Larny Holdings Ltd. c. Canada (Ministre de la santé) (1re inst.) [2003] 1 C.F. 541
Date : 20020705
Dossier : T-1716-00
OTTAWA (ONTARIO), LE 5e JOUR DE JUILLET 2002
En présence de : L'HONORABLE JUGE NADON
ENTRE :
LARNY HOLDINGS LIMITED
exploitant une entreprise du nom de QUICKIE CONVENIENCE STORES
Demandeur
et
CANADA (ministre de la Santé)
et JOHN T. ZAWILINSKI, gestionnaire,
Unité de la mise en application des lois sur le tabac, Santé Canada
Défendeurs
ORDONNANCE
ÉTANT DONNÉ une demande de contrôle judiciaire concernant la directive publiée par John T. Zawilinski, gestionnaire de l'Unité de la mise en application des lois sur le tabac, de Santé Canada, en mai 2000 ou vers cette période;
LA COUR DÉCLARE que la vente, par le demandeur, de multi-emballages de cigarettes pour un prix unitaire inférieur au prix demandé pour un seul paquet de cigarettes vendu séparément ne constitue pas, en vertu de l'article 29 de la Loi sur le tabac, un « rabais » offert aux clients.
Le demandeur recevra donc ses frais.
M. Nadon
JUGE
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL.L.
Date : 20020705
Dossier : T-1716-00
Référence neutre : 2002 CFPI 750
ENTRE :
LARNY HOLDINGS LIMITED
exploitant une entreprise du nom de QUICKIE CONVENIENCE STORES
Demandeur
et
CANADA (ministre de la Santé)
et JOHN T. ZAWILINSKI, gestionnaire,
Unité de la mise en application des lois sur le tabac, Santé Canada
Défendeurs
[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire qui vise une « directive » [1], publiée par le défendeur, John T. Zawilinski, agissant en sa capacité de gestionnaire de l'Unité de la mise en application des lois sur le tabac de la région de l'Ontario, de la Direction générale de la protection de la santé de Santé Canada, et reçue par le demandeur le 30 mai 2000. La directive est rédigée comme suit :
[TRADUCTION] Le but de cette lettre consiste à vous informer de la prise de position de Santé Canada concernant les rabais offerts lors de la vente de plusieurs paquets de cigarettes ou de produits du tabac afin de vous aider à vous conformer à l'article 29 de la Loi sur le tabac.
Le but de la Loi sur le tabac est de protéger la santé des Canadiens, particulièrement les jeunes, des effets négatifs de l'usage du tabac. Puisque la promotion des produits de tabac constitue l'une des principales façons d'influencer les attitudes des clients, la restriction de la promotion est une partie essentielle de la Loi. La Loi limite la promotion des produits de tabac, y compris la promotion de vente telle que les rabais, tout en donnant aux fabricants et aux détaillants assez de latitude pour exercer leur liberté d'expression commerciale.
Santé Canada a remarqué que quelques détaillants offraient des rabais à l'achat de plusieurs unités de produits du tabac. Par exemple, un détaillant offre un paquet de cigarettes à 4 $, mais trois paquets à 10 $. Santé Canada est d'avis que cette pratique contrevient à l'article 29 de la Loi sur le tabac.
L'alinéa 29a) indique qu'il est interdit au fabricant et au détaillant :
è d'offrir ou de donner, directement ou indirectement, une contrepartie pour l'achat d'un produit du tabac, notamment un cadeau à l'acheteur ou à un tiers, une prime, un rabais ou le droit de participer à un tirage, à une loterie ou à un concours.
Ainsi, les détaillants doivent s'assurer qu'ils n'offrent pas de rabais à l'achat de plus de une unité de produit de tabac. Le prix de vente de plusieurs paquets de cigarettes doit être le même que si les paquets étaient vendus séparément, c'est-à-dire la somme du prix de vente de chaque paquet. (Par exemple, à 4 $ par paquet, il devrait en coûter 12 $ pour trois paquets).
Veuillez noter que l' « unité » que l'on doit utiliser pour déterminer le prix de base est le produit emballé intact final. Ainsi, une cartouche de cigarettes non ouverte représente une unité de produit de tabac, et un paquet de cigarettes représente une unité de produit de tabac.
Les détaillants sont tout à fait libres d'établir le prix de vente de leurs produits du tabac. Par conséquent, le prix d'une cartouche ou d'un paquet de cigarettes est à la discrétion du détaillant. La restriction de l'article 29 mentionnée plus haut ne s'applique qu'aux rabais offerts pour les ventes de plusieurs paquets.
Veuillez noter qu'à partir du 1er mai 2000, Santé Canada enverra des lettres d'avertissement aux détaillants qui enfreindront la disposition. Tout délit subséquent pourrait mener à une poursuite.
Tout détaillant qui enfreint l'article 29 est coupable d'un acte illégal et passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, pour une première infraction, d'une amende ne dépassant pas 3 000 $ et, pour toute autre infraction subséquente, d'une amende ne dépassant pas 50 000 $. Veuillez prendre les mesures nécessaires pour éviter d'enfreindre cette Loi.
[2] Il faut remarquer que le demandeur a initialement déposé sa demande auprès de la Cour supérieure de Justice de l'Ontario. Cependant, après une discussion et des lettres échangées avec les défendeurs, le demandeur a abandonné cette demande et, le 11 octobre 2000, a déposé la présente demande. Avant l'abandon de la demande du demandeur déposée auprès de la Cour de l'Ontario, une lettre datée du 4 août 2000 a été envoyée par les défendeurs au demandeur. Cette lettre est en partie rédigée comme suit :
[TRADUCTION] Comme je l'ai signalé au cours de notre conversation téléphonique du 2 août, à notre avis, la Cour de l'Ontario n'a pas la compétence permettant de se charger de cette demande. Le demandeur demande jugement contre une personne ayant exercé des pouvoirs prévus par une loi fédérale. En vertu de l'article 18 de la Loi sur la Cour fédérale, la Cour fédérale du Canada possède la compétence exclusive permettant de prononcer le jugement que votre client demande. Nous vous serions donc reconnaissants d'abandonner la demande déposée auprès de la Cour de l'Ontario.
[3] Le 5 août 2000, le juge Blais, avec le consentement des défendeurs, a accueilli la requête de prorogation de délai du demandeur visant à commencer et à déposer la présente demande.
[4] Le demandeur, Larny Holdings Ltd., exploite une entreprise du nom de Quickie Convenience Stores en Ontario et au Québec ( « Quickie » ) et, dans le cadre de ses activités d'entreprise, vend des cigarettes. Au moment en question, Quickie offrait à ses clients un paquet de cigarettes au prix de 4,31 $, plus les taxes, et une cartouche de cigarettes (huit paquets) au prix de 28,49 $, plus les taxes. Quickie offrait également deux paquets ( « multi-emballage » ) de cigarettes au prix de 7,99 $, plus les taxes.
[5] Ainsi, le prix d'un paquet de cigarettes acheté individuellement était de 4,31 $. Si un client achetait un multi-emballage, le prix par paquet était de 4 $, et, si le client achetait une cartouche, le prix par paquet était de 3,56 $. L'offre de deux paquets de cigarettes à un prix par paquet légèrement inférieur au prix par paquet individuel constituait une stratégie de prix que Quickie utilisait depuis environ dix ans. La stratégie de prix de Quickie avait été adoptée en réponse à l'environnement de vente de cigarettes très concurrentiel découlant de l'introduction des stations d'essence libre-service et des dépanneurs indépendants dans le marché de l'Ontario. Le multi-emballage n'était pas offert dans un contenant pré emballé ou un emballage spécial. Le demandeur annonçait simplement qu'il vendrait deux paquets de cigarettes à un prix par paquet inférieur à celui de un seul paquet de cigarettes acheté séparément.
[6] Les défendeurs, le ministre de la Santé et John T. Zawilinski, qui sont responsables de l'administration et de la mise en application de la Loi sur le tabac, L.C. 1997, ch. 13 (la LT), sont d'avis que la vente d'un multi-emballage à un prix inférieur au prix d'un paquet vendu séparément enfreint la LT.
[7] Après avoir reçu deux lettres quelque peu coercitives des défendeurs lui indiquant que la vente de multi-emballages à un prix réduit constituait une pratique illégale, le demandeur en a arrêté la vente.
[8] Le 19 mars 2000, l'Unité de la mise en application des lois sur le tabac, de Santé Canada, a envoyé par lettre un Avis aux établissements vendant des produits du tabac, ce qui comprenait le demandeur. La lettre mentionnait que Santé Canada considérait que la vente de plusieurs paquets de cigarettes pour un prix unitaire inférieur à celui demandé pour un seul paquet de cigarettes vendu séparément constituait un « rabais » et enfreignait donc l'article 29 de la LT. Je fais remarquer, en passant, que la vente d'une cartouche de huit paquets de cigarettes à un prix beaucoup plus réduit par paquet ne constitue pas, selon les défendeurs, une pratique illégale.
[9] La lettre avisait également le demandeur et les autres détaillants qu'après le 1er mai 2000, Santé Canada enverrait des lettres d'avertissement aux détaillants qui, à son avis, continuaient d'enfreindre l'article 29 de la LT et que toute conduite répréhensible subséquente serait passible de poursuite. La lettre mentionnait de plus que tout détaillant qui enfreignait l'article 29 de la LT était coupable d'un acte illégal et donc passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, pour une première infraction, d'une amende ne dépassant pas 3 000 $ et, pour toute autre infraction subséquente, d'une amende ne dépassant pas 50 000 $. La lettre se terminait en conseillant aux détaillants de [TRADUCTION] « prendre les mesures nécessaires pour éviter d'enfreindre la Loi » . Cette lettre type n'était ni signée ni adressée à une personne en particulier.
[10] Le 30 mai 2000, le demandeur a reçu une lettre d'avertissement signée par M. John Zawilinski, laquelle décrivait notamment la prise de position de Santé Canada quant au sens de l'article 29 de la LT. Le contenu de cette lettre était identique à celui de la lettre type précédemment envoyée par les défendeurs, à part deux petits changements : la lettre était adressée personnellement au demandeur et elle était signée par M. Zawilinski.
[11] Le 30 mai 2000, après une menace de poursuite, le demandeur a cessé d'offrir des multi-emballages. Ainsi, la seconde lettre a eu l'effet voulu - au moins sur le demandeur - soit celui de convaincre les détaillants d'arrêter de vendre des multi-emballages pour un prix par paquet inférieur au prix de un seul paquet vendu séparément sans avoir à porter accusation. Ainsi, les produits de la vente de tabac du demandeur ont diminué de un p. 100. Le demandeur a donc perdu environ 6 500 $ par semaine. De plus, le demandeur a vu son nombre de clients diminuer d'environ 2 100 clients par semaine dans ses 38 magasins.
[12] Le demandeur prétend que le fait d'envoyer des lettres coercitives menaçant de poursuite et d'amendes, sur déclaration de culpabilité, allant jusqu'à 50 000 $ a nui à sa stratégie de prix interne. De plus, le demandeur affirme que la lettre constitue en fait une directive de Santé Canada lui ordonnant de renoncer et de mettre fin à quelques-unes de ses stratégies de marketing et de prix. Ainsi, le demandeur demande un contrôle judiciaire visant la lettre qu'il qualifie de directive. Le demandeur demande à la Cour ce qui suit :
1. une déclaration selon laquelle la directive donnée par M. Zawilinski au demandeur est invalide et/ou contraire à la loi;
2. une ordonnance annulant ou rejetant la directive;
3. une ordonnance et/ou injonction provisoire - puis définitive - interdisant et empêchant M. Zawilinski et Santé Canada en général de limiter le prix et la vente par le demandeur de multi-emballages de cigarettes à un prix inférieur ou réduit par paquet par rapport au prix de un seul paquet vendu séparément par le demandeur;
[13] Il semble, selon ce qui a été mentionné précédemment, que le demandeur demande notamment une déclaration indiquant que la vente de plusieurs paquets de cigarettes à un prix inférieur à celui demandé pour un seul paquet de cigarettes vendu séparément ne constitue pas, en vertu de la loi 29 de la LT, un « rabais » .
[14] Avant de me pencher sur le bien-fondé de la demande, je dois aborder un certain nombre de questions de compétence soulevées par les défendeurs. La première question provient de l'affirmation des défendeurs selon laquelle M. Zawilinski n'a pris aucune décision pouvant être examinée et selon laquelle, dans tous les cas, il ne peut pas être considéré comme un « office fédéral » selon la définition de cette expression de l'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R. 1985, ch F-7 (la « Loi » ). Dans la déposition des défendeurs, puisque aucune conséquence juridique ne découle de la décision-lettre de M. Zawilinski, celle-ci ne peut pas être considérée comme une « décision ou une ordonnance » en vertu du paragraphe 18.1 de la Loi. La déposition des défendeurs concernant ce point apparaît aux paragraphes 6 à 9 de leur Mémoire des faits et du droit, qui sont rédigés comme suit :
6. [TRADUCTION] L'article 2 de la Loi sur la Cour fédérale, lorsqu'il définit l'expression « office fédéral » , ne considère pas tous les actes d'omission d'un ministre ou d'un fonctionnaire de la Couronne comme une décision d'un office fédéral. La décision doit être prise conformément à une loi fédérale ou en vertu d'une loi fédérale, ou il doit y avoir, tout au moins, une menace d'utilisation future de cette autorité, c'est-à-dire qu'il doit y avoir des conséquences juridiques concrètes découlant de l'action ou de la décision de l'office. Aucune conséquence de ce genre ne découle directement de l'opinion des défendeurs dans le présent cas. [Sources omises].
7. De plus, une activité comprenant la formulation d'une opinion qui n'a pas d'effet obligatoire concernant la façon dont les dispositions d'une loi sont perçues quant à leur application ne fait pas partie du type de décisions d'un office fédéral pouvant être susceptible d'un examen. [Sources omises].
8. Une recommandation visant à porter accusation ou à dénoncer ne peut pas être plus sujette à un contrôle judiciaire que la recommandation du ministre transmise au gouverneur en conseil concernant le fait que certaines propositions de modifications apportées à la loi soient sujettes à un examen. [Sources omises].
9. Les défendeurs n'ont aucun pouvoir direct permettant de faire mettre en application l'opinion énoncée. Ils ne peuvent pas imposer de sanction, retirer de permis ou directement avoir un effet sur le demandeur quant à ce qu'ils peuvent considérer comme une violation de l'article 29 de la Loi. Tout ce qu'ils peuvent faire, comme cela est mentionné plus bas, c'est dénoncer le demandeur afin de commencer le processus d'accusation du demandeur. Par la suite, le procureur et, finalement, la Cour, auront le dernier mot quant à savoir s'il y a eu violation et à la pénalité à imposer.
[15] Pour les motifs qui suivent, je suis d'avis que la position des défendeurs est incorrecte. Je commence par les remarques du juge Décary dans l'arrêt Gestion Complexe Cousineau (1989) Inc. c. Canada (Ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, [1995] 2 C.F. 694 (C.A.), où, aux pages 700 à 705, il déclare, en termes non équivoques, que le contrôle judiciaire, en vertu de l'article 18 de la Loi, est englobant et accessible aux demandeurs :
[TRADUCTION] L'expression « pouvoirs prévus par une loi fédérale » qu'on retrouve dans la définition d' « office fédéral » est particulièrement englobante et ne permet pas la restriction qu'y suggère le ministre. [...]
Faut se rappeler qu'en l'espèce, il s'agit de déterminer le droit d'accès d'un plaideur au contrôle judiciaire de cette Cour dans le contexte d'une disposition législative - l'alinéa 18(1)a) de la Loi sur la Cour fédérale - par laquelle le Parlement a voulu assujettir l'administration fédérale au pouvoir de surveillance de cette Cour. Il ne me semble pas nécessaire de chercher à dénaturer le sens usuel des mots ou à les vider de tout sens pratique en recourant à des nuances propres au langage constitutionnel qui produiraient des effets stérilisants contraires à l'intention du législateur.
En modifiant en 1990 l'alinéa 18(1)a) de la Loi sur la Cour fédérale de manière à désormais permettre le contrôle judiciaire des décisions prises dans le cadre de l'exercice d'une prérogative royale, le Parlement, à n'en pas douter, faisait une concession considérable au pouvoir judiciaire et infligeait un recul extrême à la Couronne en tant que pouvoir exécutif, si tant est que l'on puisse qualifier de recul le fait d'assujettir l'État encore davantage au pouvoir judiciaire. Ce qu'il faut retenir, de cette modification importante, c'est que le Parlement ne s'est pas satisfait de l'assujettissement au pouvoir judiciaire de l' « administration fédérale » dans le sens traditionnel de cette expression mais qu'il a voulu que bien peu de chose, désormais, ne soit à l'abri du contrôle judiciaire. Dans ce contexte, j'avoue avoir du mal à donner à l'alinéa 18(1)a) une interprétation telle qu'elle mette les ministres à l'abri de ce contrôle lorsqu'ils exercent les pouvoirs de gestion les plus usuels de la Couronne, codifiés par surcroît par législation et règlement.
Ce serait là, je le dis avec égards, avoir une conception dépassée du contrôle de l'administration gouvernementale. La « légalité » des actes posés par l'administration, qui est l'objet même du contrôle judiciaire, ne se détermine pas seulement en fonction de l'observation des exigences législatives et réglementaires expresses. [...]
Cette approche libérale des termes de l'alinéa 18(1)a) n'est pas nouvelle pour cette Cour. Elle s'explique aisément, pour peu que l'on se place du point de vue du plaideur et que l'on soit conscient de la tendance du Parlement lui-même à rendre l'administration de plus en plus responsable de ses actes. [...]
Le Parlement a fait des efforts considérables, ces dernières années, pour adapter la compétence de cette Cour aux réalités contemporaines et pour éliminer les problèmes de compétence qui avaient considérablement terni l'image de la Cour. Entre une interprétation qui favorise l'accès au contrôle judiciaire et assoit la compétence de la Cour sur une base ferme et uniforme et une interprétation qui restreint l'accès au contrôle judiciaire, segmente la compétence de la Cour en fonction de critères incertains et impraticables et amène inéluctablement une avalanche de débats liminaires, le choix s'impose de lui-même. [Renvois omis]. [Non souligné dans l'original].
[16] En vertu de l'alinéa 18(1)a) de la Loi, la Section de première instance de la Cour a compétence notamment pour accorder un jugement déclaratoire contre tout « office fédéral » . L'article 18 de la Loi doit être lu conjointement avec l'alinéa 18.1(3)b), qui donne les pouvoirs suivants à la Section de première instance :
18.1 (3) Sur présentation d'une demande de contrôle judiciaire, la Section de première instance peut : [...]b) déclarer nul ou illégal, ou annuler, ou infirmer et renvoyer pour jugement conformément aux instructions qu'elle estime appropriées, ou prohiber ou encore restreindre toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l'office national. |
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18.1 (3) On an application for judicial review, the Trial Division may [...] (b) declare invalid or unlawful, or quash, set aside or set aside and refer back for determination in accordance with such directions as it considers to be appropriate, prohibit or restrain, a decision, order, act or proceeding of a federal board, commission or other tribunal. |
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[17] Lorsqu'on lit le paragraphe précédent, il est clair que tous les actes ou les procédures, tout comme les décisions et les ordonnances d'un office fédéral, sont sujets au contrôle judiciaire. Le sens des mots « décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte » a été examiné par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Morneault c. Canada (Procureur général), [2001] 1 C.F. 30 (C.A.). La question de ce cas consistait notamment à savoir si les conclusions de fautes individuelles de certains individus nommés tirées par la Commission d'enquête sur le déploiement de 1992 des Forces canadiennes en Somalie constituaient des décisions sujettes au contrôle judiciaire en vertu de l'alinéa 18.1(4)d) de la Loi. Lorsqu'il s'est penché sur cette question, le juge Stone, au nom de la Cour d'appel, a fait remarquer ce qui suit aux pages 61 à 64 :
[40] À mon avis, il s'agit d'une question d'interprétation de la loi. Toutefois, il n'est pas clair que les similitudes qui existent sur le plan de la procédure constituent en tant que telles un fondement valable permettant de conclure que les conclusions en question sont des « décisions » susceptibles d'être examinées en vertu de l'alinéa 18.1(4)d). Notre Cour a eu à maintes reprises à interpréter l'expression « décision ou ordonnance [. . .] résultant d'un processus [. . .] ayant légalement [un] caractère judiciaire ou quasi judiciaire--rendue par un office fédéral ou à l'occasion de procédures en cours devant cet office » figurant à l'article 28 de la Loi tel qu'il était libellé avant d'être modifié en 1990. Comme l'ont signalé D. J. M. Brown et J. M. Evans, dans l'ouvrage intitulé : Judicial Review of Administrative Action in Canada, édition en feuilles mobiles (Toronto: Canvasback Publishing, 1998), au paragraphe 2:4420, note 376 : [traduction] « La Cour a initialement restreint la portée de l'expression aux décisions ou ordonnances « définitives » et aux décisions ou ordonnances que l'office était expressément chargé de rendre en vertu de sa loi habilitante » , mais la portée de l'article 28 a par la suite été [traduction] « élargie de façon à inclure une décision qui déterminait pleinement les droits fondamentaux de la partie, même si la décision de l'office n'était peut-être pas définitive » . En fait, une recommandation faite à un ministre par un tribunal d'enquête qui devait normalement entraîner une expulsion a été considérée comme susceptible d'être examinée. [sources omises]
[41] [...] Toutefois, je dois reconnaître la force de l'argument contraire, à savoir qu'un contrôle de conclusions telles que celles qui sont ici en cause est possible pour le motif énoncé à l'alinéa 18.1(4)d), et ce, même s'il s'agit d'opinions qui n'ont pas d'effet obligatoire, à cause du tort sérieux que des conclusions non étayées par le dossier pourraient causer à la réputation d'une personne. [Non souligné dans l'original].
[42] S'il n'existe aucun motif justifiant l'octroi d'une réparation en vertu de cet alinéa, je suis néanmoins d'avis que les conclusions en cause peuvent être examinées en vertu de la disposition en question. Le contrôle judiciaire prévu à l'article 18.1 n'est pas limité à « une décision ou une ordonnance » . C'est ce qui ressort clairement du paragraphe 18.1(1), qui permet au procureur général du Canada et à « quiconque est directement touché » de solliciter le contrôle judiciaire. II ressort clairement de la disposition dans son ensemble que, si d'une part une décision ou une ordonnance est une question qui peut être examinée, d'autre part une question autre qu'une décision ou une ordonnance peut également être examinée. C'est ce que montre la décision que notre Cour a rendue dans l'affaire Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476 (C.A.). Dans cette décision, il a été statué qu'une demande de contrôle judiciaire présentée conformément à l'article 18.1 en vue de l'obtention du bref de mandamus, du bref de prohibition et du jugement déclaratoire prévus à l'article 18 [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 4] de la Loi, sont des questions sur lesquelles la Cour a compétence et que la Cour peut accorder la réparation appropriée conformément aux alinéas 18.1(3)a) 18.1(3)b). [Autres sources omises]. Je suis convaincu que l'intimé est directement touché par les conclusions et que celles-ci peuvent être examinées en vertu de l'article 18.1. Les conclusions sont exceptionnellement importantes pour l'intimé à cause des conséquences qu'elles ont sur sa réputation. La Cour doit être en mesure de déterminer si, comme il a été allégué, les conclusions sont injustifiables compte tenu de la preuve.
[43] Pour pouvoir être examinée en vertu de l'article 18.1, une question doit néanmoins émaner d'un « office fédéral » . Tel était le cas dans l'affaire Krause, précitée. L'expression « office fédéral » est définie au paragraphe 2(1) de la Loi comme s'entendant d'un « Conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne [. . .] ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale » . À mon avis, la Commission est visée par cette définition, car son mandat lui a été dévolu par le décret du 20 mars 1995, tel qu'il a subséquemment été modifié, et ses pouvoirs d'enquête ainsi que son pouvoir de tirer des conclusions relatives à une faute lui sont dévolus par la Loi sur les enquêtes. [Sources omises].
[18] Les remarques formulées par le juge Stone dans l'arrêt Morneault, précité, tout comme celles formulées par le juge Décary dans l'arrêt Gestion Complexe, précité, indiquent que le contrôle judiciaire, en vertu de l'article 18 de la Loi, doit être interprété de façon englobante et libérale, donc qu'une grande gamme de procédures administratives feront partie du mandat de contrôle judiciaire de la Cour. Il est également clair que le contrôle judiciaire n'est plus limité aux décisions ou aux ordonnances dont un décideur avait été chargé selon la loi habilitante. Au lieu de cela, le contrôle judiciaire touchera les décisions ou les ordonnances qui déterminent les droits d'une partie, même si la décision en question ne constitue pas la décision finale. Il s'ensuit également, depuis la décision rendue par la Cour d'appel dans l'arrêt Morneault, précité, que le mot « question » que l'on retrouve à l'article 18.1 de la Loi n'est pas limité aux « décisions ou [aux] ordonnances » , mais englobe toute question pour laquelle une réparation pourrait être possible en vertu de l'article 18 ou du paragraphe 18.1(3).
[19] Dans l'arrêt Moumdjian c. Canada (Comité de surveillance du renseignement de sécurité), [1999] 4 C.F. 624 (C.A.), le juge Robertson a conclu ceci : [TRADUCTION] « Une décision qui prend la forme d'une recommandation ou d'un conseil au ministre ou au gouverneur en conseil et à laquelle ces derniers donneront vraisemblablement suite doit être assujettie au contrôle judiciaire, ne serait-ce que parce que les conséquences découlant d'une décision erronée ou d'une procédure viciée revêtiront invariablement une importance fondamentale aux yeux de ceux dont les droits seront de ce fait lésés » . Il a ensuite conclu, après un examen approfondi de la jurisprudence pertinente que l'expression « "décision ou ordonnance" n'a pas un sens figé ou précis, mais que ce sens est plutôt tributaire du cadre législatif dans lequel s'inscrit la décision de nature consultative "compte tenu des conséquences qu'une telle décision peut avoir sur les droits et libertés de ceux qui cherchent à obtenir un contrôle judiciaire" » .
[20] Je ferai référence à un dernier arrêt sur cette question. Dans l'arrêt Markevich c. Canada (Procureur général (1re inst.), [1999] 3 C.F. 28, le juge Evans, aux paragraphes 9 à 13 (pages 36 à 38), fait les remarques suivantes :
[9] La défenderesse conteste la compétence de la Cour en la matière, par ce motif que seule une « décision ou ordonnance » peut faire l'objet du recours en contrôle judiciaire prévu à l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale. La lettre envoyée au nom du ministre, identifiée dans la requête introductive d'instance du demandeur comme étant l'objet du recours en contrôle judiciaire, n'était qu'un moyen d'information et n'entendait délimiter ou affecter ses droits ou obligations de quelque manière que ce soit. Elle n'était pas une « décision ou ordonnance » et, de ce fait, échappait au contrôle de la Cour. D'ailleurs, le juge Teitelbaum a tiré, dans Fuchs c. R., [1997] 2 C.T.C. 246 (C.F. 1re inst.), la même conclusion sur des faits fort semblables.
[10] Je ne partage pas cette conception plutôt restrictive de ce qui peut relever du pouvoir de contrôle de la Cour. Les mots « décision ou [. . .] ordonnance » se trouvent au paragraphe 18.1(2) de la Loi sur la Cour fédérale, aux termes duquel la demande de contrôle judiciaire doit être présentée dans les 30 jours qui suivent la première communication, par l'office fédéral, de « sa décision ou de son ordonnance » . À mon avis, ce paragraphe ne fait que prévoir le délai dans lequel la demande de contrôle judiciaire contre une décision ou ordonnance doit normalement être introduite, sous peine de prescription. Il ne dit pas que seules les décisions ou ordonnances peuvent faire l'objet d'un recours en contrôle judiciaire, il ne dit pas non plus qu'une mesure administrative autre qu'une décision ou ordonnance est soumise au délai de prescription de 30 jours; voir Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476 (C.A.).
[11] Il me semble que les matières sujettes à contrôle judiciaire sont prévues au paragraphe 18.1(3), aux termes duquel la Section de première instance, saisie du recours, peut ordonner à l'office fédéral concerné d'accomplir tout acte qu'il a illégalement omis ou refusé d'accomplir, ou déclarer nul ou illégal, renvoyer pour jugement, ou prohiber ou restreindre « toute décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte de l'office fédéral » [non souligné dans l'original]. Les mots « procédure ou tout autre acte » ont clairement une portée générale et peuvent comprendre une grande diversité d'actions administratives qui ne sont pas pour autant des « décisions ou ordonnances » , par exemple les règlements, rapports ou recommandations relevant de pouvoirs légaux, les énoncés de politique, lignes directrices et guides, ou l'une quelconque des formes multiples que peut prendre l'action administrative dans la prestation d'un programme public par un organisme public; voir Krause c. Canada, précité.
[12] N'est cependant considéré comme « procédure ou tout autre acte » susceptible de contrôle judiciaire que l'acte administratif qui représente une « procédure ou tout autre acte » d'un « office fédéral » , savoir un conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne « ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale » (paragraphe 2(1) [mod. par L.C. 1990, ch. 8, art. 1] de la Loi sur la Cour fédérale). La lettre envoyée au demandeur au nom du ministre, et qui fait l'objet de ce recours en contrôle judiciaire, n'était certes ni un acte ni une procédure d'un office fédéral dans l'exercice d'un pouvoir légal, mais le ministre est une personne ayant les pouvoirs légaux, qu'il tient de la Loi de l'impôt sur le revenu.
[13] Même si elle ne s'inscrit pas dans l'exercice d'un pouvoir légal, la mesure administrative prise par une personne ayant des pouvoirs légaux peut être soumise au contrôle judiciaire à titre de « procédure ou tout autre acte » par application de l'alinéa 18.1(3)b) si elle touche aux droits ou intérêts d'individus. La lettre en question ne comportait aucune décision prise en application d'un pouvoir légal, ni n'était expressément censée porter atteinte à un droit ou intérêt quelconque du demandeur. Cependant, on peut raisonnablement interpréter ce document ainsi que les communications entre le demandeur et Mme Kara, sa rédactrice, comme signifiant que Revenu Canada avait décidé de procéder au recouvrement de l'impôt en souffrance et entendait faire le nécessaire pour recouvrer la dette fiscale antérieurement « radiée » . Et tel était effectivement le cas, comme en témoignent les sommations de payer envoyées par la suite. [Non souligné dans l'original].
[21] Les faits, dans l'arrêt Markevich, précité, étaient que le demandeur devait un montant d'impôt, qui a ensuite été « radié » par Revenu Canada parce qu'il ne semblait pas y avoir de chance réaliste de récupérer la dette dans un avenir assez rapproché. Ainsi, son relevé de compte de 1993 de Revenu Canada indiquait un solde nul. Cependant, en 1998, une Mme Kara de Richmond (Colombie-Britannique), du bureau de Revenu Canada, a envoyé une lettre au demandeur lui signalant qu'il devait plus de 770 000 $ en impôt rétroactif. Mme Kara, au nom du ministre, a indiqué, dans sa lettre, que Revenu Canada avait décidé d'essayer de récupérer l'impôt non payé et avait l'intention de prendre des mesures pour récupérer la dette préalablement « radiée » .
[22] Le juge Evans a conclu que, nonobstant le fait que la lettre ne contenait « aucune décision prise en application d'un pouvoir légal, ni n'était expressément censée porter atteinte à un droit ou intérêt quelconque du demandeur » , la lettre constituait quand même un acte susceptible d'être examiné par la Cour.
[23] En tenant compte de la jurisprudence précédente, je me penche maintenant sur les faits du cas m'étant présenté. Je suis entièrement d'accord avec le demandeur quant au fait que la directive des défendeurs ne peut être qualifiée de la façon dont le suggèrent les défendeurs, c'est-à-dire en tant qu'opinion ou lettre d'avertissement : (i) non délivrée conformément à une autorité législative particulière, mais plutôt par courtoisie pour informer le demandeur de la position des défendeurs concernant l'article 29 de la LT; (ii) dont aucune conséquence juridique n'influence le demandeur; (iii) représentant une « opinion non obligatoire » quant au respect de l'interprétation de l'article 29 de la LT; (iv) représentant une « recommandation » de poursuivre le demandeur en vertu de la LT.
[24] La directive envoyée par les défendeurs est à mon avis coercitive, et son but consiste à menacer le demandeur afin qu'il arrête immédiatement de vendre des multi-emballages à défaut de quoi une accusation serait portée, et une poursuite au criminel pourrait être intentée. Je suis convaincu que les défendeurs espéraient que se produise ce qui s'est effectivement produit, c'est-à-dire que le demandeur arrête de vendre des multi-emballages afin d'éviter une poursuite au criminel. Comme je l'ai déjà mentionné, la décision du demandeur d'arrêter de vendre des multi-emballages lui a causé des pertes d'argent.
[25] Je suis donc d'avis que la lettre envoyée par M. Zawilinski constitue une « décision, ordonnance, procédure ou tout autre acte » et qu'elle est susceptible d'examen par la Cour. Je n'ai également aucune hésitation à conclure qu'en envoyant la directive, M. Zawilinski était un « office fédéral » au sens du sous-paragraphe 2(1) de la Loi, qui définit cette expression dans les termes suivants :
2. (1) [...] « office fédéral » Conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne ou groupe de personnes, ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale ou par une ordonnance prise en vertu d'une prérogative royale, à l'exclusion d'un organisme constitué sous le régime d'une loi provinciale ou d'une personne ou d'un groupe de personnes nommées aux termes d'une loi provinciale ou de l'article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867.
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2. (1) [...] "federal board, commission or other tribunal" means any body or any person or persons having, exercising or purporting to exercise jurisdiction or powers conferred by or under an Act of Parliament or by or under an order made pursuant to a prerogative of the Crown, other than any such body constituted or established by or under a law of a province or any such person or persons appointed under or in accordance with a law of a province or under section 96 of the Constitution Act, 1867;
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[26] Dans leur ouvrage intitulé Judicial Review of Administrative Action in Canada (Toronto: Canvasback Publishing, 1998, édition en feuilles mobiles), les savants auteurs Donald J. M. Brown, c.r., et l'honorable John M. Evans font, au paragraphe 2-45, les remarques suivantes concernant le sens de l'expression « office fédéral » qui se trouve au sous-paragraphe 2(1) de la Loi :
[TRADUCTION] En fin de compte, la source de la compétence d'un tribunal - et non pas la nature du pouvoir exercé ou de l'office l'exerçant - est le premier facteur déterminant quant à savoir si elle fait partie de la définition. Le test consiste à chercher à savoir si l'office détient les pouvoirs en vertu d'une ordonnance délivrée loi fédérale ou d'une ordonnance conformément à une prérogative de la Couronne fédérale. [...]
La note en bas de page 250, qui apparaît également dans le paragraphe 2-45, est également pertinente :
250 [TRADUCTION] Il faut remarquer que, parce que l'expression « office fédéral » est définie comme incluant une personne « ayant, exerçant ou censée exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale » , il n'est peut être pas nécessaire d'établir que la procédure administrative évaluée a été entreprise au cours de l'exercice d'un pouvoir accordé par une loi. [...]
[27] Je suis tout à fait d'accord avec le point de vue de ces auteurs : comment peut-on dire, dans le présent cas, que M. Zawilinski n'était pas une personne « ayant, exerçant ou censée exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale » ? Si M. Zawilinski n'était pas tout au moins censé exercer une compétence prévue par la LT, on peut se demander ce qu'il faisait.
[28] Tandis qu'il peut être vrai qu'aucune disposition de la LT ne confère à M. Zawilinski de compétence particulière lui permettant d'envoyer la lettre en question au demandeur, cela ne signifie pas, à mon avis, que M. Zawilinski n'était pas un « office fédéral » . À mon avis, M. Zawilinski était tout au moins censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par la LT.
[29] Les défendeurs soulèvent deux autres questions de compétence. D'abord, ils ont prétendu que la Cour fédérale, Section de première instance, ne représentait pas le bon tribunal pour déterminer le sens de l'article 29 de la LT, mais que le bon tribunal était la Cour provinciale, une cour de poursuites sommaires. Ils soutiennent également que la demande déposée par le demandeur est précoce, du fait qu'il n'y a pas de litige entre les parties et qu'avant que le demandeur ne soit accusé d'une infraction en vertu de la LT, la demande est précoce. Les défendeurs affirment que le demandeur ne peut obtenir de déclaration judiciaire concernant l'interprétation de l'article 29 de la LT que de la cour qui a compétence quant au procédé de poursuites sommaires. Puisque aucune accusation n'a été portée contre le demandeur, ce procédé n'a pas encore commencé.
[30] Si le demandeur suivait la logique des défendeurs, il se serait exposé à des risques et à des dépenses de poursuite au criminel afin d'obtenir une déclaration concernant l'interprétation de l'article 29 de la LT, et plus particulièrement le fait de savoir si la vente de multi-emballages constitue un « rabais » en vertu de l'article. En d'autres mots, le demandeur devrait se conduire de façon à censément enfreindre la loi, attendre une accusation, subir le préjudice qui découlerait de l'accusation, puis dépenser des sommes importantes pour défendre son accusation. Cela n'est sûrement pas la solution aux difficultés du demandeur. Comme l'a déclaré le juge Farwell aux pages 420-421 de l'arrêt Dyson c. Procureur général, [1911] 1 K.B. 410 (C.A.) :
[TRADUCTION] Maintenant, l'action ne demande pas de déclaration relative à une pénalité; la plainte est que la législature a conféré à un ministère du gouvernement (les commissaires de Inland Revenue) la tâche de s'assurer que des requêtes particulières présentées d'une façon particulière provenant de propriétaires et exigeant des réponses leur soient envoyées et a imposé une pénalité de 50 £ en cas de désobéissance. Le demandeur allègue que les commissaires avaient outrepassé leurs pouvoirs en n'autorisant pas la présentation des requêtes, en n'allouant pas assez de temps pour les réponses et en exigeant que les réponses soient envoyées à des personnes non autorisées à les recevoir et qui peuvent nuire aux intérêts du demandeur si elles les reçoivent [...] il y aurait tache sur notre système de loi et de procédure s'il n'y avait pas de façon dont une décision à la limite réelle du pouvoir inquisitorial accordé aux commissaires pourrait être obtenue par tout membre du public touché sans qu'il ne doive se mettre dans la difficile position d'être poursuivi pour pénalité. Je suis d'avis, cependant, que l'allégation du procureur général ne comporte pas de bien-fondé.
[31] Le juge Farwell a poursuivi en déclarant, à la page 424, que [TRADUCTION] « ... les Cours sont la seule défense des libertés du sujet contre l'agression d'un ministère » . Les paroles du juge Farwell semblent être très appropriées dans le cas présent, puisque les arguments des défendeurs sont que M. Zawilinski a agi sans pouvoir légal lorsqu'il a envoyé la directive qui est en litige dans cette instance.
[32] À mon avis, le jugement déclaratoire constitue la seule réparation appropriée dans le présent cas. Dans l'arrêt Operation Dismantle c. La Reine, [1985] 1 F.C.R. 441, le juge Dickson a indiqué que, pour obtenir une mesure de redressement déclaratoire, une personne n'a qu'à démontrer qu'un [Traduction] « intérêt juridique quelconque ou que l'un de ses droits est en péril ou est gravement menacé » . Le raisonnement du juge Dickson est le suivant (page 451) :
Il ne s'agit pas par là de nier le rôle préventif du jugement déclaratoire. Comme le juge Wilson le fait remarquer dans ses motifs, Borchard, dans Declaratory Judgments (2nd ed. 1941), à la p. 27, dit ceci :
[TRADUCTION] ... il n'est pas nécessaire qu'un « préjudice » ou un « acte dommageable » ait été vraiment commis ou menace de l'être pour que le demandeur puisse demander à la justice d'intervenir : il n'a qu'à démontrer un intérêt juridique quelconque ou que l'un de ses droits est en péril ou est gravement menacé...
Néanmoins, la fonction préventive du jugement déclaratoire doit être fondée sur autre chose que des conséquences purement hypothétiques : il doit y avoir un intérêt juridique menacé qui soit identifiable avant que les tribunaux n'envisagent d'y avoir recours comme mesure préventive. Comme cette Cour l'a déclaré dans l'arrêt Solosky c. La Reine, [1980] 1 R.S.C. 821 un jugement déclaratoire peut influer sur des droits éventuels, mais pas lorsque le litige en cause est purement hypothétique [...]
[33] Le cas présent n'en est sûrement pas un où le litige entre les parties est purement hypothétique. À mon avis, il y a un litige réel et sérieux entre les parties concernant l'interprétation de l'article 29 de la LT. Il est certainement justifié que le demandeur, étant donné les faits du cas, demande réparation à la Cour sans avoir à se soumettre à une poursuite au criminel.
[34] Le résultat de la question est que les défendeurs avaient la liberté de porter accusation contre le demandeur et donc de demander une interprétation de l'article 29 de la LT auprès de la cour des poursuites sommaires. Cependant, les défendeurs n'ont pas porté accusation contre le demandeur, mais ont plutôt envoyé des lettres coercitives dans l'espoir qu'il obéirait sans qu'il ne soit nécessaire de porter accusation. Dans ces circonstances, je suis convaincu que la Cour constitue un bon tribunal. Je suis également convaincu que cette demande de contrôle judiciaire n'est pas précoce.
[35] Je me penche maintenant sur le bien-fondé de la demande. La seule question de décision consiste à savoir si la vente de multi-emballages de cigarettes à un prix par paquet légèrement inférieur à celui d'un paquet vendu séparément constitue un rabais contraire à la loi en vertu de l'alinéa 29a) de a LT. Pour les motifs qui suivent, ma réponse à cette question est non.
[36] Les articles pertinents de la LT sont rédigés comme suit :
2. [...]
« produit de tabac » Produit fabriqué à partir du tabac, y compris des feuilles et des extraits de celles-ci; y sont assimilés les tubes, papiers et filtres à cigarette. Sont toutefois exclus de la présente définition les aliments, drogues et instruments contenant de la nicotine régis par la Loi sur les aliments et drogues.
**********
4. La présente loi a pour objet de s'attaquer, sur le plan législatif, à un problème qui, dans le domaine de la santé publique, est grave et d'envergure nationale et, plus particulièrement : a) de protéger la santé des Canadiennes et Canadiens compte tenu des preuves établissant, de façon indiscutable, un lien entre l'usage du tabac et de nombreuses maladies débilitantes ou mortelles; b) de préserver notamment les jeunes des incitations à l'usage du tabac et du tabagisme qui peut en résulter; c) de protéger la santé des jeunes par la limitation de l'accès au tabac; d) de mieux sensibiliser la population aux dangers que l'usage du tabac présente pour la santé. ********** 18. (1) Dans la présente partie, « promotion » s'entend de la présentation, par tout moyen, d'un produit ou d'un service - y compris la communication de renseignements sur son prix ou sa distribution -, directement ou indirectement, susceptible d'influencer et de créer des attitudes, croyances ou comportements au sujet de ce produit ou service.
**********
29. Il est interdit au fabricant et au détaillant a) d'offrir ou de donner, directement ou indirectement, une contrepartie pour l'achat d'un produit du tabac, notamment un cadeau à l'acheteur ou un tiers, une prime, un rabais ou le droit de participer à un tirage, à une loterie ou à un concours; [Le souligné est le mien].
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2. [...]
"tobacco product" means a product composed in whole or in part of tobacco, including tobacco leaves and any extract of tobacco leaves. It includes cigarette papers, tubes and filters but does not include any food, drug or device that contains nicotine to which the Food and Drug Act applies.
**********
4. The purpose of this Act is to provide a legislative response to a national public health problem of substantial and pressing concern and, in particular, (a) to protect the health of Canadians in light of conclusive evidence implicating tobacco use to the incidence of numerous debilitating and fatal diseases; (b) to protect young persons and others from inducements to use tobacco products and the consequent dependence on them; (c) to protect the health of young persons by restricting access to tobacco products; and
(d) to enhance public awareness of the health hazards of using tobacco products.
********** 18. (1) In this Part, "promotion" means a representation about a product or service by any means, whether directly or indirectly, including any communication of information about a product or service and its price and distribution, that is likely to influence and shape attitudes, beliefs and behaviours about the product or service.
**********
29. No manufacturer or retailer shall (a) offer or provide any consideration, direct or indirect, for the purchase of a tobacco product, including a gift to a purchaser or a third party, bonus, premium, cash rebate or right to participate in a game, lottery or contest; [emphasis added] |
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[37] Comme cela est évident dans l'article 4 de la LT, le but de la LT consiste à protéger la santé des Canadiens, plus particulièrement à préserver les jeunes des incitations à l'usage du tabac et à restreindre leur accès à ces produits. C'est pour cela que l'article 19 de la LT interdit la promotion des produits du tabac, sauf dans les cas autorisés par la LT ou le règlement y afférent. L'article 29, dont le titre est « Promotion des ventes » , se trouve dans la partie V de la LT intitulée « Promotion » .
[38] Le demandeur prétend que la vente de multi-emballages ne contrevient pas à l'intention, au but, au point de mire principal ou à l'objectif primordial de la LT, non plus qu'elle ne provoque de préjudice que cette loi est destinée à empêcher. Selon le demandeur, la vente de multi-emballages reflète plutôt simplement sa stratégie de prix interne et sa décision économique de générer moins de profit, par paquet, résultant de la vente de multi-emballages en réponse à la stratégie de prix utilisée par ses compétiteurs dans l'environnement très concurrentiel et le marché de la vente au détail de cigarettes. Le demandeur fait également valoir que sa stratégie de vente ne constitue pas un moyen de promouvoir la vente de cigarettes en influençant ou en créant des attitudes, croyances ou comportements au sujet des cigarettes, comme cela est mis en évidence dans les articles 18 et 29 de la LT.
[39] En prétendant que la vente de multi-emballages contrevient à l'article 29, les défendeurs soutiennent que le sens de l'article 29 peut être fondé sur l'utilisation du mot « unité » et le sens apparent qu'ils ont attribué à ce mot. Dans la directive envoyée au demandeur, les défendeurs sont de l'avis qu'une « unité » est une cartouche de cigarettes non ouverte ou un seul paquet de cigarettes. Ainsi, de l'avis des défendeurs, les commerçants sont libres d'établir le prix de vente de leurs produits du tabac, c'est-à-dire de « l'unité » . Puisque les multi-emballages ne constituent pas des « unités » , ils ne peuvent pas être vendus, selon les défendeurs, à un prix qui est inférieur au prix de vente d'un paquet individuel. La position des défendeurs apparaît aux paragraphes 52 à 54 de leur Mémoire des faits et du droit, qui est rédigé comme suit :
[Traduction]
52. En réponse aux paragraphes 57 à 61, même s'il n'y a pas de définition du terme « unité » dans la Loi, l'interprétation donnée par les défendeurs dans les lettres en question est en accord avec le stratagème frauduleux. L'utilisation du mot « unité » ne se voulait qu'à titre d'illustration.
53. Présentement, la réalité, qui est confirmée par la preuve du demandeur même et qui est suffisamment notoire, au cas où l'honorable Cour le considérerait comme un fait notoire, est que les cigarettes se vendent en paquets individuels ou en cartouches de huit paquets.
54. Des prix peuvent être établis par cartouche ou par paquet pour des raisons d'ordre pratique et les motifs pour lesquels ils sont produits. Cependant, une fois qu'une cartouche est ouverte, elle devient un ensemble de huit paquets individuels. Il n'y a aucune preuve, au dossier, selon laquelle les paquets de cigarettes sont emballés en cartouches plus petites ou en mini cartouches. Ainsi, le demandeur incite le client à acheter plus de un paquet de cigarettes, c'est-à-dire plus de une unité.
[40] Malheureusement pour les défendeurs, je ne vois aucun bien-fondé dans cet argument. Le terme « unité » n'est défini nulle part dans la LT ou dans le règlement y afférent[2]. La définition de l'expression « produit de tabac » que l'on retrouve à l'article 2 de la LT n'inclut pas le terme « unité » et n'y fait pas référence. Le fait que le tabac soit généralement vendu en cartouche ou en paquets individuels n'est selon moi pas du tout pertinent quant à l'interprétation de l'alinéa 29a) de la LT.
[41] La seule question, comme je l'ai déjà mentionné, consiste à savoir si la vente de multi-emballage constitue un rabais en vertu de l'alinéa 29a). Dans l'arrêt R. c. Rothmans, Benson & Hedges Inc. (3 mai 1996), Montréal 500-27-000567-919 (S.Q.), le défendeur a été accusé de ce qui suit :
[TRADUCTION] À Montréal, dans le district de Montréal, le 20e jour de novembre 1990 ou vers cette date, être un distributeur offrant illégalement un rabais en échange de l'achat de produits du tabac, notamment une offre de rabais de 1 $ pour chaque ensemble de 800 cartouches de cigarettes Mark Ten, à raison de huit paquets de 25 cigarettes par cartouche, King size, vendues à Sue Shang Wholesale Red., commettant ainsi une infraction en vertu du paragraphe 7(2) et du sous-alinéa 18(1)(i)a)(i) de la Loi réglementant les produits du tabac, L.C. 1988, ch 20.
[42] La question présentée à la Cour consistait à savoir si la méthode par laquelle le défendeur faisait la promotion de ses cigarettes Mark Ten constituait un « rabais » au sens de la Loi réglementant les produits du tabac, la prédécesseure de la LT. Le paragraphe de cette Loi était rédigé comme suit :
Il est interdit d'offrir un cadeau ou une remise, ou la possibilité de participer à un concours, une loterie ou un jeu, en contrepartie de l'achat d'un produit du tabac ou de la production d'une preuve d'achat de celui-ci.
[43] Après un examen approfondi des définitions des mots « rabais » et « remise » du dictionnaire et de la jurisprudence pertinente, le juge Morand, de la Cour du Québec, a conclu ce qui suit à la page 5 :
[TRADUCTION] Il semble, selon toutes ces définitions, que les mots « rabais » et « remise » fassent référence à une réduction de prix d'un produit fabriqué au moment de l'achat de ce produit ou après l'achat de ce produit. La Cour peut également se baser sur le texte de la Loi lorsque ces mots sont écrits. Au paragraphe 7(2), le législateur a indiqué qu'il est interdit d'offrir un cadeau ou un rabais. Il aurait pu ajouter « un rabais, une réduction de prix » , ce qu'il n'a pas fait. Pour la Cour, le fait de vendre un produit à un prix déterminé ne peut pas constituer un rabais.
Dans ce cas, l'accusé a vendu à un grossiste une quantité de cigarettes à un prix déterminé. Comme le législateur n'a pas interdit la vente de cigarettes ou déterminé la façon d'établir les prix, l'accusé a profité de tous ses droits en vendant ses produits à un prix raisonnable établi selon son choix. Le fait de vendre une marque de cigarettes à un prix différent de celui d'une autre marque n'est pas interdit par le législateur. Ce qui est interdit, c'est donner un cadeau ou un rabais en échange de l'achat de cigarettes. Dans ce cas, il n'existe pas de preuve montrant que le grossiste a reçu un cadeau ou qu'on lui a offert un rabais après l'achat. Il n'a payé que le prix établi par l'accusé sans autre récompense. [Non souligné dans l'original].
Par exemple, chaque semaine, nous recevons, à la maison, un « Public-Sac » contenant les brochures des principales épiceries. Nous y trouvons des coupons-rabais, qui, lorsque nous les présentons au moment de l'achat d'un produit, sont déduits du montant total de la facture. Il s'agit là d'un rabais offert par le fabricant en échange d'un achat.
Dans le présent cas, il n'y a pas eu de rabais : il y a eu une vente à un prix légèrement inférieur pour une marque de cigarettes, ce qui n'est pas interdit par le législateur.
[44] Je suis entièrement d'accord avec le raisonnement du juge Morand, en particulier lorsqu'il mentionne que la promotion présentée sous ses yeux ne constitue pas un rabais rendant le défendeur coupable d'une infraction en vertu du paragraphe 7(2) de la Loi réglementant les produits du tabac.
[45] À mon avis, la vente de multi-emballages par le demandeur à un prix par paquet réduit ne constitue pas un « rabais » en vertu de l'alinéa 29a) de la LT. Je suis d'accord avec les arguments du demandeur selon lesquels la vente de multi-emballages reflète sa stratégie de prix interne et sa décision économique, dont le résultat consiste une génération de moins de profit par paquet pour la vente de multi-emballages. La stratégie du demandeur, à mon avis, n'équivaut pas à la promotion des produits de tabac qui constitue une pratique interdite par l'article 18 et l'alinéa 29a) de la LT.
[46] Lorsque je lis l'alinéa 29a) de la LT, je ne comprends pas la déclaration des défendeurs selon laquelle la vente de multi-emballages constitue un rabais ou une contre-valeur pour l'achat de produits de tabac. La liste non exhaustive d'exemples donnée par le Parlement à l'alinéa 29a) de la LT constitue à mon avis une indication claire de ce que le Parlement avait à l'esprit lorsqu'il a interdit le don de toute contre-valeur pour l'achat de produits de tabac. La liste comprend « un cadeau offert à l'acheteur ou à un tiers, une prime, un rabais ou le droit de participer à un tirage, à une loterie ou à un concours » . Je ne peux pas être d'accord pour dire que la vente de deux paquets de cigarettes à un prix qui est légèrement inférieur à celui de deux paquets vendus séparément fait partie de la même catégorie que les exemples donnés par le Parlement. Ainsi, la stratégie de vente du demandeur ne constitue pas un rabais ni une contre-valeur du type que le Parlement avait à l'esprit lorsqu'il a édicté l'alinéa 29a) de la LT.
[47] Il va sans dire que j'ai de la difficulté à voir comment la vente de multi-emballages de cigarettes peut constituer un rabais si la vente d'une cartouche ne le constitue pas. Dans les deux cas, le client paie un prix par paquet inférieur à celui de un seul paquet vendu séparément. Le Parlement a clairement décidé, à mon avis, de ne pas examiner le prix des cigarettes et n'a donc pas inclus les stratégies de prix - du type utilisé par le demandeur - dans la conduite qu'il visait à interdire. S'il l'avait fait, la LT, et plus particulièrement l'alinéa 29a), auraient été rédigés différemment.
[48] À mon avis, le demandeur, en vendant des multi-emballages de cigarettes, n'a pas offert de contre-valeur, directe ou indirecte, à ses clients pour l'achat de produits du tabac. Ainsi, le demandeur a droit à la déclaration suivante :
La vente par le demandeur de multi-emballages de cigarettes pour un prix unitaire par paquet inférieur au prix demandé pour un seul paquet de cigarettes vendu séparément ne constitue pas, en vertu de l'alinéa 29a) de la LT, un « rabais » offert aux clients.
Le demandeur aura droit à ses frais.
M. Nadon
JUGE
Ottawa (Ontario)
Le 5 juillet 2002
Traduction certifiée conforme
Martine Guay, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-1716-00
INTITULÉ : LARNY HOLDINGS LIMITED DIRIGEANT UNE
ENTREPRISE DU NOM DE QUICKIE
CONVENIENCE STORES C. CANADA (MINISTRE
DE LA SANTÉ) ET AL.
LIEU DE L'AUDIENCE : OTTAWA
DATE DE L'AUDIENCE : LE 14 JANVIER 2002
MOTIFS DU JUGEMENT : LE JUGE NADON
DATES DES MOTIFS : LE 5 JUILLET 2002
COMPARUTIONS :
STEPHEN VICTOR POUR LE DEMANDEUR
JANE M. BACHYNSKI
R. JEFF ANDERSON POUR LES DÉFENDEURS
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
KIMMEL, VICTOR, AGES POUR LE DEMANDEUR
OTTAWA
BORDEN LADNER GERVAIS, s.r.l. POUR LE DEMANDEUR
OTTAWA
MORRIS ROSENBERG POUR LES DÉFENDEURS
SOUS-PROCUREUR
GÉNÉRAL DU CANADA
[1] J'utilise le mot « directive » parce que c'est le mot que le demandeur a utilisé dans son Avis de demande déposé le 11 octobre 2000 pour qualifier la lettre faisant l'objet du litige en l'instance. Cependant, les défendeurs contestent l'utilisation du mot « directive » pour qualifier la lettre qu'ils ont envoyée au demandeur.
[2] Cela n'est pas tout à fait correct, puisque le Règlement sur l'information relative aux produits du tabac, SOR/2000-272, établis à la suite de l'article 33 de la LT, définit le mot « unité » comme suit : « a) une cigarette; b) un cigare; c) un bâtonnet de tabac; d) un kretek; ou e) un bidi » . Le Règlement définit également le mot « cartouche » comme suit : « emballage destiné à être vendu au détail et qui renferme au moins deux paquets de produits du tabac autres que des tubes, papiers ou filtres à cigarette » .
Je dois également souligner que l'article 10 de la LT interdit la vente de cigarettes dans un paquet contenant moins de 20 cigarettes.