Date : 20050506
Dossier : IMM-2332-04
Référence : 2005 CF 614
ENTRE :
VALLIPURAM NITHIYANANTHASOTHY
demandeur
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE PINARD
[1] La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu, le 12 février 2004, que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger au sens des articles 96 et 97, respectivement, de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.
[2] Vallipuram Nithiyananthasothy (le demandeur) est un citoyen du Sri Lanka. Il prétend craindre avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité et de son appartenance à un groupe social.
[3] La Commission a jugé que le demandeur n'est pas un témoin digne de foi et a rejeté sa demande d'asile. Au soutien de sa décision, la Commission donne les motifs suivants :
Le demandeur a déclaré qu'il a demandé sa carte d'identité nationale en 2000 et qu'il lui a fallu de six à huit mois pour l'obtenir; pourtant, sa carte d'identité nationale lui a été délivrée le 21 mai 2002. On lui a demandé de préciser la raison pour laquelle sa carte d'identité nationale indique une adresse à Jaffna alors qu'il vivait à Colombo. Il a déclaré que sa carte d'identité nationale avait été établie en fonction de son lieu de naissance. Cette affirmation contredisait la preuve documentaire qui indiquait que les cartes d'identité nationale sont établies en fonction du lieu de résidence.
Le demandeur a déclaré avoir été libéré de prison en 1998 avec l'aide d'élus influents. Cette information ne figurait pas dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP). La Commission estime qu'il s'agit d'un renseignement important digne de mention. Cette omission mine sa crédibilité.
Le demandeur a déclaré avoir été arrêté et battu à coups de poing en 1998. Il n'a pas été en mesure de fournir plus de détails même si la Commission lui en a demandé. Son exposé circonstancié n'indique pas qu'il a été victime de violence physique en 1998. En outre, son exposé circonstancié indique qu'il a été détenu et battu en 2000. Ses déclarations ne sont pas claires quant à savoir si des armes ont été utilisées lorsqu'il a été battu en 2000. À la question 38 de son FRP, le demandeur a répondu n'avoir été arrêté qu'à deux reprises. Il n'a pas mentionné qu'il avait été arrêté et torturé en 1998 et 2000. La Commission n'a pas cru son explication, savoir qu'il voulait faire un récit concis et qu'il s'est contenté d'indiquer les événements importants.
Le demandeur a déclaré que, comme il craignait les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET), il a présenté une demande d'immigration au Canada en 1995. En réalité, sa demande a été déposée en mars 1997. Il a expliqué cette contradiction en affirmant avoir remis sa demande à son avocat en 1995. Il s'est montré évasif dans sa réponse quand on lui a demandé pourquoi sa demande n'avait fait l'objet d'aucun suivi en temps opportun de sa part ou de la part de son avocat. Il a seulement expliqué qu'il vivait des tensions à l'époque.
Le demandeur a fourni la preuve à un agent des visas, en 1998, que tous ses intérêts commerciaux étaient situés à Jaffna. Son FRP indique qu'il faisait des affaires à Colombo seulement depuis qu'il avait quitté Jaffna en 1990.
[4] Après avoir entendu les avocats des parties et examiné le dossier de la Cour, je suis d'avis que les motifs énoncés plus haut sont, de manière générale, étayés par des éléments de preuve solides, dont le propre témoignage du demandeur, son FRP et sa carte d'identité nationale. En outre, dans Sheikh c. Canada (M.E.I.), [1990] 3 C.F. 238, la Cour d'appel fédérale a statué que la perception du tribunal qu'un demandeur n'est pas un témoin digne de foi peut équivaloir à la conclusion qu'il n'y avait aucun élément de preuve crédible à l'appui de la demande.
[5] La Commission est un tribunal spécialisé qui est en mesure d'apprécier la vraisemblance et la crédibilité d'un témoignage dans la mesure où les inférences qu'il en tire ne sont pas déraisonnables (Aguebor c. Canada (M.E.I.), (1993) 160 N.R. 315 (C.A.F.)) et dans la mesure où ses motifs sont exprimés en termes clairs et explicites (Hilo c. Canada (M.E.I.), (1991) 130 N.R. 236 (C.A.F.)). En l'espèce, les contradictions et les invraisemblances ont été dûment signalées au demandeur et elles étaient assez importantes pour justifier la décision dûment motivée de la Commission de rejeter la demande.
[6] Pour les motifs susmentionnés, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
YVON PINARD JUGE
OTTAWA (ONTARIO)
Le 6 mai 2005
Traduction certifiée conforme
Suzanne Bolduc, LL.B.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-2332-04
INTITULÉ: VALLIPURAM NITHIYANANTHASOTHY c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE 7 AVRIL 2005
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PINARD
DATE DES MOTIFS : LE 6 MAI 2005
COMPARUTIONS:
Preevanda K. Sapru POUR LE DEMANDEUR
Michael Butterfield POUR LE DÉFENDEUR
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:
MAX BERGER & ASSOCIATES POUR LE DEMANDEUR
Toronto (Ontario)
John H. Sims, c.r. POUR LE DÉFENDEUR
Sous-procureur général du Canada