Date : 20040924
Dossier : T-489-04/
T-539-04
Référence : 2004 CF 1313
T-489-04
ENTRE :
NIPISIHKOPAHK EDUCATION AUTHORITY
de la NATION CRIE DE SAMSON
demanderesse
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA, DON ADAMSON,
SANDI BASSET, DENNIS CHERNICK, MAXIME CLAYBOURNE,
SHIRLEY DEEN et ROBERT A. SHARMA
défendeurs
et
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
intervenante
ET ENTRE :
T-539-04
LA TRIBU ERMINESKIN, faisant affaire sous la raison sociale ERMINESKIN TRIBAL
ENTERPRISES et LA BANDE ERMINESKIN
demanderesses
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA et
TAMMY FOUREYES
défendeurs
- et -
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
intervenante
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
(Jugement rendu à l'audience à Calgary (Alberta), le 24 septembre 2004.)
LE JUGE HUGESSEN :
[1] Dans ces deux dossiers de la Cour, chacune des bandes indiennes demanderesses demande le contrôle judiciaire d'une décision de la Commission de déférer des plaintes déposées auprès du Tribunal canadien des droits de la personne par huit personnes alléguant discrimination aux termes de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
[2] Les présents motifs traitent de ces deux demandes et seront déposés dans les deux dossiers. Il est admis que les deux demanderesses soulèvent une question sérieuse dans leurs demandes de contrôle judiciaire. En bref, cette question consiste à savoir si, en vertu de l'article 67 de la Loi canadienne sur les droits de la personne ou en vertu de l'exécution d'un traité et de la constitutionnalisation de droits issus de traités aux termes de l'article 35 de la Loi constitutionnelle, les demanderesses ne sont pas assujetties aux dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne.
[3] Cela dit, et le problème de la question sérieuse ayant été réglé en faveur des demanderesses, je dois examiner les deux autres parties du critère à trois volets qui s'applique lorsque qu'une cour de justice doit examiner si oui ou non elle doit accorder un sursis.
[4] Premièrement, en ce qui concerne le préjudice irréparable, les demanderesses ont le fardeau de la preuve et il n'y a aucun élément de preuve dans les présents dossiers que les demanderesses ont subi ou subiront un quelconque préjudice résultant des instances introduites devant la Commission ou le Tribunal. Plus particulièrement, les demanderesses n'ont pas, jusqu'à maintenant, reçu l'ordre de faire quoique ce soit, encore moins quelque chose qu'elles ne veulent pas faire et elles n'ont pas reçu l'ordre de ne pas faire ou n'ont pas été empêchées de faire quoique ce soit qu'elles croient avoir le droit de faire.
[5] Elles prétendent qu'elles ne sont pas soumises à la Loi canadienne sur les droits de la personne, ni au Tribunal. La question n'a cependant pas été tranchée dans un sens ou dans l'autre. Les demanderesses se sont simplement vu donner l'occasion de se défendre et de faire valoir leur position constitutionnelle devant le Tribunal, lequel est l'organisme compétent pour trancher la question.
[6] Il ne s'agit là aucunement d'un préjudice. Si le Tribunal est d'accord avec les demanderesses, l'affaire se terminera là. Même si le Tribunal n'est pas d'accord et rend une décision qui leur est défavorable, elles n'auront encore subi aucun tort tant et aussi longtemps que le Tribunal, après un examen exhaustif, n'aura pas délivrer une ordonnance contre les demanderesses. Selon moi, il y aura assez de temps pour décider si la position constitutionnelle et l'argument des demanderesses justifient que l'on cherche à obtenir le sursis de l'ordonnance définitive du Tribunal.
[7] Pour ce qui est de la dernière question, à savoir la prépondérance des inconvénients, je n'accepte pas que le fait que les deux bandes comptent environ 10 000 membres alors que les plaignants ne sont qu'au nombre de huit ait une quelconque importance.
[8] En fait, comme je l'ai affirmé, les demanderesses, jusqu'à présent, ont subi et ne subiront pas plus d'inconvénient que l'inconvénient relativement mineur d'avoir l'occasion de plaider leur cause devant un organisme compétent. J'ajouterais incidemment que, selon la preuve, c'est là quelque chose qu'elles font déjà depuis au moins cinq ans avec le résultat que les instances dans les plaintes en matière de droits de la personne ont été suspendues.
[9] D'autre part, les plaignantes ont déjà été obligées de voir leurs plaintes retardées pour cette même période de cinq ans et le temps s'écoule. Toute enquête de la part du Tribunal deviendra moins efficace car le temps entre les événements faisant l'objet des plaintes et la suspension de l'enquête s'allonge. Il s'agit d'une vérité absolue. Justice différée est justice refusée. Les plaignantes ont subi un grave inconvénient du fait que leur audience a été retardée presque indéfiniment.
[10] Il y a également, et cela est un aspect de ce que j'ai déjà affirmé, un intérêt public important à servir et à protéger en faisant en sorte que les plaintes devant le Tribunal soient traitées rapidement.
[11] Cet intérêt, comme je l'ai déjà mentionné, n'a certainement pas été respecté en l'espèce.
[12] Je conclus que les demanderesses ont échoué quant au deuxième et quant au troisième volet du critère et que les requêtes visant à obtenir un sursis dans chaque dossier doivent être rejetées.
[13] Quant à la question des dépens, je ne crois pas qu'il convienne d'ordonner en l'espèce l'adjudication de dépens en faveur du Tribunal ou de la Commission mais je crois que les plaignants individuels qui ont demandé et ont obtenu le statut de partie en cette Cour parce que les demanderesses ne les avaient pas constituées comme partie dans leurs demandes initiales et qui ont apporté ce que je qualifierais de contribution utile au débat en cette Cour devraient se voir accorder une ordonnance à l'égard des dépens. J'ordonnerai que dans le dossier NEA, la demanderesse verse collectivement au plaignants individuels/défendeurs la somme de 3 000,00 $ payable immédiatement sans égard à l'issue de la cause.
« James K. Hugessen »
Juge
Traduction certifiée conforme
Claude Leclerc, LL.B., trad. a.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-489-04, T-539-04
INTITULÉ : T-489-04
NIPISIHKOPAHK EDUCATION AUTHORITY DE LA NATION CRIE DE SAMSON
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET AUTRES
et
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
T-539-04
LA TRIBU ERMINESKIN ET AUTRES
et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA ET TAMMY FOUREYES
et
LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE
LIEU DE L'AUDIENCE : CALGARY (ALBERTA)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 24 SEPTEMBRE 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE HUGESSESEN
DATE DES MOTIFS : LE 24 SEPTEMBRE 2004
COMPARUTIONS :
Priscilla Kennedy POUR LA DEMANDERESSE
Tanya Knobloch POUR LE DÉFENDEUR (PGC)
Katrina Haymond POUR LES AUTRES DÉFENDEURS
Ritu Khullar POUR L'INTERVENANTE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Parlee McLaws LLP POUR LA DEMANDERESSE
Edmonton (Alberta)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Field LLP POUR LES AUTRES DÉFENDEURS
Edmonton (Alberta)
Chivers Carpenter POUR L'INTERVENANTE
Edmonton (Alberta)