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Date : 20030221

Dossier : T-757-02

Référence neutre : 2003 CFPI 212

ENTRE :

                                                         

                                 ALWAYS TRAVEL INC. et

                     HIGHBOURNE ENTERPRISES INC. et

CANADIAN STANDARD TRAVEL AGENT REGISTRY (CSTAR)

                                                         

                                                                                               demandeurs

                                                    - et -

             AIR CANADA, AMERICAN AIRLINES INC.,

         UNITED AIRLINES INC., DELTA AIRLINES INC.,

CONTINENTAL AIRLINES INC., NORTHWEST AIRLINES INC.

et ASSOCIATION DU TRANSPORT AÉRIEN INTERNATIONAL (IATA)

                                                                                          défenderesses

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                   (Prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),

                                    jeudi le 20 février 2003.)

LE JUGE HUGESSEN


[1]    Il s'agit d'un recours collectif envisagé dans le cadre duquel j'ai été nommé juge chargé de la gestion de l'instance. Lors d'une première conférence de gestion de l'instance tenue le 26 novembre 2002, j'ai entendu tous les avocats, puis rendu une ordonnance selon laquelle, en premier lieu, les demandeurs étaient autorisés à produire une déclaration modifiée et, en second lieu, les défenderesses devraient déposer toutes leurs requêtes préliminaires au plus tard le 13 janvier 2003, y compris une requête visant à obtenir une prorogation du délai applicable à la production des défenses. Voici les parties pertinentes de cette ordonnance :

[traduction]

1.              Les demandeurs doivent signifier et déposer une déclaration modifiée au plus tard le 6 décembre 2002.

2.            Toutes les requêtes préliminaires des défenderesses doivent être signifiées et déposées au plus tard le 13 janvier 2003, y compris la requête en prorogation du délai applicable au dépôt de leur défense.

[...]

5.            L'audition de ces requêtes se tiendra à Ottawa, les 20 et 21 février 2003, à 9 h 30.

[2]    Le 6 décembre 2003, les demandeurs ont dûment déposé leur déclaration modifiée. La requête dont je suis saisi a été présentée conformément à mon ordonnance et vise à obtenir la prorogation du délai imparti pour produire les défenses jusqu'à ce qu'un jugement soit rendu sur la question de l'autorisation d'une action comme recours collectif. Il s'agit de la seule requête préliminaire déposée par les défenderesses en application de l'ordonnance susmentionnée, ce qui, à mon sens, signifie que les défenderesses sont maintenant irrecevables à présenter d'autres requêtes préliminaires.


[3]                 Je crois qu'il est préférable d'exposer les principes sur lesquels je dois m'appuyer pour trancher la question soulevée en l'espèce, à savoir si les défenderesses peuvent attendre que la question de l'autorisation de l'action comme recours collectif soit réglée avant de déposer leur défense à l'action.

[4]                 Premièrement, j'estime que ma compétence, tant au titre de l'exercice de mon pouvoir discrétionnaire qu'en qualité de juge responsable de la gestion de l'instance en l'espèce, d'accorder la réparation demandée ne peut être mise en doute. Si besoin est, cette compétence m'est conférée par la règle 385.

[5]                 Deuxièmement, bien que, comme je viens de le préciser, je sois d'avis qu'elles sont maintenant irrecevables à présenter d'autres requêtes préliminaires et ne peuvent donc plus déposer de requête en vue d'obtenir la radiation de tout ou partie de la déclaration modifiée, les défenderesses peuvent néanmoins faire valoir lors de la présentation de la requête en autorisation de l'action comme recours collectif qu'aucune cause d'action n'a été établie ou que certaines causes d'action alléguées ne sont pas valables. En effet, je suis d'opinion qu'elles pourraient encore suivre cette voie.


[6]                 Troisièmement, à mon avis, non seulement une défense n'est pas essentielle pour trancher les questions soulevées par la requête en autorisation de l'action comme recours collectif, mais il est en outre très invraisemblable que cet acte de procédure puisse aider en quoi que soit la Cour au présent stade de l'instance. À mon sens, la règle 299.18 définit et restreint les questions auxquelles la Cour doit répondre dans le cadre d'une requête en autorisation d'une action comme recours collectif. Or, ces questions peuvent uniquement être résolues à la lumière de la déclaration; une défense n'est pas nécessaire.

[7]                 Quatrièmement, les défenderesses, à l'appui de leur requête, invoquent et renvoient à un certain nombre de décisions rendues par d'autres tribunaux judiciaires. Il s'agit notamment des décisions Mangan c. Inco Limited (1996), 30 D.R. (3d) 90 (Div. gén.) et Monsanto Canada Inc. c. Hoffman, 2002 SKCA 120, dans lesquelles des requêtes analogues à celle dont je suis saisi ont été accueillies. Cependant, je ne considère pas que ces décisions aient pour effet d'énoncer un quelconque principe voulant que ce genre de requêtes, présentées dans le cadre d'un recours collectif envisagé, doivent être accordées de façon automatique. En réalité, j'estime qu'un principe de cette nature serait tout à fait contraire au premier principe énoncé plus haut, à savoir que la question de la prorogation du délai applicable à la production d'une défense intéresse essentiellement l'exercice du pouvoir judiciaire discrétionnaire.

[8]                 Cinquièmement, à mon avis, les défenderesses, en qualité de parties requérantes, ont la charge de me convaincre que je devrais accorder la réparation demandée. À cet égard, l'absence, dans le présent dossier, de tout élément de preuve sous forme d'affidavit ou autre, constitue un inconvénient sérieux puisque je dois maintenant rendre une décision uniquement sur le fondement des actes de procédure.


[9]                 Sixièmement, bien que ce défaut soit grave à mes yeux, je ne crois pas qu'il soit fatal. J'estime que dans les circonstances de la présente affaire, il m'est possible de rendre une décision appropriée à la simple lecture de la déclaration modifiée. Cependant, j'insiste encore sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une mesure qui va de soi et que, à tout le moins devant la Cour, les défendeurs qui présentent une requête afin d'obtenir une réparation de ce genre seraient bien avisés d'accompagner leur requête d'éléments de preuve mentionnant de quelle façon la réparation demandée permettra de favoriser l'accomplissement de l'objet visé par les règles, soit la résolution la plus juste, la plus efficiente et la moins coûteuse du litige. Mais la présente action, dont je suis saisi, est d'une très grande complexité, et cette complexité est telle qu'il serait fort invraisemblable que le fait de demander la production d'une défense au présent stage de l'instance entraîne une résolution moins onéreuse et plus rapide de l'action.

[10]            La présente affaire concerne trois parties demanderesses et sept parties défenderesses désignées, parmi lesquelles se trouvent six transporteurs aériens, dont la plupart sont membres d'alliances ou de groupements de compagnies aériennes comprenant d'autres transporteurs. La septième défenderesse est l'Association du transport aérien international, association internationale qui représente notamment des compagnies aériennes.


[11]            Selon la déclaration modifiée, le nombre de membres du groupe envisagé qui sont des agents de voyages ayant établi des billets ou des documents analogues pour le compte des compagnies aériennes défenderesses au Canada serait d'environ 3 700. La déclaration modifiée énonce 13 points de droit ou de fait collectifs. Elle fait en outre état de l'existence d'au moins deux cocomploteurs qui ne sont pas désignés comme parties à l'instance. Les causes d'action alléguées comprennent, très brièvement, les suivantes : complot, abus de confiance et violation d'une obligation légale.

[12]            Si je devais exiger maintenant que les défenses soient produites dans le délai habituel ou dans un délai raisonnable prorogé, les étapes logiques subséquentes consisteraient en la production des documents et la tenue des interrogatoires préalables. Or, dans la présente affaire, l'autorisation de l'action comme recours collectif n'a pas encore été accordée et il est donc impossible de savoir si l'action se poursuivra, que ce soit en tant que telle ou à titre de recours collectif. À mon sens, un tel travail, soit la production des documents et la tenue des interrogatoires préalables, est extrêmement exigeant à la fois pour les demandeurs et les défenderesses puisqu'ils savent que ces mesures pourraient ne profiter à personne dans l'éventualité où l'action ne serait pas autorisée du tout ou seulement en partie.

[13]            En conséquence, j'estime qu'il est approprié en l'espèce, mais, je le répète, cela ne va pas de soi, d'accorder aux défenderesses un délai de 30 jours suivant le prononcé du jugement de la Cour sur la demande d'autorisation des demandeurs pour déposer leur défense. Il sera évidemment possible de se faire entendre sur ce délai au moment opportun.


[14]            Aucun dépens n'est adjugé relativement à la présente requête.

                                                                              « James K. Hugessen »

                                                                                                             Juge             

Ottawa (Ontario)

Le 21 février 2003

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                   T-757-02

INTITULÉ :                                             ALWAYS TRAVEL INC. ET AL. c. AIR CANADA ET AL.

DATE DE L'AUDIENCE :                    Le 20 février 2003

LIEU DE L'AUDIENCE :                      Ottawa (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :      MONSIEUR LE JUGE HUGESSEN

DATE DES MOTIFS :              Le 21 février 2003                                  

COMPARUTIONS :

Gilles Gareau et John Legge                    POUR LES DEMANDEURS

Michael Phelan                           POUR LA DÉFENDERESSE, Continental Airlines Inc.

Sylvain Deslauriers                                   POUR LA DÉFENDERESSE, American Airlines Inc.

Kent Thomson et

Matthew Milne-Smith                 POUR LA DÉFENDERESSE, Delta Airlines Inc.

Katherine Kay                           POUR LA DÉFENDERESSE, Air Canada

Michael Penny                           POUR LA DÉFENDERESSE, United Airlines Inc.

David Kent                                               POUR LA DÉFENDERESSE, Northwest Airlines Inc.

Stanley Wong                                           POUR LA DÉFENDERESSE, l'Association du transport aérien international


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lauzon Bélanger                                                  

Montréal (Québec)                                  POUR LES DEMANDEURS

Ogilvy Renault

Ottawa (Ontario)                                     POUR LA DÉFENDERESSE, Continental Airlines Inc.

McCarthy Tétrault

Montréal (Québec)                                  POUR LA DÉFENDERESSE, American Airlines Inc.

Davies Ward Phillips & Vineberg

Toronto (Ontario)                                    POUR LA DÉFENDERESSE, Delta Airlines Inc.

Stikeman Elliott

Toronto (Ontario)                                    POUR LA DÉFENDERESSE, Air Canada

Torys

Toronto (Ontario)                                    POUR LA DÉFENDERESSE, United Airlines Inc.

McMillan Binch

Toronto (Ontario)                                    POUR LA DÉFENDERESSE, Northwest Airlines Inc.

Davis & Company                                   POUR LA DÉFENDERESSE, l'Association du transport aérien international

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