Date : 20010509
Dossier : T-2655-89
Référence neutre : 2001 CFPI 456
ENTRE :
ELIZABETH BERNADETTE POITRAS
demanderesse
- et -
WALTER PATRICK TWINN,
LE CONSEIL DE LA BANDE DE SAWRIDGE,
LA BANDE DE SAWRIDGE et
SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA
représentée par LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES
ET DU NORD CANADIEN
défendeurs
(prononcés à l'audience à Ottawa (Ontario),
le mercredi 9 mai 2001)
[1] La requête, dans la mesure où elle vise l'interrogatoire préalable du déposant produit par la Couronne sur des questions liées à la préparation et au contenu de l'affidavit de documents signé au nom de la Couronne par un autre déposant, (et aucune disposition des règles ne s'oppose à ce qu'il s'agisse de deux personnes différentes), est manifestement sans fondement. Quoi qu'il en soit, règle générale, les affidavits de documents ne peuvent habituellement pas donner lieu à un contre-interrogatoire sans autorisation et l'interrogatoire préalable d'un déposant relativement à des questions concernant la façon dont l'affidavit de documents a été préparé est tout simplement irrégulier puisqu'il ne porte pas sur les questions en litige plaidées en l'espèce.
[2] Par ailleurs, dans la mesure où la requête vise à obliger la Couronne à produire des documents censément pertinents qui n'ont pas été produits, je ne suis pas convaincu qu'un document présentement versé au dossier établit que les documents censément pertinents et non produits existent ou sont pertinents et le fardeau d'en faire la preuve appartient à la requérante. En affirmant que, parce qu'il peut être prouvé qu'un document provient d'un dossier en particulier, tous les autres documents inclus dans ce dossier sont nécessairement pertinents et doivent être produits, on étendrait indûment la portée de l'arrêt Everest and Jennings Canadian Ltd c. Invacare Corporation[1] de la Cour d'appel, que je connais bien. Cette décision n'étaye pas cette thèse.
[3] La Bande n'a aucune justification, non plus, pour prétendre comme elle le fait qu'elle devrait être autorisée à examiner de façon générale les documents contenus dans les dossiers de la Couronne afin de vérifier s'il existe des documents pertinents qui n'ont pas été inclus dans l'affidavit de documents. Pareille autorisation ferait bien sûr échec à l'objet même d'un affidavit de documents et permettrait la communication illimitée de documents en général avant l'enquête préalable proprement dite.
[4] Un affidavit de documents est un document très solennel. Il s'agit d'un affidavit et son contenu doit, sauf preuve contraire, être tenu pour exact et fidèle; c'est pourquoi les Règles prévoient que l'avocat doit donner à la personne qui rédige l'affidavit des instructions et des conseils concernant ses obligations. La partie qui entend mettre un affidavit de documents en échec, ce que vise en fait en partie la présente requête, doit s'acquitter d'un lourd fardeau, dont la demanderesse ne s'est pas déchargée en l'espèce.
[5] Cela nous amène à la deuxième partie de la requête, soit la revendication d'un privilège dans l'affidavit de documents de la Couronne. Sur ce point, je suis d'accord avec la Bande pour dire que cette revendication de privilège est trop englobante et trop vague. Vingt-deux documents ou liasses de documents ne sont désignés que par un numéro de classement. Un autre dossier est identifié par une description seulement, soit comme le dossier d'instance des avocats. Aucune indication n'est fournie relativement à ces documents ou liasses quant au nombre de documents qu'elles contiennent, le cas échéant et quant à leur date; l'auteur et le destinataire de chaque document ne sont indiqués qu'en termes très généraux. Cela ne suffit manifestement pas. Je reconnais que la description d'un document à l'égard duquel un privilège est revendiqué ne doit pas être de nature à faire échec à la revendication de privilège, mais la simple indication de la date et du nom, du titre ou des initiales de son auteur et de son destinataire ne font habituellement pas échec à la revendication de privilège, sauf lorsqu'il existe des circonstances exceptionnelles, ce qui n'a pas été plaidé en l'espèce.
[6] Par conséquent, j'ordonnerai que la requête soit accueillie en partie et la Couronne devra produire d'ici 30 jours un affidavit de documents additionnels relativement à sa revendication de privilège.
[7] Chaque partie ayant en partie gain de cause, j'ai l'intention de ne pas adjuger les dépens.
« James K. Hugessen »
Juge
Ottawa (Ontario)
le 9 mai 2001
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-2655-89
INTITULÉ DE LA CAUSE : ELIZABETH BERNADETTE POITRAS c. WALTER PATRICK TWINN, LE CONSEIL DE LA BANDE DE SAWRIDGE, LA BANDE DE SAWRIDGE et SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA représentée par LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES ET DU NORD CANADIEN
LIEU DE L'AUDIENCE : Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : le 9 mai 2001
MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR LE JUGE HUGESSEN
DATE DES MOTIFS : le 9 mai 2001
ONT COMPARU
Mes Martin Henderson et Philip Healy POUR LA BANDE DÉFENDERESSE
Me Catherine Twinn POUR LA BANDE DÉFENDERESSE
Mes Kathleen Kohlman et Maria Mandola POUR SA MAJESTÉ LA REINE, DÉFENDERESSE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
Aird & Berlis POUR LA BANDE DÉFENDERESSE
Toronto (Ontario)
Catherine Twinn POUR LA BANDE DÉFENDERESSE
Slave Lake (Alberta)
Morris Rosenberg POUR SA MAJESTÉ LA REINE,
Sous-procureur général du Canada DÉFENDERESSE
Edmonton (Alberta)