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Date : 19991206


Dossier : T-398-99



         AFFAIRE INTÉRESSANT les articles 18, 18.1 et 18.2 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7,

    

         ET la Loi sur les aliments et drogues,_ L.R.C. (1985), ch. F-27 et le titre 8 du Règlement pris en application de cette loi,
         ET le paragraphe 55.2(4) de la Loi sur les brevets et le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133.

ENTRE :

     MERCK & CO., INC.

     et MERCK FROSST CANADA & CO.,

     demanderesses,

     - et -

     LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

     LE MINISTRE DE LA SANTÉ

     et NU-PHARM INC.,

     défendeurs.

                                    

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE McGILLIS

    

[1]          La défenderesse Nu-Pharm Inc. (Nu-Pharm) a demandé, de manière urgente, un sursis d"exécution de mon jugement daté du 23 novembre 1999. Ce jugement accueillait la demande de contrôle judiciaire présentée par Merck & Co., Inc. et Merck Frosst Canada & Co. (Merck), et annulait la décision du ministre de la Santé (le ministre) de délivrer un avis de conformité à Nu-Pharm pour la médicament Nu-Énalapril, version générique du médicament breveté de Merck VASOTEC. Dans cette décision, sur le fondement de l"interprétation du paragraphe 5(1) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) , DORS/93-133 modifié, j"ai conclu que le ministre avait commis une erreur de droit en délivrant l"avis de conformité avant que Nu-Pharm se soit conformée aux dispositions du règlement. La question centrale dans l"affaire était l"interprétation du paragraphe 5(1) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) . Bien que Nu-Pharm compte interjeter appel de ce jugement, elle n"a pas encore déposé l"avis d"appel auprès de la Cour d"appel. Selon la règle 398 des Règles de la Cour fédérale (1998) , j"ai donc compétence pour connaître d"une requête en sursis d"exécution. Étant donné l"urgence et l"importance de l"affaire pour toutes les parties, je dois rendre ma décision sur la requête en sursis d"exécution le plus rapidement possible. Au terme de l"audience, j"ai prévenu les avocats des parties que les contraintes de temps m"empêcheraient de résumer dans ma décision la preuve abondante qui a été présentée sur la requête en exécution. Toutefois, pour arriver à ma décision, j"ai examiné et considéré attentivement l"ensemble de la preuve au dossier, ainsi que les prétentions écrites excellentes présentées par les avocats des parties.




[2]      ßåâae

ß plus de 90 pour cent de ses actifs à court terme. Cependant, une part importante des créances, environ 85 pour cent, représente les 14 000 000 $ de comptes clients pour le stock de Nu-Énalapril sur le marché. En outre, les matières premières du Nu-Énalapril et le stock de produits finis (représentant au total 8 600 000 $) constituent environ 45 pour cent des stocks indiqués dans les actifs à court terme. Les passifs de Nu-Pharm sont considérables, et comprennent un crédit bancaire important et des comptes créditeurs de taille, représentant des paiements dus à des fournisseurs et des crédits commerciaux.


[3]          Le bilan comporte également deux notes, dont l"une contient une section sous la rubrique " Questions de trésorerie au cours des trois prochains mois ". Selon ce qu"indique cette note, Nu-Pharm doit effectuer des paiements substantiels au cours des trois prochains mois sur " les comptes fournisseurs et d"autres dettes ". En outre, ses comptes clients pour les médicaments autres que le Nu-Énalapril constituent une très petite proportion de ses créances des trois prochains mois, de l"ordre de 15 pour cent. Par conséquent, si Nu-Pharm est incapable de recouvrer une partie de ses comptes clients de 14 000 000 $ pour le Nu-Énalapril, elle fera face à une insuffisance de trésorerie considérable au cours des trois prochains mois. Enfin, Richard Benyak, président de Nu-Pharm, a témoigné au cours du contre-interrogatoire sur son affidavit que Nu-Pharm était " ... débitrice à la banque de sommes d"argent considérables " et que la banque voulait savoir comment Nu-Pharm s"y prendrait, à la suite de la publication du jugement, pour lui rembourser les sommes dues. Son témoignage selon lequel le refus du sursis d"exécution pendant l"appel mettrait en danger la viabilité de Nu-Pharm n"a pas été affaibli au cours du contre-interrogatoire.


[4]          Avant la délivrance de l"avis de conformité pour le Nu-Énalapril, Nu-Pharm était une société rentable. Sa situation financière précaire résulte directement de son investissement considérable dans le Nu-Énalapril et du fait qu"elle peut ne pas être capable de se maintenir sur le marché en attendant le jugement sur l"appel.


[5]          Nu-Pharm estime que Merck perdrait des ventes de l"ordre d"environ 5 000 000 $, ce qui entraînerait une perte d"environ 500 000 $ (à un taux de profit de 10 pour cent), dans l"hypothèse où un appel accéléré serait entendu avant la fin de janvier 2000. Merck n"a contesté cette assertion ni par contre-interrogatoire ni par présentation d"une preuve contraire. Selon M. Benyak, Nu-Pharm pourrait " facilement " rembourser à Merck les bénéfices perdus au cours de la période de sursis pendant l"appel.


[6]          À l"audience sur la requête en sursis, l"avocat de Nu-Pharm a plaidé de façon très convaincante que le préjudice financier causé à Nu-Pharm au cours des trois prochains mois serait si grave que sa viabilité serait mise en danger.


[7]          À la suite de la suspension pour le déjeuner et au commencement de ses observations, l"avocat de Merck a rappelé l"engagement déjà souscrit par Merck d"indemniser Nu-Pharm pour ses dommages raisonnables, si celle-ci devait avoir gain de cause en appel. Il a également informé la Cour que Merck Frosst était maintenant disposée à souscrire un second engagement, ainsi conçu :

[TRADUCTION] Dans le cas où Nu-Pharm connaîtrait des problèmes de trésorerie et n"arriverait pas à obtenir un complément de soutien financier de ses actionnaires ou des sociétés de son groupe, Merck Frosst serait disposée à garantir un prêt qui serait consenti par la banque de Nu-Pharm, de préférence avec quelque forme de sûreté, à concurrence de l"insuffisance sur une période de trois mois, dans l"attente de la décision de la Cour d"appel.

[8]          Compte tenu du moment choisi pour présenter ce second engagement, je suis forcé de conclure que Merck Frosst a formulé cette proposition dans une tentative de répondre aux arguments très convaincants présentés par l"avocat de Nu-Pharm au sujet du préjudice démontrable et irréparable que subirait Nu-Pharm pendant l"appel. En présentant ce second engagement, Merck Frosst cherchait manifestement à prendre des mesures pour éviter que la viabilité de Nu-Pharm ne soit mise en danger par suite des problèmes de trésorerie à court terme qu"elle connaîtrait du fait de son incapacité à rester sur le marché avec ses comprimés de Nu-Énalapril pendant l"appel. Cependant, ce second engagement dépend de la collaboration d"un tiers, à savoir la banque de Nu-Pharm. Le refus par la banque de consentir un crédit très important à Nu-Pharm, en sus des sommes qui lui sont déjà dues par Nu-Pharm, aurait pour effet de rendre le second engagement sans intérêt et sans effet. En outre, on voit difficilement comment la Cour pourrait assurer l"exécution d"un tel engagement. Je ne suis donc pas convaincue que le second engagement offre une solution satisfaisante. De surcroît, dans les circonstances très particulières de l"espèce, le premier engagement n"offre pas non plus une solution satisfaisante pour réparer le dommage irréparable que subirait Nu-Pharm. En particulier, la preuve au dossier établit que la viabilité de Nu-Pharm est mise en danger si le statu quo n"est pas maintenu pendant l"appel. En d"autres termes, si Nu-Pharm est incapable de faire face à ses obligations au cours des trois prochains mois, toute indemnisation versée par Merck à une date ultérieure viendrait trop tard pour remédier au problème.


[9]          Après avoir considéré l"ensemble de la preuve au dossier, je suis d"opinion que Nu-Pharm a établi, par une preuve claire et convaincante, que les conséquences financières découlant de son incapacité à rester sur le marché pendant l"appel constituent un préjudice irréparable au sens défini dans RJR-Macdonald c. Canada (Procureur général), précité, à la page 341. Manifestement, dans l"hypothèse où elle échouerait en appel, Nu-Pharm devrait alors subir les conséquences de son investissement dans le Nu-Énalapril.


[10]          Étant donné la conclusion à laquelle j"en viens, à savoir que Nu-Pharm subirait un préjudice irréparable du fait des conséquences financières pendant l"appel, je n"ai pas besoin de considérer la seconde branche de l"argument présenté par l"avocat de Nu-Pharm, soit que les conséquences sur le marché constituent un préjudice irréparable.

iii) La prépondérance des inconvénients

[11]          Pour apprécier la prépondérance des inconvénients, j"ai pris en compte tous les facteurs pertinents, notamment la nature du redressement demandé, le préjudice subi par les deux sociétés, la nature et l"objet de la loi en cause et l"intérêt public [Voir RJR-Macdonald c. Canada (Procureur général), précité aux pages 342 à 347, 350 et 351.] À mon avis, sur le fondement de la preuve au dossier, Nu-Pharm subirait un préjudice plus grand du fait du refus du sursis d"exécution pendant l"appel. Compte tenu de tous les facteurs pertinents, notamment de ceux qui sont énumérés ci-dessus, j"en viens à la conclusion que la prépondérance des inconvénients favorise Nu-Pharm.

iv) Conclusion

[12]          Ayant pris en considération l"ensemble de la preuve au dossier, j"en viens à la conclusion, dans l"exercice de mon pouvoir discrétionnaire, qu"il est dans l"intérêt de la justice d"accorder un sursis d"exécution de mon jugement pendant l"appel.

        



[13]          La requête en sursis d"exécution est donc accordée avec dépens. Il est sursis à l"exécution de mon jugement daté du 23 novembre 1999 jusqu"à la conclusion définitive de l"appel.

                                        

                                 D. McGillis

     Juge


Toronto (Ontario)

Le 6 décembre 1999





Traduction certifiée conforme


Richard Jacques, LL. L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Avocats et avocats inscrits au dossier

N DU DOSSIER :                  T-398-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :          AFFAIRE INTÉRESSANT les articles 18, 18.1 et 18.2 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7,
                         ET la Loi sur les aliments et drogues,_ L.R.C. (1985), ch. F-27 et le titre 8 du Règlement pris en application de cette loi,
                         ET le paragraphe 55.2(4) de la Loi sur les brevets et le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133.

                         MERCK & CO., INC.

                         et MERCK FROSST CANADA & CO.,

     demanderesses,

            

                         - et -

                         LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

                         LE MINISTRE DE LA SANTÉ

                         et NU-PHARM INC.,

     défendeurs.

                                    

DATE DE L"AUDIENCE :              LE VENDREDI 3 DÉCEMBRE 1999
LIEU DE L"AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE McGILLIS EN DATE DU LUNDI 6 DÉCEMBRE 1999


ONT COMPARU                  G. A. Macklin

                         Jane Clark         

                         Emmanuel Manolakis

                         Carina Pelligrin

                             Pour la demanderesse
                         H. B. Radomski

                         Daniela Bassan

                             Pour la défenderesse Nu-Pharm

                         F. B. Woyiwada

                            

                             Pour le défendeur ministre

AVOCATS AU DOSSIER :          Gowling, Strathy & Henderson

                         Avocats

                         2600-160, rue Elgin

                         Ottawa (Ontario)

                         K1P 1C3

                             Pour la demanderesse

                         Goodman, Phillips & Vineberg

                         Avocats

                         2400-250, rue Yonge Ouest

                         C.P. 24

                         Toronto (Ontario)

                         M5B 2M6

                             Pour la défenderesse Nu-Pharm

                         Ministère de la Justice

                         Édifice commémoratif de l"Est

                         284, rue Wellington, 2e étage

                         Ottawa (Ontario)

                         K1A 0H8

                                

                             Pour le défendeur ministre

                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 19991206

                        

         Dossier : T-398-99


                         AFFAIRE INTÉRESSANT les articles 18, 18.1 et 18.2 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7,
                         ET la Loi sur les aliments et drogues,_ L.R.C. (1985), ch. F-27 et le titre 8 du Règlement pris en application de cette loi,
                         ET le paragraphe 55.2(4) de la Loi sur les brevets et le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133.

                         ENTRE :

                         MERCK & CO., INC.

                         et MERCK FROSST CANADA & CO.

     Demanderesses

                         - et -

                         LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,

                         LE MINISTRE DE LA SANTÉ

                         et NU-PHARM INC.

     Défendeurs



                                

                        

            

                                                                         MOTIFS DE L"ORDONNANCE

                            

                        



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