Date : 20041001
Dossier : IMM-8034-03
Référence : 2004 CF 1319
ENTRE :
NAZIR AKHTAR
domicilié au 7445, De L'Epee, app. 310
Montréal (Québec) H3N 2E4
demandeur
et
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
200, boulevard René-Lévesque Ouest, 5e étage, Tour Est,
Montréal (Québec) H2Z 1X4
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] La présente demande de contrôle judiciaire vise la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a tranché, en date du 27 août 2003, que le demandeur n'était ni un réfugié au sens de la Convention ni une « personne à protéger » , selon les définitions données aux articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] Nazir Akhtar (le demandeur) est un citoyen du Pakistan qui prétend craindre avec raison d'être persécuté du fait des opinions politiques qui lui ont été imputées. Il allègue également avoir qualité de personne à protéger.
[3] La Commission a jugé que le demandeur n'avait ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger parce que ses prétentions n'étaient pas crédibles.
[4] La Commission a sérieusement mis en doute les allégations du demandeur se rapportant à son appartenance à la Ligue musulmane du Pakistan (Pakistan Muslim League, PML). En fait, le demandeur s'est contredit à propos de la date à laquelle il dit avoir joint les rangs de ce parti politique et à propos d'autres détails concernant sa participation politique, notamment une erreur concernant le numéro de la section électorale où il avait été nommé secrétaire. Le dossier du tribunal révèle que le demandeur a témoigné avoir joint les rangs de la PML en janvier 1999, même si sa carte montre qu'il y a adhéré en 1997. De plus, la Commission souligne qu'il a déclaré dans son témoignage avoir été nommé secrétaire de la section électorale 22/5 mais qu'il avait inscrit 622/5 dans l'exposé circonstancié contenu dans son formulaire de renseignements personnel. En outre, le demandeur était incapable de se rappeler quand la première attaque alléguée avait eu lieu et il n'a fourni aucune preuve à l'appui des allégations selon lesquelles il avait été sauvagement battu le 24 avril 2002 et avait eu besoin de soins médicaux. Compte tenu des incohérences et des manques de vraisemblance importants relevés dans la demande, la Commission était en droit de mettre en doute la crédibilité des allégations du demandeur. Contrairement à ce qui ressort des observations formulées par le demandeur, j'estime que les conclusions de la Commission ne sont pas fondées sur des hypothèses mais plutôt sur la cohérence interne des allégations. Le demandeur n'a pas pu fournir des explications satisfaisantes à l'égard de ces incohérences lorsqu'il répondait aux questions de la Commission. Celle-ci a clairement expliqué pourquoi elle doutait de la crédibilité du demandeur, en s'appuyant sur les incompatibilités, et je suis convaincu qu'elle a agi de manière raisonnable en concluant que le demandeur n'était pas crédible.
[5] La Commission a également pris en compte dans son évaluation de la crédibilité du demandeur le fait qu'il n'avait pas fourni d'éléments de preuve, tels que des billets d'avion ou un passeport. La Commission a estimé que le demandeur n'avait fait aucun effort pour se procurer ces documents. L'article 7 des Règles de la section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228, prévoit que : « Le demandeur d'asile transmet à la Section des documents acceptables pour établir son identité et les autres éléments de sa demande. S'il ne peut le faire, il en donne la raison et indique quelles mesures il a prises pour s'en procurer. » En l'espèce, la Commission s'est penchée sur l'explication du demandeur qui affirmait que les passeurs exigent habituellement que les documents de voyage leur soient rendus dès l'arrivée à destination. Compte tenu du fait que la Commission a conclu que de nombreux aspects de la demande n'étaient pas crédibles, il est tout à fait raisonnable de sa part d'accorder une grande importance aux documents qui auraient soutenu les allégations du demandeur et de tirer une conclusion défavorable à partir du fait que le demandeur n'avait pas soumis ces documents (voir Elazi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 212 (C.F. 1re inst.) (QL), Museghe c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 1539 (C.F. 1re inst.) (QL) et Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.)).
[6] En ce qui concerne l'allégation écrite selon laquelle la Commission a manqué aux principes de justice fondamentale en pressant le demandeur de procéder avec sa demande même s'il l'avait informée qu'il n'était pas convenablement préparé, il importe de noter que le demandeur ne s'est pas présenté à l'audience initialement prévue le 13 août 2003 pour cause de maladie et que l'audience a alors été reportée au 27 août 2003. Il n'y a aucune raison pour laquelle le demandeur n'aurait pas pu être prêt pour l'audition de sa demande à ce moment-là et, par conséquent, j'estime que cette allégation est sans fondement.
[7] Pour les motifs exposés précédemment, je suis d'avis que la Commission n'a commis aucune erreur manifestement déraisonnable dans sa décision. La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée.
« Yvon Pinard »
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
Le 1er octobre 2004
Traduction certifiée conforme
Jacques Deschênes, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-8034-03
INTITULÉ : NAZIR AKHTAR
c.
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : MONTRÉAL (QUÉBEC)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 18 AOÛT 2004
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 1er OCTOBRE 2004
COMPARUTIONS :
Dan Bohbot POUR LE DEMANDEUR
Michel Pépin POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Dan Bohbot POUR LE DEMANDEUR
Montréal (Québec)
Morris Rosenberg POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada
Montréal (Québec)