de Levi. En outre, un autre des trois dessins était tout à fait distinct de ceux faisant l'objet de la présente. Au vu de cette preuve et de celle soumise par Levi, la COMC a conclu qu' « une partie importante de la population canadienne a probablement été mise en présence, à l'occasion, des dessins double arc-double couture qui ressemblent davantage aux marques de Vivat qu'à celle de Levi.
[14] La COMC a refusé de tirer une inférence défavorable contre Levi par suite de son refus de répondre à certaines questions ou de produire certaines preuves en contre-interrogatoire; il s'agit surtout ici des questions posées à M. Yaneff (portant sur le caractère distinctif, unique et mémorable de quelques-unes des surpiqûres déposées en preuve par Vivat) et des demandes auprès de Mme Baker afin qu'elle produise certains documents (visant à établir le volume des ventes qui, selon Levi, constituaient une contrefaçon de sa marque).
[15] La COMC a conclu que M. Yaneff n'aurait pas été en mesure de produire quelque élément de preuve ayant une valeur probante en ce qui a trait au caractère distinctif, unique et mémorable d'autres surpiqûres. Elle a conclu que l'argument de Vivat portant sur le refus de Mme Baker de produire certaines preuves était bien fondé, mais a fait remarquer que Vivat n'avait pas interrogé Mme Baker sur son affirmation portant que « l'emploi des marques ou des dessins [par des tiers] est à petite échelle et de courte durée » ; l'affirmation n'a donc pas été contredite. La Commission est d'avis que si Vivat avait interrogé Mme Baker sur cette affirmation et soulevé des doutes quant à la fiabilité et à l'exactitude de son témoignage, elle aurait alors vraisemblablement tiré une inférence défavorable.
[16] Se fondant sur l'arrêt American Assn. of Retired Persons c. Canadian Assn. of Retired Persons (1998), 84 C.P.R. (3d) 198 (C.F. 1re inst.), la COMC a énoncé les dates pertinentes suivantes en ce qui a trait à chaque motif d'opposition soulevé par Levi :
- en vertu de l'alinéa 12(1)d) de la Loi: la date de la décision de la Commission;
- en vertu du paragraphe 16(3) de la Loi : la date de dépôt prioritaire des marques de Vivat (27 juin 1994);
- l'opposition fondée sur le caractère distinctif : la date du dépôt de l'opposition (9 août 1994).
[17] La Commission a fait sienne la proposition suivant laquelle il appartient à la requérante d'établir qu'il n'y a aucun risque de confusion, au sens du paragraphe 6(2) de la Loi, entre les marques visées par la demande et les marques de l'opposante. Elle a affirmé que si une conclusion déterminante ne peut être tirée après examen de la preuve, la question doit alors être tranchée à l'encontre de la requérante. Elle a identifié le critère de la confusion comme étant celui de la première impression et du souvenir imparfait.
[18] La COMC a tiré certaines conclusions à l'égard des circonstances énoncées au paragraphe 6(5) de la Loi.
[19] En ce qui a trait au « caractère distinctif inhérent des marques de commerce (...) et la mesure dans laquelle [elles] sont devenu[es] [connues] » (alinéa 6(5)a) de la Loi), la Commission n'a pas été convaincue par la preuve déposée par Levi portant que sa marque possède un caractère distinctif inhérent ou constitue une marque forte. La Commission se fondait à cet égard sur sa propre décision dans Levi Strauss & Co. c. Benetton Group S.p.A. (1997), 77 C.P.R. (3d) 223. La Commission n'a pas non plus jugé convaincantes les affirmations de M. Yaneff suivant lesquelles la marque de Levi est « mémorable » et possède un caractère « distinctif inhérent » . De tels éléments, soutient-elle, devraient être établis par des sondages menés valablement. De même, la Commission a conclu que les marques de Vivat n'ont pas un caractère distinctif inhérent solide. La Commission a conclu que la preuve de Levi a démontré que sa marque était très bien connue au Canada à toutes les époques pertinentes tandis que Vivat n'a pu démontrer que ses marques ont acquis une quelconque renommée au Canada à quelque moment que ce soit. Cet élément militait donc en faveur de Levi.
[20] En ce qui a trait à la « période pendant laquelle les marques de commerce (...) ont été en usage » (alinéa 6(5)b) de la Loi), la Commission a conclu qu'il s'agissait d'un facteur qui militait fortement en faveur de Levi.
[21] Pour ce qui est du « genre de marchandises » (alinéa 6(5)c) de la Loi), la COMC a conclu que les marchandises des parties sont les mêmes lorsqu'il s'agit de salopettes et de jeans et qu'elles sont étroitement liées en ce qui a trait aux autres articles vestimentaires inscrits dans leurs demandes d'enregistrement respectives. Ce facteur favorisait également Levi.
[22] Eu égard à « la nature du commerce » (alinéa 6(5)d) de la Loi), la Commission a conclu que les réseaux de distribution seraient « les mêmes ou se chevaucheraient » . Ce facteur favorisait aussi Levi.
[23] En ce qui a trait au « degré de ressemblance entre les marques de commerce (...) dans la présentation (...) ou dans les idées qu'[elles] suggèrent » (alinéa 6(5)e) de la Loi), la COMC l'a considéré comme l'un des facteurs les plus importants en raison des circonstances de l'espèce. La Commission a conclu que les marques de Vivat incorporent le dessin consistant en un double arc-double couture (le « concept essentiel » de la marque de Levi) mais que les marques de Vivat possèdent néanmoins des caractéristiques différentes de la marque de Levi. La Commission a fait référence à la décision Krazy Glue, Inc. c. Grupo Cyanomex, S.A. de C.V. (1992), 45 C.P.R. (3d) 161 (C.F. 1re inst.), dans laquelle la juge McGillis a énoncé le critère de la confusion qui consiste à se demander « si une personne moyenne, en fait de première impression et non d'examen rigoureux, ayant un souvenir imparfait des marques de commerce, se serait prise de confusion » .
[24] La COMC a manifesté son désaccord avec l'affirmation de Vivat suivant laquelle l'étendue de la protection dont la marque de Levi jouit devrait être restreinte au motif que le consommateur moyen est habitué de voir des dessins- marques de tiers sur le marché et est donc en mesure de les distinguer. La Commission a conclu que la preuve soumise par Vivat n'est pas suffisante pour étayer son affirmation et que la preuve établit que l'emploi, par des tiers, de marques consistant en double arc-double couture survient « à l'occasion » , mais que cet usage cesse en raison des efforts déployés par Levi pour protéger sa marque.
[25] Compte tenu de tous ces facteurs, la COMC a estimé que la prépondérance des probabilités était également répartie entre, d'une part, une conclusion voulant qu'il n'y ait pas de risque raisonnable de confusion entre les marques en litige et, d'autre part, une conclusion voulant qu'il y ait un risque raisonnable de confusion. Vivat ne s'étant pas acquittée de son fardeau, la question devait être tranchée contre elle. Par conséquent, la Commission a rejeté les demandes d'enregistrement visant les marques de Vivat.
LA NORME DE CONTRÔLE
[26] La norme de contrôle applicable à un appel interjeté en vertu de l'article 56 de la Loi a été déterminée et définie dans Molson Breweries c. John Labatt Ltd. (2000), 5 C.P.R. (4th) 180 (C.A.F.), autorisation de pourvoi rejetée, [2000] S.C.C.A. No. 161, et Christian Dior, S.A. c. Dion Neckwear Ltd. (2002), 20 C.P.R. (4th) 155 (C.A.F.). Les décisions de la Commission doivent être révisées selon la norme de contrôle de la décision raisonnable, ce qui signifie que la décision doit être manifestement erronée, à moins qu'une preuve additionnelle qui aurait pu influer sur la décision ne soit déposée en appel. En présence d'une preuve additionnelle de nature à influer sur les conclusions de fait ou de droit de la Commission, ou encore l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, la norme qui s'applique est celle de la décision correcte.
[27] Pour avoir une incidence sur la norme de contrôle, la nouvelle preuve doit être suffisamment importante. Lorsque la preuve additionnelle ne va pas au-delà de ce qui a déjà été établi devant la Commission et a peu de poids, mais ne consiste qu'à compléter ou tout simplement répéter des éléments déjà mis en preuve, alors l'application d'une norme comportant une moins grande déférence n'est pas justifiée. Le critère en est un de qualité et non de quantité : Garbo Group Inc. c. Harriet Brown & Co. (1999), 3 C.P.R. (4th) 224 (C.F. 1re inst.); Conseil canadien des ingénieurs professionnels c. APA - Engineered Wood Assn. (2000), 7 C.P.R. (4th) 239 (C.F. 1re inst.); Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc. (2004), 30 C.P.R. (4th) 456 (C.F.).
LA PREUVE ADDITIONNELLE
[28] Vivat et Levi ont toutes deux déposé une preuve additionnelle en vertu du paragraphe 56(5) de la Loi. L'affidavit souscrit par M. Stephen Bierbrier au bénéfice de Vivat portait sur la prise de photographies de plusieurs paires de jeans en vente à Ottawa, en 1994. Mme Elena Wegner a mené des enquêtes sur le marché et par Internet afin d'essayer et de trouver des jeans dont la poche arrière arborait des surpiqûres similaires à celle apparaissant sur les jeans Levi. Ses résultats ont été photographiés ou imprimés. Mme Ellen Anastacio a versé en preuve d'autres éléments relatifs à l'état du registre et M. James Anthony Gerety, directeur du groupe de gestion de deux des sociétés de Vivat, a attesté la coexistence des jeans Vivat et Levi dans des juridictions étrangères. Levi a déposé l'affidavit de M. Kevin Hampson attestant les mesures prises par Levi, et son succès, pour faire cesser l'emploi par des tiers des dessins mentionnés dans les affidavits de M. Bierbrier et de Mme Wegner.
[29] La position de Levi est que, sans égard à la quantité, la preuve additionnelle n'ajoute pas à la qualité de la preuve dont disposait la COMC. La preuve n'est que du [traduction] « pareil au même » et ne modifie pas [traduction] « la situation factuelle de façon fondamentale » . Rien dans la nouvelle preuve n'aurait influé sur la décision de la COMC, d'où la prétention de Levi selon laquelle la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable.
[30] Les observations écrites de Vivat ne vont pas aussi loin. Toutefois, à l'audience, Vivat n'a pas soutenu que la nouvelle preuve était telle qu'elle satisfaisait aux critères du poids important et de l'importance, ni n'a-t-elle avancé que la nouvelle preuve était plus qu'une simple répétition de la preuve existante, ou un complément de celle-ci. Selon moi, la nouvelle preuve de Vivat (décrite ci-dessous) n'est qu'une « simple répétition » de la preuve dont disposait la COMC « sans accroître la force probante de [celle-ci] » : Garbo Group Inc., précité.
[31] Des photographies de surpiqûres apparaissant sur la poche arrière de jeans en vente dans divers magasins du centre-ville de Toronto ont été jointes aux affidavits de M. Lam et de Mme MacLean lors de la procédure d'opposition. L'affidavit de Mme MacLean contenait aussi une preuve portant sur l'état du registre, tel qu'il apparaissait au moment où l'affidavit a été souscrit, en ce qui a trait aux demandes et aux enregistrements concernant des surpiqûres pour vêtements. La preuve contenue dans les affidavits additionnels de M. Bierbrier, de Mme Wegner et de Mme Anastacio est, à mon sens, du pareil au même en ce qu'il s'agit des renseignements dont disposait déjà la COMC. Le fait que les jeans photographiés par M. Bierbrier ont été mis en vente à Ottawa plutôt qu'à Toronto ne suffit pas, pas plus que la simple mise à jour effectuée par Mesdames Wegner et Anastacio des recherches de Mme MacLean. L'avocat de Vivat a demandé lors de l'audience, à juste titre selon moi, que les documents trouvés sur Internet soient écartés.
[32] En somme, la preuve contenue dans les « nouveaux » affidavits susmentionnés est d'une similarité frappante, du point de vue de la qualité, à celle dont disposait la CMOC. Ces affidavits n'apportent rien qui aurait pu influer sur la décision de la Commission.
[33] Je suis du même avis à l'égard de la preuve déposée par M. Gerety. Essentiellement, la preuve de celui-ci ne fait que réitérer la preuve contenue dans l'affidavit de M. Richards. Plus particulièrement, il répète qu'aucun incident de confusion réelle avec la marque de Levi n'a été rapporté par les détaillants et détenteurs de licence. La seule « nouvelle » information offerte par M. Gerety consiste en une mise à jour des oppositions déposées dans d'autres juridictions, ce qui a peu de force probante au regard du risque de confusion au Canada.
[34] Pour les motifs qui précèdent et au vu du retrait par Vivat de l'argument suivant lequel la COMC a eu tort d'appliquer la norme de preuve du « doute persistant » , la décision de la COMC sera révisée selon la norme de la décision raisonnable, qui consiste à savoir si la décision était manifestement erronée.
QUESTIONS EN LITIGE
[35] Tel que mentionné précédemment, Vivat allègue dans ses observations écrites une erreur commise par la COMC en ce qui a trait au fardeau de preuve. Compte tenu des propos énoncés dans Dion Neckware Ltd., précité, - portant que « [si] la preuve est telle qu'elle permet au tribunal de dire : "Nous estimons que cela est plus probable qu'improbable", le fardeau est déchargé, mais si les probabilités sont égales, le fardeau n'est pas déchargé » - Vivat, il faut le souligner, a retiré son argument relatif au fardeau.
[36] Vivat allègue une pléthore d'erreurs de la part de la COMC. À mon avis, les différentes questions soulevées par Vivat peuvent être abordées en se demandant si la COMC a commis une erreur :
(a) en utilisant un élément de présentation « conceptuelle » ;
(b) dans son évaluation de l'état du registre et du marché; ou
(c) en omettant de tenir compte de la preuve de coexistence.
Les arguments se rapportant à ces questions sont parfois interreliés.
L'ÉLÉMENT DE PRÉSENTATION « CONCEPTUELLE »
[37] Premièrement, Vivat soutient que la COMC n'a pas tenu compte des dessins de surpiqûres appartenant à des tiers ayant des éléments en commun avec la marque de Levi et qu'elle a plutôt choisi de ne tenir compte que des dessins de surpiqûres qui correspondaient au profil double arc-double couture. Si elle avait examiné comme il se doit tous les dessins de surpiqûres (dans le registre et sur le marché) partageant un élément commun, force aurait été de conclure que le consommateur moyen est habitué à être en présence des différentes surpiqûres utilisées par différents commerçants et qu'il serait peu probable qu'il les confonde. Ainsi, selon Vivat, l'étendue de la protection accordée à la marque de Levi aurait été réduite.
[38] Le principe général qui s'applique à l'évaluation de l'état du registre ou du marché en matière de confusion est énoncé dans Kellogg Salada Canada Inc. c. Maximum Nutrition Ltd. (1992), 43 C.P.R. (3d) 349 (C.A.F.), aux pages 358-359, où le juge Stone a fait sien ce passage tiré de Re Harrods Ltds. Appl'n (1934) 52 R.P.C. 65 :
[TRADUCTION] C'est maintenant un principe reconnu, dont il faut tenir compte pour déterminer la possibilité de confusion entre deux marques de commerce, que lorsque ces deux marques comportent un élément commun qui est également compris dans un certain nombre d'autres marques employées dans le même marché, cet emploi commun dans le marché incite les acheteurs à porter une plus grande attention aux autres traits des marques respectives et à les distinguer les unes des autres au moyen de ces autres traits.
[39] La première étape consiste à rechercher l'élément commun entre les deux marques. C'est à mon sens ce que la COMC a fait et il était raisonnable, et tout à fait correct, de la part de la Commission de conclure, en se fondant sur la preuve dont elle disposait, que la marque de Levi et les marques de Vivat ont un élément en commun - un arc double avec une double couture. Aussi était-il raisonnable pour la COMC, suivant le principe énoncé dans Kellogg Salada Canada, précité, de limiter sa prise en compte d'autres marques de commerce employées dans le même marché aux seuls jeans arborant un dessin double arc-double couture. L'argument de Vivat suivant lequel tous les jeans sur le marché arborant une surpiqûre décorative devraient être pris en considération a une portée trop large pour établir une comparaison valable.
[40] Ayant identifié les dessins des tiers arborant un élément double arc-double couture, la COMC a conclu en ces termes :
J'arrive à la conclusion que la preuve de la requérante n'est pas suffisante pour appuyer sa proposition voulant que les consommateurs sont habitués de voir des dessins-marques de tiers qui sont essentiellement les mêmes que la marque de l'opposante consistant en un DOUBLE ARC. La preuve établit plutôt que l'emploi, par des tiers, de marques consistant en double arc - double couture, qui ressemblent plus aux marques visées par la demande d'enregistrement qu'à la marque de l'opposante, survient à l'occasion, mais cet usage cesse à cause des efforts déployés par l'opposante pour protéger sa marque consistant en un DOUBLE ARC. Si la requérante avait été en mesure d'établir un usage étendu et à long terme des dessins-marques consistant en un double arc - double couture par de nombreux tiers, alors je conviens qu'une telle circonstance aurait pesé lourd en faveur de la requérante pour limiter l'étendue de la protection accordée à la marque de l'opposante.
[41] Les propos de la Commission portant que les marques ne sont pas « essentiellement les mêmes » que l'ARC DOUBLE sont, j'en conviens, problématiques. Le facteur dont on doit tenir compte, suivant le raisonnement de Kellogg Salada Canada, précité, consiste à savoir si des marques en usage appartenant à des tiers comportent l'élément qui est commun aux deux marques en cause, en l'occurrence, le double arc-double couture. Après avoir identifié les marques des tiers correspondant à ce profil, la Commission n'aurait pas dû pousser son analyse jusqu'à tenter de savoir si les marques ainsi identifiées ressemblaient davantage aux marques de Vivat qu'à l'ARC DOUBLE.
[42] Cela dit, les commentaires discutables ne portent pas à conséquence. L'élément déterminant de la conclusion n'est pas le fait que les marques des tiers ainsi relevées ressemblent davantage aux marques de Vivat, mais bien que l'emploi des marques des tiers « survient à l'occasion, mais cet usage cesse à cause des efforts déployés par [Levi] pour protéger sa marque consistant en un DOUBLE ARC » .
[43] La COMC a à juste titre tenu compte de l'étendue de l'emploi des marques des tiers comportant l'élément commun. La Cour d'appel fédérale, dans Kellogg Salada Canada, précité, à la p. 359, approuve cette façon de faire lorsqu'elle a fait siens les commentaires des rédacteurs de l'ouvrage Canadian Law of Trade Marks and Unfair Competition, 3rd ed. (Toronto : Carswell, 1972) :
[traduction] Il arrive rarement qu'on emploie uniquement les parties communes au commerce sans leur ajouter d'autres traits, qui peuvent être distinctifs. On prend habituellement une partie d'une marque de commerce, comme le préfixe ou le suffixe d'un mot, ou, dans d'autres cas, seulement l'un des mots d'une marque de commerce comportant plusieurs mots. Pour déterminer la possibilité de confusion entre deux marques de commerce données, c'est un principe reconnu que, lorsque ces deux marques comportent un élément commun qui est également compris dans un certain nombre d'autres marques employées dans le même marché, cet emploi commun dans le marché incite les acheteurs à porter une plus grande attention aux traits additionnels ou non communs des marques respectives et à les distinguer les unes des autres au moyen de ces autres traits. Ce principe exige toutefois que les marques qui comprennent les éléments communs fassent l'objet d'un emploi assez répandu dans le marché à l'intérieur duquel les marques examinées sont ou seront utilisées.
La question qui demeure consiste à savoir si la conclusion relative à l'étendue de l'emploi des marques pertinentes des tiers est raisonnable. Cette question sera approfondie dans les parties deux et trois des présents motifs.
[44] Vivat fait valoir ensuite que la Commission ne pouvait se fonder en droit sur la ressemblance des « concepts » sous-jacents des dessins en cause et qu'elle a eu tort de conclure que le « concept » sous-jacent était le même à la lumière de sa conclusion portant que les marques de Vivat se distinguaient suffisamment de la marque de Levi du point de vue de la présentation visuelle. Vivat soutient qu'incorporer un élément de « concept » à l'alinéa 6(5)e) de la Loi, qui traite du degré de ressemblance entre les marques de commerce, constitue une erreur en droit.
[45] La COMC fait mention du « concept » dans son analyse de la confusion sous le régime de l'alinéa 6(5)e) de la Loi dans les extraits suivants de ses motifs :
À mon avis, les facteurs les plus importants dans la présente affaire sont : (i) le degré de ressemblance entre les marques en litige; (ii) la question de savoir si des marques similaires au DOUBLE ARC de l'opposante sont communes sur le marché. En ce qui concerne (i), j'arrive à la conclusion que les marques visées par la demande d'enregistrement incorporent le concept essentiel de la marque de l'opposante, notamment le dessin consistant en double arc - double couture, mais que les marques visées par la demande d'enregistrement possèdent néanmoins des caractéristiques qui sont différentes de la marque de l'opposante. En d'autres termes, le dessin dans son ensemble est le même, mais il y a des différences dans la présentation du concept. [...]
En résumé, les différences visuelles entre les marques des parties jouent en faveur de la requérante. Toutefois, le fait que la marque de la requérante emploie les mêmes caractéristiques que la marque de l'opposante et que la marque de l'opposante était bien connue à toutes les époques pertinentes, cela joue contre la requérante. [Non souligné dans l'original.]
[46] Selon moi, l'argument de Vivat est mal fondé. Replacé dans son contexte, le terme « concept » désigne l'idée suggérée par les marques en question, un élément spécifiquement mentionné à l'alinéa 6(5)e). Il était loisible à la COMC de tenir compte à la fois de l'apparence des marques (en concluant que les marques de Vivat possèdent quelques caractéristiques différentes de la marque de Levi) et du concept ou de l'idée suggérée par les marques (en concluant que les marques partagent le même concept général - double arc-double couture. Il n'y a pas d'erreur ici.
[47] En résumé, les marques de Vivat et de Levi sont toutes deux employées à titre décoratif sur la poche arrière des salopettes, jeans et autres articles vestimentaires. La COMC était fondée de conclure qu'elles contiennent un élément commun - toutes deux font usage d'un double arc avec double couture. Je reconnais qu'il existe des différences visuelles entre les deux dessins, la plus notable étant que les marques de Vivat sont asymétriques tandis que celle de Levi est symétrique. D'autres différences visuelles sont décrites plus en détail dans le mémoire de Vivat mais, en dernière analyse, elles ne revêtent pas une importance telle qu'elles emportent interdiction à Vivat d'employer l'élément double arc-double couture. Autrement dit, la COMC a à juste titre souligné qu'il y a des différences visuelles (un facteur qui favorise Vivat), mais que le trait dominant des deux dessins est le double arc-double couture (un facteur qui pèse lourdement en faveur de Levi). Tel que mentionné précédemment, rien dans la preuve additionnelle n'aurait pu influer sur ces conclusions.
L'ÉTAT DU REGISTRE ET LE MARCHÉ
[48] Vivat soutient, tout d'abord, que la COMC a commis une erreur en définissant trop étroitement le marché. Elle se fonde sur l'argument suivant lequel la COMC n'a pas tenu compte des surpiqûres des tiers présentant des éléments en commun avec la marque de Levi. Mon analyse en ce qui a trait à cet argument s'inscrit dans le raisonnement applicable à la première question et je n'ai pas l'intention d'y revenir. Qu'il suffise de dire que, si l'on se fie à la preuve dont disposait la COMC et à la preuve additionnelle versée en appel, il n'existe que très peu de surpiqûres appartenant à des tiers sur le marché ou inscrits au registre qui présentent un double arc-double couture.
[49] Le deuxième argument est que la COMC n'a pas considéré la preuve suivant laquelle Levi elle-même estime que les dessins de surpiqûres des tiers, qui ne sont pas « essentiellement les mêmes » que la marque de Levi, contreviennent aux droits découlant de l'enregistrement de son dessin. À cet égard, Vivat fait mention de certaines déclarations déposées par Levi contre des tierces parties. Vivat n'offre aucune explication en ce qui a trait à la pertinence de ces déclarations, outre les efforts de Levi pour protéger sa marque, par rapport à la question dont la COMC est saisie. L'argument n'a pas été suffisamment développé pour me permettre de conclure que la Commission a agi de manière déraisonnable ou inappropriée en omettant de tenir compte des déclarations.
[50] Vivat soutient également que la COMC a eu tort de refuser de tirer une inférence défavorable en ce qui a trait à l'étendue de l'emploi des dessins de surpiqûres des tiers, vu le refus de Mme Baker et de M. Yaneff de répondre aux questions ou de produire les documents pertinents en contre-interrogatoire sur la nature et l'emploi de telles marques par des tiers, compte tenu de sa remarque portant que la demande de Vivat était « fondé[e] » . Vivat souligne qu'il n'existe aucun mécanisme, dans la procédure devant la COMC, obligeant les affiants à répondre aux questions. Le seul recours qui s'offre à une partie en de telles circonstances est de demander à la COMC de ne pas tenir compte de la preuve, d'y accorder peu d'importance ou de tirer une inférence défavorable.
[51] Il a été mentionné que l'erreur (le défaut de tirer une inférence défavorable) a été aggravée par le poids déterminant que la COMC a accordé à la déclaration de Mme Baker portant que « l'emploi des marques ou des dessins [par des tiers] est à petite échelle et de courte durée » . Vivat soutient que la COMC a eu tort d'affirmer que ce témoignage n'avait pas été « contredit [ni] contesté » par la requérante au motif que Mme Baker avait refusé de répondre aux questions de Vivat quant à l'étendue et à la durée de l'emploi par des tiers des dessins de surpiqûres.
[52] En ce qui concerne M. Yaneff, la Commission a délibérément évité de se fier entièrement à son témoignage, jugeant qu'il n'y avait aucun fondement crédible lui permettant de conclure que les réponses aux questions susmentionnées avaient une quelconque valeur probante. Selon moi, cette conclusion n'est pas manifestement erronée. Il est fort douteux que le témoignage de M. Yaneff ait pu être d'une quelconque utilité à Vivat.
[53] En ce qui a trait aux réserves de Vivat relativement à Mme Baker, la COMC a conclu que l'emploi par des tiers du double arc-double couture était peu répandu sur le marché et ne survenait qu'à l'occasion, suivant les facteurs qui suivent :
- la conclusion que M. Lam n'a pu indiquer depuis quand les jeans susmentionnés sont vendus au Canada, ni le volume des ventes s'y rapportant;
- le témoignage de Mme MacLean qui décrit les mesures prises par Levi à l'égard des différentes marques-dessins des tiers et les résultats en découlant;
- la preuve de Mme Baker portant que Levi intente toujours des actions pour empêcher l'emploi sur le marché des dessins consistant en double arc-double couture en tant que marques de commerce sur les jeans, et qu'habituellement cela donne lieu à l'arrêt par le défendeur de l'emploi du dessin en litige;
- la décision de Vivat de ne pas interroger Mme Baker sur l'affirmation contenue dans son affidavit, soit que « l'emploi des marques ou des dessins [par des tiers] est à petite échelle et de courte durée » , ce qui rend ce témoignage « non contredit et non contesté » .
[54] Je partage l'opinion de Vivat suivant laquelle le dernier facteur n'est pas un reflet exact de la situation. Un examen de la transcription du contre-interrogatoire de Mme Baker démontre, sans équivoque, que l'avocat de Vivat lui a posé des questions sur l'étendue et la durée de l'emploi sur le marché des dessins de surpiqûres appartenant à des tiers et mentionnés à l'affidavit de Mme Baker. Celle-ci a refusé d'y répondre ou les a prises en délibéré. Les renseignements fournis par Levi à la suite du contre-interrogatoire ont apporté des précisions, particulièrement en ce qui a trait aux dates auxquelles Levi a acheté les vêtements ainsi qu'aux copies des ententes de règlement exigées par Vivat, et l'information s'y rapportant, sauf celles que Levi n'avait pas le droit de déposer en raison des clauses de confidentialité qu'elles contenaient. Il est toutefois incontestable que les réponses aux questions portant sur l'étendue et la durée de l'emploi par des tiers n'ont pas été faciles à obtenir indépendamment du fait que Mme Baker aurait pu ne pas savoir quoi répondre. L'extrait qui suit révèle l'importance que la COMC a accordée à la déclaration de Mme Baker :
L'argument de la requérante voulant que les documents demandés auraient pu éclaircir la question de la mesure de l'emploi des marques de tiers consistant en couture est fondé. Toutefois, Mme Baker a affirmé dans son affidavit que « l'emploi des marques ou des dessins [par des tiers] est à petite échelle et de courte durée. . . » . L'avocat de la requérante a choisi de ne pas questionner Mme Baker sur ces aspects qui semblent dans les limites de ses connaissances. Par conséquent, d'une part, la présente Commission dispose du témoignage non contredit et non contesté de Mme Baker concernant l'étendue de l'emploi des marques de tiers, et, d'autre part, il y a l'argument de la requérante au sujet de la possibilité de trouver des renseignements qui aideraient la requérante. Si la requérante avait interrogé Mme Baker sur son témoignage et que des doutes avaient été soulevés quant à la fiabilité ou à l'exactitude de son témoignage, alors j'aurais probablement accédé à la demande de l'opposante de tirer des conclusions négatives. Toutefois, dans l'espèce, étant donné qu'on n'a pas tenté de contre-interroger Mme Baker sur son témoignage, j'estime que la requérante n'a pas établi complètement le fondement permettant de tirer des conclusions négatives.
[55] La question de savoir si Mme Baker disposait de quelque renseignement que ce soit sur l'étendue et la durée de l'emploi des dessins mentionnés dans son affidavit a été prise en délibéré et les réponses ont été fournies par la suite en ces termes :
[traduction] Fournir l'information portant sur l'étendue et la durée de l'emploi de dessins appartenant à des tiers dont il est fait mention au paragraphe 8 de l'affidavit de Mme Baker.
- R: L'étendue et la durée de l'emploi par des tiers dont il est question sont énoncées au paragraphe 8 de l'affidavit de Mme Baker.
Indiquer le fondement de l'affirmation contenue au paragraphe 8 de l'affidavit de Mme Baker.
- R: Refusée.
[56] Le refus ou l'incapacité de répondre à la question et à celles qui s'y rapportent suffit à mon avis à soulever un doute sur la fiabilité et l'exactitude de l'affirmation de Mme Baker portant sur la durée et l'étendue de l'emploi des surpiqûres des tiers par rapport à l'emploi de la marque de Levi. Par conséquent, l'affirmation en elle-même n'aurait dû se voir accorder que peu d'importance pour déterminer l'étendue et la durée de l'emploi de dessins appartenant à des tiers.
[57] Toutefois, il ne s'ensuit pas pour autant qu'une inférence défavorable doive être tirée en ce qui a trait à l'étendue et à l'emploi des surpiqûres des tiers révélées dans l'affidavit de Mme Baker. Le suivi sur les questions en suspens et les engagements pris lors du contre-interrogatoire a fait la lumière sur certaines questions spécifiquement liées à l'étendue et à la durée de l'emploi des dessins de certains tiers. Chaque fois, Levi a répondu qu'il était impossible de préciser les dates auxquelles il y a eu vente continue d'articles vestimentaires arborant un dessin particulier, mais elle a fourni les dates auxquelles Levi avait acheté les vêtements portant lesdits dessins. Levi a été directe quant à l'information dont elle disposait et quant à sa capacité de fournir des précisions sur la durée et l'étendue, sur le marché, de l'emploi de dessins appartenant à des tiers.
[58] Dans Milliken & Co. c. Interface Flooring Systems, [1998] 3 C.F. 103 (F.C. 1re inst.), la juge Tremblay-Lamer, à la page 115, a fait sien le passage suivant de Wigmore on Evidence :
[traduction] L'omission de présenter au tribunal une circonstance, un document, ou un témoin, alors que la partie elle-même ou son adversaire allègue que les faits seraient ainsi élucidés, sert à montrer, ce qui est la déduction la plus naturelle, que la partie craint de le faire, et cette crainte prouve d'une certaine façon que la circonstance, le document ou le témoin, s'ils avaient été présentés, auraient exposé des faits défavorables à la partie. Ces déductions ne peuvent être à juste titre faites qu'à certaines conditions; de plus, elles peuvent toujours s'expliquer par des circonstances qui rendent plus naturelle une hypothèse autre que le fait que la partie craignait la divulgation. Cependant, le bien-fondé de pareille déduction en général n'est pas remis en question.
[59] Dans les circonstances de l'espèce, on ne peut dire que le défaut de Levi de répondre précisément aux questions découlait de sa crainte de voir révélées des informations qui lui étaient défavorables. Dans ses observations, Vivat soutient que la marque de Levi a été employée, inchangée, pendant au moins 54 ans. Vivat ne remet pas en question le témoignage de Mme Baker portant que Levi protège diligemment sa marque et veille au respect des droits qui s'y rattachent. Levi a révélé les dates auxquelles elle a acheté des vêtements arborant les marques qu'elle estime violer ses droits. L'information portant sur le cadre temporel spécifique, l'étendue et la durée de l'emploi du dessin d'un tiers sur le marché relèverait de la connaissance exclusive du tiers.
[60] De même, on ne peut dire que le défaut de produire des copies des ententes de règlement confidentielles découlait de la crainte que leur contenu ne révèle des informations sur l'étendue et la durée de l'emploi du dessin du tiers sur le marché. J'en suis d'autant plus convaincue que Vivat a eu l'occasion en l'espèce de demander la communication des documents et des renseignements qui ne pouvaient être fournis dans le cadre de la procédure d'opposition, ce qu'elle a choisi de ne pas faire.
[61] Dans ce contexte, même si la COMC a manifestement eu tort de conclure que Mme Baker n'avait pas été interrogée sur sa déposition, il ne s'agissait toutefois pas d'une situation justifiant à mon avis de tirer une inférence défavorable.
[62] En résumé, la preuve portant sur l'état du registre et le marché est constituée d'un petit nombre de surpiqûres appartenant à des tiers, inscrites au registre (ou se trouvant sur le marché) et correspondant au profil double arc-double couture. Rien ne nous donne une indication claire de l'étendue et de la durée de leur emploi sur le marché. Au mieux, nous savons qu'à plusieurs reprises Levi a pu, tout comme Vivat, acheter des vêtements qui portaient certains de ces dessins, mais dont l'emploi a pu être interrompu en raison des mesures prises par Levi pour protéger sa marque de commerce. Il ressort de la preuve que certaines marques de jeans, identifiées sur le marché par Vivat alors qu'elle effectuait ses achats, étaient l'objet même des ententes de règlement (découlant des actions intentées par Levi) intervenues après la date des achats. Dans d'autres cas, nous ne savons rien sur l'étendue et la durée de l'emploi. Vivat n'a tout simplement pas démontré, sur le fondement de la preuve, que les dessins des tiers comportant l'élément commun - double arc-double couture - sont passablement répandus sur le marché.
PREUVE DE COEXISTENCE
[63] Vivat soutient que la COMC a commis une erreur en omettant de prendre en considération l'état des demandes et des enregistrements des marques de Vivat provenant de l'étranger. Elle allègue que la Commission a eu tort de ne pas tenir compte de la preuve démontrant la coexistence, au Canada et dans d'autres pays, de vêtements portant les marques de Vivat et de Levi sans qu'aucun incident de confusion chez les détaillants ou les consommateurs n'ait été rapporté. La preuve attestant la coexistence sans confusion, la COMC aurait dû considérer l'absence de preuve de confusion dans les juridictions étrangères où il y a usage contemporain des marques en question.
[64] Finalement, Vivat soutient que la preuve devrait être considérée du point de vue du consommateur moyen, soit une personne d'intelligence moyenne qui n'est pas pressée ni méfiante. Selon Vivat, le consommateur moyen est sensibilisé à la notoriété de la marque lorsqu'il achète des articles de mode. Ce consommateur accorde de l'importance aux marques achetées, manipule, examine attentivement et essaie les vêtements afin de s'assurer qu'ils sont de la bonne taille avant de les acheter. Les consommateurs, affirme Vivat, ont été mis en présence du dessin de Levi (son seul dessin) depuis plus de 50 ans. Il est donc improbable que les vêtements portant les marques de Vivat soient achetés suivant la croyance erronée qu'il s'agit d'un produit Levi (en raison des différences visuelles entre les marques).
[65] On peut trancher sommairement la question des demandes et des enregistrements à l'étranger. L'absence de preuve quant au droit étranger n'est pas contestée. Ni M. Richards ni M. Gerety n'ont déclaré être au courant de ces questions. Dans Re Haw Par Brothers International Ltd. c. Registraire des marques de commerce (1979), 48 C.P.R. (2d) 65 (C.F. 1re inst.), le juge Marceau a établi qu'il y a peu à tirer du fait que les marques de commerce en question coexistent dans d'autres juridictions, puisque la décision du registraire doit se fonder sur les normes canadiennes et eu égard à la situation au Canada. De même, dans Sun-Maid Growers of California c. Williams & Humbert Ltd (1981), 54 C.P.R. (2d) 41 (C.F. 1re inst.), le juge en chef adjoint Thurlow a émis l'opinion que les enregistrements dans d'autres juridictions ne sont pas pertinents étant donné qu'ils se fondent entièrement sur le droit et la procédure étrangère. Je suis plutôt d'accord avec Levi en ce que la preuve de la simple coexistence des marques dans les registres étrangers n'est pas pertinente et que la preuve d'une opposition étrangère sur la base de documents dont la preuve n'a pas été faite en droit étranger n'a aucune valeur probante. De plus, Vivat n'a pas obtenu gain de cause à l'égard de toutes ses demandes.
[66] En ce qui a trait à la coexistence, l'avocat de Vivat, tout en soutenant que la coexistence est très répandue dans l'emploi de la marque sur le plan international, a reconnu à l'audience que la preuve est plus modeste au Canada. En ce qui a trait au Canada, Vivat s'est fondée sur la preuve soumise par M. Richards dont la COMC a dit qu'il « n'a pas fourni de preuve contenant des données quantitatives quant à l'emploi des marques visées par la demande d'enregistrement au Canada ou ailleurs » . La COMC a également conclu que son témoignage manquait de précision et était constitué de ouï-dire inadmissible.
[67] Selon moi, la conclusion de la Commission n'était pas déraisonnable et était en fait bien fondée. La prétendue vente de plus de 40 000 articles par l'intermédiaire d'un licencié, entre novembre 1994 et décembre 1997, n'était rien de plus qu'une affirmation générale. La preuve portant sur les circonstances entourant la prétendue vente de vêtements portant les marques visées par la demande d'enregistrement au Canada était totalement déficiente.
[68] Pour fin d'exhaustivité, je remarque que la preuve de M. Gerety, déposée en appel, n'est d'aucune aide pour Vivat. La prétendue vente de 125 000 articles vestimentaires découle de ventes ponctuelles réalisées par l'intermédiaire d'un licencié étranger à des sociétés commerciales situées au Canada. M. Gerety n'a pu donner aucune précision sur des ventes réalisées au Canada et n'était nullement au courant de l'endroit ni de la façon dont les vêtements ont été vendus. Au mieux, son témoignage consistait en du ouï-dire portant que ces marchandises ont été déplacées vers les acheteurs pour vente au Canada.
[69] Le dilemme auquel Vivat est confrontée ne peut se résoudre par la notion de coexistence internationale, dont la pertinence (suivant les sources mentionnées) est des plus douteuses. En ce qui a trait à la preuve de M. Richards sur l'absence de confusion, elle est constituée d'un double ouï-dire résultant de la compilation par un employé de Vivat de réponses provenant de licenciés de Vivat dans le cadre de la demande d'enregistrement de Vivat au Canada. M. Richards n'a rien révélé à propos des politiques et procédures qui auraient pu avoir été mises sur pied par les licenciés de Vivat pour détecter et rapporter les cas de confusion. Il n'y a pas la moindre indication qu'un seul des licenciés ait été en contact avec les consommateurs. La COMC était tout à fait fondée à conclure comme elle l'a fait, et ce faisant, elle a rendu une décision correcte.
[70] Le témoignage de M. Gerety ne jette aucun nouvel éclairage sur la question de la confusion. Il s'est joint à Vivat vers la fin de l'année 2003 et sa connaissance personnelle de la situation antérieure de Vivat est manifestement limitée. La preuve qu'il a apportée quant à la confusion est de la même nature que celle de M. Richards. Bien qu'il ait apporté quelques éléments d'information additionnels en ce qui a trait aux ventes, il n'a pu, lors du contre-interrogatoire, répondre aux questions relatives au marketing. Il avait des chiffres à sa disposition, mais à peu près rien d'autre. Sa déposition n'aurait pu influer sur les conclusions de la Commission.
[71] La question suivante consiste à savoir si la COMC aurait dû tenir compte de l'absence de preuve quant à l'existence d'une véritable confusion, Vivat ayant attesté une coexistence sans confusion. Cet argument repose sur les commentaires de la Cour d'appel fédérale dans Dion Neckwear, précité, au par. 19 :
En ce qui concerne l'insuffisance des éléments de preuve présentés par l'opposante au sujet de cas concrets de confusion, le registraire s'est dit d'avis qu'un opposant n'a pas à produire ce genre de preuve. C'est vrai en théorie, mais lorsque le requérant a présenté certains éléments de preuve qui pourraient permettre de conclure à l'absence de risque de confusion, l'opposant court un grand danger si, se fiant à la charge de la preuve imposée au requérant, il présume qu'il n'a pas à produire de preuves au sujet de la confusion. Bien que la question à laquelle il faut répondre soit celle de savoir s'il existe un « risque de confusion » et non une « confusion effective » ou « des cas concrets de confusion » , l'absence de « confusion effective » est un facteur auquel les tribunaux accordent de l'importance lorsqu'ils se prononcent sur le « risque de confusion » . Une inférence négative peut être tirée lorsque la preuve démontre que l'utilisation simultanée des deux marques est significative et que l'opposant n'a soumis aucun élément de preuve tendant à démontrer l'existence d'une confusion. (Voir l'arrêt Pink Panther, précité, au paragraphe 10, au par. 36, et les jugements Multiplicant Inc. c. Petit Bateau Valton S.A., (1994), 55 C.P.R. (3d) 372 (C.F. 1re inst.),Bally Schuhfabriken AG/Bally's Shoe Factories Ltd. c. Big Blue Jeans Ltd., (1992), 41 C.P.R. (3d) 205 (C.F. 1re inst.), Monsport Inc. c. Vêtements de Sport Bonnie (1978) Ltée, (1988), 22 C.P.R. (3d) 356 (C.F. 1re inst.).) L'intimée a expliquéson défaut de soumettre des éléments de preuve au sujet de cas concrets de confusion par le fait que, comme elle est une personne étrangère, il est [TRADUCTION] « difficile, voire impossible » pour elle de citer les propos de consommateurs canadiens. Cette explication ne tient pas.
[72] Pour les présentes fins, les phrases pertinentes dans le paragraphe cité sont :
« éléments de preuve qui pourraient permettre de conclure à l'absence de risque de confusion » et « lorsque la preuve démontre que l'utilisation simultanée des deux marques est significative » . À mon avis, nous ne sommes ici en présence d'aucune des deux situations. Même si j'avais décidé autrement et conclu à « l'absence de risque de confusion » (et je ne conclus rien de tel), il est bien établi que la marque de Levi est largement employée au Canada depuis longtemps. La preuve de Vivat quant à l'étendue de l'emploi de ses marques au Canada est à toute fin pratique inexistante. Il ressort tout au plus de cette preuve que 165 000 articles vestimentaires ont été mis en vente au Canada depuis le lancement des produits Vivat en 1994. En l'absence d'explication à cet effet et d'information portant sur la distribution desdits vêtements, je ne peux conclure, non plus que la Commission, que l'utilisation simultanée des marques au Canada a été significative. Donc, selon moi, aucune inférence défavorable ne saurait être tirée du défaut de Levi de soumettre une preuve attestant une véritable confusion. Pour les motifs mentionnés précédemment, le résultat est le même en ce qui concerne les juridictions étrangères.
[73] Vivat nous exhorte en dernier lieu à considérer la question du point de vue du consommateur moyen. Le critère de la « confusion » a été analysé précédemment et il n'y a pas lieu de le répéter. J'accepte et fais mien l'argument de Levi suivant lequel la « première impression » d'un consommateur ne peut aller jusqu'à inclure l'impression qui subsiste une fois que le vêtement a été manipulé, minutieusement examiné et fait l'objet d'un essayage pour la grandeur et l'apparence. La première impression peut changer, mais c'est la première impression qui compte : Miss Universe, Inc. c. Bohna (1994), 58 C.P.R. (3d) 381 (C.A.F.), à la p. 397.
CONCLUSION
[74] Cela dispose des nombreuses allégations d'erreurs. Vivat ne conteste pas les conclusions suivantes de la COMC : la mesure dans laquelle les marques des parties sont devenues connues est favorable à Levi; la durée pendant laquelle les marques des parties ont été en usage favorise fortement Levi; le genre de marchandises favorise clairement Levi étant donné que les marchandises des parties sont identiques pour ce qui est des salopettes et des jeans et sont étroitement liées en ce qui a trait aux autres articles vestimentaires énumérés dans les demandes; les canaux de distribution seraient les mêmes ou se chevaucheraient sur la base de l'inférence, en l'absence de preuve contraire, suivant laquelle lorsque les marchandises des parties sont à peu près identiques, la nature du commerce sera elle aussi vraisemblablement la même et les marchandises seront vraisemblablement exposées côte à côte dans le même point de vente au détail. Bien que j'aie conclu que la COMC a commis deux erreurs, la décision de la Commission ne devrait pas être scrutée à la loupe. Elle doit plutôt être lue comme un tout.
[75] La COMC a bien identifié le critère à appliquer pour savoir s'il existait un risque raisonnable de confusion entre les marques en cause. En dernière analyse, la Commission a conclu que le risque était réparti de part et d'autre et, de ce fait, rejeté les demandes de Vivat. En raison du nombre de facteurs militant en faveur de Levi, je n'aurais pas été portée à conclure que la prépondérance des probabilités était répartie également (entre la probabilité raisonnable de confusion et l'absence d'une telle probabilité). Toutefois, en l'absence de preuve additionnelle qui aurait influé sur la décision, il ne m'appartient pas de substituer mon opinion (à celle de la COMC) en ce qui a trait à l'importance à accorder aux nombreux faits puisqu'ils n'ont pas à être interprétés comme ayant le même poids : Miss Universe, Inc., précité. Si l'on interprète correctement la décision, il ne fait aucun doute qu'elle est raisonnable et qu'elle est essentiellement correcte.
[76] Pour les motifs qui précèdent, les appels seront rejetés. Il y aura deux ordonnances mais les motifs seront identiques pour les deux dossiers. Une copie certifiée conforme des présents motifs sera versée au dossier ne comportant pas les motifs originaux. Levi obtiendra les dépens de l'appel. Si les parties ne peuvent s'entendre sur les dépens, chacune d'elles peut soumettre des observations écrites d'au plus trois pages à ce sujet, à double interligne, le ou avant le 31 mai 2005.
Carolyn A. Layden-Stevenson
Juge
Ottawa (Ontario)
Le 19 mai 2005
Traduction certifiée conforme
Thanh-Tram Dang, B.C.L., LL.B.
COUR FÉDÉRALE
Avocats inscrits au dossier
DOSSIER : T-2456-03 et T-2457-03
INTITULÉ : VIVAT HOLDINGS LIMITED
demanderesse
et
LEVI STRAUSS & CO.
défenderesse
DATE DE L'AUDIENCE : LE 26 AVRIL 2005
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : LA JUGE LAYDEN-STEVENSON
DATE DES MOTIFS : LE 19 MAI 2005
COMPARUTIONS :
Arthur Renaud POUR LA DEMANDERESSE
Brian Isaac
Lynn Ing POUR LA DÉFENDERESSE
Page : 2
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Sim, Hughes, Ashton, MacKay LLP
Toronto (Ontario) POUR LA DEMANDERESSE
Smart & Biggar
Toronto (Ontario) POUR LA DÉFENDERESSE
ANNEXE A
aux motifs de l'ordonnance du 19 mai 2005
dans
VIVAT HOLDINGS LIMITED
et
LEVI STRAUSS & CO.
T-2456-03 et T-2457-03
DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES
Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13
6. (1) Pour l'application de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l'emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionnés cause de la confusion avec la marque de commerce ou le nom commercial en dernier lieu mentionnés, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article. (2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. [...](5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris_: a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus; b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage; c) le genre de marchandises, services ou entreprises; d) la nature du commerce; e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.
12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants_: [...] d) elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;
16. (3) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce projetée et enregistrable, a droit, sous réserve des articles 38 et 40, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard des marchandises ou services spécifiés dans la demande, à moins que, à la date de production de la demande, elle n'ait créé de la confusion_: a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne; b) soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement a été antérieurement produite au Canada par une autre personne;
56. (1) Appel de toute décision rendue par le registraire, sous le régime de la présente loi, peut être interjeté à la Cour fédérale dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l'avis de la décision ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l'expiration des deux mois. [...] (5) Lors de l'appel, il peut être apporté une preuve en plus de celle qui a été fournie devant le registraire, et le tribunal peut exercer toute discrétion dont le registraire est investi. |
|
Trade-Marks Act, R.S.C., 1985, c. T-13
6. (1) For the purposes of this Act, a trade-mark or trade-name is confusing with another trade-mark or trade-name if the use of the first mentioned trade-mark or trade-name would cause confusion with the last mentioned trade-mark or trade-name in the manner and circumstances described in this section.
(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class. [...]
(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including (a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;
(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use; (c) the nature of the wares, services or business; (d) the nature of the trade; and (e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.
12. (1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not [...] (d) confusing with a registered trade-mark;
16. (3) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a proposed trade-mark that is registrable is entitled, subject to sections 38 and 40, to secure its registration in respect of the wares or services specified in the application, unless at the date of filing of the application it was confusing with
(a) a trade-mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person; (b) a trade-mark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or
56. (1) An appeal lies to the Federal Court from any decision of the Registrar under this Act within two months from the date on which notice of the decision was dispatched by the Registrar or within such further time as the Court may allow, either before or after the expiration of the two months.
[...] (5) On an appeal under subsection (1), evidence in addition to that adduced before the Registrar may be adduced and the Federal Court may exercise any discretion vested in the Registrar. |
|
|
|