Date : 20030430
Dossier : IMM-4372-02
Référence neutre : 2003 CFPI 540
Toronto (Ontario), le mercredi 30 avril 2003
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE
ENTRE :
PADMALEELA YOGALINGAM
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
[1] La demanderesse fait appel de la décision du protonotaire Lafrenière qui avait rejeté la requête de la demanderesse en prorogation du délai fixé pour la production du dossier de demande, jusqu'à cinq jours à compter de la date de l'ordonnance.
[2] La demanderesse voulait la prorogation du délai afin d'obtenir l'enregistrement de l'audition de la revendication du statut de réfugié de la demanderesse devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la CISR), en vue de mettre en état le dossier de la demanderesse pour sa demande d'autorisation.
[3] L'affidavit produit avec la requête ne dit pas que les bandes magnétiques sont nécessaires pour parfaire le dossier de demande de la demanderesse.
Point en litige
[4] L'appel à l'encontre de la décision du protonotaire devrait-il être accueilli?
Analyse et décision
[5] Le défendeur a fait valoir, à titre préliminaire, que je n'étais pas compétent pour instruire l'appel parce que l'appel à l'encontre de la décision d'un protonotaire est un appel formé contre un jugement interlocutoire, ce que n'autorise pas l'alinéa 72.(2)e) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, (la LIPR), ainsi rédigé :
72.(2) Les dispositions suivantes s'appliquent à la demande d'autorisation :
. . . |
72.(2) The following provisions govern an application under subsection (1):
. . .
|
e) le jugement sur la demande et toute décision interlocutoire ne sont pas susceptibles d'appel. |
(e) no appeal lies from the decision of the Court with respect to the application or with respect to an interlocutory judgment. |
[6] Comme je l'ai dit plutôt, il s'agit d'un appel à l'encontre de la décision d'un protonotaire qui avait rejeté la requête de la demanderesse en prorogation du délai fixé pour le dépôt d'un dossier de demande. Une décision refusant la requête en prorogation du délai fixé pour le dépôt d'un dossier de demande est une ordonnance interlocutoire (voir l'arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly, [1995] A.C.F. n ° 1183 (QL) (C.A.)).
[7] Puisque l'alinéa 72.(2)e) de la LIPR dit qu'une décision interlocutoire n'est pas susceptible d'appel, le défendeur affirme qu'il ne peut être interjeté appel de l'ordonnance du protonotaire.
[8] Cependant, la règle 51.(1) des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, prévoit qu'une ordonnance du protonotaire peut être portée en appel devant un juge de la Section de première instance.
51. (1) L'ordonnance du protonotaire peut être portée en appel par voie de requête présentée à un juge de la Section de première instance. |
51. (1) An order of a prothonotary may be appealed by a motion to a judge of the Trial Division. |
[9] Par conséquent, pour évaluer cet argument préliminaire, il faut s'en remettre à la règle 1 des Règles de la Cour fédérale (1998) :
1. (1) Sauf disposition contraire d'une loi fédérale ou de ses textes d'application, les présentes règles s'appliquent aux instances devant la Cour. |
1. (1) These Rules apply to all proceedings in the Court unless otherwise provided by or under an Act of Parliament. |
(2) Les dispositions de toute loi fédérale ou de ses textes d'application l'emportent sur les dispositions incompatibles des présentes règles.
|
(2) In the event of any inconsistency between these Rules and an Act of Parliament or a regulation made thereunder, that Act or regulation prevails to the extent of the inconsistency.
|
[10] La règle 1.(2) prévoit que, lorsqu'il y a conflit entre les Règles de la Cour fédérale (1998), et une loi fédérale, la loi a préséance sur les Règles dans la mesure du conflit.
[11] Il y a un conflit entre la règle 51.(1) des Règles de la Cour fédérale (1998) et l'alinéa 72.(2)e) de la LIPR, qui est une loi fédérale. En conséquence, l'alinéa 72.(2)e) est applicable, et il ne peut être interjeté appel à la Cour de l'ordonnance du protonotaire. Je n'ai donc pas compétence pour instruire un tel appel.
[12] Je suis donc d'avis que je n'ai pas compétence pour instruire l'appel.
[13] La demanderesse voudrait que je certifie les questions suivantes :
1. L'article 72 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés empêche-t-il qu'un appel soit interjeté devant un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada contre la décision d'un protonotaire?
2. Si la réponse à la question n ° 1 est affirmative, un protonotaire a-t-il le pouvoir de certifier une question de portée générale?
3. Lorsqu'un demandeur a pris avec diligence les moyens nécessaires pour recevoir l'enregistrement de la procédure d'un tribunal, que le retard dans la transmission de l'enregistrement est imputable au tribunal et que le demandeur sollicite une prorogation du délai avant l'expiration de ce délai, le demandeur doit-il quand même produire une preuve montrant qu'il a des arguments défendables, avant qu'il ne puisse obtenir une prorogation du délai fixé pour la réception de cet enregistrement?
[14] Je suis disposé à certifier seulement la question n ° 1 comme question grave de portée générale en application de l'alinéa 74.d) de la LIPR.
ORDONNANCE
LA COUR ORDONNE :
1. L'alinéa 72.(2)e) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés prive ici la Cour de sa compétence pour instruire un appel à l'encontre de la décision du protonotaire.
2. La question grave suivante de portée générale est certifiée en application de l'alinéa 74.d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés :
L'article 72 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés empêche-t-il qu'il soit interjeté appel à un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada contre la décision d'un protonotaire?
« John A. O'Keefe »
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : IMM-4372-02
INTITULÉ : PADMALEELA YOGALINGAM
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE : LE LUNDI 25 NOVEMBRE 2002
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE : MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE
DATE DES MOTIFS : LE MERCREDI 30 AVRIL 2003
COMPARUTIONS :
M. Raoul Boulakia pour la demanderesse
Mme Kareena Wilding pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Raoul Boulakia pour la demanderesse
45, rue Saint-Nicholas
Toronto (Ontario)
M4Y 1W6
Morris Rosenberg pour le défendeur
Sous-procureur général du Canada
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 20030430
Dossier : IMM-4372-02
ENTRE :
PADMALEELA YOGALINGAM
demanderesse
- et -
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION
défendeur
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
ET ORDONNANCE