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Date: 20000925


Dossier : T-992-92



ENTRE :

     ALMECON INDUSTRIES LIMITED,


demanderesse,

     - et -



     ANCHORTEK LTD., EXPLOSIVES LIMITED,

     ACE EXPLOSIVES ETI LTD. et

     WESTERN EXPLOSIVES LTD.,

     défenderesses.



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE DAWSON


[1]          Voici les motifs pour lesquels je rejette l'appel interjeté par la demanderesse relativement à l'ordonnance du protonotaire Lafrenière autorisant la défenderesse Anchortek Ltd. ( « Anchortek » ) à modifier sa demande reconventionnelle et exigeant de la demanderesse qu'elle produise le règlement à l'amiable intervenu avec un tiers, Austin Powder Ltd. ( « Austin Powder » ).

[2]          Je ne suis pas convaincue que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en appliquant un principe erroné ou à l'issue d'une appréciation erronée des faits. J'arrive plutôt à la conclusion qu'il a exercé ce pouvoir correctement.


[3]          Les motifs du protonotaire exposent les faits pertinents. La modification autorisée consistait en l'ajout des paragraphes suivants à la demande reconventionnelle :     

[Traduction] 12.      Par voie de déclaration déposée auprès de la Cour fédérale dans le dossier T-609-96, la demanderesse a intenté une action contre Austin Powder Ltd. (désignée ci-dessous « Austin » ) pour contrefaçon du brevet canadien no 1 220 134 au motif de la vente par Anchortek à Austin de cartouches Energy Plug et de la revente de ces cartouches par Austin à d'autres. En raison d'un accord entre les parties, la présente action et l'action T-609-96 devaient être jugées ensemble.
13.      Anchortek a mis fin à la vente de sa cartouche Energy Plug en 1996. Depuis, au vu et au su de la demanderesse, Anchortek a produit et vendu des cartouches de forage d'un concept différent de l'Energy Plug à Austin et à d'autres. La demanderesse n'a jamais allégué que ces autres cartouches produites et vendues par Anchortek contrefaisaient le brevet canadien no 1 220 134.
14.      La demanderesse est parvenue récemment à un règlement de l'affaire T-609-96 avec Austin. Comme élément du règlement, la demanderesse a demandé à Austin soit de mettre fin à ses achats, soit de les limiter aux cartouches d'Anchortek non mises en question dont il est fait mention au paragraphe 13 ci-dessus. Par conséquent, Austin a cessé ou réduit de manière importante ses achats de cartouches d'Anchortek non mises en question.
15.      La demanderesse s'est donc appuyée sur l'allégation fausse et trompeuse que les cartouches Energy Plug d'Anchortek contrefaisaient le brevet canadien no 1 220 134, et sur la menace d'une poursuite à ce sujet, pour obtenir d'Austin un accord illicite et indu qui a réduit les ventes de cartouches non mises en question d'Anchortek à Austin.
16.      La demanderesse a également cherché, en janvier 2000, à passer un accord semblable avec Western Explosives comme élément d'un règlement de la présente instance avec Western.

[4]          La demanderesse a fait valoir devant moi que la seule allégation qui, suivant les paragraphes ajoutés, serait fausse et trompeuse, est que la cartouche Energy Plug d'Anchortek contrefait le brevet canadien no 1 220 134 d'Almecon. Telle était l'allégation formulée dans la déclaration de la demanderesse visant Austin Powder (no de dossier T-609-96, Cour fédérale).

[5]          La demanderesse prétend qu'une allégation figurant dans un acte de procédure ne saurait conférer un droit d'action aux fins de l'alinéa 7a) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13, modifiée (la « Loi » ). Par conséquent, comme une allégation formulée dans une déclaration ne confère aucun droit d'action, la déclaration figurant dans une entente portant règlement d'une action et dont la teneur est la même ne confère pas non plus un droit d'action. La demanderesse estime donc que le protonotaire a commis une erreur de droit en autorisant la modification.

[6]          Je crois qu'il ressort du texte de la modification que la thèse de la défenderesse s'appuie sur le règlement intervenu entre la demanderesse et Austin Powder. Vu le témoignage non contesté de Frank Bodell, je reconnais aux fins de la requête que le règlement renfermait une clause exigeant d'Austin Powder qu'elle cesse d'acheter à Anchortek ses cartouches non mises en question et qu'elle les achète plutôt à la demanderesse. Aussi, le règlement prévoyait que si Anchortek avait gain de cause dans le cadre de l'action principale, c'est-à-dire si le tribunal concluait que sa cartouche Energy Plug ne contrefait pas le brevet d'Almecon, la clause du règlement exigeant qu'Austin Powder cesse d'acheter à Anchortek ses cartouches non mises en question serait nulle et sans effet et Austin Powder n'aurait plus à les acheter à la demanderesse.

[7]          Partant, Anchortek allègue qu'Austin Powder a accepté de mettre fin à l'achat de cartouches d'Anchortek non mises en question en tenant pour acquis que les cartouches Energy Plug contrefaisaient le brevet de la demanderesse. Pour simplifier, il est allégué que la concession obtenue d'Austin Powder concernant l'achat des cartouches non mises en question découle directement de l'allégation selon laquelle les cartouches Energy Plug d'Anchortek contrefont le brevet de la demanderesse.

[8]          Si Anchortek devait avoir gain de cause au fond et obtenir un jugement selon lequel ses cartouches Energy Plug ne contrefont pas le brevet de la demanderesse, il pourrait être établi que le règlement se fondait sur une déclaration fausse ou trompeuse contrairement à l'alinéa 7a) de la Loi, ce qui pourrait justifier le versement de dommages-intérêts à Anchortek.

[9]          La déclaration fausse ou trompeuse faite par un breveté à un tiers et tendant à discréditer l'entreprise, les marchandises ou les services d'un concurrent, y compris la déclaration selon laquelle le produit d'un tiers contrefait son brevet, confère un droit d'action fondé sur l'alinéa 7a) de la Loi. Voir : S. & S. Industries Inc. c. Rowell, [1966] R.C.S. 419.

[10]          La demanderesse n'a invoqué aucun arrêt de jurisprudence à l'appui de sa prétention voulant qu'une clause d'un règlement ne puisse conférer un droit d'action fondé sur l'alinéa 7a) de la Loi.

[11]          Vu cette omission, et dans la mesure où le règlement porte sur des questions non soulevées dans l'acte de procédure initial (en l'occurrence les cartouches non mises en question), je ne peux conclure qu'il est manifeste ou indubitable que la prétention d'Anchortek, fondée sur le règlement, sera rejetée. Il s'ensuit que le protonotaire n'a pas commis l'erreur qui lui est reprochée.

[12]          Cette conclusion s'applique également à l'ordonnance du protonotaire concernant la production du règlement. Aucune des parties n'a sérieusement contesté que, une fois la modification autorisée, les documents que comporte le règlement sont les principaux éléments de preuve documentaire qu'Anchortek pourra invoquer au procès. En conséquence, le règlement est un document pertinent et devrait être produit conformément à l'ordonnance du protonotaire.

[13]          Vu les motifs énoncés aux présentes, l'appel de la demanderesse est rejeté. La défenderesse Anchortek a droit aux dépens à suivre la cause afférents à la requête, et leur montant sera établi conformément à la colonne IV du tableau du tarif B.

     ORDONNANCE

[14]          La requête présentée par la demanderesse afin d'obtenir une ordonnance accueillant l'appel de l'ordonnance du protonotaire Lafrenière datée du 25 août 2000 est rejetée.

[15]          La défenderesse Anchortek a droit aux dépens à suivre la cause afférents à la requête; ils lui seront versés par la demanderesse après que leur montant aura été établi conformément à la colonne IV du tableau du tarif B.

    



                                 Eleanor R. Dawson

     Juge

Toronto, Ontario

25 septembre 2000


Traduction certifiée conforme


_____________________________

Claire Vallée, LL.B.



COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats et procureurs inscrits au dossier


No DU GREFFE :      T-992-92

INTITULÉ DE LA CAUSE :      ALMECON INDUSTRIES LIMITED,

     demanderesse,

                     - et -

     ANCHORTEK LTD., EXPLOSIVES LIMITED,                      ACE EXPLOSIVES ETI LTD. et WESTERN                      EXPLOSIVES LTD.,

     défenderesse.

DATE DE L'AUDIENCE :          LUNDI 18 SEPTEMBRE 2000
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE du juge Dawson en date du lundi 25 septembre 2000.

ONT COMPARU :           Me B. Stratton
     pour la demanderesse

         Me H. Lue

     pour la demanderesse

     Me S. Garland

     pour les défenderesses


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:Dimock Stratton Clarizio

     Avocats

     Boîte postale 102

     3202-20 Queen St. W.

     Toronto (Ontario)

     M5H 3R3

     pour la demanderesse

     Smart & Biggar

     Avocats

     Boîte postale 111

     1500-438 University Ave.

     Toronto (Ontario)

     M5G 2K8

     pour les défenderesses

                    

                     COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 20000925

                        

         Dossier : T-992-92


                     ENTRE :

                     ALMECON INDUSTRIES LIMITED,

     demanderesse,

                     - et -

                     ANCHORTEK LTD., EXPLOSIVES LIMITED,

                     ACE EXPLOSIVES ETI LTD. et WESTERN

                     EXPLOSIVES LTD.,

     défenderesses.

                    


                    


                     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                     ET ORDONNANCE

                    

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