Date : 20040123
Dossier : T-2406-93
Référence : 2004 CF 88
OTTAWA (ONTARIO), LE 23 JANVIER 2004
EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PELLETIER
ENTRE :
JAMES W. HALFORD et VALE FARMS LTD.
demandeurs
et
SEED HAWK INC., PAT BEAUJOT,
NORBERT BEAUJOT, BRIAN KENT et
SIMPLOT CANADA LIMITED
défendeurs
MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE
INTRODUCTION
[1] Les présents motifs s'écarteront quelque peu du style narratif habituel des motifs judiciaires, car l'instruction de la présente affaire a duré plus de quatre ans et les obligations professionnelles des parties exigent qu'une décision soit rendue dans les plus brefs délais. En vue de remettre ces motifs aux parties le plus tôt possible, je m'abstiendrai de faire une récapitulation de la preuve, sauf dans la mesure où cela est nécessaire pour régler des questions sur lesquelles je dois statuer.
[2] Je vais commencer par présenter l'invention décrite dans l'exposé relatif au brevet, de manière à identifier son principe et son mode de fonctionnement. En tenant compte de ces explications de l'invention, je procéderai ensuite à une interprétation téléologique du brevet en vue d'identifier les éléments essentiels des revendications du brevet. Free World Trust c. Électro Santé Inc., [2000] 2 R.C.S. 1024, au paragraphe 31; 2000 CSC 66 (Free World Trust).
[3] Après avoir interprété le brevet, je me pencherai ensuite sur la question de la contrefaçon, bien qu'il soit logiquement plus sensé de traiter d'abord de l'invalidité puisque les revendications invalides ne peuvent être contrefaites. Cependant l'action porte sur la contrefaçon et l'invalidité est invoquée comme moyen de défense et dans la demande reconventionnelle. De plus, si une erreur est commise au sujet de la question de l'invalidité et qu'aucune analyse de la contrefaçon n'a été faite, la Cour d'appel devra déterminer si ces revendications ont été contrefaites ou l'affaire devra être renvoyée au juge de première instance pour examen. Aucune de ces solutions de rechange n'est particulièrement satisfaisante.
[4] La méthode servant à déterminer si le dispositif des défendeurs constitue une contrefaçon des revendications du brevet est énoncée dans la décision que la Cour suprême du Canada vient de rendre dans Free World Trust, précité. La question n'est pas de savoir s'il y a eu contrefaçon de l'essentiel du brevet ou contrefaçon textuelle, mais il s'agit plutôt de savoir si les éléments essentiels de l'invention énoncés dans les revendications se retrouvent dans le dispositif des défendeurs. Free World Trust, précité, au paragraphe 55.
[5] J'examinerai ensuite la validité du brevet et des revendications particulières du brevet. Dans le cas qui nous occupe, les questions d'évidence, d'antériorité et de suffisance de l'exposé ont été soulevées en ce qui a trait au brevet lui-même. Des revendications précises sont aussi contestées, parce qu'elles ne comportent pas un élément essentiel de l'invention.
[6] Les demandeurs, James Halford, et son cessionnaire, Vale Farms Ltd., ont aussi déposé une demande contre Pat Beaujot, Norbert Beaujot et Brian Kent (les défendeurs individuels), les mandants de Seed Hawk Inc. (Seed Hawk), à titre personnel. Les personnes morales et physiques poursuivies seront appelées collectivement les défendeurs Seed Hawk. Par conséquent, si la contrefaçon est démontrée et que l'invalidité ne l'est pas, je devrai déterminer si la responsabilité qui incombe à la personne morale défenderesse, qui fabrique et vend le dispositif en litige, incombe aussi aux défendeurs individuels. Les demandeurs ont aussi allégué que Simplot Canada Limited (Simplot) avait poussé les défendeurs Seed Hawk à contrefaire leur brevet. Si je dois déterminer si les défendeurs individuels sont responsables envers les demandeurs, je dois aussi me demander si une preuve a été établie à l'encontre de Simplot.
[7] Dans l'intérêt des personnes non associées au présent litige, qui pourraient être appelées à lire ces motifs, je donne un bref aperçu des personnes en cause et des événements qui ont donné lieu au litige. Le demandeur, James Halford, est un agriculteur possédant une formation universitaire qui s'intéresse à la conservation du sol, et plus particulièrement aux techniques de culture à labourage minimal ou sans labourage. Le trait marquant de ces techniques de culture est qu'elles visent à cultiver la terre sans la travailler plus qu'il n'est absolument nécessaire pour planter la semence. La nouvelle culture est ensemencée dans le chaume de l'ancienne. Monsieur Halford a inventé un dispositif permettant de mettre en place la semence et l'engrais dans le sol dans un rapport bien défini l'un avec l'autre (bandes latérales) en une seule opération (un passage). Il a obtenu un brevet pour son invention, le brevet canadien no 1 239 835 (le brevet Halford). Au moment de commercialiser son invention, il a cédé le brevet à son entreprise, la codemanderesse Vale Farms Ltd.
[8] Norbert Beaujot est un ingénieur et un agriculteur à temps partiel qui a aussi inventé un semoir en bandes latérales à un passage. Il avait déjà rencontré M. Halford et vu son dispositif à une ou deux fois avant de présenter son propre dispositif. Norbert Beaujot a constitué Seed Hawk Inc. en personne morale afin d'assurer l'exploitation commerciale de son dispositif. Pat Beaujot est le frère de Norbert et est un mandant de Seed Hawk. Brian Kent a déjà été lié à Seed Hawk mais ne l'est plus. Lorsque le dispositif de Seed Hawk était à l'étape de développement, Pat Beaujot travaillait pour Simplot. C'est ce qui a amené Norbert Beaujot à demander à Simplot de fournir des fonds pour la mise au point du dispositif Seed Hawk en promettant en retour de concevoir la machine pour qu'elle puisse épandre de l'engrais liquide, principal produit vendu par Simplot. Simplot a fourni une somme d'argent à Seed Hawk ainsi que de l'aide pour la commercialisation. Les demandeurs ont avisé Simplot que, d'après eux, les défendeurs Seed Hawk contrefaisaient le brevet Halford. Insatisfaits de la réponse de Simplot, ils l'ont nommé comme défendeur lorsqu'ils ont engagé la présente instance contre les défendeurs Seed Hawk. Ceci résume bien le dramatis personae et l'intrigue qui s'est déroulée en Saskatchewan vers la fin des années 1980 et le début des années 1990.
NATURE DE L'INVENTION :
[9] Puisque ce brevet a été délivré avant les modifications apportées à la Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, ch. P-4, il s'agit d'une demande fondée sur * l'ancienne Loi +. L'article 34 de la Loi sur les brevets, à l'époque pertinente, énonçait ce qu'un inventeur devait divulguer pour obtenir un brevet :
34. (1) Dans le mémoire descriptif, le demandeur : |
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34. (1) An applicant shall in the specification of his invention |
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a) décrit d'une façon exacte et complète l'invention et son application ou exploitation, telles que les a conçues l'inventeur; |
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(a) correctly and fully describe the invention and its operation or use as contemplated by the inventor; |
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b) expose clairement les diverses phases d'un procédé, ou le mode de construction, de confection, de composition ou d'utilisation d'une machine, d'un objet manufacturé ou d'un composé de matières, dans des termes complets, clairs, concis et exacts qui permettent à toute personne versée dans l'art ou la science dont relève l'invention, ou dans l'art ou la science qui s'en rapproche le plus, de confectionner, construire, composer ou utiliser l'objet de l'invention; |
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(b) set out clearly the various steps in a process, or the method of constructing, making, compounding or using a machine, manufacture or composition of matter, in such full, clear, concise and exact terms as to enable any person skilled in the art or science to which it appertains, or with which it is most closely connected, to make, construct, compound or use it; |
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c) s'il s'agit d'une machine, en explique le principe et la meilleure manière dont il a conçu l'application de ce principe; |
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(c) in the case of a machine, explain the principle thereof and the best mode in which he has contemplated the application of that principle; |
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d) s'il s'agit d'un procédé, explique la suite nécessaire, le cas échéant, des diverses phases du procédé, de façon à distinguer l'invention d'autres inventions; |
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(d) in the case of a process, explain the necessary sequence, if any, of the various steps, so as to distinguish the invention from other inventions; and |
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e) indique particulièrement et revendique distinctement la partie, le perfectionnement ou la combinaison qu'il réclame comme son invention. |
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(e) particularly indicate and distinctly claim the part, improvement or combination that he claims as his invention.(2) Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications exposant distinctement et en termes explicites les choses ou combinaisons que le demandeur considère comme nouvelles et dont il revendique la propriété ou le privilège exclusif. |
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(2) The specification referred to in subsection (1) shall end with a claim or claims stating distinctly and in explicit terms the things or combinations that the applicant regards as new and in which he claims an exclusive property or privilege. |
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[10] La Cour peut consulter le mémoire descriptif du brevet pour obtenir une description de l'invention et de son principe de fonctionnement (s'il s'agit d'une machine). C'est à la lumière de ces renseignements que les revendications doivent être interprétées, en gardant toujours à l'esprit que les renseignements doivent être compris de la façon dont les comprendrait une personne versée dans l'art possédant les connaissances usuelles des personnes versées dans l'art à l'époque pertinente.
[11] L'invention est décrite comme un [traduction] * système de mise en place de semence et d'engrais pour technique de culture à labourage minimal +. Le mémoire descriptif précise [traduction] qu' * il faut des machines agricoles qui permettent la mise en place d'engrais et de semences diverses dans le sol, aux profondeurs recommandées et dans un rapport optimal l'un avec l'autre +. Dans un système sans labourage, il faut aussi [traduction] * pouvoir planter directement dans les débris et les résidus des cultures précédentes sans labourage préalable +. De nombreuses machines existantes mises au point pour mettre en place la semence et l'engrais selon ce système font appel à une conception lourde et massive pour assurer l'enfoncement dans le sol non travaillé. Selon le brevet, on a tenté récemment d'utiliser des cultivateurs avec des systèmes de distribution à air ou par gravité comme semoirs, mais ces appareils posent plusieurs problèmes, plus particulièrement le manque de contrôle de profondeur et la difficulté à obtenir un tassement suffisant autour de la semence. L'invention a pour but [traduction] * de fournir un appareil permettant de mettre en place deux matériaux différents, comme de la semence et de l'engrais, en une seule opération, simple, peu coûteuse et efficace +.
[12] Avec ces renseignements de base, on pourrait s'attendre à ce que l'invention traite des problèmes qui ont été identifiés, soit le besoin de mettre en place deux matériaux en une seule opération et le besoin de mettre les matériaux en place aux profondeurs adéquates et dans un bon rapport l'un avec l'autre. Il est suggéré que la profondeur de mise en place soit obtenue sans se fier uniquement à la masse pour obtenir l'enfoncement. La pertinence du tassement doit aussi être abordée. Tout ceci doit être effectué sans oublier que la surface du sol doit être dérangée le moins possible.
[13] En lisant la description détaillée de l'invention et en consultant les dessins, la forme de l'invention se concrétise (les figures 1 et 5 du brevet sont jointes à l'annexe I des présents motifs). D'une façon générale, l'invention est formée d'un assemblage fixé à un cadre qui se déplace sur le sol. En se déplaçant, un couteau fixé au cadre creuse un sillon dans le sol. Un tube fixé immédiatement derrière le couteau dépose un premier matériau, l'engrais par exemple, dans le sillon immédiatement derrière le couteau. Une roue de tassement/contrôle de la profondeur (la roue de tassement) est fixée de manière à pivoter par rapport au couteau. Un tube, fixé au même élément que la roue de tassement (l'élément de fixation unique), s'enfonce dans la terre du sillon creusé par le couteau pour déposer un second matériau, probablement la semence. (Dans le reste des présents motifs, le premier matériau sera l'engrais et le second matériau sera la semence). Le tube d'ensemencement peut être ajusté verticalement et d'un côté à l'autre. Un mécanisme permet d'exercer une force sur l'élément de fixation unique, de manière à garder la roue de tassement et le tube d'ensemencement en contact avec le sol. La roue de tassement est fixée de manière à suivre le sillon creusé par le couteau.
[14] On peut se demander comment les différents besoins ci-dessus identifiés seront comblés par cet appareil. Le premier point porte sur le contrôle précis de la profondeur au point de vue de la mise en place de la semence et de l'engrais. Le mémoire descriptif aborde cette question de deux façons. Par rapport à la première réalisation, à la page 10 du brevet figure la description suivante de la méthode de contrôle de la profondeur du couteau de creusage de sillon :
[traduction] Lors de l'utilisation, le semoir est abaissé en position de travail et soutenu par les roues normales (non illustrées) qui supportent la structure comportant une traverse 10, et ces roues fournissent un certain contrôle sur la profondeur du labourage. L'utilisateur ajuste ensuite la roue de tassement/contrôle de la profondeur 38 de chaque unité individuelle au moyen de tiges d'ajustement 40 pour obtenir la profondeur de fonctionnement désirée de l'outil de labourage principal sous forme de couteau 15 de même que la profondeur à laquelle l'engrais et/ou la semence sort du tube 18. Il ajuste aussi la pression sur la roue de tassement/contrôle de profondeur en transférant la charge de la machine à la roue 38.
[15] Bien que ce paragraphe se rapporte à la première réalisation, un mécanisme similaire est fourni pour exercer une pression sur la roue de tassement dans la deuxième réalisation. Dans les deux réalisations, une force est exercée sur l'élément de fixation unique auquel la roue de tassement est fixée. Cette force place la roue de tassement en contact plus étroit avec le sol et a aussi un effet sur la profondeur de travail du couteau. La profondeur de l'outil de creusage de sillon est donc contrôlée en abaissant le cadre de la machine en position de travail et en exerçant une force sur la roue de tassement au moyen de l'élément de fixation unique. Ceci ne se rapporte qu'à la mise en place de l'engrais.
[16] Le mémoire descriptif précise aussi que la proximité immédiate du second tube par rapport à la roue de tassement permet un contrôle ultime de la profondeur du produit déposé par ce tube (brevet, article 20, page 14). Le mémoire descriptif précise que la profondeur du tube d'ensemencement est ajustée au moyen d'un manchon de fixation de tube 49 et d'une vis de calage 51 et qu'une fois l'ajustement effectué, la position du tube d'ensemencement dans le sol est maintenue par la force d'inclinaison exercée sur l'élément de fixation unique. Cela a pour résultat que la roue de tassement contrôle la profondeur de mise en place de la semence en roulant sur le sol.
[17] L'étape suivante consiste à maintenir un rapport constant entre la mise en place de la semence et la mise en place de l'engrais. Comme il en a déjà été fait mention, la force d'inclinaison exercée sur l'élément de fixation unique maintient le couteau de fertilisation et le tube d'ensemencement dans leurs positions de travail respectives dans le sol. Pour ce qui est de leur alignement latéral, l'exposé montre que le tube d'ensemencement est ajustable horizontalement et verticalement. Sur l'axe horizontal, le tube peut être ajusté d'un côté à l'autre, ce qui permet le déplacement latéral de l'extrémité du second tube [traduction] * par rapport à la base du couteau + (brevet, à la page 10).
[18] Il faut ensuite examiner le contrôle de la fonction de tassement. Étant donné que le tube d'ensemencement est fixé au même élément que la roue de tassement, cela signifie qu'ils sont fixés l'un par rapport à l'autre de manière que la roue suive derrière le tube (voir article 21, page 15 du brevet). Dans la deuxième réalisation, la rotation de la partie arrière 353 de l'élément de fixation unique 351 par rapport à la partie avant 352 fait en sorte que la roue de tassement et le tube d'ensemencement tournent. Cela permet à la roue de tassement de rouler sur la semence après qu'elle a été déposée dans le sillon par le tube d'ensemencement.
[19] La roue de tassement est conçue de manière à rouler dans le sillon à une position qui se trouve sous la surface du sol mais au-dessus du fond du sillon et à pousser la terre vers l'avant en se déplaçant pour couvrir la semence. En pratique, la largeur de la roue de tassement peut varier d'un pouce et trois quarts à un peu moins de quatre pouces. La largeur du couteau doit être telle que le sillon qu'il creuse est plus large à la surface du sol que la roue de tassement (brevet, à la page 20).
[20] Étant donné que l'invention est conçue pour être utilisée dans des situations de culture sans labour, il est possible d'identifier certains éléments qui sont adaptés à cette situation. L'utilisation d'un système intégré de protection à ressort dans le tube d'ensemencement permet à ce dernier d'éviter d'être endommagé par des obstructions dans le sillon. De plus, ses vibrations permettront de dégager les débris qui peuvent s'accumuler sur le tube. L'utilisation d'un tube d'ensemencement placé en angle par rapport au sens de déplacement vers l'avant permet une moins grande perturbation du sol (brevet, à la page 13). L'utilisation d'une tige à arête étroite réduit les risques d'accumulation de débris sur le bord d'attaque de la tige. Des rouleaux et des lames peuvent être fixés à l'assemblage pour faire dévier les débris. L'utilisation d'un couteau étroit est préférable, afin de limiter la perturbation du sol en créant un sillon plus étroit.
[21] Même si les paragraphes ci-dessus n'abordent pas tous les aspects de l'invention donnés dans l'exposé, ils traitent des points que le mémoire descriptif identifie comme représentant les avantages à tirer de l'invention, c'est-à-dire la capacité de mettre en place deux matériaux dans le sol à une profondeur adéquate et dans un rapport constant l'un avec l'autre, en obtenant un tassement adéquat, dans un environnement sans labourage. Je me propose maintenant de passer à l'interprétation téléologique des revendications du brevet.
INTERPRÉTATION DES REVENDICATIONS DU BREVET
[22] Pour effectuer l'interprétation téléologique des revendications, je me suis inspiré de l'enseignement de la Cour suprême du Canada dans Free World Trust, précité, aux pages 1053 à 1062, où on trouve le modèle suivant d'interprétation téléologique :
e) Suivant une interprétation téléologique, il ressort de la teneur des revendications que certains éléments de l'invention sont essentiels, alors que d'autres ne le sont pas. Les éléments essentiels et les éléments non essentiels sont déterminés de la manière suivante :
(i) En fonction des connaissances usuelles d'un travailleur versé dans l'art dont relève l'invention
(ii) Ce qui constitue un élément * essentiel + doit être déterminé en fonction des connaissances acquises dans le domaine à la date de la publication du mémoire descriptif
(iii) Il faut se demander s'il était manifeste, au moment où le brevet a été publié, que la substitution d'une variante modifierait le fonctionnement de l'invention
(iv) Conformément à l'intention de l'inventeur, expresse ou inférée des revendications du brevet
(v) Interprétation fondée sur le mémoire descriptif lui-même, indépendamment de toute preuve extrinsèque
LES EXPERTS
[23] Avant de passer à l'interprétation du brevet, je voudrais traiter brièvement de mon évaluation des témoignages que les experts sont venus donner sur les questions de contrefaçon et d'invalidité, nommément le Dr Tessier et M. Schaaf pour les demandeurs et M. Anderson pour les défendeurs Seed Hawk. J'ai trouvé que tous les experts avaient fait preuve d'intelligence et étaient qualifiés dans leurs domaines respectifs. Toutefois, dans une mesure plus ou moins grande, tous ont abordé le procès comme s'ils avaient pour mission de me persuader de leur point de vue, comme si ma décision, quelle qu'elle soit, leur importait. À mon avis, les avocats, et seuls les avocats, ont comme mandat d'être persuasifs; les experts ont un rôle d'information et doivent présenter les renseignements qui sont au-delà de l'expérience courante d'un profane d'une façon bien organisée et cohérente, de manière à aider le juge des faits à comprendre les renseignements. La nature du processus judiciaire veut que les témoignages des experts seront contestés par les personnes dont les intérêts sont opposés. Les experts ont le droit de défendre leur point de vue; leur témoignage n'aura aucun intérêt pour le juge des faits à moins qu'ils ne soient capables de le faire. Cependant, le rôle des experts ne consiste pas à défendre un point de vue dans le litige et ils ne doivent pas façonner leur témoignage de manière qu'il soit conforme au point de vue des parties ou de leurs conseillers. Lorsqu'ils agissent de cette façon, la Cour est laissée à elle-même et doit se débrouiller avec les renseignements qui, par définition, sont en dehors de l'expérience courante.
[24] Monsieur Anderson a été longuement contre-interrogé sur son affidavit. Il a fait plusieurs concessions qui n'ont pas eu un effet positif sur la valeur de son témoignage. Il a admis avoir fait deux erreurs dans les documents qu'il a produits devant la Cour. Il a présenté dans son témoignage des renseignements qui lui avaient été fournis par Norbert Beaujot. Il a donné l'impression qu'il avait observé certaines opérations, alors qu'en fait ce n'était pas le cas. Il n'a jamais observé le fonctionnement d'un semoir Seed Hawk. Tout ceci n'inspire pas confiance en son témoignage. Par contre, j'ai trouvé que M. Anderson était l'expert le moins partisan de ce groupe de témoins.
[25] J'ai aussi trouvé les témoignages du Dr Tessier et de M. Schaaf problématiques. Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Tessier a été forcé d'admettre qu'il avait fait plusieurs erreurs dans le calcul de la résistance des couteaux d'ensemencement Seed Hawk (transcription de témoignage, 29 octobre 2001, aux pages 1693 à 1699). Lorsqu'il a été confronté à la possibilité d'une erreur dans l'application d'une formule, le Dr Tessier a refusé de prendre position en répondant qu'il ne pouvait pas [traduction] * donner une réponse à une suggestion + (transcription, idem, aux pages 1694 et 1695). Lorsque le Dr Tessier a admis ses erreurs, il ne l'a fait qu'avec beaucoup de réticence. Toutes ses erreurs portaient sur la position qu'il défendait.
[26] Le docteur Tessier a semblé être offusqué qu'on lui demande de produire ses calculs détaillés :
[traduction]
Q. [...] Il y a une chose que j'aimerais savoir, et je crois que la Cour aussi aimerait le savoir, vous dites que vous vous fiez à cela pour votre analyse théorique, mais où est votre analyse?
R. D'accord, ce que vous me dites essentiellement c'est que vous auriez aimé que les calculs soient là pour pouvoir vérifier les chiffres. Êtes-vous en train de me dire que vous croyez que je n'ai pas utilisé l'équation correctement --
LA COUR : Monsieur Tessier, --
MONSIEUR MACKLIN :
Q. Non, ce n'est pas une question de confiance.
LA COUR : -- L'avocat a le droit de voir les calculs que vous avez utilisés pour en arriver à vos résultats.
LE TÉMOIN : Donc, devrais-je fournir les exemples avec calculs?
LA COUR : Et il vous demande si vous avez les calculs, et il peut vous demander de les produire. Mais, à ce point-ci, je crois que la question est, avez-vous les calculs?
LE TÉMOIN : Oui, j'ai les calculs.
Transcription, 26 octobre 2001, aux pages 1497 et 1498.
Or, en fin de compte, il y avait des erreurs dans ses calculs.
[27] J'ai trouvé que le Dr Tessier a tenu un discours argumentatif lors de son contre-interrogatoire et qu'il insistait pour s'en tenir à une description qu'il a essayé d'imposer sur l'analyse d'un des points importants du litige. (Transcription, 29 octobre 2001, aux pages 1652 à 1657.) Ce point était la comparaison de la fonction du couteau d'ensemencement et du tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk par rapport à la fonction du second tube décrit dans le brevet. Le docteur Tessier a adopté une description de ces dispositifs, traceurs de sillons à houe étroits, qui suggère une fonction commune, lorsque la question consistait justement à décider s'ils avaient en fait une fonction commune. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que le Dr Tessier témoigne que les deux dispositifs ont une fonction commune. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que le Dr Tessier utilise des mots et des expressions qui décrivent cette fonction. Mais le fait que le Dr Tessier refuse de s'écarter du vocabulaire qu'il a choisi, comme si le nom déterminait la fonction plutôt que l'inverse, me pose plus de problèmes.
[28] Même si ses titres universitaires sont impressionnants, le Dr Tessier m'a donné l'impression de défendre la cause des demandeurs. J'aborde son témoignage avec une certaine prudence étant donné son attitude partisane.
[29] Le problème que pose le témoignage de M. Schaaf est que ce dernier a préparé son affidavit en se servant de l'affidavit du Dr Tessier. Selon son témoignage, il s'en est inspiré pour la définition de l'invention Halford. Si c'était le cas, cela compromettrait quand même son indépendance. Cependant, il s'en est de toute évidence inspiré pour beaucoup plus que la définition de l'invention Halford. Dans ses notes de travail, M. Schaaf appelle de façon constante les dispositifs de traçage de sillon du dispositif Seed Hawk des [traduction] * couteaux + (transcription, 20 juin 2002, aux pages 3004 à 3007). Cependant, dans son témoignage oral, il a préféré les appeler des [traduction] * traceurs de sillon à houe arrondis + (transcription, idem, aux pages 2937 et 2938). Dans son affidavit, il appelait le couteau d'ensemencement le traceur d'ensemencement. Lorsqu'il a été interrogé à ce propos au cours de son contre-interrogatoire, il a dit qu'il avait utilisé le terme couteau parce que c'était le terme utilisé dans le manuel de Seed Hawk. Après avoir terminé son analyse, il a choisi d'appeler les couteaux des traceurs. J'ai examiné le brevet en entier et j'ai trouvé 61 occurrences du mot [traduction] * couteau +, une occurrence de l'expression [traduction] * outil de travail du sol +, une occurrence de l'expression [traduction] * outil de labourage principal + et trois occurrences de l'expression [traduction] * traceurs à couteau +. Je n'ai trouvé aucune occurrence de l'expression [traduction] * traceur de sillon à houe étroit + ou [traduction] * traceur de sillon à houe arrondi +. Étant donné que M. Schaaf a utilisé le mot [traduction] * couteau + dans ses propres notes, une utilisation sanctionnée (si sanctionné il y a) par le brevet lui-même, je crois que son insistance à utiliser le mot [traduction] * traceur + ou l'expression [traduction] * traceur de sillon à houe arrondi + vise à essayer d'harmoniser son vocabulaire avec celui utilisé par le Dr Tessier.
[30] Je suis d'accord avec l'allégation des défendeurs Seed Hawk voulant que M. Schaaf ait utilisé un langage plutôt ambigu pour décrire les effets du couteau d'ensemencement. Dans son affidavit établi sous serment le 30 octobre 2000, M. Schaaf déclare que :
[traduction]
80. Les observations sur le terrain démontrent que le traceur de sillon à houe d'ensemencement (7) se déplace dans le sillon creusé par le traceur de fertilisation. Après le passage du traceur de fertilisation dans le sol, la terre retombe dans le sillon. Lorsque le traceur de sillon à houe d'ensemencement avance dans le sol, il travaille principalement dans la terre cultivée ou ameublie par le traceur de fertilisation, même s'il racle la paroi du sillon. Il crée quand même une ouverture ou un sillon, car il déplace la terre ameublie qui est retombée pour remplir le sillon. Cela concorde avec la description du brevet Halford.
[Non souligné dans l'original.]
[31] Les notes de travail de M. Schaaf, auxquelles nous ferons référence plus en détail ultérieurement, montrent qu'il a mesuré la largeur du sillon creusé par le passage du couteau de fertilisation et qu'il a déterminé qu'il mesurait 3 pouces de large. Il l'a mesuré une seconde fois après le passage du couteau d'ensemencement et a déterminé qu'il mesurait alors 4 pouces et un quart de large. Il est clair que le couteau d'ensemencement avait fait plus que déplacer la terre travaillée dans le sillon ou que simplement racler le bord du sillon. Je ne reproche pas à M. Schaaf de ne pas avoir divulgué les résultats de ses mesures, même si je crois qu'un témoin vraiment impartial aurait présenté à la Cour tous les renseignements qu'il avait recueillis. Cependant, je lui reproche d'avoir essayé de persuader la Cour de l'exactitude d'une proposition dont il avait des motifs de croire qu'elle n'était pas exacte ou qu'elle n'était que partiellement exacte. Étant donné la partialité dont il a fait preuve, j'aborde son témoignage avec une certaine prudence.
[32] Les revendications 1, 2, 3, 6, 10, 12, 19 et 20 sont en litige dans la présente affaire. Parmi celles-ci, les revendications 1, 12, 19 et 20 sont des revendications indépendantes, c'est-à-dire qu'elles n'incorporent pas les termes d'une autre revendication. Je commence par énoncer d'une façon structurée le texte de la revendication 1 :
REVENDICATION 1 ET REVENDICATIONS DÉPENDANTES
1 Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
2 un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
3 un moyen de distribution du premier matériau comportant
4 un couteau pour creuser un sillon dans le sol,
5 un moyen de fixer le couteau au cadre
6 disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
9 un premier tube,
10 un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
12 un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
15 un moyen de distribution du second matériau comportant
16 un second tube,
17 un moyen de fournir un second matériau au second tube,
19 un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
21 ledit moyen de fixer le second tube pouvant être ajusté pour fournir au moins un ajustement d'un côté à l'autre du second tube par rapport au couteau,
26 ledit moyen de distribution du second matériau comprenant
27 un moyen faisant saillie vers le bas d'une position située au-dessus du sillon et pouvant s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon à une position espacée vers l'arrière par rapport au couteau et
32 formé uniquement d'une surface extérieure du second tube pour que le second tube suive dans le sillon à ladite position espacée et s'enfonce dans la terre du sillon,
37 une roue de tassement et
38 un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube.
[33] Ni la présence ni la définition du cadre auquel l'invention est fixée ne sont contestées. Cependant, les demandeurs font valoir que la notion de planter dans le sol devrait laisser sous-entendre une restriction selon laquelle le dispositif doit être utilisé dans un environnement sans labour. Les demandeurs soutiennent que cette restriction ou réserve est appuyée par le nom donné à l'invention [traduction] * système de mise en place de semence et d'engrais pour technique de culture à labourage minimal + de même que par divers passages de l'exposé, comme le passage suivant :
[traduction] Le présent système de mise en place de semence et d'engrais fournit un outil de travail du sol qui entraîne une perturbation minimale du sol dans les rangées de semis et qui laisse des bandes de sol intactes entre les rangées de semis. Il permet aussi un contrôle de la profondeur optimale et une séparation de la semence et de l'engrais selon les besoins.
Brevet, à la page 4.
[34] Selon la jurisprudence, la Cour peut utiliser le mémoire descriptif pour comprendre le sens dans lequel certains mots et expressions sont utilisés, mais ne peut s'en servir pour élargir ou restreindre la portée des revendications, comme il convient de les interpréter.
[traduction] On doit naturellement interpréter les revendications en se reportant à l'ensemble du mémoire descriptif, qui peut donc être consulté pour faciliter la compréhension et l'interprétation d'une revendication, mais on ne peut pas permettre que le breveté élargisse la portée de son monopole décrit expressément dans les revendications * en empruntant tel ou tel élément à d'autres parties du mémoire descriptif +.
Metalliflex Ltd. c. Wienenberger Aktiengesellschaft, [1961] R.C.S. 117, à la page 122.
[...] J'estime que le juge de première instance pouvait parfaitement examiner le reste du mémoire descriptif, y compris le dessin, pour comprendre le sens du mot * ailette + utilisé dans les revendications, mais non pour élargir ou restreindre la portée de la revendication telle qu'elle était écrite et, ainsi, interprétée.
Whirlpool Corp. c. Camco Inc., [2000] 2 R.C.S. 1067, au paragraphe 52, 2000 CSC 67.
[35] D'après moi, ces extraits signifient qu'en l'absence d'une restriction précise relativement aux techniques de culture sans labourage ou à labourage minimal dans les revendications, je ne peux me servir des références à ces techniques dans le mémoire descriptif pour y incorporer une telle restriction. Par contre, je peux tenir compte de ces références pour déterminer le sens à attribuer à des mots, des expressions ou des concepts précis dans les revendications. Par conséquent, je ne crois pas que la revendication 1 doive être lue comme si elle contenait une restriction selon laquelle l'invention doit être utilisée dans des conditions sans labour.
[36] L'élément suivant de l'invention est le [traduction] * couteau pour creuser un sillon dans le sol +. Les demandeurs affirment qu'une personne versée dans l'art saurait qu'un tel couteau est un traceur de sillon à houe étroit :
[traduction]
Q. Au point 18C, vous utilisez l'expression * traceur de sillon à houe étroit +, qu'entendez-vous par là?
R. Traceur de sillon à houe étroit est une expression normalisée qui couvre une vaste gamme de types de traceurs de sillon à houe. En agriculture, il y a très peu de catégories de traceurs de sillon. Les traceurs de sillon sont des dispositifs servant à creuser des sillons, tandis que dans le dictionnaire traceur n'a pas ce sens. Dans notre domaine particulier, nous parlons de tracer un sillon. Vous avez, bien entendu, des traceurs de sillon à disque, et vous avez des traceurs de sillon à houe, qui représentent une vaste catégorie, qui comprend le terme moins technique de * couteau +.
Q. Et, en réalité, vous utilisez le mot * couteau + dans le même paragraphe.
R. J'ai utilisé le mot * couteau + pour indiquer que tout ce qui est appelé un couteau n'est rien d'autre qu'un traceur de sillon à houe étroit. Les traceurs de sillon à houe, depuis le début des années 1980 et même aujourd'hui, peuvent être assez arrondis. Ils peuvent mesurer 3, 4 ou 5 cm de large, plus particulièrement dans les outils de labourage conventionnels. Cependant, dans les outils sans labourage, ils ont pris une autre orientation, c'est-à-dire qu'ils sont le plus étroit possible pour une meilleure résistance mécanique et une plus grande durabilité. Et dans le cas présent, il est réellement question de traceurs de sillons à houe étroits, qui sont plus courants et plus utiles pour les techniques de culture sans labour, car ils peuvent s'enfoncer dans un sol plus ferme, mais ils peuvent aussi mieux manier et déplacer les résidus de culture laissés en surface.
Témoignage du Dr Tessier, transcription, 25 octobre 2001, aux pages 1294 et 1295.
[37] J'ai peu de difficulté à conclure qu'une personne versée dans l'art saurait que le couteau identifié dans la revendication 1 est un traceur de sillon à houe étroit.
[38] L'élément suivant est le * moyen de fixer le couteau au cadre +. Le témoignage de M. Anderson portait sur le fait que l'invention visait un raccord rigide entre le couteau et le cadre sur lequel les assemblages sont fixés :
[traduction]
33. Pendant l'utilisation du dispositif Halford, le cadre est abaissé de la position (20A) à la position (20)*. Cela ajuste la profondeur du couteau (15) dans le sol puisque le couteau (15) est fixé de façon rigide au cadre (10) par l'élément tige du couteau (111 et 113) et le système de boulon et de plaque de retenue (12). Lorsque le cadre (10) se déplace vers l'avant, le couteau (15) creuse un sillon et l'engrais est déposé par un tube (18) à travers une ouverture dans le fond du tube, dans le sillon derrière le couteau (15).
Affidavit de Clifford Anderson établi sous serment le 28 février 2000 et une seconde fois le 3 février 2003.
*Dans ses croquis, pièces C et D, M. Anderson utilise un système de numérotation qui ne correspond pas à la numérotation des figures 1 et 5 du brevet. J'ai donc remplacé les nombres utilisés dans le brevet par ceux utilisés par M. Anderson. Pour ce qui est des articles 20A et 20, le cadre est l'article 10 dans le brevet. L'article 20A sert à montrer le dispositif lorsqu'il n'est pas enfoncé dans le sol.
[39] Ce témoignage a été nuancé lors du contre-interrogatoire, lorsque M. Anderson a admis que la tige à laquelle le couteau était fixé pouvait fournir une certaine flexibilité :
[traduction]
Q. Regardons le paragraphe 33 qui traite du même dispositif Halford que celui que vous avez défini. Dans ce paragraphe, vous parlez de la profondeur du couteau (24) dans le sol, car le couteau (24) est fixé de façon rigide au cadre.
R. Oui.
Q. Ne venez-vous pas de nous dire, il y a une minute, qu'il y avait une tige à ressort pour la flexibilité?
R. J'utilise malheureusement le terme rigide dans le contexte de non pivotant. Il n'est pas fixé de manière à pivoter. Vous savez, rien n'est entièrement rigide.
Q. Ceci n'est certainement pas rigide parce qu'il comporte une tige à ressort n'est-ce-pas?
R. Il a une certaine flexibilité, oui.
Transcription, 3 février 2003, à la page 4425.
[40] Le docteur Tessier a rejeté l'opinion de M. Anderson sur la nature du raccord en se basant sur son interprétation du mémoire descriptif :
[traduction] Il est clair que M. Anderson croit que le fait que le couteau est fixé au cadre de manière à ce que la profondeur de l'outil de fertilisation soit contrôlée uniquement par la hauteur du cadre qui est ajustable est un élément essentiel de l'invention. Cependant, cela est manifestement incorrect, car le brevet précise dans le paragraphe figurant aux pages 10 et 11 que :
l'utilisateur ajuste ensuite la roue de tassement/contrôle de la profondeur 38 de chaque unité individuelle au moyen de tiges d'ajustement 40 pour obtenir la profondeur de fonctionnement désirée de l'outil de labourage principal sous forme de couteau 15 de même que la profondeur à laquelle l'engrais et/ou la semence sort du tube 18.
L'ajustement est effectué après l'ajustement de la hauteur de travail du cadre et indépendamment de celui-ci. Cet ajustement est permis grâce, par exemple, au raccord à ressort 13 entre la tige 11 et le cadre. Ainsi, le ressort 13 exerce une force vers le bas sur l'outil de fertilisation et sur les éléments derrière l'outil de fertilisation, la profondeur étant contrôlée par la hauteur de la roue de tassement par rapport à l'outil de fertilisation. Cette disposition est essentiellement identique à la disposition du Seed Hawk, sauf que le ressort 13 est remplacé dans la machine Seed Hawk par un vérin hydraulique qui est situé à un endroit différent.
Affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 25 octobre 2000, au paragraphe 376.
[41] Dans ce passage, le Dr Tessier affirme que l'invention prévoit le pivotement du moyen de fixer le couteau au cadre par l'action du ressort (13), qui est décrit dans le mémoire descriptif comme un mécanisme de déclenchement optionnel. L'allégation du Dr Tessier équivaut à faire d'un composant décrit dans le brevet comme étant optionnel un élément essentiel de l'invention. Cela ne se peut pas. On peut tout au plus dire qu'il peut y avoir un élément de fixation pivotant lorsque le mécanisme de déclenchement optionnel est fourni, mais cela ne sous-entend pas qu'il y a pivotement dans tous les autres cas.
[42] De plus, la flexibilité fournie par la tige à ressort ne correspond pas à un pivotement. La meilleure explication du sens de pivotement vient de l'échange suivant tiré du contre-interrogatoire de M. Anderson :
[traduction]
Q. Maintenant, hier, en référence à la pièce D de votre affidavit, vous avez admis que contrairement à ce que vous avez déclaré, c.-à-d. que dans le dispositif Halford le couteau (24) [15 de la figure 5] est fixé de façon rigide au cadre, il y avait en fait une flexibilité dans la tige à ressort (40) [11]
R. Oui.
Q. N'est-il pas vrai que toute flexibilité de la tige par rapport à un élément fixe comme le cadre fournit en fait un rapport de pivotement?
R. Non.
Q. Vous n'acceptez pas cela?
R. Non.
Q. Et pourquoi? Parce qu'il n'y a pas un point de pivotement fixe?
R. Pivotant signifie qu'il peut pivoter à partir d'un point. Autrement tout est pivotant, parce que tout...
Q. Donc vous êtes d'accord pour dire qu'un mouvement de flexion est un mouvement de type pivotant?
R. Tout peut fléchir. Non, pivotant signifie qu'il peut - que la structure peut tourner par rapport à une autre structure.
Q. Et que signifie flexion?
R. La flexion signifie qu'il y a de l'élasticité, il y a de l'élasticité en tout, donc presque tout peut fléchir.
Q. Ce qui a pour résultat que les structures se déplacent les unes par rapport aux autres?
R. Des parties de la structure se déplacent les unes par rapport aux autres, oui.
Q. D'accord.
R. Mais cela n'est pas pivotant.
Transcription, 4 février 2003, aux pages 4437 à 4439.
[43] La discussion sur la flexibilité de la tige à ressort a été amorcée sans qu'aucune distinction ne soit faite entre la flexibilité que l'on peut s'attendre à trouver dans la tige à ressort 11 illustrée à la figure 1 et la tige raccourcie 112 ou la tige à arête 113 illustrée à la figure 5. Il est reconnu, toutes choses étant égales par ailleurs, qu'il est plus facile de faire fléchir une longue pièce qu'une pièce courte du même matériau. Il suffit de penser à une règle de 12 pouces et à une règle de 36 pouces tenues par une extrémité. La règle de 12 pouces restera rigide tandis que la règle de 36 pouces aura tendance à fléchir Dans le même ordre d'idées, un élément à arête est beaucoup plus rigide qu'un élément semblable orienté différemment. Encore une fois, il est assez facile de briser une règle de 12 pouces en la pliant sur son côté le plus large, mais il est beaucoup plus difficile de la briser en la pliant sur son côté étroit. Tout cela pour dire que l'hypothèse de flexibilité offerte par la tige à ressort ne tient pas compte des possibilités de différences réelles dans la flexibilité.
[44] De fait, le témoignage de M. Schaaf relativement à la première réalisation de l'invention précise que l'utilisation de la tige d'ajustement 40 fait en sorte que tout l'appareil se déplace en bloc à travers le sol :
[traduction]
Q. Eh bien, nous ne parlons pas de l'utilisation sur le terrain, parce que maintenant vous traitez du Conserva Pak, d'accord. Nous n'avons pas encore fait le rapprochement.
R. Je parle en termes de fonctionnement du dispositif.
Q. D'accord. Donc si vous prenez la tige 40 et que vous l'ajustez, ce que vous êtes capable de faire, n'est-ce-pas?
R. Oui.
Q. D'accord. Cela soulèvera ou abaissera --
R. C'est exact.
Q. -- le tube d'ensemencement et la roue de tassement au moyen du levier coudé, c'est exact?
R. Et c'est l'ajustement que vous utiliseriez pour pouvoir --
Q. D'accord, d'accord.
R. -- pour ajuster les hauteurs relatives.
Q. Et cela n'ajustera pas le couteau ou le tube de fertilisation parce qu'ils sont fixés au bras 11. Et le bras du tube d'ensemencement et la roue de tassement tournent autour de 37, d'accord?
R. Ils ne tournent que lorsque vous les ajustez. Lorsque vous êtes en mode de fonctionnement, lorsque vous travaillez, lorsque le dispositif fonctionne, tout est rigide. Et en tant qu'unité rigide, toute l'unité ensemble repose sur 38 pour pouvoir servir de roue de jaugeage.
Contre-interrogatoire de David Schaaf, transcription, 20 juin 2002, aux pages 3071 et 3072.
[45] La conclusion que je tire de cet échange est qu'il n'y a aucune raison de sous-entendre dans le * moyen de fixer le couteau au cadre + un raccord pivotant. Le raccord doit permettre au couteau de s'enfoncer dans le sol pour creuser un sillon, ce qui exige une certaine rigidité. Cela peut être accompagné d'une certaine flexibilité dans les éléments de soutien, mais ces éléments peuvent aussi être rendus rigides.
[46] Le prochain élément, qui est le premier tube, ne prête pas à controverse. Tous sont d'accord pour dire qu'il s'agit d'un tube et qu'il n'a pas à être d'une construction particulière. Il n'y a pas non plus de désaccord marqué sur les autres éléments du moyen de distribution du premier matériau, c'est-à-dire le moyen de fournir un premier matériau au premier tube, et le [traduction] * moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon +. Il doit y avoir une façon de placer le premier tube, qui doit être fixé au couteau et à l'arrière de celui-ci, de manière qu'il dépose le premier matériau dans le sillon.
[47] Il y a cependant une controverse sur le sens et les dimensions du sillon creusé par le couteau. Le docteur Tessier, qui possède un doctorat en génie agricole, a témoigné qu'un sillon n'était pas simplement l'ouverture créée par le couteau, mais plutôt toute la zone d'influence du couteau :
[traduction]
Q. D'accord. D'accord. Et, de plus, êtes-vous d'accord pour dire qu'au-delà des limites du, du sillon tel qu'on le voit, il y a des zones dans lesquelles l'énergie du couteau s'est propagée dans le sol et a causé de petites fissures et des choses du genre? De l'énergie?
R. Oui. C'est ce qu'on appelle le sillon.
Q. Eh bien, je crois que nous B
R. Toutes les fissures font partie du sillon.
Q. Je crois que nous avons donc un problème. Ce que vous dites c'est, n'est-ce-pas, que le sillon n'est pas ce que l'on voit comme, comme, si nous n'avions pas de terre qui retombe, vous dites -- un instant, vous dites que pour identifier le sillon il ne suffit pas simplement de regarder et d'identifier une ouverture créée par le couteau qui possède des côtés, d'accord, qui peuvent être identifiés, d'accord? Vous dites que le sillon ne comprend pas uniquement la zone où la terre a été retirée par le couteau, et vous, créant le type de sillon que vous voyez dans les dessins du brevet n'est-ce-pas? Avec des côtés définis B
R. Eh bien le B
Q. Vous dites que cela va au-delà, cela va dans le sol et lorsque vous avez de l'énergie qui va dans le sol, peut-être, qui cause des fissures, ou des choses semblables, peut-être sur un autre deux, trois, quatre ou cinq pouces, cela fait partie du sillon?
R. Le sillon est défini comme la zone d'influence de l'outil de labour, dans ce cas-ci un traceur de sillon étroit. Cela respecte la théorie de la mécanique du sol. Que ce soit par des approches de modélisation comme celles prises par McKyes ou par une approche plus généraliste comme celle prise par Cullen et Keeper (ph), donc, fondamentalement, le sillon comprend tout ce que vous avez dit, c'est-à-dire, la zone de fracture, et nous en voyons une partie dans la figure de la pièce * Z +. Si vous regardez à environ trois quarts de pouce à un pouce à partir du cure-dents qui est le plus à gauche du dessus de l'interface du sol résiduel, vous verrez certaines de ces fractures, et elles font véritablement, véritablement partie du sillon creusé par l'outil de labourage. Ces B
[Non souligné dans l'original.]
Contre-interrogatoire du Dr Tessier, transcription, 30 octobre 2001, aux pages 1861 à 1863.
[48] Une personne versée dans l'art ne posséderait pas nécessairement un doctorat en génie agricole avec des antécédents en science du sol et n'aborderait pas nécessairement la définition d'un sillon du même point de vue. L'avocat chargé du contre-interrogatoire a désigné un sillon comme étant [traduction] * une ouverture créée par le couteau qui possède des côtés +. Les dessins qui font partie du mémoire descriptif du brevet considèrent certes le sillon de la même façon que le fait l'avocat, comme une ouverture marquée avec des côtés inclinés créés par le couteau. Je n'ai aucun doute que le Dr Tessier a énoncé correctement ce qu'un scientifique du sol entend lorsqu'il parle d'un sillon. Mais, je ne suis pas convaincu que la personne versée dans l'art interpréterait ce terme de la même façon.
[49] Voici comment M. Schaaf, l'autre expert des demandeurs, a décrit le sillon creusé par le couteau de fertilisation :
[traduction]
Q. Maintenant, au paragraphe 79 vous utilisez l'expression * racle la terre non remaniée le long du bord de la paroi du sillon +. Pour commencer, où est la paroi du sillon?
R. Ce que j'appelle la paroi du sillon est le bord extérieur de ce que le traceur de sillon de fertilisation a creusé. Imaginez que le traceur de sillon de fertilisation s'enfonce dans le sol et creuse un sillon. Si vous arrêtiez et enleviez toute la terre meuble, vous obtiendriez le bord extérieur du sillon d'origine.
Le second traceur de sillon, qui est le traceur de sillon d'ensemencement, avance ensuite derrière le premier. Il avance de manière à racler, à déplacer, à bouger un peu le bord extérieur du premier sillon creusé par le traceur de sillon de fertilisation. Et, évidemment, il déloge et déplace en même temps la terre meuble retombée dans le premier sillon creusé. Ce déplacement le long du bord peut être décrit comme causant un raclage lorsqu'il ne s'agit que d'un raclage le long du bord du sillon.
[Non souligné dans l'original.]
Transcription, 19 juin 2002, aux pages 2895 et 2896.
[50] Même si cette discussion a été abordée dans le contexte de * paroi du sillon +, il est clair que M. Schaaf considère qu'un sillon est une ouverture avec des limites bien déterminées pour qu'il soit possible de parler de raclage le long d'une paroi du sillon.
[51] Monsieur Halford semble partager le même point de vue. L'échange suivant, qui a eu lieu lors du contre-interrogatoire du M. Halford, indique très clairement qu'il utilise le mot sillon pour décrire l'ouverture faite par le couteau, et non la zone de sol remanié qui l'entoure :
[traduction]
Q. Donc, la roue doit être suffisamment étroite pour pouvoir rouler dans le sillon, pour utiliser votre terminologie n'est-ce-pas?
R. Oui.
Q. Et la roue que vous venez de décrire, la roue que vous indiquez sur la pièce 6, répond à cette description?
R. Oui, elle ira dans le sillon, mais il ne faut pas qu'elle aille directement dans le fond du sillon.
Q. Eh bien, pourquoi doit-elle rouler dans le sillon alors?
R. Eh bien, il a été déterminé depuis longtemps qu'il faut que la roue de tassement roule dans le sillon pour obtenir une action de tassement. Si la roue de tassement - si vous creusez un sillon et que la roue de tassement roule à côté, vous ne tirerez aucun avantage de la roue.
Q. Donc la raison pour laquelle la roue de tassement passe dans le sillon, c'est pour fournir une meilleure action de tassement?
R. Vous voulez qu'elle se trouve dans le sillon parce que, bien entendu, c'est aussi à cet endroit que la semence sera placée. Il faut pouvoir tasser la semence. C'est l'objectif du tassement.
Q. Donc, la roue de tassement roule dans le sillon parce qu'elle réussit mieux à tasser la semence et l'engrais lorsqu'elle se trouve dans le sillon, est-ce bien ce que vous dites?
R. Oui.
[Non souligné dans l'original.]
Transcription, 7 novembre 2000, aux pages 273 et 274.
[52] Même si les revendications d'un brevet doivent être interprétées sans tenir compte de ce que l'inventeur peut avoir à dire à leur sujet, un inventeur peut aussi être une personne versée dans l'art. S'il ne l'est pas, c'est qu'il a su faire preuve d'inventivité et d'imagination par opposition à sa connaissance approfondie du domaine. Voir Beloit Canada Ltd. et al. c. Valmet Oy (1986), 8 C.P.R. (3d) 289, à la page 294 (Beloit Canada Ltd.). Dans ce passage, M. Halford ne parle pas comme quelqu'un qui fait appel à son inventivité ou à son imagination pour résoudre un problème, mais comme quelqu'un qui connaît bien le domaine.
[53] Il est manifeste, à partir de cette discussion, que M. Halford faisait référence à la zone du sol meuble en forme de V créée par le passage du couteau dans le sillon. La roue de tassement doit être à l'intérieur de cette zone, car c'est l'endroit où la semence se trouve. Il n'y a aucun avantage à ce que la roue de tassement passe dans la zone plus large travaillée par l'énergie du couteau.
[54] Il est aussi manifeste, lorsqu'on lit attentivement le mémoire descriptif, que le mot sillon est toujours utilisé pour désigner la zone en forme de V de sol meuble créée par le passage du couteau. Par exemple, le passage suivant décrit le fonctionnement du second tube (tube d'ensemencement) :
[traduction] Comme l'illustre la figure 8, le tube 44 est ajusté par rapport au tube 18 de manière qu'il soit plus haut que l'extrémité du tube 18 et qu'il soit tourné d'un côté. De cette façon, le bord inférieur du tube 44 racle le côté du sillon creusé par le couteau 15 et pousse la terre vers l'avant de manière à remplir partiellement le sillon comme cela est indiqué à 445. Ainsi, comme l'illustrent les figures 5 et 8, le sillon creusé par le couteau est indiqué à 151 et une paroi latérale du sillon est indiquée à 152 où le tube 442 racle le côté pour déposer la semence dans la terre non retournée du côté opposé à celui où l'engrais sort du tube 18 et indiqué à 153.
Brevet, aux pages 17 et 18.
[55] Il y a très peu de latitude dans ce passage pour un sillon qui s'étend au-delà des côtés de l'ouverture creusée par le couteau. Il est clair que le sillon a une limite déterminée, une paroi, et qu'il s'agit d'un espace pouvant être rempli. Je conclus donc qu'une personne versée dans l'art, à la lecture de ce brevet, déterminerait que le sens du mot sillon est plus étroit que celui proposé par le Dr Tessier et correspond à une zone en forme de V de terre meuble ou remaniée causée par le passage du couteau.
[56] Un autre point litigieux est soulevé en ce qui concerne le moyen de distribution du second matériau, plus précisément, le second tube. Les demandeurs disent que le second tube est essentiellement un assemblage comprenant un traceur de sillon à houe étroit :
[traduction]
Ainsi, * le second tube + est une expression générale qui désigne l'ensemble de l'outil d'ensemencement qui est en fait un traceur de sillon à houe étroit. Le * second tube + peut donc être un composant composite qui s'enfonce dans la terre du sillon et fournit la semence. Cette expression comprend les outils d'ensemencement qui sont définis par des tubes uniquement, par des tubes renforcés composites, par un assemblage comportant un tube et un élément de renfort dans lequel la résistance est fournie par les deux éléments et par un assemblage comportant un tube et un élément de renfort dans lequel la résistance est fournie principalement ou entièrement par l'élément de renfort.
Conclusions finales des demandeurs, au paragraphe 64.
[57] La référence au traceur de sillon à houe étroit est tirée de l'affidavit du Dr Tessier, établi sous serment le 30 novembre 1999, aux paragraphes 18g) et h) :
[traduction]
g) le second tube d'ensemencement est fixé de manière à faire saillie dans le sillon à partir du dessus du sillon. Le second tube est placé vers l'arrière de l'outil de fertilisation et du tube connexe à une distance suffisante pour permettre à la terre meuble de remplir partiellement le sillon ou d'entrer dans celui-ci avant le passage du second tube. Dans les faits, cette distance est d'environ 200 mm (8 po);
h) ces fonctions déterminent donc la forme de l'outil d'ensemencement qui peut être un simple tube ou qui peut être un équivalent mécanique d'un simple tube. Ainsi, le second tube peut avoir la forme d'un traceur de sillon à houe étroit léger avec tube, étant donné qu'une telle structure, lorsqu'elle est fixée à l'endroit approprié comme il est indiqué ci-dessous, effectue la fonction susmentionnée sans creuser son propre sillon distinct.
[58] L'élément important de ce témoignage est la notion de tube formé d'un tube fixé à un traceur de sillon à houe léger. Personne ne conteste sérieusement le fait qu'un tube qui s'enfonce dans la terre doit être construit de manière à pouvoir le faire. Ce qui est litigieux, c'est la déclaration des demandeurs selon laquelle les mots de la revendication ont une portée suffisamment large pour permettre de trouver une équivalence entre un tube construit de manière à s'enfoncer dans la terre du sillon et un tube fixé à un traceur de sillon à houe étroit léger.
[59] Monsieur Anderson était d'avis que le brevet prévoyait uniquement un simple tube sans couteau :
[traduction]
51. Dans les revendications 19 et 20 du mémoire descriptif Halford, le moyen de distribution du second matériau est décrit comme * comportant un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé uniquement d'un second tube constitué d'un seul tube [...] +. À mon avis, cela n'enseigne ni ne décrit rien de plus qu'un tube qui peut ouvrir la terre dans le sillon creusé par le couteau de fertilisation qui est évidemment de la terre remaniée et meuble. Il reste qu'il ne s'agit que d'un tube et qu'il est décrit dans des termes considérablement différents de ceux utilisés pour le moyen de distribution du premier matériau, qui est décrit de façon constante, comme comprenant un * couteau + et * creusant un sillon +. La description du moyen de distribution du second matériau utilise une terminologie passablement différente et ne peut être interprétée comme comprenant un * couteau + capable de * creuser un sillon + ou d'effectuer une fonction semblable à celle du moyen de distribution du premier matériau. À mon avis, le second tube lui-même est un composant essentiel du mémoire descriptif Halford. Si le mémoire descriptif avait pour but de revendiquer l'exclusivité sur un second tube accompagné d'un second couteau alors, à mon avis, il aurait pu et aurait dû l'exprimer en le disant clairement et explicitement.
Affidavit de Clifford Anderson établi sous serment le 3 février 2003, au paragraphe 51.
[60] Le témoignage de M. Anderson précise fondamentalement que lorsque le brevet exige un second tube, il ne peut pas être considéré comme faisant référence au même élément qu'il vient de décrire comme un couteau et un premier tube. Dans les motifs qu'il a prononcés dans Free World Trust, précité, le juge Binnie a mentionné comme principe directeur dans l'interprétation téléologique des brevets le fait que la Loi sur les brevets favorise le respect de la teneur des revendications (voir paragraphes 33 et suivants). La proposition mise de l'avant par les demandeurs ne peut facilement être décrite comme faisant valoir le respect des mots et des expressions utilisés dans les revendications.
[61] L'idée selon laquelle le second tube est formé uniquement d'un tube est soutenue par les mots et les expressions utilisés plus loin dans la revendication 1 où il est dit que le moyen de distribution du second matériau comprend un moyen faisant saillie vers le bas [...] pouvant s'enfoncer dans le sol et [traduction] * formé uniquement d'une surface extérieure du second tube pour que le second tube suive dans le sillon +. Si le moyen pouvant s'enfoncer dans le sol est formé uniquement d'une surface extérieure du tube, il est clair qu'il ne peut y avoir de structure intermédiaire entre la surface extérieure du tube et le sol.
[62] Il est possible de concevoir que la revendication 1 ne limite pas le second tube à la même conception et au même matériau que le premier tube sans concevoir que le second tube puisse être quelque chose d'autre qu'un tube. Il est clair que le second tube n'a pas à être un tube en plastique flexible uniquement parce que le premier tube est un tube en plastique flexible. Le second tube a une fonction précise à accomplir et une personne versée dans l'art déterminerait qu'il doit être construit en fonction de sa tâche. Le second tube pourrait être un tube léger ou lourd. Les demandeurs vont plus loin et soutiennent que le tube peut comprendre des éléments de renfort pour le tube, sous forme d'un traceur de sillon à couteau. Autrement dit, un tube fixé à un traceur de sillon à houe étroit est, aux fins des revendications, uniquement un tube. D'après moi, un tube peut être construit de manière à pouvoir accomplir sa tâche, mais s'il est fixé à un autre élément, l'ensemble ne constitue pas un tube. Il s'agit d'un tube et d'un autre élément.
[63] Les demandeurs essaient de faire valoir que le brevet considère le second tube comme un traceur de sillon à houe étroit ou [traduction] * couteau + en faisant référence à la partie du mémoire descriptif qui énumère les avantages de l'invention, par rapport à la première réalisation :
[traduction]
(11) Tout le système utilise un [sic] deux traceurs de sillon à couteau successifs pour mettre en place l'engrais et/ou la semence en assurant le contrôle de la profondeur de fonctionnement au moyen d'une roue de tassement/de contrôle de la profondeur fixée directement.
[Non souligné dans l'original.]
Brevet, à la page 12.
[64] Les défendeurs Seed Hawk disent que cet argument portant sur deux traceurs de sillon à couteau est inapproprié, car le passage cité fait référence à la première réalisation, illustrée à la figure 1, qui comprend un coutre circulaire. Ils disent que le premier traceur de sillon à couteau (dans l'hypothèse où le couteau 15 est le second) doit être le coutre circulaire. Les demandeurs répliquent en précisant que le coutre circulaire ne peut pas être un des deux traceurs de sillon à couteau puisqu'une personne versée dans l'art saurait qu'un [traduction] * disque de coutre circulaire + n'est pas un couteau. Après avoir examiné les divers documents techniques fournis comme éléments de preuve, je suis persuadé que cela est vrai. Il y a une nette distinction entre un traceur de sillon à couteau et un traceur de sillon à coutre circulaire. Même si les deux sont des traceurs de sillon (voir pièce K de l'affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 30 novembre 1999), ils sont différents. Lorsqu'on revient au paragraphe 11, on remarque une incohérence dans l'utilisation du terme * un + par rapport à deux traceurs de sillon à couteau. Pour éliminer l'incohérence, il faudrait tenir compte du reste du mémoire descriptif.
[65] Un examen du reste du mémoire descriptif révèle qu'il n'y a aucune autre référence à plusieurs traceurs de sillon à couteau. Il y a cependant une autre incohérence au bas de la page 6 du mémoire descriptif qui se lit comme suit :
[traduction] Le support 14 soutient un couteaux traceur de sillon 15 fixé au support au moyen de boulons 16, le couteau faisant saillie vers le bas et étant orienté la face vers l'avant à un angle légèrement incliné, [...]
Brevet, à la page 16.
Dans tous les autres cas, la référence au couteau est au singulier, et est le plus souvent accompagnée du chiffre 15 qui est le chiffre identificateur pour le couteau à la figure 1 des dessins.
[66] Par conséquent, la référence à deux traceurs de sillon à couteau successifs n'est pas facile à expliquer. Le paragraphe 15 donne quelques éclaircissements sur les avantages revendiqués pour l'invention :
[traduction]
(15) Il est fourni avec un coutre entièrement fixé mais qui peut facilement être retiré avec le traceur de sillon à couteau 15 qui le suit.
Brevet, à la page 13.
La référence à [traduction] * qui le suit + rappelle les [traduction] * deux traceurs de sillon à couteau successifs +. Il est donc possible de se demander si la multiplicité des couteaux est une erreur ou s'il y avait une erreur dans la description des coutres circulaires. Même s'il est permis de consulter le mémoire descriptif pour éliminer les ambiguïtés dans les revendications, il y a peu d'avantages à le faire lorsque le mémoire descriptif lui-même est ambigu. C'est pourquoi je trouve que le texte du paragraphe 11 des avantages de l'invention n'est pas très utile pour décider si le second tube comprend un traceur de sillon à houe étroit.
[67] L'argument le plus révélateur contre la position avancée par les demandeurs est le témoignage du Dr Tessier au paragraphe 125 de son affidavit établi sous serment le 25 octobre 2000 dans lequel il précise :
[traduction] 125. En résumé, est-ce que l'état de la technique mentionné par Anderson démontre que les fonctions de chaque composant utilisé dans le dispositif Halford étaient connues en 1983? D'après moi, oui, à l'exception des modifications apportées à l'outil d'ensemencement, enseignées dans le brevet Halford, qui lui permettent de fléchir lorsqu'il entre en contact avec des obstacles [...]
Si le Dr Tessier décrit un outil d'ensemencement flexible comme étant un progrès par rapport à l'état antérieur de la technique, il va de soi que cette flexibilité est un aspect important de l'outil d'ensemencement. Comme telle, la notion de rendre l'outil d'ensemencement rigide en le fixant à un traceur de sillon à houe étroit va à l'encontre de l'avantage identifié de cet outil.
[68] L'élément suivant est le [traduction] * moyen de fournir un second matériau au second tube +, (ce qui ne prête pas à controverse) et le [traduction] * moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau +. Les demandeurs soutiennent que les mots [traduction] * vers l'arrière et à part + signifient que le second tube est fixé de manière à suivre le couteau, et qu'il est fixé au couteau, c'est-à-dire qu'il fait partie intégrante du couteau.
[69] Les demandeurs soutiennent que [traduction] * cet élément exige que le second tube soit fixé au Acouteau@, qu'il fasse partie intégrante de celui-ci et non du cadre + (paragraphe 84 des conclusions finales des demandeurs). À un autre point (paragraphe 89, conclusions finales des demandeurs), les demandeurs soutiennent que l'élément portant la roue de tassement et le second tube doivent être fixés au moyen de fixer le couteau et non au cadre. Ils appuient cette allégation par le texte suivant tiré du mémoire descriptif :
[traduction] [...] L'utilisateur ajuste ensuite la roue de tassement/de contrôle de la profondeur 38 de chaque unité individuelle au moyen de tiges d'ajustement 40 pour obtenir la profondeur de fonctionnement désirée de l'outil de labourage principal sous forme de couteau 15 [...]
Brevet, à la page 10.
En se basant sur ce passage, les demandeurs soutiennent que [traduction] * si la profondeur de la roue de tassement est ajustée au moyen de l'ajustement du couteau, la roue de tassement doit faire partie du couteau et non en être indépendante +. Avec égards, ce passage ne traite pas de l'ajustement de la profondeur de la roue de tassement par l'ajustement du couteau. La profondeur du couteau est ajustée en ajustant la roue de tassement au moyen des tiges d'ajustement. Néanmoins, tout ceci prouve qu'il y a un lien entre le couteau et la roue de tassement.
[70] Les demandeurs n'expliquent pas ce qu'ils entendent par montage intégral. Les défendeurs semblent croire que le point de vue des demandeurs sur le montage intégral mène à l'argument voulant que le couteau, le second tube et la roue de tassement soient tous fixés sur un élément de fixation unique. Je ne vois rien dans le texte de la revendication 1 qui donne à entendre autre chose que le fait que le second tube est fixé vers l'arrière et à part du couteau. Cela n'empêche aucun rapport fonctionnel entre le couteau et le second tube, mais les mots et expressions utilisés n'exigent pas de [traduction] * montage intégral +.
[71] Tout ce qu'il est possible de dire sur cet aspect de la revendication 1, à ce point-ci, c'est que le second tube est monté vers l'arrière et à part du couteau.
[72] La revendication précise ensuite que le moyen de fixer le second tube est ajustable pour fournir au moins un ajustement d'un côté à l'autre du second tube par rapport au couteau. Cette question ne semble pas être en litige.
[73] L'élément suivant porte sur un autre aspect du moyen de distribution du second matériau, décrit en termes fonctionnels :
[traduction] ledit moyen de distribution du second matériau comprenant
un moyen faisant saillie vers le bas d'une position située au-dessus du sillon et pouvant s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon à une position espacée vers l'arrière par rapport au couteau et formé uniquement d'une surface extérieure du second tube pour que le second tube suive dans le sillon à ladite position espacée et s'enfonce dans la terre du sillon,
[74] Les deux parties conviennent que cela fait référence au fait que le second tube doit suivre dans le sillon creusé par le couteau. Les demandeurs disent que le fait de mentionner que le second tube est espacé vers l'arrière par rapport au couteau et suit [traduction] * dans le sillon à ladite position espacée + montre que l'espacement est important. En fait, les deux experts ont pris la position selon laquelle l'espacement était essentiel au fonctionnement de l'invention. Par exemple, au paragraphe 70 de l'affidavit de David Schaaf, établi sous serment le 30 octobre 2000, on peut lire :
[traduction] L'espacement entre le traceur de sillon de fertilisation et le traceur de sillon d'ensemencement est très important pour le rendement du dispositif; il maintient l'écartement dans la mise en place de la semence et de l'engrais [...]
Dans son affidavit établi sous serment le 25 octobre 2000, le Dr Tessier dit au paragraphe 167 :
[traduction] La dimension la plus importante, pour ce qui est d'assurer un remblayage fiable de la terre derrière l'outil de fertilisation et avant l'outil d'ensemencement, est l'espace entre le bord arrière du tube de fertilisation et le bord avant de l'outil d'ensemencement [...]
[75] Pour mes besoins, cela indique peut-être qu'il y a une dimension importante, mais cela n'indique pas ce qu'est cette dimension. Les conséquences de cette omission ne me préoccupent pas pour le moment.
[76] L'autre note explicative que les demandeurs ont mise au sujet de cet élément de la revendication est qu'il démontre que le second tube ne forme pas son propre sillon. Il se déplace dans le sillon principal qui, selon l'interprétation que j'ai donnée de cette expression, est l'espace en forme de V de sol meuble créé par le passage du couteau. Cette question n'est pas en litige. Les demandeurs disent aussi que la référence au fait qu'il fait saillie dans le sillon signifie que le second tube ne fait pas que suivre derrière le couteau dans le sillon.
[77] Cette partie de la revendication comporte une autre réserve sur le moyen de distribution du second matériau, soit que le moyen qui fait saillie vers le bas est formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Malgré un long contre-interrogatoire sur le sujet, l'expert des demandeurs, le Dr Tessier, n'a pas voulu convenir que les mots et les expressions utilisés empêchaient de placer un traceur de sillon à houe étroit entre le tube et le point de contact avec le sol. D'après lui, même avec un traceur de sillon à houe étroit comme bord d'attaque du second tube, la surface extérieure du tube ferait quand même saillie dans le sillon :
[traduction] R. En fait, lorsque cet appareil se déplace dans le sol, la surface extérieure formée des côtés est définitivement en contact avec la terre. Et après avoir relu le brevet, je peux dire qu'il y a une vaste gamme de traceurs de sillons à houe étroits qui pourraient correspondre à cette description.
Transcription, 29 octobre 2002, à la page 1652.
[Non souligné dans l'original.]
[78] Je ne crois pas que le point de vue du Dr Tessier tienne adéquatement compte de l'exigence voulant que le moyen pouvant s'enfoncer dans le sol soit formé [traduction] * uniquement d'une surface extérieure du second tube +. Compte tenu de la discussion antérieure de l'interprétation du second tube, j'interprète cet aspect de la revendication comme exigeant que le tube lui-même s'enfonce dans la terre et non un autre élément sur lequel le tube pourrait être fixé.
[79] L'élément suivant est une roue de tassement et [traduction] * un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube +. L'interprétation de cet élément n'est pas particulièrement contestée, car toutes les parties semblent s'entendre pour dire que la roue de tassement doit passer dans le sillon pour comprimer la terre au-dessus du lit de semences.
[80] Cela met fin à l'interprétation de la revendication 1, du moins pour ce qui est de la définition des mots et des expressions utilisés et de leurs rapports les uns avec les autres. Il reste maintenant à effectuer l'interprétation téléologique, c'est-à-dire l'identification des éléments essentiels de la revendication.
[81] Je dois maintenant identifier les éléments de l'invention qui sont essentiels. Puisque cela doit être fait sans tenir compte des questions de contrefaçon et d'invalidité, la tentation est grande de simplement dire que chaque élément distinct de la revendication est essentiel en se fondant sur le fait que l'invention ne pourrait pas fonctionner sans tous ces éléments. C'est un peu comme appliquer le critère du * facteur déterminant +. Si ce n'était du cadre, l'invention ne pourrait se déplacer sur le sol, par conséquent le cadre est un élément essentiel. Le problème que pose cette approche, c'est qu'elle ne tient pas compte des variantes. Il est possible qu'un élément qui n'entre pas dans la description d'un élément soit utilisé à la place de celui-ci. Cette substitution peut n'avoir qu'une fonction esthétique ou peut avoir des répercussions importantes sur le fonctionnement de l'invention décrite dans le brevet. Considérer que ces deux situations représentent une absence d'un élément essentiel ne constitue pas un guide fiable pour la contrefaçon.
[82] Une des façons de régler le problème des variantes consiste à donner des descriptions étendues aux éléments de manière à englober les variantes possibles. C'est ce qui a été fait lorsque le second tube a été décrit comme un traceur de sillon à houe étroit. D'après moi, cette approche ne respecte pas le texte du brevet, car elle équivaut à redéfinir les éléments de la revendication en utilisant des mots et des expressions que l'inventeur n'a pas utilisés lorsqu'il a rédigé ses revendications.
[83] J'ai déjà dit dans une autre cause que les éléments essentiels doivent se rapporter à l'inventivité de l'invention :
L'interprétation téléologique doit faire plus que résumer les principaux éléments d'un dispositif (dans le cas d'un brevet mécanique). Puisque, par définition, un brevet porte sur un dispositif nouveau et utile, l'interprétation téléologique doit relever les éléments fonctionnels générateurs de la nouveauté et de l'inventivité. Et comme le brevet protège les moyens par lesquels un résultat est obtenu plutôt que le résultat lui-même, l'interprétation téléologique doit relever les éléments fonctionnels qui produisent un résultat utile d'une façon nouvelle et inventive. Dans cette mesure, on ne saurait affirmer que tous les éléments d'une revendication sont pareillement essentiels parce que l'invention ne pourrait fonctionner en l'absence de l'un d'eux. L'examen doit principalement permettre de mettre en évidence les éléments dont l'absence priverait le dispositif d'inventivité.
Norac Systems International Inc. c. Prairie Systems and Equipment Ltd., (2002), 19 C.P.R. (4th) 360, au paragraphe 16.
[84] Cette approche semble correspondre à ce que la Cour suprême a fait dans Free World Trust lorsqu'elle s'est demandé si les revendications du brevet étaient contrefaites par le remplacement d'un micro-contrôleur par des * circuits +. La Cour a conclu que * [l]a régulation de la magnétothérapie grâce à des circuits constitu[ait] [...] un élément essentiel de l'invention + :
[...] Il n'y a pas lieu, dans la présente affaire, de se perdre dans les détails. Les revendications précisent que des * circuits + régulent l'électromagnétothérapie. Aucun élément du contexte des revendications ne permet de conclure que l'inventeur considérait les circuits comme non essentiels. Au contraire, ils sont au coeur de l'invention.
Free World Trust, précité, au paragraphe 68.
[85] En discutant de la question de la régulation de la magnétothérapie, la Cour a dit :
En outre, rien ne permet de croire que l'inventeur envisageait autre chose que ce qu'il a décrit ni qu'il considérait le recours à des * circuits + comme un élément non essentiel des revendications ou qu'il voulait revendiquer davantage que des * circuits +, compromettant ainsi la validité des brevets à cause de visées trop ambitieuses. Comme l'a fait remarquer la Cour d'appel, le moyen de régler l'amplitude et la fréquence correspond précisément à la différence qui a justifié la délivrance des brevets par rapport à l'antériorité intégrée à des appareils de magnétothérapie déjà existants comme Magnétospace, Myodynamic et Elec.
Free World Trust, précité, au paragraphe 73.
[86] Ces passages donnent à penser que le * coeur de l'invention +, * la différence qui a justifié la délivrance des brevets par rapport à l'antériorité +, est un élément essentiel de l'invention. Mais il ne peut être le seul élément essentiel pour la simple raison que l'invention est conçue pour fournir un résultat utile. Les * circuits + seuls ne peuvent pas constituer une contrefaçon des revendications du brevet, parce que les circuits par eux-mêmes ne peuvent pas faire ce que l'invention allègue pouvoir faire. C'est pourquoi les éléments essentiels doivent être les éléments nécessaires à l'obtention du résultat nouveau et utile ou à l'accomplissement d'un résultat utile grâce à un nouveau moyen qui justifie la délivrance du brevet.
[87] Ceci dit, quels sont les éléments essentiels de l'invention tels qu'ils sont énoncés dans la revendication 1? D'après moi, ce sont les éléments suivants :
- un cadre conçu pour être déplacé sur le sol;
- un couteau fixé au cadre de manière à creuser un sillon dans la terre lorsque le cadre est déplacé sur le sol, et un tube pour déposer un premier matériau dans le sillon;
- un second tube fixé vers l'arrière et à part du couteau, faisant saillie vers le bas dans le sillon, pouvant s'enfoncer dans la terre uniquement au moyen de sa surface extérieure et qui suit dans le sillon creusé par le couteau;
- un moyen d'ajuster le déplacement latéral entre le second tube et le couteau;
- une roue de tassement fixée vers l'arrière du second tube pour suivre dans le sillon derrière le second tube.
[88] Les revendications invoquées contre les défendeurs Seed Hawk qui dépendent de la revendication 1 sont les suivantes :
[traduction]
[...]
(2) L'invention selon la revendication 1 dans laquelle le second tube porte une tige verticale sur un bord avant qui peut s'enfoncer dans le sol vers l'avant et vers le bas par rapport à l'extrémité ouverte du tube.
(3) L'invention conformément à la revendication 1 dans laquelle l'extrémité ouverte inférieure du second tube est disposée d'un côté et au-dessus de l'extrémité ouverte inférieure du premier tube de manière que le second tube suive dans le sillon mais racle une paroi latérale du sillon.
[...]
(6) L'invention conformément à la revendication 1 dans laquelle ledit moyen de fixation de ladite roue de tassement et ledit moyen de fixation du second tube forment un élément de fixation unique fixé de manière à pivoter par rapport au couteau et comprenant un ressort inclinant ledit second tube et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol.
[...]
(10) L'invention conformément à la revendication 1 comprenant une tige pour supporter ledit couteau, ladite tige étant placée de manière à faire dévier les résidus vers les côtés et formée d'un matériau mince dont l'épaisseur est inférieure à la largeur et où la tige est disposée de manière que l'épaisseur soit placée transversalement au sens du déplacement.
Brevet, aux pages 23 à 25.
[89] La revendication 2 ravive le débat sur le fait que le second tube est un élément composite pouvant comprendre un tube fixé à un traceur de sillon à houe étroit. Elle soulève aussi la question du rapport entre les revendications indépendantes et les revendications dépendantes de celles-ci. Dans ce cas-ci, les demandeurs soutiennent que le second tube peut être interprété comme comprenant un tube fixé à un traceur de sillon à houe étroit. La revendication 2 ajoute au second tube de la revendication 1 une tige verticale. Si le second tube comprend déjà un traceur de sillon à houe étroit, l'ajout d'une tige verticale est redondant. De même, si une tige verticale peut être interprétée comme étant un traceur de sillon à houe étroit, alors l'élément distinctif de la revendication 2 a été sous-entendu dans la revendication 1. Cette interprétation n'est pas admissible.
[90] L'article 24 des Règles sur les brevets, C.R.C. 1978, c. 1250, en vigueur à la date à laquelle le brevet a été délivré, se lit comme suit :
24. Les revendications doivent être complètes, indépendamment de toute référence à un document quelconque qui peut être faite dans l'exposé; une revendication plus étendue doit précéder une revendication plus limitée, et toute caractéristique supplémentaire décrite dans une revendication limitée doit être ajoutée à celles décrites dans une revendication plus étendue en indiquant le numéro de celle-ci.
Il est évident qu'une revendication * plus étendue + est une revendication indépendante par rapport à une revendication * plus limitée +, qu'elle incorpore et qui en dépend. Le rapport entre les revendications dépendantes et indépendantes est traité de manière plus explicite à l'article 87 des Règles sur les brevets en vigueur DORS/96-423, qui, à mon avis, explicitent bien ce qui est implicite dans les anciennes règles :
87. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la revendication qui inclut toutes les caractéristiques d'une ou de plusieurs autres revendications (appelée * revendication dépendante + au présent article) renvoie au numéro de ces autres revendications et précise les caractéristiques additionnelles revendiquées. |
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87. (1) Subject to subsection (2), any claim that includes all the features of one or more other claims (in this section referred to as a Adependent claim@) shall refer by number to the other claim or claims and shall state the additional features claimed. |
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(2) La revendication dépendante peut seulement renvoyer à une ou plusieurs revendications antérieures. |
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(2) A dependent claim may only refer to a preceding claim or claims.(3) La revendication dépendante comporte toutes les restrictions contenues dans la revendication à laquelle elle renvoie ou, si elle renvoie à plusieurs revendications, toutes les restrictions figurant dans la revendications ou les revendications avec lesquelles elle est prise en considération. |
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(3) Any dependent claim shall be understood as including all the limitations contained in the claim to which it refers or, if the dependent claim refers to more than one other claim, all the limitations contained in the particular claim or claims in relation to which it is considered. |
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[91] Il est clair, à la lecture de l'article 87 des Règles sur les brevets, qu'une revendication dépendante comprend toutes les caractéristiques et toutes les restrictions de la revendication à laquelle elle renvoie. C'est pourquoi l'interprétation d'une revendication indépendante ne doit pas être en contradiction avec les revendications qui en dépendent. Mon collègue le juge Campbell a adopté ce raisonnement dans Heffco Inc. c. Dreco Energy Services Ltd. (1997), 73 C.P.R. (3d) 284, à la page 298.
[92] Ce principe est bien connu dans la jurisprudence américaine qui traite de l'interprétation des brevets et est appelé le principe de la différenciation des revendications. L'article 112 de la Patent Act américaine, 35 U.S.C., est l'équivalent de l'article 87 des Règles sur les brevets. Il prévoit ce qui suit au paragraphe 4 :
[traduction] Sous réserve du paragraphe suivant, une revendication dépendante doit contenir un renvoi à une revendication énoncée précédemment et doit préciser une restriction de l'objet revendiqué. Une revendication dépendante doit être interprétée de manière à incorporer par renvoi toutes les restrictions de la revendication à laquelle elle renvoie.
[93] Dans sa forme la plus simple, la différenciation des revendications exige uniquement que [traduction] * les restrictions d'une revendication ne soient pas considérées comme faisant partie d'une revendication générale +.Wolens c. F. W. Woolworth Co., 703 F. 2d, 983, à la page 988. Un commentaire plus approfondi sur la différenciation des revendications est donné dans D.M.I., Inc. c. Deere & Co., 755 F. 2d, 1570, à la page 1574 (Fed. Cir. 1985) :
[traduction] La Cour de district a dit ce qui suit : * En règle générale, une restriction ne peut être attribuée à une revendication afin d'éviter la contrefaçon +, en citant Kalman c. Kimberly-Clark Corp. 713 F. 2d 760 [...] Puisque, comme dans le cas présent, la restriction qui ferait partie d'une revendication se trouve déjà dans une autre revendication, la règle est beaucoup plus que * générale +. Elle est fixe. Elle est établie depuis longtemps. Elle a un statut immuable et universellement applicable assez rare parmi les règles de droit. Sans cette règle, toute la structure législative et réglementaire régissant la rédaction, la présentation, l'examen, la reconnaissance et la force exécutoire des revendications s'effondrerait. Cette cour a confirmé le maintien de la règle. Amstar Corp. c. Envirotech Corp., 730 F. 2d 1476 [...] Raytheon Co. c. Roper Corp, précité [...] Fromson c. Advance Offset Plate, Inc. 720 F. 2d 1565 [...] En fait, dans Kalman, 713 F. 2d à la page 770, cette cour a cité avec approbation cet énoncé clair de la règle trouvée dans Deere & Co. c. International Harvester Co. 658 F. 2d 1137 [...] cert. refusé 454 U.S. 969 [...] :
Lorsque certaines revendications sont étendues et d'autres limitées, les restrictions de la revendication limitée ne peuvent pas être considérées comme faisant partie de la revendication étendue pour éviter l'invalidité ou la contrefaçon.
[94] Le principe de différenciation des revendications est traité comme une présomption réfutable :
[traduction] Cette présomption est particulièrement forte lorsque la restriction en litige est la seule différence importante entre une revendication indépendante et une revendication dépendante, et qu'une des parties soutient que la restriction dans la revendication dépendante devrait être considérée comme faisant partie de la revendication indépendante.
Sunrace Roots Enterprise Co. Ltd. c. SRAM Corporation 336 F. 3d 1298, à la page 1303 (U.S.C.A. Fed. Cir. 2003).
[95] Le corollaire de ce principe est que les revendications indépendantes doivent être interprétées d'une manière compatible avec les revendications qui en dépendent. Dans Southwall Technologies c. Cardinal I.G. Co., 54 F. 3d 1570 (U.S.C.A. Fed. Cir. 1995), la Cour a dit, à la page 1579 :
[traduction] L'interprétation d'un mot ou d'une expression d'une revendication contestée exige non seulement le renvoi au mémoire descriptif et à l'historique de la poursuite, mais aussi aux autres revendications [...] Le fait qu'il faut examiner les autres revendications utilisant le même mot ou la même expression lorsque l'on interprète un mot ou une expression d'une revendication invoquée exige que le mot ou l'expression soit interprété d'une manière uniforme dans toutes les revendications [...] (examen de l'emploi du mot * standard + dans des revendications non invoquées pour interpréter le même mot dans des revendications invoquées.)
[96] Cela ne s'étend pas uniquement à l'utilisation uniforme des mots et des expressions, mais aussi à l'uniformité interne entre les revendications indépendantes et dépendantes :
[traduction] De plus, la revendication 9, qui dépend de la revendication 6, précise que la dégauchisseuse à plateau comporte * un passage [...] conçu pour accrocher de manière coopérative ladite poignée de guidage pour permettre à la surface abrasive de dégauchissage de tourner transversalement autour du long axe central de ladite poignée de guidage +. On peut lire la même chose à la colonne 14, lignes 22 à 25. Ainsi, puisque la dégauchisseuse à plateau peut être alignée en rotation de différentes façons, elle n'a aucun alignement en rotation * approprié +. Puisque nous ne pouvons interpréter une revendication indépendante d'une manière qui n'est pas compatible avec une revendication qui en est dépendante, voir Southwall Techs. Inc. c. Cardinal I.G. Co. [citations omises], il faut interpréter l'expression * dans l'alignement approprié + de la revendication 6 comme faisant référence uniquement à l'angle varus/valgus [...]
Wright Technology Inc. c. Osteonics Corp. 122 F. 3d 1440 (U.S.C.A. Fed. Cir. 1997), à la page 1445.
[97] La Cour d'appel fédérale a souvent fait référence à la jurisprudence américaine dans les affaires de brevet. Voir Stamicarbon B.V. c. Urea Casale S.A. (C.A.), [2002] 3 C.F. 347, 2002 CAF 10, au paragraphe 17, pour un examen de la jurisprudence. Une mise en garde a été faite dans Thomas & Betts, Ltd. c. Panduit Corp. (C.A.), [2000] 3 C.F. 3, au paragraphe 28. Les arrêts américains m'aident; cependant, ma conclusion relativement à la nécessité d'interpréter les revendications indépendantes d'une manière compatible avec les revendications qui en dépendent est basée sur le texte des Règles sur les brevets.
[98] En appliquant les principes dont il a ci-dessus été question au problème qui nous occupe, je conclus que les revendications des demandeurs relativement au second tube comprenant un élément de support rigide, comme un traceur de sillon à houe étroit, auquel le second tube est fixé, est incompatible avec l'ajout d'une [traduction] * tige verticale sur un bord avant qui peut s'enfoncer dans le sol vers l'avant et vers le bas par rapport à l'extrémité ouverte du tube + dans la revendication 2. Si la tige verticale est considérée comme un traceur de sillon à houe étroit, point sur lequel je reviendrai dans un moment, alors les demandeurs ont essayé de sous-entendre sa présence dans la revendication 1, rendant ainsi la revendication 2 redondante. Puisqu'il y a présomption contre la redondance et présomption de différenciation des revendications, cette interprétation ne peut être soutenue. Cela confirme donc l'interprétation que j'ai donnée précédemment du second tube.
[99] Il reste à déterminer si le traceur de sillon à houe étroit qui, selon les demandeurs, se trouve sur le second tube peut être représenté par la tige verticale ajoutée à la revendication 2. Dans leurs conclusions finales, les demandeurs ont affirmé que la revendication 2 appuie leur interprétation de la revendication 1. Comme je l'ai déjà mentionné, cette approche est contraire aux règles d'interprétation des brevets. Cependant, il y a encore la possibilité que la tige verticale soit le traceur de sillon à houe étroit sur laquelle est basé leur argument.
[100] Tout repose sur le sens à donner au mot tige. Même si ce mot a été utilisé par de nombreux témoins, on ne leur a pas demandé de le définir. Il est toujours utilisé dans le sens d'une pièce métallique dont la forme et les dimensions ne sont pas précisées. Le mot est aussi utilisé dans le mémoire descriptif, mais encore une fois sans définition. Dans les circonstances, je crois que j'ai le droit de consulter le mémoire descriptif pour voir s'il donne des renseignements sur le sens du mot * tige +. La mention la plus claire du mot tige dont il est question dans la revendication 2 se trouve dans le mémoire descriptif à la page 17 où on peut lire ce qui suit :
[traduction] [...] Un bord avant de la partie 442 porte une pointe ou tige 443 qui fait saillie au-delà du bord inférieur du tube 44 et sert à racler la surface du sol. La tige 443, qui peut être de section circulaire, sert à réduire l'usure sur le bord avant du tube et réduit aussi les risques que la terre humide soit repoussée vers l'arrière dans le tube 44 [...]
Brevet, à la page 17.
En regardant la figure 5, il est possible de voir à 443 une petite pièce de métal, dont le diamètre est beaucoup plus petit que celui du tube sur lequel elle est fixée.
[101] J'accorde une certaine importance au fait de qualifier la tige de * pointe +, car cela suppose qu'elle ne s'étend pas sur toute la longueur du second tube. De plus, je ne crois pas que le fait de conclure qu'il y a une différence entre [traduction] * racler la surface du sol + et [traduction] * tracer un sillon + prête à controverse. Sur cette base, je suis incapable de conclure qu'une tige verticale est autre chose qu'une pièce métallique fixée à l'avant du second tube dans le but de fournir une résistance à l'usure, mais non conçue pour permettre au tube de servir de traceur de sillon à houe étroit.
[102] La revendication 3 ajoute l'élément de l'emplacement de l'extrémité ouverte du second tube au-dessus et à côté de l'extrémité ouverte du premier tube de manière que le second tube suive dans le sillon mais racle une paroi latérale du sillon. Même si la revendication 1 fournit le moyen de fixation grâce auquel le second tube s'enfonce dans le sillon et est ajustable d'un côté à l'autre, elle ne donne pas de renseignement particulier sur l'emplacement relatif des deux tubes. Cet emplacement relatif est donné à la revendication 3.
[103] De plus, la revendication 3 précise que l'emplacement relatif est obtenu en faisant en sorte que le second tube racle une paroi latérale du sillon. La paroi du sillon doit correspondre aux côtés inclinés mentionnés précédemment. L'utilisation du mot sillon dans la revendication 3 est incompatible avec l'argument antérieur des demandeurs qui précise que le sillon comprend non seulement la zone à l'intérieur des côtés inclinés mais aussi la zone de sol remanié au-delà des côtés inclinés. Par conséquent, cette revendication vient appuyer l'interprétation de [traduction] * sillon +, que j'ai adoptée auparavant dans les présents motifs.
[104] La revendication 6 apporte d'importants nouveaux éléments à la revendication 1. Elle précise que l'élément de fixation de la roue de tassement et l'élément de fixation du second tube forment un élément de fixation unique et que ledit élément de fixation est fixé de manière à pivoter par rapport au couteau. L'élément de fixation comprend aussi un ressort qui incline ledit second tube et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol.
[105] L'élément de fixation unique n'est pas en litige en ce qui concerne le second tube et la roue de tassement. Relativement à la revendication 1, les demandeurs ont affirmé que le fait que le second tube est fixé [traduction] * vers l'arrière et à part du couteau + implique que ces éléments sont fixés sur un élément commun.
[106] Les défendeurs Seed Hawk ne sont pas d'accord pour dire que cette revendication exige que le couteau, le second tube et la roue de tassement soient fixés sur un élément de fixation unique. À ce propos, je crois qu'ils ont raison.
[107] Le point qui prête le plus à controverse porte sur la façon exacte dont l'élément commun est fixé de manière à pivoter par rapport au couteau. Les témoignages des experts, relativement à l'importance de cet élément, consistent en grande partie à renvoyer aux dessins. La figure 1 (article 36) et la figure 5 (article 351) illustrent un élément de fixation unique pour le second tube et la roue de tassement. On peut aussi voir sur les deux figures que cet élément commun est lui-même fixé à un élément qui sert à fixer le couteau au cadre. À la figure 1, le point de fixation permettant le pivotement est l'article 37, et à la figure 5, le point de fixation n'est pas numéroté mais se trouve à la jonction des éléments 111 et 351. Dans les deux cas, le point de fixation permet à l'élément de fixation unique de tourner sur le plan vertical par rapport au couteau.
[108] Ce point est soulevé dans le témoignage du Dr Tessier, au paragraphe 18k) de son affidavit établi sous serment le 30 novembre 1999, où il est possible de lire :
[traduction] [...] Cet assemblage [roue de tassement et tube d'ensemencement] n'est pas un élément séparé mais agit de concert avec l'outil de fertilisation. L'élément de fixation de la roue de tassement et de l'outil d'ensemencement exige généralement un mouvement pivotant par rapport à l'outil de fertilisation, c'est-à-dire que l'élément de fixation de l'outil d'ensemencement et de la roue de tassement peut pivoter par rapport à l'outil de fertilisation ou vice versa pour améliorer la profondeur de contrôle de la semence.
[109] Dans son témoignage, le Dr Tessier donne des précisions sur ce point :
[traduction] D'accord, fondamentalement, d'après mon interprétation des revendications 6 et 12, il faut qu'il y ait un rapport de pivotement entre l'outil d'ensemencement et la roue de tassement de même que l'outil de fertilisation. Maintenant, il y a très peu de renseignements sur l'emplacement exact du pivot. Ainsi, le pivot pourrait se trouver à l'avant de l'outil de fertilisation, derrière, au-dessus ou ailleurs. Donc, ce que je dis c'est qu'il est vrai, ou du moins c'est ce que j'en conclus à la lecture des revendications 6 et 12, qu'un des deux outils, c'est-à-dire l'outil de fertilisation et l'ensemble outil d'ensemencement et roue de tassement, doit pouvoir pivoter par rapport à l'autre, ou vice versa, selon mon interprétation de la revendication.
Transcription, 26 octobre 2001, aux pages 1452 et 1453.
[110] Selon le témoignage de M. Anderson au paragraphe 42, je présume que pivoter signifie se déplacer par rapport à un point, tourner. Cela sous-entend un point de fixation, comme le point de pivotement susmentionné. Lorsqu'on parle d'un élément fixé de manière à pivoter par rapport à un autre, il faut nécessairement qu'il y ait un point de fixation entre ces deux éléments. Cela étant, je ne comprends pas le Dr Tessier lorsqu'il dit que le point de pivotement peut se trouver à l'avant de l'outil de fertilisation ou au-dessus de celui-ci ou ailleurs.
[111] Il s'ensuit également qu'un élément peut pivoter par rapport à un autre. Il est difficile de comprendre comment l'ensemble roue de tassement et tube d'ensemencement peut être fixé de manière à pivoter par rapport au couteau de fertilisation si le point de pivotement est à l'avant ou au-dessus du couteau de fertilisation. S'il était fixé de cette façon, il pourrait y avoir mouvement de l'ensemble roue de tassement et tube d'ensemencement par rapport au couteau de fertilisation, mais un tel mouvement n'est pas nécessairement un pivotement. À mon avis, le témoignage du Dr Tessier sur ce point n'est pas fiable. Je conclus donc que pour pouvoir pivoter par rapport au couteau, l'élément de fixation unique doit être fixé au couteau soit directement soit par un autre moyen pour permettre le pivotement de l'élément de fixation unique par rapport au couteau lui-même. Ce point de vue est confirmé par le témoignage de M. Schaaf :
[traduction] Q. D'accord. Alors * fixé par rapport au couteau. + D'accord, cela veut donc dire qu'on peut avoir un élément de fixation différent pour le couteau, fixé par rapport à ce couteau, mais cela ne dit pas qu'ils sont fixés ensemble. Il y a B de fait, nous savons qu'il y a une goupille à cet endroit, une charnière.
R. Il est indiqué * fixé par rapport au couteau +, donc pour moi cela indique qu'il est fixé au couteau.
Q. Oui, avec une charnière, avec une goupille. C'est la façon dont c'est divulgué.
R. Oui. Et ensuite à partir de là un moyen de fixer une entretoise.
Transcription, 20 juin 2002, à la page 3062.
[112] L'élément suivant est la question de la force d'inclinaison. Dans son témoignage le Dr Tessier a expliqué que l'inclinaison signifie l'application d'une force au moyen d'un mécanisme (transcription, 25 octobre 2001, à la page 1324). Le docteur Tessier a précisé dans son témoignage que la décision relative à la question de savoir si la force d'inclinaison devait être exercée par un ressort ou par un vérin hydraulique est [traduction] * passablement banale + (transcription, 26 octobre 2001, à la page 1472). Je crois qu'il veut dire que la façon d'exercer la force d'inclinaison est moins importante que le fait qu'une force d'inclinaison est exercée.
[113] Les éléments essentiels de la revendication 6, abstraction faite de ceux de la revendication 1 de laquelle elle dépend, sont les suivants :
- élément de fixation unique pour le second tube et la roue de tassement;
- élément de fixation unique fixé de manière à pivoter par rapport au couteau;
- force d'inclinaison exercée sur le second tube et la roue de tassement pour les maintenir en contact avec le sol.
[114] La revendication 10 traite uniquement de la tige sur laquelle le couteau est fixé. Elle n'est pas en litige. Les parties s'entendent pour dire que la tige décrite dans la revendication est ce qu'on appelle une * tige à arête +, ce qui signifie que la tige est orientée de façon que son côté le plus étroit soit son bord d'attaque. La mention du déplacement des débris constitue l'une des rares indications dans les revendications précisant que l'invention est conçue pour être utilisée dans un environnement sans labourage.
REVENDICATION 12
[115] Cela conclut l'interprétation de la revendication 1 et des revendications qui en dépendent. Je dois maintenant examiner les trois autres revendications indépendantes qui sont invoquées contre le dispositif des défendeurs Seed Hawk. La première de ces revendications est la revendication 12 que je reproduis ici sous forme structurée :
1 Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
2 un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
3 un moyen de distribution du premier matériau comportant
4 un couteau pour creuser un sillon dans le sol,
5 un moyen de fixer le couteau au cadre
6 disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
9 un premier tube,
10 un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
12 un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
15 un moyen de distribution du second matériau comportant
16 un second tube,
17 un moyen de fournir un second matériau au second tube,
19 un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
21 ledit moyen de fixer le second tube étant disposé de manière à soutenir le second tube à une position située au-dessus du sillon et disposé de manière que le second tube entre dans le sillon pour que le second tube suive dans le sillon et s'enfonce dans la terre de ce dernier et
29 disposé de manière que le second tube soit espacé du premier tube d'une distance suffisante pour permettre à la terre de retomber dans le sillon entre les deux tubes lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le moyen de creuser,
36 une roue de tassement et
37 un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube,
39 ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant un élément de fixation unique
42 fixé de manière à pivoter par rapport au couteau pour que le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement, et
46 comprenant un moyen d'incliner ledit second tube et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol,
49 la largeur de ladite roue de tassement et la largeur du couteau étant établies de manière que la largeur du sillon par rapport à la roue de tassement permette à cette dernière de rouler dans le sillon à une position sous le niveau du sol de manière à guider ledit second tube dans le sillon.
[116] Puisque la définition la plus complète de l'invention est donnée à la revendication 6, il est peut-être plus facile de discuter de la présente revendication en renvoyant à la revendication 6. Les nouveaux éléments sont la distance à maintenir entre le second tube et le premier tube, le moyen de fixer le second tube de façon rigide par rapport à la roue de tassement et le rapport entre les largeurs de la roue de tassement et du couteau.
[117] Au cours de la discussion sur le moyen de fixer le second tube de la revendication 1, j'ai remarqué que les experts des demandeurs ont soutenu que l'espacement entre le second tube et le couteau était très important, mais qu'il n'y avait aucune indication de l'espacement requis. Cet élément de la revendication 12 fournit la réponse en termes fonctionnels : la distance doit être [traduction] * suffisante pour permettre à la terre de retomber dans le sillon entre les deux tubes lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le moyen de creuser +. La distance précise n'est pas précisée dans la revendication.
[118] L'élément de fixation unique du second tube et de la roue de tassement, qui est mentionné dans la revendication 6 comme revendication dépendante, fait maintenant partie d'une revendication indépendante. Un autre élément nouveau est apporté, soit que le second tube est fixé de façon rigide par rapport à la roue de tassement. Ce qui est intéressant, c'est que l'ajout de cet élément est associé au retrait de la mention d'un [traduction] * ajustement d'un côté à l'autre + du second tube. Dans son témoignage, le Dr Tessier donne deux fonctions à cette fixation rigide. Il précise qu'elle a un lien avec le contrôle de la mise en place de la semence :
[traduction]
R. Il devrait être clair maintenant qu'une des fonctions importantes d'une roue de tassement, lorsqu'elle est fixée de façon rigide à l'outil d'ensemencement, est de déterminer ou de guider la mise en place de la semence par des ajustements par rapport à l'élévation.
Transcription, 26 octobre 2001, à la page 1475.
[119] Par contre, le Dr Tessier a aussi mentionné la fixation rigide relativement au guidage du second tube dans le sillon :
[traduction] [...] par conséquent, étant donné qu'il est fixé de façon rigide à l'outil d'ensemencement, il influe sur la capacité de guidage du dispositif d'ensemencement et la transfère au semoir.
Transcription, 26 octobre 2001, à la page 1484.
[120] L'élément suivant est l'inclinaison de la roue de tassement et du second tube. J'ai noté que la manière précise dont la force d'inclinaison est exercée n'est pas précisée comme elle l'est dans la revendication 6, qui montre clairement que c'est le fait qu'une force d'inclinaison est exercée qui est important, et non le moyen par lequel elle est exercée. L'importance de l'inclinaison est plutôt modeste selon le Dr Tessier :
[traduction] Cela a vraiment un réel -- le mécanisme d'inclinaison de ces dispositifs d'ensemencement a un rôle mineur à jouer puisque les principales caractéristiques, ou j'imagine un des principaux composants ou un facteur contributif de l'épandage en bandes latérales de l'engrais par rapport à la semence est ce qui se passe dans le sol.
Transcription, 26 octobre 2001, à la page 1472.
[121] Le dernier élément nouveau mentionné dans la revendication 12 est le rapport entre les largeurs du couteau et de la roue de tassement qui permet à la roue de tassement de rouler dans le sillon sous le niveau du sol de manière à guider le second tube dans le sillon. Voici ce que M. Halford avait à dire à propos de la fonction de guidage :
[traduction] R. Ce que nous avons appris lorsque nous avons assemblé ce dispositif c'est que toutes les autres machines d'ensemencement, je ne dirais pas toutes mais la majorité des autres machines conçues au début des années 80, avaient presque toutes un ensemble de tassement sur l'arrière, vous savez, une série de roues alignées, et des disques ou des houes à l'avant et ainsi de suite. Il est évident que certaines machines avaient un dispositif de tassement plus rapproché, mais sur plusieurs le dispositif était disposé sur l'arrière. Avec cette disposition, si le traceur de sillon est à l'avant, la roue de tassement peut se trouver aussi loin que six à sept pieds derrière. Lorsqu'on effectue des virages avec cette machine, la roue de tassement sort du sillon. La machine n'est réellement efficace que lorsqu'elle se déplace en ligne droite. Si vous placez la roue de tassement de la façon dont nous le faisons, directement derrière le couteau, le couteau de fertilisation et le traceur de sillon d'ensemencement, et que la roue de tassement se trouve dans le sillon, la roue de tassement ne sortira pas immédiatement du sillon lorsque la machine avancera et tournera légèrement. Elle restera dans le sillon parce qu'elle est enfoncée dans le sillon et qu'elle sent une résistance contre la paroi latérale du sillon qui l'aide à rester dans le sillon. Ainsi, elle maintiendra son rapport avec le traceur de sillon d'ensemencement qui est situé immédiatement devant elle.
Q. Donc la fonction de guidage n'est mise en oeuvre que lors des situations de virage?
R. Elle ne sera efficace que lors des virages légers, si vous parlez des situations de virage. Elle ne sera pas efficace lorsque vous arriverez à l'extrémité d'un champ et que vous devrez faire un virage de 90 degrés. Il n'y a aucune façon que la roue de tassement reste dans le sol dans ce cas.
Q. Et le guidage dont vous avez parlé est le fait que la roue de tassement est retenue par les parois du sillon, qu'elle ne peut en sortir, et est maintenue en place?
R. Eh bien, elle est retenue en place à cause de la forme du sillon qui est généralement en V d'environ 80 à 90 degrés, et parce que le sillon -- en d'autres termes, vous avez une forme biseautée dans laquelle se trouve la roue, donc elle a une paroi sur laquelle s'appuyer, et cela lui permet de maintenir sa position dans l'ouverture.
Transcription, 7 novembre 2000, aux pages 280 à 282.
[122] Sur la base de cette analyse, je dirais que les éléments essentiels de la revendication 12 sont les mêmes que ceux de la revendication 6 avec en plus :
- espacement du second tube par rapport au premier pour permettre à la terre de retomber après le passage du premier tube avant que le second tube dépose le second matériau;
- second tube fixé de façon rigide à la roue de tassement/contrôle de la profondeur;
- largeur du couteau par rapport à la roue de tassement/contrôle de la profondeur;
- effet de guidage de la roue de tassement qui vient du fait qu'elle roule dans le sillon sous le niveau du sol.
REVENDICATION 19
[123] La revendication indépendante suivante est la revendication 19 que je reproduis ici sous forme structurée :
1 Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
2 un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
3 un moyen de distribution du premier matériau comportant
4 un moyen de creuser un sillon dans le sol formé uniquement d'un couteau,
6 un moyen de fixer le couteau au cadre
7 disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
10 un premier tube,
11 un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
13 un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
16 un moyen de distribution du second matériau comportant
17 un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé
18 uniquement d'un second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol,
22 un moyen de fournir un second matériau au second tube,
24 un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
26 ledit moyen de fixer le second tube comportant un élément placé au-dessus du sillon et à partir duquel le second tube fait saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier,
30 ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau,
35 un moyen d'exercer une force sur ledit second tube pour maintenir ledit second tube en contact avec le sol.
[124] Tous les éléments de la revendication 19 ont donc déjà été discutés :
- dépôt de matériaux différents au moyen de deux tubes de distribution de matériaux différents;
- outil de creusage de sillon, couteau fixé a un cadre qui se déplace sur le sol;
- premier tube fixé immédiatement vers l'arrière du premier couteau;
- moyen de distribution du second matériau formé uniquement d'un second tube composé d'un seul tube avec une ouverture au point d'enfoncement dans le sol;
- second tube fixé vers l'arrière et à part du couteau;
- moyen de distribution du second matériau s'enfonçant dans le sol à une position espacée vers l'arrière par rapport au couteau;
- second tube fixé à une distance du premier tube de manière à laisser un espace libre dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau;
- moyen d'exercer une force sur le second tube pour essayer de maintenir le second tube en contact avec le sol.
REVENDICATION 20
[125] La dernière revendication indépendante est la revendication 20 que je reproduis ci-dessous sous forme structurée, comme je l'ai fait pour les autres revendications indépendantes.
1 Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
2 un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
3 un moyen de distribution du premier matériau comportant
4 un moyen de creuser un sillon dans le sol formé
5 uniquement d'un couteau,
6 un moyen de fixer le couteau au cadre
7 disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
10 un premier tube,
11 un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
12 un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
15 un moyen de distribution du second matériau comportant
16 un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé
17 uniquement d'un second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol,
21 un moyen de fournir un second matériau au second tube,
23 un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
25 ledit moyen de fixer le second tube comportant
26 un élément placé au-dessus du sillon et à partir duquel le second tube fait saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier,
30 ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau,
38 un ensemble de roue de tassement comportant
39 une roue de tassement et
40 un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube,
43 ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant
46 un élément de fixation unique fixé par rapport au couteau pour que le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement,
51 un moyen d'exercer une tension [force] sur ledit élément de fixation unique pour maintenir ledit second tube et ladite roue de tassement en contact avec le sol,
56 ladite roue de tassement et ledit couteau ayant des largeurs respectives concourantes, faisant de sorte que la roue de tassement est plus large que le couteau à son point le plus bas et plus étroite que la partie la plus large du sillon creusé par le couteau afin que la roue de tassement roule dans le sillon à une position sous le niveau du sol de manière à guider ledit second tube dans le sillon.
[126] La revendication 20 comprend plusieurs caractéristiques qui ne figurent pas dans la revendication 1 mais qui figurent dans les autres revendications. Les lignes 1 à 14 de la revendication 20 sont essentiellement les mêmes que les lignes 1 à 15 de la revendication 1, sauf pour la description du couteau, figurant aux lignes 4 et 5 de la revendication 19. Je ne vois aucune différence marquée entre les deux en raison d'une description légèrement différente.
[127] La description de l'outil pouvant ouvrir la terre et s'enfoncer dans la terre donnée aux lignes 16 à 20 de la revendication 20 reproduit la description donnée aux lignes 17 à 21 de la revendication 19. La description du moyen de fixer le second tube donnée aux lignes 25 à 29 de la revendication 20 reproduit la description donnée aux lignes 26 à 29 de la revendication 19. La description de l'espacement entre le premier et le second tube donnée aux lignes 30 à 37 de la revendication 20 répète en grande partie la description de ce même espacement que l'on retrouve aux lignes 30 à 34 de la revendication 19, sauf pour la dernière phrase. Dans la revendication 20, la terre tombe dans le sillon [traduction] * lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau +, tandis que dans la revendication 19 la terre retombe dans le sillon [traduction] * derrière le couteau +. La différence entre les deux est que la revendication 19 indique le * moment + où la terre tombe dans le sillon tandis que la revendication 20 indique * l'endroit + où la terre tombe dans le sillon.
[128] La principale différence entre la revendication 20 et les autres revendications est la description de l'ensemble de roue de tassement. Les lignes 46 à 50 parlent d'un élément de fixation unique fixé par rapport au couteau, mais sans mentionner qu'il est fixé de manière à pivoter comme cela est indiqué aux revendications 6 et 12. Ces lignes mentionnent aussi que le second tube est soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement comme dans la revendication 12. Donc, la revendication 20 est plus large que les revendications 6 et 12 relativement à la façon de fixer l'élément commun.
[129] Dans l'hypothèse où le mot * tension + à la ligne 51 serait une erreur typographique pour * force +, la description du moyen d'exercer une force sur l'élément de fixation unique est presque la même que la mention du moyen d'incliner de la revendication 12. Les commentaires que j'ai faits sur cette dernière s'appliquent aussi à cette partie de la revendication 20.
[130] La dernière partie de la revendication 20 est une reprise de la question des largeurs respectives du couteau et de la roue de tassement, sauf que la largeur de la roue de tassement est maintenant définie en fonction de la partie la plus étroite du couteau et de la partie la plus large du sillon. Le résultat est le même que dans la revendication 12, soit que la roue de tassement roule dans le sillon à une position sous le niveau du sol et guide le second tube dans le sillon.
CONTREFAÇON
DESCRIPTION DU DISPOSITIF SEED HAWK
[131] Je vais maintenant décrire le dispositif Seed Hawk en renvoyant à un dessin fourni dans la documentation publicitaire de Seed Hawk et qui est joint aux présents motifs à l'annexe 2. Le dispositif Seed Hawk est un dispositif qui sert à mettre en place deux matériaux dans le sol à une profondeur déterminée et dans un rapport uniforme l'un avec l'autre. Il est formé d'un cadre auquel est fixé un support d'accrochage 13 au moyen de boulons en U 17 et auquel est fixé, de manière à pivoter, un bras de mise en place 15 afin de permettre un mouvement sur le plan vertical. Les éléments suivants sont fixés au bras de mise en place 15 :
[traduction] - une plaque de déclenchement 9, qui est fixée de manière à pivoter sur le bras de mise en place 15 et à laquelle est fixé un couteau de fertilisation 8 qui se termine par une lame en carbure 4 (l'ensemble de couteau de fertilisation) et un tube de descente d'engrais 16 qui est fixé derrière le couteau de manière à déposer l'engrais dans le sillon creusé par le couteau;
- un couteau d'ensemencement 6 qui est fixé de façon rigide au bras de mise en place 15, vers l'arrière de l'ensemble de couteau de fertilisation, et un tube de descente de semence 7 qui est fixé derrière le couteau d'ensemencement 6 de manière à déposer la semence dans le sillon creusé par le couteau d'ensemencement;
- une roue de tassement/jaugeage pneumatique 5 dont l'essieu est maintenu en position sur une jauge de profondeur 12 au moyen d'un boulon de blocage de profondeur 11.
[132] Un vérin hydraulique 14, dont l'extrémité distale est fixée à un point sur la plaque de déclenchement 9, est aussi fixé au support d'accrochage 13. Le vérin hydraulique 14 peut exercer des forces vers l'avant (traction) et vers l'arrière (poussée) par rapport au devant du cadre. Lorsqu'une force de traction est exercée, l'ensemble de couteau de fertilisation est tiré dans le sol. Le degré de traction est limité par une chaîne 10 qui s'étend de la plaque de déclenchement 9 jusqu'au bras de mise en place 15 vers l'arrière. Lorsque la chaîne est sous tension, la force de traction est transférée par le bras de mise en place 15 à la roue de tassement pneumatique 5.
[133] La position du couteau de fertilisation peut être ajustée en soulevant ou abaissant mécaniquement le couteau de fertilisation sur la plaque de déclenchement. Il est possible d'ajuster l'espacement latéral entre le couteau de fertilisation et le couteau d'ensemencement en ajoutant une rondelle entre le couteau 8 et la pièce coulée de la plaque de déclenchement 9. (Voir les manuels Seed Hawk, pièce R de l'affidavit de David Schaaf établi sous serment le 30 octobre 2000, sous le titre [traduction] * Tassement +.) On peut ajuster la profondeur de mise en place de l'engrais et de la semence en modifiant l'emplacement de la roue de tassement dans la jauge de profondeur 11. En glissant la roue de tassement vers le haut dans la jauge de profondeur, on augmente la profondeur d'ensemencement, mais en la glissant vers le bas, on diminue la profondeur d'ensemencement. Les profondeurs de la semence et de l'engrais sont mesurées à partir de la surface du sol sous le centre de la roue de tassement. (Ces renseignements sont tirés de la page 11 du dernier manuel Seed Hawk inclus dans la pièce R de l'affidavit de David Schaaf établi sous serment le 30 octobre 2000.)
[134] Lorsqu'elles ont été ajustées, les positions des couteaux d'ensemencement et de fertilisation sont fixes et la force d'inclinaison exercée sur l'ensemble de couteau de fertilisation et éventuellement sur la roue de tassement n'a aucune incidence sur elles. La force d'inclinaison et le fait que le bras de mise en place 15 est fixé au cadre de manière à pivoter par l'intermédiaire du support d'accrochage 13 permettent à tout l'ensemble de suivre le terrain quelle que soit la position du cadre lui-même par rapport au terrain (à l'intérieur de certains paramètres d'utilisation).
[135] Lorsque l'appareil est abaissé en position d'utilisation, la force de traction du vérin hydraulique tire le couteau de fertilisation en position d'utilisation. La force exercée est transmise à la roue de tassement et pousse celle-ci à entrer en contact avec le sol. Le couteau d'ensemencement 6 suit le couteau de fertilisation 8 dans le sol selon un rapport établi par les ajustements mécaniques des divers composants.
[136] Le vérin hydraulique sert à maintenir une pression constante sur la roue de tassement pneumatique, malgré les changements de niveau du sol par rapport au cadre, ce qui assure une mise en place uniforme de la semence et de l'engrais par rapport à la surface du sol sous la roue de tassement. Cependant, la pression hydraulique est réglée de manière à être relâchée si l'ensemble de couteau de fertilisation frappe un obstacle assez gros pour surmonter la force de traction du vérin hydraulique. Cela permet à la plaque de déclenchement (et à tout l'ensemble de couteau de fertilisation) de pivoter librement sur son point de fixation et de passer par-dessus l'obstacle. Une fois l'obstacle passé, le vérin hydraulique exerce de nouveau sa force de traction et tire sur le couteau de fertilisation pour le remettre en position d'utilisation. En mode de transport, le vérin hydraulique est placé de manière à exercer une force de poussée, qui replie la plaque de déclenchement contre le bras de mise en place, soulevant ainsi le bras de mise en place suffisamment au-dessus de la surface du sol pour qu'aucun des éléments qui y est fixé n'entre en contact avec le sol.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 1
[137] Grâce à cette description, je suis maintenant en mesure d'associer les éléments de la revendication au dispositif Seed Hawk. La façon la plus facile de procéder consiste à reproduire chaque revendication sous forme de colonne et d'identifier dans une deuxième colonne les éléments correspondants du dispositif Seed Hawk. Je commence par la revendication 1 : Revendication 1 Dispositif Seed Hawk
Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un couteau pour creuser un sillon dans le sol,
-un moyen de fixer le couteau au cadre
-disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
-un premier tube, -un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un second tube,
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
-ledit moyen de fixer le second tube pouvant être ajusté pour fournir au moins un ajustement d'un côté à l'autre dudit second tube par rapport au couteau,
-ledit moyen de distribution du second matériau comprenant
-un moyen faisant saillie vers le bas d'une position située au-dessus du sillon et pouvant s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon à une position espacée vers l'arrière par rapport au dit couteau et
-formé uniquement d'une surface extérieure du second tube pour que le second tube suive dans le sillon à ladite position espacée et s'enfonce dans la terre du sillon,
-une roue de tassement et
-un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube. |
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Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un couteau formé d'un couteau de fertilisation 8 pour creuser un sillon dans le sol,
-un moyen de fixer le couteau de fertilisation 8 à la plaque de déclenchement qui est fixée de manière à pivoter sur le bras de mise en place qui est lui-même fixé de manière à pivoter sur le support d'accrochage qui est fixé au cadre (1)
-disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol
-un premier tube formé d'un tube de descente d'engrais 16, -un moyen de fournir un matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un second tube formé d'un tube de descente de semence 7,
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau de fertilisation 8 qui consiste à le fixer au couteau d'ensemencement 6,
-la position dudit second couteau par rapport au couteau de fertilisation pouvant être ajustée en plaçant des entretoises entre le couteau de fertilisation et la plaque de déclenchement, (2)
-ledit moyen de distribution du second matériau comprenant
-un moyen faisant saillie vers le bas d'une position située au-dessus du sillon et pouvant s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon à une position espacée vers l'arrière par rapport au dit couteau de fertilisation 9 et
-formé du couteau d'ensemencement 6 et du tube d'ensemencement 7 pour que le second tube suive dans le sillon creusé par le couteau d'ensemencement à ladite position espacée (3) (4)
-une roue de tassement/de jaugeage pneumatique 5 et
-un moyen de fixer la roue de tassement/jaugeage pneumatique 5 vers l'arrière par rapport au tube de descente de semence 7 pour qu'elle suive dans le sillon derrière le tube de descente de semence. |
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[138] Il y a quatre différences entre le dispositif Seed Hawk et la revendication 1, identifiées par les chiffres 1, 2, 3 et 4 dans la colonne de Seed Hawk. Les différences sont :
(1) couteau de fertilisation fixé de manière à pivoter au bras de mise en place plutôt qu'au cadre;
(2) ajustement de l'espacement latéral entre les tubes d'ensemencement et de fertilisation effectué au moyen d'entretoises placées entre le couteau de fertilisation et la plaque de déclenchement, plutôt qu'au moyen d'un ajustement d'un côté à l'autre du tube d'ensemencement;
(3) utilisation d'un couteau d'ensemencement qui s'enfonce dans la terre plutôt que d'un tube qui s'enfonce dans la terre uniquement au moyen de sa surface extérieure;
(4) création d'un sillon distinct par le couteau d'ensemencement plutôt qu'enfoncement du tube d'ensemencement dans la terre du sillon creusé par le couteau.
[139] Aucune de ces différences ne se traduit par l'absence d'un élément essentiel. Elles pourraient plus exactement être décrites comme des variantes de ce qui est décrit dans la revendication. Nous n'avons donc pas affaire à l'absence d'un élément essentiel. Par conséquent, pour déterminer s'il y a eu contrefaçon, il ne suffit pas de demander s'il manque un élément essentiel. Il se peut qu'un élément ait été remplacé par un autre et que l'élément de remplacement effectue exactement ce que l'élément de base faisait, de la même façon et avec le même résultat. Un tel remplacement équivaudrait clairement à une contrefaçon, même si selon une interprétation textuelle de la revendication un des éléments essentiels manquait. Comme le juge Willis l'a signalé dans Incandescent Gas Light Co. c. De Mare Incandescent Light System Ltd. (1896), 13 R.P.C. 301, à la page 330 :
Il est rare que le contrefacteur accomplisse tout ce qui est revendiqué dans le mémoire descriptif et rien d'autre.
Cité par le juge Binnie dans Free World Trust, précité, au paragraphe 71.
[140] C'est pour cette raison que le juge Binnie a incorporé dans son analyse le critère énoncé dans Improver Corp. c. Remington Consumer Products Ltd., [1990] F.S.R. 181 :
(i) La variante influence-t-elle de façon appréciable le fonctionnement de l'invention? Dans l'affirmative, la variante ne tombe pas sous le coup de la revendication. Dans la négative :
(ii) Le fait que la variante n'influence pas de façon appréciable le fonctionnement de l'invention aurait-il été évident, à la date de la publication du brevet, pour un expert du domaine? Dans la négative, la variante ne tombe pas sous le coup de la revendication. Dans l'affirmative :
(iii) L'expert du domaine conclurait-il malgré tout, à la lecture de la teneur de la revendication, que le breveté considérait qu'une stricte adhésion au sens premier constituait une condition essentielle de l'invention? Dans l'affirmative, la variante ne tombe pas sous le coup de la revendication.
Free World Trust, précité, au paragraphe 55
[141] Le critère énoncé dans Improver tient compte du caractère essentiel, de l'opportunité et de l'intention de l'inventeur.
[142] Comme il a déjà été mentionné, il y a quatre variantes relativement à la revendication 1 :
(1) couteau de fertilisation fixé au bras de mise en place;
(2) ajustement de l'espacement latéral du couteau de fertilisation par rapport au couteau d'ensemencement;
(3) enfoncement dans la terre du couteau d'ensemencement;
(4) création d'un second sillon par le couteau d'ensemencement.
1) Première variante : couteau de fertilisation fixé au bras de mise en place :
a) Répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention
[143] Il faut d'abord déterminer, relativement au couteau de fertilisation fixé au bras de mise en place 15 du dispositif Seed Hawk, s'il s'agit en fait d'une variante et, dans l'affirmative, si elle influence de façon appréciable le fonctionnement de l'invention. La revendication parle d'un moyen de fixer le couteau au cadre, qui peut ou non comprendre des éléments intermédiaires. Les demandeurs renvoient au mémoire descriptif pour appuyer leur conclusion voulant que les mots et les expressions utilisés dans la revendication 1 soient assez étendus pour inclure la fixation au cadre au moyen d'un élément intermédiaire comme la tige 11 à la figure 1.
[144] Les experts des demandeurs se sont concentrés sur le fait qu'il y avait un seul point de fixation au cadre dans les dessins pour appuyer la conclusion voulant que toute disposition avec un seul point de fixation au cadre, comme c'est le cas pour le dispositif Seed Hawk, satisfaisait à l'exigence d'être fixé au cadre. Par exemple :
[traduction] La pièce 59 montre un point de fixation simple qui se trouve sur le cadre. Elle montre aussi que le traceur de sillon de fertilisation, le couteau de fertilisation, est relié à ce point de fixation de même qu'au vérin. D'après moi, cela démontre que le couteau de fertilisation est fixé au cadre. Il est fixé au cadre au moyen d'un élément de déclenchement qui prend essentiellement la forme d'un vérin hydraulique. Cela forme son lien avec le cadre.
Témoignage de David Schaaf, transcription, 10 février 2003, à la page 5283.
[145] Le témoignage de M. Schaaf revient à dire que le couteau de fertilisation est fixé au cadre, parce qu'il est fixé à un élément qui est lui-même fixé au cadre. La figure 1 du brevet montre que le couteau de fertilisation est fixé au cadre au moyen du support 10, de la tige 11 et du support 14. La figure 5 montre l'ensemble de couteau de fertilisation et l'élément de fixation unique fixés à la tige 111. Puisque le mémoire descriptif utilise le mot couteau pour faire référence à la partie de l'ensemble qui creuse vraiment le sillon, ce dispositif exige une quincaillerie intermédiaire pour pouvoir être fixé au cadre si le cadre doit se trouver à plus de quelques pouces au-dessus du sol. Le mémoire descriptif fait état de cela :
[traduction] Une tige 11 est fixée sous les éléments transversaux 10 au moyen d'un boulon en U courant 12 et, au besoin, un mécanisme de déclenchement 13 peut être ajouté pour la tige 11. Cette tige 11 courbe vers le bas et vers l'arrière à partir du boulon en U et se termine par un support 14 qui est situé juste au-dessus de la surface du sol lorsque l'outil est en position d'utilisation et que tout l'ensemble de mise en place est fixé à la tige 11 au moyen du support 14 et des autres raccords qui seront décrits par la suite.
[...]
Le support 14 soutient un couteau de traçage de sillon fixé à ce support au moyen de boulons 16 de façon que le couteau fasse saillie vers le bas et pointe vers l'avant dans un angle légèrement incliné [...]
Brevet, aux pages 6 et 7.
Par conséquent, le moyen de fixer le couteau au cadre doit comprendre plus qu'un simple support.
[146] Dans le cas du dispositif Seed Hawk, le support d'accrochage 13 est fixé au cadre au moyen de boulons en U 17. Le bras de mise en place pivote à partir du support d'accrochage et l'ensemble de couteau de fertilisation à son tour pivote à partir du bras de mise en place. Dans la mesure où l'on peut dire que quelque chose est fixé au cadre, il s'agit du support d'accrochage. Le bras de mise en place est fixé au support d'accrochage de manière à pivoter et l'ensemble de couteau de fertilisation est fixé au bras de mise en place de manière à pivoter. Le témoignage de M. Anderson sur ce point fait une distinction entre fixé au cadre et suspendu au cadre :
[traduction] Par contre, le dispositif Seed Hawk est conçu de manière que chaque couteau de fertilisation et couteau d'ensemencement est suspendu indépendamment et individuellement au cadre de manière à pivoter. Les couteaux de fertilisation ne sont pas * fixés + au cadre de façon rigide selon le sens donné dans le mémoire descriptif Halford et de la manière indiquée dans le dispositif Halford, mais ils sont plutôt fixés sur un bras qui est suspendu du cadre et qui pivote par rapport à celui-ci. Ceci constitue une dérogation importante par rapport aux anciennes technologies applicables aux cultivateurs sous-soleurs et aux cultivateurs. Les couteaux de fertilisation ne se soulèvent pas directement lorsque le cadre est soulevé comme dans le dispositif Halford; ils sont plutôt ajustés séparément et indépendamment de manière à rester à une profondeur constante par rapport à la surface du sol.
Affidavit de Clifford Anderson établi sous serment le 3 février 2003, au paragraphe 41.
[147] Je ne suis pas certain que cette distinction puisse être maintenue. Logiquement, M. Anderson devrait dire que l'ensemble de couteau de fertilisation est aussi suspendu, puisqu'il pivote à partir du bras de mise en place, tout comme ce dernier pivote sur le support d'accrochage. Si l'on veut être logique dans l'utilisation du mot * couteau +, l'élément du dispositif Seed Hawk qui est comparable au couteau de fertilisation 15 est le couteau de fertilisation 8 de la figure 2. Le couteau 8 est boulonné à la plaque de déclenchement qui, à son tour, est fixée de manière à pivoter au bras de mise en place, qui est lui-même fixé de manière à pivoter au support d'accrochage qui est boulonné au cadre. Étant donné cette série de raccords, je crois qu'il n'est pas correct de dire que le couteau de fertilisation est fixé au cadre.
[148] L'argument de M. Schaaf voulant que la présence d'un point de fixation unique signifie que le couteau de fertilisation (ainsi que tout ce qui se trouve sur le bras de mise en place) est fixé au cadre est tout simplement trop général (voir la contre-preuve de David Schaaf, transcription, 10 février 2003, à la page 5283).
[149] D'après moi, le fait de fixer le couteau de fertilisation sur un bras qui est lui-même fixé de manière à pivoter à un support fixé au cadre est une variante par rapport à ce qui est décrit dans le brevet. Cette variante influence-t-elle de façon appréciable le fonctionnement de la machine? Il est impossible de répondre à cette question sans comprendre d'abord comment fonctionne l'invention décrite dans le brevet.
Comment fonctionne l'invention?
[150] Selon la description de la revendication, je comprends que l'invention place deux matériaux dans le sol au moyen d'un couteau qui creuse un sillon dans lequel un premier matériau est déposé au moyen d'un premier tube tandis qu'un second matériau est déposé par un second tube qui s'enfonce dans la terre du sillon creusé par le couteau. Par contre, il ne suffit pas de mettre en place deux matériaux dans la terre en un passage; il faut aussi les mettre en place à une profondeur donnée et dans un rapport donné l'un par rapport à l'autre. Selon l'expert des défendeurs Seed Hawk, M. Anderson, le fait que le couteau de fertilisation est fixé au cadre signifie que la profondeur de labourage du couteau de fertilisation est contrôlée par la hauteur du cadre :
[traduction] 33. Lors de l'utilisation du dispositif Halford, le cadre est abaissé de la position (20A) à la position (20)*. Cela ajuste la profondeur du couteau (15) dans le sol puisque le couteau (15) est fixé de façon rigide au cadre (10) par l'élément tige du couteau (111 et 113) et le système de boulon et de plaque de retenue (12). Lorsque le cadre (10) se déplace vers l'avant, le couteau (15) creuse un sillon et l'engrais est déposé par un tube (18) à travers une ouverture dans le fond du tube dans le sillon derrière le couteau (15).
Affidavit de Clifford Anderson établi sous serment le 3 février 2003.
*la numérotation a été modifiée comme il en a déjà été fait mention
[151] Monsieur Anderson a aussi mentionné que puisque le couteau était fixé de façon rigide, la mise en place de la semence ne se fera pas toujours selon un rapport constant avec l'engrais :
[traduction] 37. Lorsque le cadre (10) se déplace vers l'avant sur le sol, la position du couteau (15) et la position du bord inférieur du premier tube (19) sont fixes par rapport au cadre, car ils sont fixés de façon rigide au cadre par les éléments (112 et 113) et (12). Cependant, grâce au ressort flexible (431) et à la capacité du bras de montage (352 et 353) à tourner sur un point (non indiqué, le point sur lequel le bras (352) est fixé à la tige (111)), l'ouverture du second tube (444) n'est pas fixe par rapport à l'ouverture du premier tube (19). Le bras de montage (352 et 353) peut tourner sur un point (non indiqué, comme ci-dessus) parce que la roue de tassement (38) roule le long de l'intérieur du sillon et se déplace vers le haut et vers le bas par rapport au niveau du sol selon la quantité de remblayage ou de terre meuble dans le sillon. Puisqu'il est impossible de maintenir un espacement relatif entre l'extrémité ouverte du tube de fertilisation (19) et l'extrémité ouverte du tube d'ensemencement (444), la mise en place relative de l'engrais et de la semence dans le sillon ne peut être maintenue.
* la numérotation a été modifiée comme il en a déjà été fait mention
[152] Monsieur Anderson a admis lors de son contre-interrogatoire que sa description de l'invention se limitait en bonne partie à ce qui était illustré à la figure 5 du brevet, même si le brevet prévoyait plus d'une réalisation de l'invention. Cela ne veut pas nécessairement dire que la description de M. Anderson est fausse. Son analyse du fonctionnement de l'invention peut être correcte pour une réalisation. L'erreur qu'il a commise a été de traiter les caractéristiques d'une seule réalisation comme si elles s'appliquaient à l'invention elle-même dans toutes ses réalisations possibles.
[153] Le docteur Tessier a rejeté le point de vue M. Anderson relativement au couteau fixé de façon rigide au cadre au paragraphe 376 de son affidavit établi sous serment le 25 octobre 2000. Ce passage a déjà été cité dans les présents motifs (voir paragraphe 40), mais je le répète ici pour plus de commodité :
[traduction] Il est clair que M. Anderson croit que le fait que le couteau est fixé au cadre de manière à ce que la profondeur de l'outil de fertilisation soit contrôlée uniquement par la hauteur du cadre qui est ajustable est un élément essentiel de l'invention. Cependant, cela est manifestement incorrect, car le brevet précise dans le paragraphe figurant aux pages 10 et 11 que :
l'utilisateur ajuste ensuite la roue de tassement/contrôle de la profondeur 38 de chaque unité individuelle au moyen de tiges d'ajustement 40 pour obtenir la profondeur de fonctionnement désirée de l'outil de labourage principal sous forme de couteau 15 de même que la profondeur à laquelle l'engrais et/ou la semence sort du tube 18.
L'ajustement est effectué après l'ajustement de la hauteur de travail du cadre et indépendamment de celui-ci. Cet ajustement est permis grâce, par exemple, au raccord à ressort 13 entre la tige 11 et le cadre. Ainsi, le ressort 13 exerce une force vers le bas sur l'outil de fertilisation et sur les éléments derrière l'outil de fertilisation, la profondeur étant contrôlée par la hauteur de la roue de tassement par rapport à l'outil de fertilisation. Cette disposition est essentiellement identique à la disposition du Seed Hawk, sauf que le ressort 13 est remplacé dans la machine Seed Hawk par un vérin hydraulique qui est situé à un endroit différent.
Affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 25 octobre 2000, au paragraphe 376.
[154] Dans sa réponse, le Dr Tessier critique le point de vue de M. Anderson sur la réalisation illustrée à la figure 5 en renvoyant à la description de la réalisation à la figure 1. La critique du Dr Tessier est valable uniquement si l'on considère que les caractéristiques de la première réalisation s'appliquent à toutes les réalisations de l'invention. On commettrait alors la même erreur que M. Anderson relativement à la réalisation représentée à la figure 5.
[155] Je ne crois pas que ce passage aide à régler la question de la revendication 1, car il ne mentionne pas la tige de raccord 40 ni le ressort 13. Si ces éléments sont les moyens envisagés pour ajuster la profondeur du couteau de fertilisation, le fait qu'il n'en soit pas fait mention dans la revendication 1 signifie que seule la hauteur du cadre peut ajuster la profondeur de l'outil de fertilisation.
[156] Lors de son contre-interrogatoire, M. Anderson a reconnu qu'aucune des revendications ne précise que la profondeur du cultivateur est contrôlée par la hauteur du cadre, mais il a signalé la partie suivante du mémoire descriptif pour appuyer son point de vue :
[traduction] Lorsque l'appareil est utilisé, le semoir est abaissé en position de travail et soutenu par les roues normales (non illustrées) qui supportent la structure [...]
Brevet, à la page 10.
[157] Cependant, il a été obligé de reconnaître que le mémoire descriptif fait référence à l'ajustement indépendant du couteau de fertilisation :
[traduction] Q. En fait, le mémoire descriptif précise que la profondeur de l'engrais est ajustée indépendamment. Est-ce exact?
R. Il dit qu'elle est ajustable indépendamment à la figure 1, réalisation, en ajustant la tige, une tige d'ajustement.
Q. Si c'est le cas, Monsieur, si vous prenez le mémoire descriptif pour ce qu'il vaut, comment est-ce que la dernière phrase du paragraphe 40 où vous dites * les profondeurs des outils de fertilisation ne suivent pas individuellement le terrain + peut-elle être exacte dans tous les cas?
R. Eh bien, parce que l'ajustement dont il est question est un ajustement physique qui ajuste principalement le tube d'ensemencement et la roue de tassement par rapport au cadre dans la figure 1, mais il ne -- il n'est pas ajusté chaque fois qu'il faut gravir une pente. En d'autres termes, on effectue un ajustement primaire pour commencer, mais il n'y a pas d'auto-ajustement.
Q. Mais vous êtes d'accord qu'il y a un ajustement indépendant pour chaque unité de profondeur de fertilisation?
R. C'est bien ça. Un certain ajustement indépendant. Mais comme j'ai dit, cela ne signifie pas que les couteaux de fertilisation suivront les contours du terrain.
Q. Mais la flexibilité de la tige à ressort de la figure 5, votre pièce D, si vous voulez, ne permet-elle pas à chaque couteau individuel de suivre le terrain?
R. Elle permettra certains mouvements mineurs.
Transcription, 4 février 2003, aux pages 4459 à 4461.
[158] Il semble donc que M. Anderson ait changé d'idée. Il a commencé par dire que la profondeur de travail des couteaux de fertilisation était fonction de la hauteur du cadre pour dire ensuite que la profondeur de travail des couteaux dépendait d'un * certain + ajustement indépendant. Il a ensuite ajouté que cet ajustement indépendant ne permet pas aux couteaux de fertilisation de l'invention de suivre les contours du sol, ce qui ne faisait pas partie de sa déclaration originale.
[159] D'un autre côté, selon le témoignage de M. Schaaf, l'utilisation de la tige d'ajustement 40 faisait en sorte que tout l'assemblage illustré à la figure 1 devenait rigide, de manière que la roue de tassement serve de roue de jaugeage. Voir la transcription, 20 juin 2002, aux pages 3066 à 3070. Il n'a pas dit que les tiges d'ajustement permettaient d'ajuster la profondeur du couteau de fertilisation. En examinant la figure 1, il semble évident que la force exercée par la tige d'ajustement 40 forcera le levier coudé 30 (formé de l'élément vertical 36 et de l'élément horizontal 35) à tourner sur un point 37 pour que la force finisse par être exercée sur l'essieu 39 de la roue 38, forçant la roue dans le sol. Et comme tout l'ensemble, du support 25 à l'essieu 39, est sous l'influence de la force, il agira donc comme une unité rigide comme l'a indiqué M. Schaaf.
[160] Quel est l'effet de cet ajustement sur la profondeur de travail du couteau de fertilisation? On est porté à se demander quel effet la force agissant sur le pivot 37 a sur la tige à ressort 11. Le fait que la force exercée par la tige d'ajustement 40 force la roue de tassement dans le sol signifie que le bras supérieur 36 du levier coudé 30 doit nécessairement être tourné vers l'arrière sous l'effet de la force. Imaginons que le bras supérieur 36 continue de tourner vers l'arrière. Le bras inférieur 35 et la roue 38 tourneraient alors vers l'avant autour du point 37 jusqu'à ce que la roue 38 soit directement sous le point 37 et le couteau 15 serait nécessairement soulevé d'une certaine distance par rapport au sol. Lorsque l'appareil fonctionne, cela ne se produit pas, car la rotation vers l'avant de la roue 38 est contrée par le poids du cadre transmis par la tige 11. Cela fait ressortir par contre que la force qui enfonce la roue de tassement dans le sol a aussi tendance à soulever le couteau de fertilisation de sa position d'origine. Le degré de déplacement du couteau de fertilisation par suite de l'action de la tige d'ajustement 40 est fonction de la force exercée au point 37 et de la résistance offerte à cette force par la tige 11 et le cadre. Puisque selon le témoignage de M. Schaaf toute l'unité fonctionne comme un ensemble rigide, je conclus que le déplacement de la tige 11 est limité puisque la flexion continue de la tige 11 est incompatible avec un ensemble rigide. La conclusion que je tire de tout cela est que la tige d'ajustement 40 a pour fonction d'exercer une force sur la roue 38 et de maintenir tout l'ensemble rigide, de manière que le couteau de fertilisation et le tube d'ensemencement se déplacent en tandem.
[161] Ceci est contraire à la conclusion donnée par M. Anderson relativement à la réalisation représentée par la figure 5 du brevet. Je dois éviter de commettre la même erreur que les experts. Je ne dois pas définir l'invention en utilisant les caractéristiques d'une seule réalisation. C'est pourquoi, je devrais tenir compte du fonctionnement de la réalisation représentée par la figure 5.
[162] À la figure 1, une force est exercée sur la roue de tassement au moyen d'un levier formé par le levier coudé 30 (comprenant les bras 35 et 36). La force est exercée à une extrémité du levier, au point 41 du bras 36, le point d'appui se trouve entre les deux extrémités du levier au point 37 et le travail à effectuer, ou l'objet à déplacer, se trouve à l'autre extrémité du levier, au niveau de l'essieu 39 de la roue 38. Si les bras n'étaient pas placés à un angle l'un par rapport à l'autre, il s'agirait d'un levier semblable à une balançoire à bascule. À la figure 5, la force est aussi exercée par un levier, mais celui-ci a une configuration très différente. Le levier est formé de l'élément 351. Le point d'appui se trouve au point où l'élément 351 est fixé à la tige 111, le point immédiatement au-dessus du chiffre 113 sur la figure 5 de l'annexe 1. La force est exercée sur un point le long de la longueur du levier où l'élément 361 est fixé au levier 351, tandis que l'objet à déplacer, ou le travail à effectuer se trouve à l'autre extrémité du levier, c.-à-d. au niveau de l'essieu de la roue 38.
[163] Le levier représenté à la figure 5 ressemble à une porte battante dont les charnières sont placées sur un côté de la porte et dont il faut faire passer l'autre côté à travers le cadre. L'expérience commune démontre que plus la force est exercée près des charnières, plus il faut de force pour ouvrir la porte. La porte ouvre plus facilement lorsque la force est exercée près du côté de la porte opposé à celui des charnières. Cet exemple a pour but d'illustrer qu'il est probablement plus difficile de soulever le couteau 15 de sa position d'origine en utilisant le levier à la figure 5 que le levier illustré à la figure 1. Une autre façon de le faire consiste à dire que dans la réalisation représentée par la figure 1, la variable qui détermine la quantité de force requise pour déplacer le couteau 15 sur une distance donnée est la position du point d'appui, tandis qu'à la figure 5, la variable qui fait la différence est le point sur lequel la force est exercée sur le levier. Ce que je veux faire ressortir ici c'est qu'il faudra probablement beaucoup plus de force pour arriver à rendre l'unité entière rigide dans la réalisation représentée par la figure 5 que dans la réalisation représentée par la figure 1. Dans cette mesure, M. Anderson pourrait avoir raison.
[164] Contrairement à la disposition de la figure 1, la configuration représentée à la figure 5, plus particulièrement le ressort 431 sur la tige d'ajustement 401, illustre que même si la force exercée sur la tige d'ajustement influe sur tout l'ensemble, le fait que le ressort 431 permet un mouvement vers le haut de la roue 38 signifie que l'ensemble n'est pas rigide. Ainsi, la roue 38 mesure uniquement la profondeur de la mise en place de la semence, puisque le point de pivotement et le ressort 431 permettent à l'élément de fixation unique de se déplacer indépendamment du couteau de fertilisation. Il peut se déplacer indépendamment parce que le couteau est fixé au cadre tandis que la roue de tassement et le tube d'ensemencement sont fixés à l'élément de fixation unique.
[165] Que peut-on dire à propos de la capacité de l'invention de suivre le terrain compte tenu des caractéristiques de l'invention divulguées par les deux réalisations décrites dans le mémoire descriptif? Comme il a déjà été mentionné, la réalisation représentée par la figure 1 est rigide lorsque l'appareil fonctionne. Le mouvement de la roue de tassement est transmis par les deux bras du levier coudé jusqu'à la tige d'ajustement et jusqu'au support 25 qui se trouve à l'extrémité supérieure de la tige 11. Par conséquent, si le sol sous l'assemblage se soulève et que le cadre reste relativement de niveau, le déplacement vers le haut de la tige 11 sera contré par la structure rigide entre le bras supérieur 36, la tige d'ajustement 40 et le support 25. Le couteau de fertilisation et le tube d'ensemencement travailleront donc plus en profondeur dans la partie de sol soulevée que dans le sol plat qui l'entoure. Cet effet peut être contrecarré par l'ajout du mécanisme de déclenchement optionnel 13, mais le mouvement vers le haut permis sera fonction de la force exercée sur le ressort 13. En d'autres termes, le contrôle de la profondeur ne sera pas déterminé par le déplacement du sol mais par la résistance offerte par le ressort à la rotation vers le haut.
[166] Si le sol sous l'assemblage de la figure 1 s'abaisse et que le cadre demeure relativement de niveau, la force exercée sur la roue de tassement fera en sorte qu'elle suive le sol, mais uniquement par une rotation autour du pivot 37. Puisqu'il n'y a aucun mécanisme qui permet à la tige 11 de bouger pour suivre le sol, elle demeurera en position lors de l'abaissement du sol, ce qui signifie que le couteau de fertilisation travaillera moins en profondeur. La roue de tassement aura tendance à suivre le sol, en tournant autour du point 37, à cause de la force exercée par la tige 40. Par contre, lorsque le sol s'abaisse, la pression exercée sur l'élément de fixation unique diminue jusqu'à ce que la tige d'ajustement n'exerce plus de force sur l'élément de fixation unique mais empêche le bras 36 de tourner vers l'arrière. À ce point, la roue de tassement sera au-dessus du sol et sera maintenue en place par la résistance offerte par la tige 40 à la rotation de l'élément de fixation unique autour du point de pivotement 37.
[167] Qu'en est-il de la réalisation représentée par la figure 5? Si le sol sous l'assemblage se soulève et que le cadre reste relativement de niveau, le point de pivotement situé immédiatement au-dessus du chiffre 113 permettra une rotation vers le haut du bras 351 contre le ressort 431. La roue de tassement et le tube d'ensemencement pourront donc maintenir une profondeur relativement constante lors du soulèvement du sol. Par contre, la position du couteau de fertilisation demeurera relativement fixe, car sa rotation vers le haut sera contrée par la tige 111, qui est relativement rigide. Si le sol s'abaisse, cependant, la rotation vers le bas du bras 351 sera contrée par la tige 401, car elle n'a aucune élasticité. Par conséquent, si le sol s'abaisse, la roue de tassement ne pourra le suivre et la semence sera placée moins en profondeur. Si le sol s'enfonce suffisamment, la roue 38 se trouvera au-dessus du sol et sera maintenue à cet endroit par la résistance offerte par la tige 401 à la rotation vers le bas de l'élément de fixation unique.
[168] L'outil de fertilisation ne réagira pas au changement dans le niveau du sol, car sa profondeur de travail n'est pas déterminée par la roue de tassement mais par le cadre et la tige 111 relativement rigide (comparé à la tige 11). L'ajout du mécanisme de déclenchement optionnel 13 aura le même effet que pour la figure 1. La profondeur de travail du couteau sera modifiée si la résistance du ressort 13 est contrée et uniquement de façon indirecte s'il y a augmentation de l'élévation du sol, parce que le couteau est fixé au cadre plutôt qu'à l'élément de fixation unique.
[169] Qu'est-ce que tout cela nous dit à propos du fonctionnement de l'invention? D'abord, que la semence peut être mise en place dans un certain rapport à l'engrais parce que l'élément de fixation unique est fixé au couteau de manière à pivoter. Ensuite, que la conception permet à l'élément de fixation unique (roue de tassement et tube d'ensemencement) de se déplacer indépendamment du couteau de fertilisation et c'est pourquoi la semence et l'engrais peuvent ne pas toujours être mis en place selon le rapport désiré. L'élément de conception qui permet que cela se produise est le mouvement différentiel entre le tube d'ensemencement et le couteau de fertilisation. Rien de tout cela ne pose un problème pourvu que le rapport entre la surface du sol et le cadre demeure relativement constant.
Fonctionnement du dispositif Seed Hawk
[170] La description suivante du fonctionnement du dispositif Seed Hawk est tirée de l'affidavit de M. Anderson :
[traduction]
41. [...] le dispositif Seed Hawk est conçu de manière que chaque couteau de fertilisation et couteau d'ensemencement est suspendu indépendamment et individuellement au cadre de manière à pivoter. Les couteaux de fertilisation ne sont pas * fixés + au cadre de façon rigide [...], mais ils sont plutôt fixés sur un bras qui est suspendu du cadre et qui pivote par rapport à celui-ci. [...] Les couteaux de fertilisation ne se soulèvent pas directement lorsque le cadre est soulevé [...]; ils sont plutôt ajustés séparément et indépendamment, de manière à rester à une profondeur constante par rapport à la surface du sol.
42. Un des avantages qu'il y a à suspendre ou actionner indépendamment chacun des nombreux couteaux de fertilisation et d'ensemencement est que, sur un terrain inégal, chaque couteau peut s'ajuster plus facilement au niveau du sol. De cette façon, on obtient une profondeur de mise en place de l'engrais et de la semence constante. [...]
[. . .]
46 [...] Dans le dispositif Seed Hawk, où il n'y a ni soulèvement ni abaissement du cadre, la roue de tassement jauge, ou contrôle, les profondeurs des systèmes d'ensemencement et de fertilisation parce que sur le système de distribution d'engrais, le système de distribution de semence et la roue sont tous fixés sur un bras de fixation unique, qui pivote sur le cadre. Un système hydraulique exerce une force vers le bas sur la roue de tassement. Il n'est pas nécessaire que le couteau d'ensemencement et la roue de tassement pivotent par rapport au couteau de fertilisation. En fait, s'ils le faisaient, le dispositif Seed Hawk ne fonctionnerait pas correctement, parce que la profondeur de fertilisation adéquate est contrôlée par la roue de tassement [...] et par conséquent le couteau de fertilisation du dispositif Seed Hawk doit être lié de façon rigide à la roue de tassement [...]
[171] Cette description peut être complétée par le témoignage de M. Norbert Beaujot, qui parle du processus qu'il a suivi pour en arriver à la conception du dispositif Seed Hawk :
[traduction] [...] J'ai commencé à me rendre compte après cela que si j'utilisais un long bras, je n'aurais pas besoin d'un dispositif de contrôle avant. Je pourrais utiliser uniquement la roue de tassement si je rapprochais les couteaux de la roue de tassement. Ainsi, les couteaux seraient tous contrôlés par le -- par la roue de tassement plutôt qu'à partir du cadre.
Transcription, 20 juin 2002, à la page 3157.
[172] L'importance du contrôle de la profondeur de la mise en place par la roue de tassement a été expliquée par un renvoi à la pièce 59, un modèle exact du dispositif Seed Hawk. À propos du modèle (que j'ai considéré comme représentant les dispositifs en litige dans la présente action, sous réserve des modifications apportées aux différentes années modèles), M. Beaujot a dit :
[traduction] Ce modèle, pour ce qui est de la portion du sol, a été conçu pour se soulever et s'abaisser pour montrer que les deux couteaux suivent en fait le terrain dans le sens de la roue de tassement. La roue de tassement détermine la profondeur de la semence et de l'engrais. Puisque les deux couteaux sont près de la roue de tassement et assez éloignés du cadre, ils prennent la précision de la profondeur principalement de la roue de tassement.
Transcription, 21 juin 2002, à la page 3252.
[173] Lors de son contre-interrogatoire, M. Anderson a apporté des réserves à une partie de son témoignage relativement au fonctionnement du dispositif Seed Hawk :
[traduction] Q. Qu'arrive-t-il au dispositif Seed Hawk ou saviez-vous en février, le 28 février 2000, lorsque vous avez établi votre affidavit sous serment, si le cadre que vous avez numéroté 1 sur la pièce C - est-ce que vous voyez?
R. Oui.
Q. Que se passe-t-il s'il est déplacé vers le bas sur une bonne distance, disons la moitié de la distance à partir du sol?
R. Cela change la géométrie du bras.
Q. Cela n'entraînerait-il pas le couteau de fertilisation à pénétrer plus profondément dans le sol par une simple question de géométrie?
R. Par rapport à la roue de tassement, oui.
Q. Évidemment, la roue de tassement est toujours sur le sol?
R. Oui. Si vous la déplacez sur une bonne distance, vous parlez d'environ la moitié de la distance B
Q. Oui.
R. B Peut-être deux pieds B
Q. Oui.
R. B oui, cela changerait la géométrie.
Q. Donc cela se produirait si vous installiez le dispositif Seed Hawk comme cela est illustré à la pièce C sur un cadre qui monte et qui descend?
R. Si vous aviez un cadre qui monte et qui descend sur des distances importantes, comme s'il était actionné hydrauliquement, oui, cela changerait la géométrie et la profondeur du couteau de fertilisation. Mais la machine n'est pas conçue de cette façon, si je comprends bien.
Transcription, 4 février 2003, aux pages 4464 et 4465.
[174] Dans un échange qui a eu lieu plus tard, M. Anderson apporte d'autres réserves à sa position :
[traduction]
Q. Je crois que vous avez déjà convenu que si vous abaissiez le cadre d'un pied, cela changerait la position verticale du couteau?
R. Eh bien, la position verticale du couteau seulement par rapport à la position de la roue de tassement, mais le cadre lui-même ne déplace pas le couteau. Ce qui déplace le couteau c'est le sous-système qui est incliné hydrauliquement.
Q. Qui est incliné hydrauliquement par rapport au cadre?
R. Par rapport au cadre.
Q. Donc si vous abaissez le cadre.
R. Si vous abaissez le cadre, le bras se soulève. Le sous-système se soulève. C'est-à-dire par rapport au cadre. En d'autres termes, si vous abaissez le cadre d'un pied, le couteau ne s'abaisse pas d'un pied.
Q. Il s'abaisse d'un demi-pied?
R. Il monte d'un pied.
Q. Il monte d'un pied?
R. Par rapport au cadre.
Q. Je vois, par rapport au cadre. Mais est-ce qu'il ne s'enfonce pas plus profondément dans le sol?
R. C'est exact.
Q. C'est ce qui se produit?
R. C'est ce qui se produit ou non?
Q. C'est ce que je vous demande.
R. Il peut descendre légèrement plus profondément dans le sol parce que la géométrie change légèrement. Mais il ne se déplace pas directement avec le déplacement du cadre.
Q. Si vous dites qu'il se trouve à mi-chemin entre le cadre et la roue de tassement et que le cadre est abaissé d'un pied, est-ce qu'il ne s'abaisserait pas d'environ la moitié d'un pied, le couteau, à cause de la géométrie?
R. S'il était à mi-chemin il le ferait, oui.
Q. D'accord, c'est ce que je comprends.
R. Peut-être un tiers.
Transcription, 4 février 2003, aux pages 4549 à 4551.
[175] Dans leur argumentation écrite, les demandeurs se fondent sur ces passages pour appuyer la proposition voulant que si le couteau de fertilisation se trouve environ à la moitié de la distance de la roue de tassement, le couteau de fertilisation se déplacera d'environ la moitié de la distance de déplacement du cadre par rapport au sol. Avec égards, je ne suis pas certain que ce soit le cas.
[176] Je dois dire que j'ai de la difficulté à comprendre cet élément de preuve. Le cadre du dispositif Seed Hawk est fixé à des roues. Rien ne montre que le cadre peut être ajusté par rapport aux roues par un dispositif hydraulique, comme c'est le cas pour le Conserva Pak (transcription, 7 novembre 2000, à la page 349). Par conséquent, le cadre ne se déplace pas par rapport au sol, même si le niveau du sol sous le cadre peut varier parfois entre les roues.
[177] Pour comprendre les mouvements relatifs de l'ouverture du tube de fertilisation, du tube d'ensemencement et de la roue de tassement, il est possible d'effectuer une simple expérience mentale. Appelons le point de pivotement sur le support d'accrochage O, l'ouverture dans le tube de fertilisation X, l'ouverture dans le tube d'ensemencement Y et le point de contact de la roue de tassement avec la surface du sol Z. Lorsque l'appareil est utilisé, ces points sont fixes les uns par rapport aux autres. La position du tube d'ensemencement par rapport à la roue de tassement est déterminée par un raccord métallique. La position du tube de fertilisation par rapport au tube d'ensemencement est fixe aussi longtemps que le déplacement vers l'avant de la plaque de déclenchement est limité par la chaîne 10.
[178] Dans ce cas, il est possible de concevoir que le point X trace un cercle autour du point O lorsque le bras de mise en place est tourné de 360 degrés autour du point O. Ce mouvement trace un cercle, car tant et aussi longtemps que le point X est maintenu en place par la chaîne, sa position relative à O ne changera pas. Donc OX est le rayon du cercle tracé par X lorsqu'il tourne autour du point O. Il en va de même pour OY et OZ. On peut voir aussi que OX, OY et OZ sont les rayons de trois cercles concentriques dont l'origine commune est O. Ils sont concentriques, car ils ont tous la même origine ou, en termes mécaniques, le même point de pivotement. Si c'est le cas, les points X, Y et Z devraient maintenir leur position les uns par rapport aux autres lorsque le bras de mise en place pivote sur le point de pivotement O.
[179] Il est possible de vérifier la chose en pensant à un enjoliveur de roue. Si l'on fait une marque à la position de 3 heures sur le bord de l'enjoliveur et une marque à la position de 6 heures sur le bord du pneu, ces deux marques seront toujours à la même position l'une par rapport à l'autre lorsque le pneu fait un tour complet. Chacune tracera un cercle ayant son propre rayon, mais la ligne partant du centre et allant jusqu'à 3 heures sera toujours à 90 degrés par rapport à la ligne partant du centre et allant jusqu'au point de 6 heures. C'est la même chose avec OX, OY et OZ. Cela signifie que le point X sera toujours à la même position par rapport au point Y et que les deux seront toujours à la même position par rapport au point Z. Étant donné que X est l'ouverture du tube de fertilisation, Y l'ouverture du tube d'ensemencement et Z le point de contact de la roue de tassement avec le sol, la profondeur relative de la semence et de l'engrais par rapport à la surface du sol devrait être maintenue.
[180] D'après moi, la réponse de M. Anderson précisant que la profondeur de travail changerait légèrement à cause du changement dans la géométrie est généralement correcte. Je considère que sa réponse à la dernière partie de la question de l'avocat fait référence au mouvement par rapport au cadre, car elle serait clairement fausse si elle faisait référence au mouvement par rapport à la position du couteau de fertilisation dans le sol.
[181] Qu'est-ce que cela signifie par rapport au fonctionnement du dispositif Seed Hawk? Cela signifie que la possibilité de mouvement différentiel entre le couteau de fertilisation, le couteau d'ensemencement et la roue de tassement est grandement limitée par le fait qu'ils sont tous fixés sur un même élément. Sur le plan pratique, cela signifie que le Seed Hawk réussira à maintenir une mise en place relative constante de la semence et de l'engrais même si la position du sol varie par rapport au cadre.
Changement appréciable dans le fonctionnement de l'invention
[182] Maintenant que tout cela a été dit, est-ce que le fait de fixer le couteau de fertilisation au bras de mise en place plutôt qu'au cadre a des répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention? Je présume que l'expression * répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention + signifie que la variante amène le dispositif à fonctionner d'une façon qui produit un résultat différent ou qui produit le même résultat d'une façon différente. Cependant, comme l'a mentionné le juge Laddie de la Chambre de la chancellerie dans Merck & Co. c. Generics (UK), [2003] All E.R. (D) 418, au paragraphe 67 :
[traduction] Comme l'a dit le juge Hoffman relativement à la question qui se posait dans l'affaire Improver (1), pour déterminer si l'utilisation d'un produit ou d'un processus à l'extérieur de la portée contextuelle d'une revendication a des répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention, il faut tenir compte du point jusqu'auquel la façon dont l'invention fonctionne est décrite en des termes généraux.
[183] Dans le contexte de la revendication 1, nous parlons de la différence de fonctionnement du dispositif Seed Hawk par rapport à l'invention Halford parce que le couteau de fertilisation est fixé au bras de mise en place plutôt qu'au cadre. Comme le démontre l'analyse précédente du fonctionnement de l'invention, la profondeur de travail est contrôlée par la hauteur du cadre. Pour ce qui est de l'ajustement de la profondeur de travail, elle ne peut être ajustée qu'au moyen d'éléments qui ne font pas partie de la revendication 1 comme la tige d'ajustement ou le ressort d'inclinaison et l'élément de fixation unique. Par conséquent, pour ce qui est de la revendication 1, le fait de fixer le couteau de fertilisation au cadre signifie que le contrôle de la profondeur est lié uniquement à la hauteur du cadre. Cela ne permet pas une mise en place relative constante lorsque la position de la surface du sol varie par rapport au cadre. De plus, l'absence d'un élément de fixation unique pour le tube d'ensemencement et la roue de tassement dans la revendication 1 signifie que la profondeur de mise en place de la semence ne peut être mesurée par la roue de tassement.
[184] Dans le cas du dispositif Seed Hawk, le couteau de fertilisation (et le tube) et le couteau d'ensemencement (et le tube) sont fixés sur un élément commun, le bras de mise en place. Parce qu'ils sont fixés à cet élément commun, la possibilité de mouvement différentiel entre les extrémités du couteau de fertilisation et du couteau d'ensemencement est limitée. Cela donne comme résultat une mise en place relative constante de la semence et de l'engrais lorsque le contour du sol varie sous le cadre de la machine. Il s'agit d'une différence appréciable dans la manière de fonctionner envisagée dans la revendication 1 où la profondeur du couteau de fertilisation est contrôlée par le cadre, et où les éléments nécessaires pour contrôler la profondeur de mise en place de la semence sont inexistants.
[185] Même si l'on dit que le fait que le couteau de fertilisation n'est pas fixé au cadre constitue une variante, il devrait être apparent que la véritable variante est le fait que le couteau de fertilisation (et le tube), le couteau d'ensemencement (et le tube) et la roue de tassement sont tous fixés sur un élément commun qui se déplace relativement au cadre. Par conséquent, ce n'est pas l'unique fait que le couteau n'est pas fixé au cadre qui explique la différence dans le mode de fonctionnement, mais le fait qu'il n'est pas fixé au cadre ainsi que la façon dont les trois éléments sont fixés au même élément. Cela étant, la même logique s'applique lorsqu'on dit que la variante porte essentiellement sur la mise en place des trois éléments essentiels sur un élément commun.
2) Deuxième variante : ajustement latéral du couteau de fertilisation
[186] Cette variante porte sur l'ajustement de la séparation latérale entre l'outil de fertilisation et l'outil d'ensemencement. La revendication 1 parle d'un second tube ajustable qui peut être ajusté d'un côté à l'autre du tube par rapport au couteau de fertilisation. Dans le dispositif Seed Hawk, le couteau d'ensemencement et le tube d'ensemencement ne sont pas conçus pour être ajustés d'un côté à l'autre. L'ajustement latéral entre le tube de fertilisation et le tube d'ensemencement doit se faire en déplaçant le couteau de fertilisation de côté en insérant des entretoises entre le couteau de fertilisation lui-même (plutôt que l'ensemble de couteau de fertilisation) et la plaque de déclenchement. Il y a donc un ajustement de l'espacement latéral, mais non un ajustement d'un côté à l'autre du couteau d'ensemencement et du tube d'ensemencement.
[187] J'en arrive facilement à la conclusion que la façon d'effectuer l'ajustement latéral n'a aucun effet sur le fonctionnement de l'invention décrite dans la revendication 1. Cette façon d'effectuer une séparation latérale * accompli[t] essentiellement la même fonction, d'une manière essentiellement identique pour obtenir essentiellement le même résultat + que l'invention. Free World Trust, précité, au paragraphe 55. Dans le même ordre d'idées, une variante si mineure a dû être évidente pour la personne versée dans l'art au moment de la publication du brevet. Enfin, même si la revendication précise que c'est le tube qui doit être déplacé par rapport au couteau de fertilisation, il n'y a aucune raison de croire que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion à cet aspect du brevet était essentielle. Par conséquent, cette variante mènerait à une conclusion de contrefaçon.
3) Troisième variante : enfoncement dans la terre du couteau d'ensemencement :
a) Répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention
[188] La revendication 1 précise que le moyen de distribution du second matériau est placé en saillie vers le bas et s'enfonce dans la terre à l'intérieur du sillon et est formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Le dispositif Seed Hawk utilise un couteau d'ensemencement auquel est fixé un tube d'ensemencement. J'ai déjà déterminé qu'un couteau d'ensemencement auquel est fixé un tube ne peut être traité comme le second tube décrit dans le brevet. Par conséquent, la réponse à la question de savoir s'il y a une variante a déjà été donnée. Il reste à déterminer si la variante influence de façon appréciable le fonctionnement du dispositif.
[189] Une lecture téléologique de la revendication 1 montre que le moyen de distribution du second matériau a pour but de distribuer un second matériau (semence) à un emplacement et à une distance définis par rapport au premier matériau (engrais) et que cela est accompli par l'ajustement latéral du second tube et son enfoncement dans le sillon. Le lecteur versé dans l'art comprendrait que l'enfoncement dans le sillon fait référence à la mise en place de la semence dans le sillon à une profondeur donnée.
[190] Le dispositif Seed Hawk possède un moyen de distribution du second matériau formé du couteau d'ensemencement 6 et du tube d'ensemencement 7 qui a pour but de mettre en place la semence à une position relative donnée par rapport au premier matériau, l'engrais. Dans le dispositif Seed Hawk, la séparation latérale est obtenue en insérant une entretoise entre le bras de mise en place 15 et la plaque de déclenchement, ce qui augmente la séparation latérale entre les deux tubes de distribution de matériau (voir le manuel Seed Hawk pour le numéro de série 201196, pièce R de l'affidavit de David Schaaf établi sous serment le 30 octobre 2000. L'enfoncement dans le sillon est fourni par le couteau d'ensemencement auquel le tube d'ensemencement est fixé.
[191] Est-ce que le couteau et le tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk accomplissent essentiellement la même fonction que le second tube de la revendication 1, d'une manière essentiellement identique pour obtenir essentiellement le même résultat? La revendication 1 mentionne constamment [traduction] * le + sillon, car elle considère qu'il n'y a qu'un seul sillon et qu'il est creusé par le couteau de fertilisation. Les défendeurs Seed Hawk soutiennent que le couteau d'ensemencement creuse un sillon séparé qui peut empiéter sur le sillon creusé par le couteau de fertilisation mais qui constitue néanmoins un sillon distinct. Parmi les avantages revendiqués de l'invention, il y a le fait que [traduction] * la semence peut sortir par la paroi latérale de la fente plutôt que passer à travers la base de la fente où un sol à grains fins peut être lessivé ou durci et sceller la semence et l'empêcher de sortir +. Monsieur Halford (transcription, 6 novembre 2000, à la page 68, ligne 9) et M. Harapiak (transcription, 22 octobre 2001, ligne 24), un expert cité par les demandeurs, ont utilisé le mot fente pour faire référence au sillon. Je suppose donc que la fente en question est le sillon, et non l'ouverture dans le tube d'ensemencement.
[192] Si c'est le cas, alors l'avantage de pouvoir effectuer un ajustement d'un côté à l'autre est que la semence peut être mise en place de manière à sortir d'un endroit autre que le fond du sillon où elle risque d'être prise dans un sol à grains fins durci. Dans ce contexte, y a-t-il une différence sensible entre le fait de mettre en place la semence le long de la paroi latérale du sillon d'origine ou ailleurs à l'intérieur d'un second sillon qui empiète sur le premier? Étant donné que la question du second sillon est soulevée dans la prochaine variante, je vais réserver ma conclusion sur ce point jusqu'à ce que j'aie examiné et résolu cette question. Cependant, pour les besoins de la présente analyse, je vais passer à la dernière question de l'analyse préconisée dans Improver.
b) Évidence de la variante pour la personne versée dans l'art à la date de publication du brevet
[193] La question suivante est de savoir si cette variante aurait été évidente à la date de publication du brevet pour le lecteur versé dans l'art. Il y a très peu d'éléments de preuve sur ce point, mais étant donné la nature des éléments en question, j'aurais de la difficulté à conclure qu'il serait évident pour la personne versée dans l'art qu'un tube d'ensemencement puisse être fixé à un second couteau.
c) Est-ce que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion aux termes de la revendication était essentielle?
[194] La dernière question de l'analyse préconisée dans Improver consiste à déterminer si le lecteur versé dans l'art aurait compris, à partir des mots et expressions utilisés dans la revendication, que le breveté considérait qu'une stricte adhésion au libellé du brevet était essentielle. Dans le cas qui nous occupe, l'inventeur stipule que l'élément du moyen de distribution du second matériau qui s'enfonce dans la terre est formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Il faut donc déterminer si l'utilisation du terme fort [traduction] * uniquement + exprime qu'une stricte adhésion est essentielle. Si la revendication avait simplement dit que l'élément du moyen de distribution du second matériau qui s'enfonce dans le sol devait être fourni par * une surface extérieure du second tube +, la question de la stricte adhésion ne serait pas soulevée. Par contre, l'utilisation du mot [traduction] * uniquement + indique, selon moi, une intention claire d'exclure des ajouts ou des modifications au second tube.
[195] L'expert des demandeurs, le Dr Tessier, ne croit pas que l'utilisation du mot [traduction] * uniquement + empêche l'utilisation d'un autre élément pour soutenir le second tube. Voici ce qu'il a dit lors de son contre-interrogatoire :
[traduction] Q. Et formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Donc, ce qui s'enfonce dans le sol à l'intérieur du sillon vers l'arrière du couteau de fertilisation est formé uniquement d'une surface extérieure dudit second tube. Donc, est-il possible de s'entendre, afin d'aider la Cour à comprendre cette partie de la revendication, pour dire que nous devons alors avoir une situation où il n'y a pas de couteau à l'avant, parce que le tube, comme cela est indiqué ici, doit être la partie qui s'enfonce dans la terre, qui s'enfonce uniquement dans la terre; formé uniquement d'une surface extérieure du second tube; formé uniquement de. Il ne doit y avoir rien d'autre à cet endroit, ce doit être uniquement le tube; est-ce exact?
R. De fait, lorsque cet appareil se déplace dans le sol, la surface extérieure, qui correspond aux côtés, est nettement en contact avec le sol. Et encore selon mon interprétation du brevet, il pourrait y avoir une vaste gamme de traceurs de sillon de type étroit qui pourraient correspondre à cette description particulière.
Q. Mais lorsqu'il y a les mots -- et essayons d'aider la Cour. Lorsque les mots disent s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon, d'accord, à l'intérieur du sillon, on peut se demander si c'est à l'intérieur du sillon ou non. C'est un autre point qu'il faut évaluer n'est-ce pas? À l'intérieur du sillon.
R. Est-ce une question?
Q. Non, non, je jette seulement les bases de ma question. À une position vers l'arrière du couteau, nous parlons du second tube, et formé uniquement d'une surface extérieure du second tube. Donc, c'est la seule portion qui est réellement en contact avec le sol. Ce doit être uniquement une surface extérieure du second tube. Il ne doit y avoir rien d'autre devant; autrement, cette autre chose serait alors aussi en contact avec le sol.
R. Ce n'est pas mon interprétation de la revendication, ni celle de la majorité des personnes de quelque façon versées dans l'art.
Q. Donc vous ne tiendriez pas compte des mots * formé uniquement d'une surface extérieure du second tube +?
R. Eh bien, je me rends compte que la surface du second tube entre en contact avec le sol, et c'est assurément le cas de tous les modèles de série. À part celaB
Q. Mais pas uniquement?
R. -- mon interprétation est que nous parlons de -- mon interprétation de la revendication, dans le contexte de cette invention et de la façon dont elle est décrite, nous parlons d'un traceur de sillon de type à houe étroit particulièrement léger.
[196] Ce témoignage n'est pas du tout convaincant, car il ne traite pas de l'utilisation du mot [traduction] * uniquement + comme le montre le commentaire du Dr Tessier qui dit que les côtés du tube seraient en contact avec le sol. Il ne s'agit pas de déterminer si le tube est en contact avec le sol, mais si la fonction d'enfoncement dans le sol du moyen de distribution du second matériau est formée uniquement d'une surface extérieure du second tube. De plus, la prémisse du Dr Tessier est fausse; le second tube n'est pas formé d'un tube et d'un élément de renfort sous forme d'un traceur de sillon à houe étroit et d'un tube.
[197] Par conséquent, je ne vois aucune raison de ne pas donner au mot [traduction] * uniquement + son sens usuel, en l'absence d'une preuve crédible voulant qu'il était destiné à avoir un autre sens ou qu'il ait un sens technique dans le contexte. Les mots et expressions utilisés dans le brevet donnent à entendre au lecteur qualifié qu'une adhésion stricte à cette exigence particulière est visée. Dans ce cas, l'absence de cette exigence, ou son remplacement par un élément équivalent, ne peut être une contrefaçon.
[198] Dans le dispositif Seed Hawk, l'enfoncement dans le sol n'est pas effectué uniquement au moyen d'une surface extérieure du second tube. Le fait que le couteau d'ensemencement et le tube d'ensemencement étaient solidaires de 1993 à 1995 ne change rien à cela (voir pièce AAA de l'affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 25 octobre 2000). J'ai déjà déterminé qu'un tube jumelé à un couteau ne peut constituer le second tube mentionné dans le brevet. Par conséquent, l'enfoncement dans le sol par le bord d'attaque de cet outil ne constitue pas un enfoncement dans le sol uniquement par une surface extérieure du second tube. À cause de cet élément, le dispositif Seed Hawk ne tombe donc pas sous le coup de la revendication 1.
4) Quatrième variante : création d'un second sillon par le couteau d'ensemencement.
a) Répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention
[199] La variante suivante à trait au couteau d'ensemencement et au tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk, à savoir s'ils s'enfoncent dans le sol à l'intérieur du sillon ou s'ils creusent leur propre sillon. La première question est une question de fait : que fait le couteau d'ensemencement lorsqu'il se déplace à travers le sol? Est-ce qu'il suit le sillon creusé par le couteau de fertilisation, ou est-ce qu'il creuse son propre sillon? S'il creuse son propre sillon, est-ce que c'est une variante qui influence de façon appréciable le fonctionnement de l'invention décrite dans la revendication 1?
[200] Le docteur Tessier et messieurs Schaaf et Beaujot ont tous parlé du fonctionnement du couteau d'ensemencement. Les renseignements que j'ai trouvés les plus convaincants ont été fournis par M. Schaaf lorsqu'il a été contre-interrogé relativement au contenu de ses notes de travail. Monsieur Schaaf a fait des expériences avec le dispositif Seed Hawk et une de ses expériences consistait à mesurer la largeur du sillon après le passage du couteau de fertilisation puis après le passage du couteau d'ensemencement.
[201] Lors de l'interrogatoire principal, M. Schaaf a reconnu que le couteau d'ensemencement creusait [traduction] * son propre sillon à l'intérieur du sillon creusé par le traceur de fertilisation + (transcription, 19 juin 2002, à la page 2891). Par contre, la teneur de son témoignage était que le couteau d'ensemencement ne faisait que racler le côté du sillon creusé par le couteau de fertilisation. Je reproduis ici une partie de la discussion portant sur les parois du sillon :
[traduction] Le second traceur de sillon, qui est le traceur de sillon d'ensemencement, avance ensuite derrière le premier. Il avance de manière à racler, à déplacer, à bouger un peu le bord extérieur du premier sillon creusé par le traceur de sillon de fertilisation. Et, évidemment, il déloge et déplace en même temps la terre meuble retombée dans le premier sillon. Ce déplacement le long du bord peut être décrit comme causant un raclage lorsqu'il ne s'agit que d'un raclage le long du bord du sillon.
[202] Cette discussion donnait l'impression d'un déplacement mineur au niveau de la paroi du sillon. Cependant, M. Schaaf a produit ses notes de travail et a été contre-interrogé à leur sujet. Les mesures qu'il a prises de la largeur du sillon étaient très révélatrices :
[traduction] Q. D'accord. Donc, ai-je raison de dire que ce que vous avez fait -- ce que vous faites ici c'est que vous avez creusé un sillon en utilisant uniquement le couteau de fertilisation?
R. Non. Dans ce cas-ci, ce que nous avons fait -- non, dans ce cas-ci, ce que j'ai fait c'est que j'ai voulu regarder le sillon creusé derrière le couteau de fertilisation.
Q. D'accord.
R. Sur la pièce 8, cela correspond à regarder ici.
Q. Bien. C'est-à-dire entre le couteau de fertilisation et, si je peux utiliser cette expression, le couteau d'ensemencement d'accord?
R. Oui.
Q. Très bien. D'accord. Donc maintenant nous voyons uniquement l'effet du couteau de fertilisation qui creuse un sillon.
R. Oui.
Q. D'accord. Et la suivante alors, a-t-elle été prise après que -- et je vais l'appeler le couteau d'ensemencement, est passé à travers?
R. C'est exact. Elle serait prise à ce point ici --
Q. Juste derrière le couteau d'ensemencement et le tube d'ensemencement.
R. Oui, juste derrière. Et devant la roue de tassement.
Q. Merci, Monsieur. Et maintenant nous voyons que le haut du sillon mesure maintenant quatre pouces et quart; exact?
R. C'est exact, il s'élargit.
Q. Oui. Et il a toujours la même profondeur, deux pouces et quart.
R. Oui.
Q. Donc, pouvons-nous convenir que, si je peux utiliser l'expression, le couteau d'ensemencement a modifié la configuration de ce sillon, de trois pouces à quatre pouces et quart sur le dessus; est-ce vrai?
R. Oui.
Q. Oui. Et la différence d'un pouce et quart est causée par le couteau d'ensemencement, comme je l'ai appelé.
R. Oui.
Q. D'accord. Donc, pouvons-nous convenir alors que ce qui semble être ici, ceci, le couteau d'ensemencement, si vous voulez, fait plus que simplement suivre dans le sillon du couteau de fertilisation, parce qu'il creuse un sillon plus large?
R. Il suit toujours dans le sillon, parce qu'il se trouve dans le sillon qui a été creusé à l'origine. Lorsqu'il suit dans le sillon, il déplace la terre qui est retombée dans le sillon derrière le couteau de fertilisation, mais en même temps, en passant, il creuse ici et commence à creuser, commence à racler le long de la paroi et cela finit par élargir le sillon.
Q. Je crois, Monsieur, qu'il ne s'agit pas uniquement d'une question de -- parce que vous avez mesuré, je suppose dans le premier, vous avez mesuré la largeur du sillon; n'est-ce pas? Vous avez mesuré la largeur du sillon creusé par le couteau de fertilisation; n'est-ce pas?
R. Oui.
Q. D'accord. Et vous avez tenu compte du matériau qui est tombé dans le sillon, parce que vous faites un genre de dessin ici sous le dessous du sillon; n'est-ce pas?
R. Mm-hmm.
Q. Vous le faites.
R. C'est exact.
Q. Vous n'indiquez aucun effet dans le haut du sillon. Vous indiquez les trois pouces et vous montrez très clairement les parois du sillon creusé par le couteau de fertilisation; n'est-ce pas?
R. Oui.
Q. D'accord. Vous passez ensuite le -- je l'appelle le couteau d'ensemencement, lequel, bien entendu, serait déplacé d'un côté; n'est-ce pas? Et vous pouvez donc voir que le couteau d'ensemencement fera -- ne peut toucher le côté éloigné du sillon creusé par le couteau de fertilisation, parce qu'il se trouve de l'autre côté; n'est-ce pas? Il ne peut toucher qu'un côté parce qu'il est déplacé d'un côté d'un pouce et quart; exact?
R. Mm-hmm.
Q. Donc il a, en fait -- et le couteau lui-même est, selon vos mesures je crois pour le 2000, est quoi? Quelle est la largeur de ce couteau d'ensemencement? Je crois que nous avons ce renseignement ici quelque part. Excusez-moi pour un moment. Voilà. D'accord. Vous indiquez que la largeur du traceur de sillon d'ensemencement de la construction 2000, c'est exact, est 0,68 d'un pouce; exact? Il s'agit de votre pièce J.
R. Oui, c'est exact.
Q. D'accord, merci. Donc, selon votre mesure de ce, je l'appellerai le couteau -- vous pouvez l'appeler le traceur de sillon arrondi si vous désirez -- d'ensemencement sur le côté du sillon de fertilisation, il a augmenté la largeur du sillon de fertilisation d'un pouce et quart, est-ce exact? C'est l'effet donné. Cela n'a rien à voir avec la terre qui suit dans le sillon ou autre chose du genre. Vous avez mesuré le sillon, est-ce exact, avec le couteau de fertilisation où vous avez pensé que la taille du sillon serait la plus grande. C'est ce que vous avez mesuré, est-ce exact?
R. Oui.
Q. Ensuite vous l'avez mesuré de nouveau avec le couteau d'ensemencement à l'endroit où vous pensiez que se trouvaient les parois extérieures du sillon est-ce exact? Vous l'avez fait?
R. Mm-hmm.
Q. Et vous avez déterminé que le sillon avait été élargi et que cela s'était produit d'un côté seulement est-ce exact? Parce que l'autre côté ne peut être touché, est-ce exact?
R. Oui.
Q. D'un pouce et quart. Alors pouvons-nous convenir que le couteau d'ensemencement ou le traceur de sillon arrondi à tube d'ensemencement est passé dans une partie du sol où le couteau de fertilisation n'avait pas creusé de sillon sur une longueur d'un pouce et quart dans le haut.
R. Lorsque vous prenez --
Q. Êtes-vous d'accord, oui ou non? Ensuite nous passerons aux explications. Oui ou non?
R. Pourriez-vous répéter la question?
Q. Oh oui certainement. Selon vos mesures et vos observations, monsieur, le couteau de fertilisation a creusé un sillon de trois pouces, d'accord, et du matériau est retombé dans le bas du sillon et votre calcul du sillon est de trois pouces. Vous passez ensuite le couteau d'ensemencement ou traceur de sillon à tube d'ensemencement au même endroit et selon vos calculs il mesure 0,68 po de largeur. Nous savons qu'il est placé d'un côté et qu'il a, en fait, élargi le sillon d'un côté d'un pouce et quart et que l'élargissement s'est produit dans du matériau qui ne se trouvait pas dans le sillon creusé par le couteau de fertilisation. Il a tracé le sillon, creusé un sillon plus large que celui creusé par le couteau de fertilisation. N'est-ce pas, en fait, ce que vous montrez ici?
R. Oui. La largeur --
[203] Il semble, selon ces renseignements, que le sillon creusé par le passage du couteau de fertilisation mesure trois pouces de largeur tandis que le sillon qui reste après le passage du couteau d'ensemencement mesure quatre pouces et quart de largeur. Étant donné que le couteau d'ensemencement mesure 0,68 pouce de largeur, il semble que le couteau d'ensemencement a creusé son propre sillon qui s'étend dans la terre qui n'a pas été retournée par le passage du couteau de fertilisation. Dans cette mesure, le couteau d'ensemencement et le tube d'ensemencement ont fait plus que seulement suivre dans le sillon creusé par le couteau de fertilisation. Ils ont creusé leur propre sillon qui empiète en partie sur le sillon creusé par le couteau de fertilisation.
[204] Puisque ce témoignage a été donné par l'expert des demandeurs, on doit lui accorder énormément de poids. Il confirme le témoignage de Norbert Beaujot sur la même question. Il contredit la position prise par le Dr Tessier, dont j'ai refusé la définition de [traduction] * sillon +. Ce témoignage n'est pas contredit par les exemples trouvés par M. Schaaf et le Dr Tessier relativement aux couteaux d'ensemencement qui ont une usure inégale d'un côté du couteau par rapport à l'autre. Monsieur Schaaf a admis dans son témoignage du 20 juin 2002, à la page 3054, que l'usure inégale peut s'expliquer par la présence de sol remanié d'un côté du couteau et de sol non remanié plus dur de l'autre côté du couteau. Je peux ajouter que cette conclusion est fondée sur l'idée selon laquelle le couteau d'ensemencement est placé perpendiculairement au sens du déplacement. S'il ne l'est pas, on peut s'attendre à ce que le bord d'attaque s'use plus que le bord de fuite. Je ne donne pas cela comme une explication de l'usure inégale. Je le mentionne uniquement pour montrer que l'argument fondé sur des traces d'usure inégale contient des hypothèses non vérifiées.
[205] Je conclus donc que le couteau d'ensemencement et le tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk ne suivent pas simplement dans le sillon creusé par le couteau de fertilisation. Le couteau d'ensemencement creuse son propre sillon dont les limites peuvent empiéter, d'un côté, sur le sillon creusé par le couteau de fertilisation, mais qui est néanmoins creusé dans de la terre non retournée par le couteau de fertilisation. Il s'agit d'une variante par rapport aux éléments décrits dans le brevet.
[206] Cette variante influence-t-elle de façon appréciable le fonctionnement de l'invention? Il est clair que le dispositif Seed Hawk accomplit la même fonction que ce qui est envisagé par l'invention décrite dans la revendication 1. Par contre, comme le précise le juge Binnie dans Free World Trust, précité, au paragraphe 32 :
Je le répète, l'ingéniosité propre à un brevet ne tient pas à la détermination d'un résultat souhaitable, mais bien à l'enseignement d'un moyen particulier d'y parvenir. La portée des revendications ne peut être extensible au point de permettre aux brevetés d'exercer un monopole sur tout moyen d'obtenir le résultat souhaité. Il n'est pas légitime, par exemple, de faire breveter un procédé permettant de faire repousser les cheveux d'un homme atteint de calvitie et de prétendre ensuite que n'importe quel moyen d'obtenir ce résultat emporte la contrefaçon du brevet.
[207] Dans le cas qui nous occupe, le breveté a trouvé une façon de planter deux matériaux dans un rapport constant l'un avec l'autre. Il y est parvenu en déposant un matériau dans le fond du sillon creusé par le couteau et l'autre dans la paroi du sillon au moyen d'un tube qui s'enfonce dans le sillon. Puisque l'invention a été conçue dans un contexte de culture sans labourage ou à labourage minimal, il est tout à fait logique de limiter la perturbation du sol le plus possible. Utiliser un tube pour déposer un second matériau dans le sillon creusé par le couteau est une façon élégante d'atteindre cet objectif. Le dispositif Seed Hawk atteint le même objectif, c'est-à-dire, planter deux matériaux dans un rapport constant l'un avec l'autre, mais il le fait d'une autre façon. Il reproduit essentiellement la disposition utilisée pour la mise en place de l'engrais et l'applique à la mise en place de la semence. Le résultat, comme il en a déjà été fait mention, donne deux sillons qui se chevauchent et une plus grande perturbation du sol que s'il n'y en avait qu'un seul. Même si la revendication ne parle pas de technique de culture sans labourage ou à labourage minimal, l'exposé en parle en précisant que l'invention est utilisée plus particulièrement, mais non exclusivement, pour des techniques de culture à labourage minimal ou à semis direct (sans labourage). Ces mots et ces expressions sont pertinents quant à la question du caractère appréciable du changement dans la manière de fonctionner du dispositif.
[208] Tout compte fait, je ne crois pas que cette variante influence de façon appréciable le fonctionnement de l'invention. Même s'il y a une différence dans le mode de fonctionnement qui peut avoir une certaine importance relativement à la perturbation minimale du sol, la différence porte sur le degré plutôt que sur la nature. D'après moi, cela n'est pas suffisant pour que la variante ne tombe pas sous le coup de la revendication 1. J'en arriverais à la même conclusion à propos de cet aspect de la quatrième variante.
b) Évidence de la variante pour la personne versée dans l'art à la date de publication du brevet
[209] À mon avis, l'utilisation de deux traceurs de sillon aurait été évidente au moment de la publication du brevet. Le brevet lui-même comprend un coutre comme premier traceur de sillon à la figure 1. Il serait difficile de dire que l'utilisation de deux traceurs de sillon n'aurait pas été évidente au moment de la publication.
c) L'inventeur considérait-il qu'une stricte adhésion aux termes de la revendication était essentielle?
[210] Puisque dans l'analyse des avantages de l'invention, l'exposé relatif au brevet parle de [traduction] * deux traceurs de sillon à couteau en séquence + (paragraphe 11, à la page 12) et d'un coutre amovible (paragraphe 15, à la page 13), il serait difficile de dire que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion à l'idée d'un seul sillon était essentielle.
[211] Par conséquent, je crois que l'utilisation d'un second couteau pour tracer un autre sillon pour la mise en place de la semence n'est pas suffisant pour que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 1.
[212] Cela règle la question de la contrefaçon de la revendication 1. Je conclus que le dispositif Seed Hawk ne contrefait pas la revendication 1 parce que certains éléments essentiels de la revendication ne se trouvent pas dans le dispositif Seed Hawk, nommément le couteau de fertilisation fixé au cadre, l'enfoncement dans le sol, par rapport au second tube, de quelque chose d'autre [traduction] qu'* uniquement + le bord extérieur du second tube. Par contre, l'utilisation d'un couteau distinct pour creuser un sillon distinct pour la mise en place de la semence n'est pas suffisant pour que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 1, pas plus qu'une méthode différente d'obtenir une séparation latérale. Par conséquent, je conclus que le dispositif Seed Hawk ne contrefait pas la revendication 1.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 2
[213] La revendication 2 est reproduite ci-dessous pour plus de commodité :
[traduction] (2) L'invention selon la revendication 1 dans laquelle le second tube porte une tige verticale sur un bord avant qui peut s'enfoncer dans le sol vers l'avant et vers le bas par rapport à l'extrémité ouverte du tube.
[214] Il est évident à la lecture de la revendication 2, qu'elle dépend de la revendication 1. Puisque la revendication 1 n'est pas contrefaite, la revendication 2 ne peut être contrefaite, à moins qu'elle n'ajoute à la revendication 1 les éléments dont l'absence a mené à une conclusion d'absence de contrefaçon. Un de ces éléments était le fait que le dispositif Seed Hawk ne s'enfonçait pas dans la terre uniquement au moyen d'une surface extérieure du second tube. La présente revendication ajoute une tige verticale au bord avant du second tube. Comme il a été mentionné dans la partie des présents motifs traitant de l'interprétation du brevet, l'ajout d'une tige verticale ne transforme pas le second tube en traceur de sillon à houe étroit avec tube. Il ne modifie pas non plus l'intention de l'inventeur voulant qu'uniquement une surface extérieure du second tube pénètre dans le sol puisqu'il faut considérer que la revendication 2 comprend toutes les limites de la revendication dont elle dépend (voir l'article 87 des Règles sur les brevets). Par conséquent, la revendication 2 n'est pas contrefaite, et ce, pour les mêmes raisons que la revendication 1.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 3
[215] La revendication 3 est reproduite ci-dessous pour plus de commodité :
[traduction] (3) L'invention conformément à la revendication 1 dans laquelle l'extrémité ouverte inférieure du second tube est disposée d'un côté et au-dessus de l'extrémité ouverte inférieure du premier tube de manière que le second tube suive dans le sillon mais racle une paroi latérale du sillon.
[216] Comme pour la revendication 2, cette revendication dépend de la revendication 1 et ne fournit pas les éléments qui feraient en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 1. Par conséquent, peu importe que cet élément soit présent dans le dispositif Seed Hawk ou ne le soit pas, cela ne suffit pas pour étayer une conclusion de contrefaçon.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 6
[217] La revendication 6 est reproduite ci-dessous pour plus de commodité :
[traduction] (6) L'invention conformément à la revendication 1 dans laquelle ledit moyen de fixation de ladite roue de tassement et ledit moyen de fixation du second tube forment un élément de fixation unique fixé de manière à pivoter par rapport au couteau et comprenant un ressort inclinant ledit second tube et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol.
[218] À la différence des revendications 2 et 3, la revendication 6 fournit certains éléments qui sont absents dans la revendication 1. Cependant, il n'y a toujours pas stricte adhésion aux exigences de la revendication 1 relativement à l'enfoncement dans le sol du second tube. Si je ne me trompe pas à propos de cet élément, la revendication 6 ne pourrait pas être contrefaite même si elle ajoutait les autres éléments qui manquent à la revendication 1. Toutefois, dans l'éventualité où je me tromperais au sujet de la revendication 1, je procède à l'analyse de la revendication 6.
[219] La revendication 6 ajoute à l'invention de la revendication 1 un élément de fixation unique pour la roue de tassement et le tube d'ensemencement. Cet élément de fixation unique est fixé de manière à pivoter par rapport au couteau et comprend un ressort qui incline le second tube et la roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol. Dans l'interprétation des revendications, j'ai déterminé que pour pouvoir pivoter par rapport au couteau l'élément de fixation unique devait être fixé au couteau soit directement soit par un autre moyen pour permettre le pivotement de l'élément de fixation unique par rapport au couteau. La revendication 6 ajoute aussi à l'élément de fixation unique un ressort qui incline le second tube et la roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol.
[220] Dans le dispositif Seed Hawk, le couteau et le tube d'ensemencement et la roue de tassement sont fixés sur un même élément, le bras de mise en place 15, mais le couteau de fertilisation est aussi fixé au même élément. Ni le couteau et le tube d'ensemencement, ni la roue de tassement, ne sont fixés de manière à pivoter par rapport au couteau de fertilisation. Le couteau de fertilisation est fixé de manière à pivoter par rapport au bras de mise en place, qui est lui-même fixé de manière à pivoter par rapport au support d'accrochage, qui permet un pivotement du bras de mise en place par rapport au cadre. Par conséquent, l'élément de fixation unique n'est pas fixé de manière à pivoter par rapport au couteau, comme cela est décrit dans la revendication 6.
[221] Le dispositif Seed Hawk utilise un vérin hydraulique pour incliner la roue de tassement pour qu'elle entre en contact avec le sol. Ce vérin agit sur le couteau de fertilisation de la plaque de déclenchement, dont l'amplitude de mouvement est limitée par une chaîne qui transfère la force d'inclinaison à la roue de tassement par l'intermédiaire du bras de mise en place. Le dispositif Seed Hawk n'utilise pas de ressort d'inclinaison, même si la force d'inclinaison incline le couteau et le tube d'ensemencement de même que la roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol.
[222] Il semblerait donc que le dispositif Seed Hawk soit différent de l'invention décrite dans la revendication 6 de deux façons : l'élément de fixation commun n'est pas fixé de manière à pivoter par rapport au couteau de fertilisation et un vérin hydraulique est utilisé pour exercer une force d'inclinaison.
1) Première variante : élément de fixation commun fixé de manière à pivoter par rapport au cadre
a) Répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention
[223] Il n'est pas nécessaire de répéter ici l'analyse du fonctionnement de l'invention et du dispositif Seed Hawk que j'ai effectuée à l'égard de la revendication 1. Deux des éléments qui étaient clairement absents de la revendication 1 sont fournis par la revendication 6, nommément un élément de fixation pour le tube d'ensemencement et la roue de tassement et une force d'inclinaison. Plus particulièrement, la revendication 6 présente un ressort d'inclinaison qui suggère une réalisation qui ressemble à celle illustrée à la figure 5. Il faut donc se demander si l'ajout de ces éléments est suffisant pour que le dispositif Seed Hawk soit visé par la revendication 6.
[224] Cela nous ramène à la discussion du fonctionnement de l'invention et du dispositif Seed Hawk que j'ai menée lors de l'examen de la revendication 1. J'ai déjà dit que la principale différence entre le dispositif Seed Hawk et l'invention revendiquée dans la revendication 1 était le fait que le couteau de fertilisation (et le tube), le couteau d'ensemencement (et le tube) et la roue de tassement étaient tous fixés à un même élément pour pouvoir conserver leur position les uns par rapport aux autres lors des changements de terrain. La revendication 6 fournit simplement à l'invention décrite dans la revendication 1 les éléments qui lui permettent de fonctionner de la façon décrite dans le mémoire descriptif du brevet. Le dispositif Seed Hawk fonctionne toujours d'une manière qui diffère sensiblement de celle de l'invention. Par conséquent, l'ajout de ces éléments ne change rien au fait que l'invention visée par la revendication 6 permet un mouvement différentiel entre le tube d'ensemencement et le tube de fertilisation lorsqu'il y a des variations locales dans le niveau du sol par rapport au cadre. La conception du dispositif Seed Hawk est telle que le mouvement différentiel des tubes d'ensemencement et de fertilisation est limité parce qu'ils sont fixés à un élément commun pour pouvoir tous tourner par rapport à un point commun. Donc, l'utilisation d'un élément de fixation commun pour les outils d'ensemencement et de fertilisation et la roue de tassement a des répercussions appréciables sur le fonctionnement du dispositif Seed Hawk comparativement à l'invention décrite dans la revendication 6. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner les deux questions restantes de l'analyse Improver.
2) Deuxième variante : vérin hydraulique utilisé pour exercer une force d'inclinaison
[225] Il faut se rappeler que dans son témoignage, le Dr Tessier a dit qu'il [traduction] * importait peu + qu'un ressort ou un vérin hydraulique soit utilisé pour exercer une force d'inclinaison. Par contre, M. Anderson était d'avis qu'il y avait une différence entre les deux façons d'exercer une force d'inclinaison. Selon lui, plus un ressort est comprimé, plus il devient rigide, à cause de la constance d'élasticité, mais un système hydraulique exerce une force constante sur toute sa portée. On ne m'a pas dit quelle différence cela pouvait, le cas échéant, avoir sur le fonctionnement de l'invention. Ce témoignage, considéré isolément, ne me convainc pas que cela aurait des répercussions appréciables sur le fonctionnement du dispositif. De plus, le témoignage du Dr Tessier est suffisant pour me permettre de conclure que la personne versée dans l'art aurait vu qu'il était possible de remplacer un ressort par un vérin hydraulique à la date de publication du brevet. Rien ne montre que l'inventeur considérait qu'il fallait absolument utiliser un ressort. C'est pourquoi cette variante ne fait pas en sorte que le dispositif Seed Hawk tombe sous le coup de la revendication 6.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 10
[226] La revendication 10 est reproduite ci-dessous :
[traduction] (10) L'invention conformément à la revendication 1 comprenant une tige pour supporter ledit couteau, ladite tige étant placée de manière à faire dévier les résidus vers les côtés et formée d'un matériau mince dont l'épaisseur est inférieure à la largeur et où la tige est disposée de manière que l'épaisseur soit placée transversalement au sens du déplacement.
Puisque cette revendication dépend de la revendication 1, qui n'est pas contrefaite, cette revendication ne sera pas contrefaite, sauf si elle fournit les éléments essentiels dont l'absence a mené à une conclusion d'absence de contrefaçon. Étant donné que ces éléments ne comportaient pas l'utilisation d'une tige à arête, il s'ensuit que l'ajout d'une tige à arête ne mène pas à une conclusion de contrefaçon. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de poursuivre l'analyse préconisée dans la décision Improver au-delà de l'incorporation par renvoi des parties de l'analyse de la revendication 1 qui ont mené à une conclusion d'absence de contrefaçon.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 12
[227] Une comparaison côte à côte de la revendication 12 et du dispositif Seed Hawk est donnée ci-dessous. Puisque la revendication 12 reprend plusieurs parties des revendications 1 et 6, j'ai mis en caractères gras les parties de la revendication 12 qui n'apparaissent pas dans ces revendications :
(12) Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un couteau pour creuser un sillon dans le sol,
-un moyen de fixer le couteau au cadre
-disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
-un premier tube,
-un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un second tube,
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
-ledit moyen de fixer le second tube étant disposé -de manière à soutenir le second tube à une position située au-dessus du sillon et -disposé de manière que le second tube entre dans le sillon pour que le second tube suive dans le sillon et s'enfonce dans la terre de ce dernier et
-disposé de manière que le second tube soit espacé du premier tube
-d'une distance suffisante pour permettre à la terre de retomber dans le sillon entre les deux tubes lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le moyen de creuser,
-une route de tassement et
-un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube,
-ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant un élément de fixation unique fixé de manière à pivoter par rapport au couteau
-pour que le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement et comprenant
-un moyen d'incliner ledit second tube et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol,
-la largeur de ladite roue de tassement et la largeur du couteau étant établies de manière que
-la largeur du sillon par rapport à la roue de tassement
-permette à cette dernière de rouler dans le sillon à une position sous le niveau du sol
de manière à guider ledit second tube dans le sillon.
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Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un couteau formé d'un couteau de fertilisation 8 pour creuser un sillon dans le sol
-un moyen de fixer le couteau de fertilisation 8 à la plaque de déclenchement qui est fixée de manière à pivoter sur le bras de mise en place qui est lui-même fixé de manière à pivoter sur le support d'accrochage qui est fixé au cadre
-disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol
-un premier tube formé d'un tube de descente d'engrais 16,
-un moyen de fournir un matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un second tube formé d'un couteau d'ensemencement 6 et d'un tube de descente de semence 7
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau de fertilisation 8,
-ledit moyen de fixer le second tube, qui consiste à -fixer le second tube le long du couteau d'ensemencement, (1)
-disposé de manière que le second tube suive dans le sillon creusé par le couteau d'ensemencement (2) et
-disposé de manière que le second tube soit espacé du premier tube
-d'une distance suffisante pour permettre à la terre de retomber dans le sillon entre les deux tubes lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le moyen de creuser,
-une roue de tassement/de jaugeage pneumatique 5 et
-un moyen de fixer la roue de tassement/de jaugeage pneumatique 5 vers l'arrière par rapport au tube de descente de semence 7 pour qu'elle suive dans le sillon derrière le tube de descente de semence,
-ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant un bras allongé fixé de manière à pivoter par rapport au cadre,
-pour que le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement et comprenant
-un moyen d'incliner lesdits couteau et tube de fertilisation, lesdits couteau et tube d'ensemencement et ladite roue de tassement pour qu'ils entrent en contact avec le sol,
-la largeur de ladite roue de tassement et la largeur dudit couteau étant établies de manière que
-la largeur du sillon par rapport à la roue de tassement
-permette à cette dernière de rouler sur les épaulements du sillon
-de manière à tasser la terre dans le sillon. (3) |
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[228] Il ne sera pas nécessaire que je répète l'analyse des éléments déjà couverts lors de l'examen des revendications 1 et 6. Puisque les mots et expressions utilisés dans la revendication 12 traitent aussi des outils fixés au bras de mise en place pivotant, le dispositif Seed Hawk ne tomberait pas sous le coup de la revendication 12, et ce, pour les mêmes raisons qu'il ne tombe pas sous le coup des revendications 1 et 6, nommément parce que le dispositif Seed Hawk assure le contrôle de la profondeur de la semence et de l'engrais d'une façon différente, et continue de le faire même s'il y a des variations de terrain. Cependant, dans l'éventualité où je me tromperais au sujet des revendications 1 et 6, je vais examiner les variantes soulevées spécifiquement par la revendication 12, nommément :
(1) le moyen de fixer le second tube disposé de manière à soutenir le second tube à une position située au-dessus du sillon;
(2) le second tube qui suit dans le sillon et s'enfonce dans la terre de ce dernier;
(3) le déplacement de la roue de tassement dans le sillon à une position sous le niveau du sol de manière à guider le second tube dans le sillon.
Première variante : le moyen de fixer le second tube disposé de manière à soutenir le second tube à une position située au-dessus du sillon
[229] La différence entre la revendication 1 et la revendication 12, relativement à l'endroit où est fixé le second tube est la suivante : la revendication 1 fait référence à l'ajustement d'un côté à l'autre du second tube tandis que la revendication 12 précise simplement qu'il suit dans le sillon à une distance suffisante pour permettre à la terre de retomber entre les outils. Les demandeurs prétendent que ces mots signifient simplement que [traduction] * [...] le second tube se déplace d'abord dans le sillon et fait ensuite saillie vers le bas dans le sillon à partir d'une position vers l'arrière du couteau et au-dessus du sillon et ne suit pas simplement derrière le couteau à l'intérieur du sillon + (conclusions finales des demandeurs, au paragraphe 170). Les défendeurs Seed Hawk signalent que les experts des demandeurs ont admis que le tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk n'est pas soutenu à une position au-dessus du sillon. Voir le témoignage de M. Schaaf, transcription, 20 juin 2002, à la page 3083, et le témoignage du Dr Tessier, transcription, 29 octobre 2001, à la page 1668. Je crois que ces aveux sont fondés et que le tube d'ensemencement du Seed Hawk n'est pas soutenu à une position au-dessus du sillon. Est-ce que cette variante influence de façon appréciable le fonctionnement de l'invention?
[230] D'après moi, non. Le tube d'ensemencement a pour but de mettre en place la semence à la profondeur appropriée dans le sillon. La revendication envisage de fixer le second tube à l'élément de fixation unique pour qu'il soit nécessairement soutenu au-dessus du sillon. Le fait que le tube du dispositif Seed Hawk est soutenu le long du couteau d'ensemencement plutôt qu'au-dessus du sillon n'a aucune répercussion appréciable sur le fait qu'il doit déposer la semence à l'endroit approprié dans le sillon. De plus, même s'il n'y a pas beaucoup d'éléments de preuve sur ce que la personne versée dans l'art aurait pensé de ce changement, je conclus que cette substitution était prévisible à l'époque pertinente. Dans le même ordre d'idées, il n'y a aucune preuve ni aucune autre raison permettant de croire que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion à de cette exigence était essentielle.
Deuxième variante : le second tube qui suit dans le sillon et s'enfonce dans la terre de ce dernier
[231] Cette variante se rapporte à la discussion relative à l'utilisation d'un couteau dans le dispositif Seed Hawk pour creuser un second sillon dans lequel la semence est déposée. J'ai conclu que la création d'un second sillon, par suite de l'enfoncement dans la terre du couteau d'ensemencement, n'avait pas de répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention. Pour la même raison, je conclus que cette variante n'a pas de répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention. L'objectif de déposer la semence dans un rapport donné avec l'engrais est atteint d'une manière essentiellement identique et avec essentiellement le même résultat que dans l'invention décrite dans la revendication 12. Comme pour l'utilisation d'un couteau distinct, je conclus que cette substitution aurait été apparente pour la personne versée dans l'art à l'époque pertinente. À la différence de la question de l'enfoncement dans la terre [traduction] * uniquement d'une surface extérieure du second tube +, il n'y a aucune raison de croire que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion à cette exigence était essentielle. Par conséquent, cette variante n'est pas suffisante pour que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 12.
Troisième variante : le déplacement de la roue de tassement dans le sillon à une position sous le niveau du sol de manière à guider le second tube dans le sillon
[232] Les demandeurs affirment que cet élément fait référence à l'effet créé en fixant le tube d'ensemencement et la roue de tassement à l'élément de fixation unique et aussi au fait que la roue de tassement est suffisamment étroite pour rouler dans le sillon. Par conséquent, la roue de tassement résiste au mouvement latéral de l'ensemble dans les situations de virage serré. Voir les conclusions finales des demandeurs, aux paragraphes 178 à 181.
[233] Les défendeurs Seed Hawk ont fait valoir que la roue de tassement du dispositif Seed Hawk n'avait pas de fonction de guidage, parce qu'elle ne roulait pas sous la surface du sol mais plutôt sur les épaulements des sillons creusés par les deux couteaux.
[234] Dans son affidavit établi sous serment le 25 octobre 2000, le Dr Tessier donne les résultats des mesures qu'il a prises lorsque le dispositif Seed Hawk était utilisé :
[traduction] 190. La largeur moyenne de l'empreinte laissée par l'ensemble de composants formant le dispositif d'ensemencement Seed Hawk est, en moyenne, 117 mm (4,6 pouces). L'élévation la plus basse de la surface du sol remanié formée par la roue de tassement varie de 19 à 23 mm (0,75 à 0,90 pouce) sous la surface du sol originale.
[...]
261. De fait, la roue de tassement du dispositif d'ensemencement Seed Hawk n'a pas tout à fait * 4 pouces + de large, mais plutôt 98 mm (3,9 pouces), et la largeur dans le haut du sillon creusé par l'outil de fertilisation du dispositif d'ensemencement Seed Hawk est d'en moyenne 111 mm (4,37 pouces), et même un peu plus. Chaque fois que la largeur de la roue de tassement est égale ou inférieure à la largeur du haut du sillon creusé par l'outil de fertilisation du dispositif d'ensemencement Seed Hawk, le seul sillon creusé par le dispositif d'ensemencement, la roue de tassement roule dans le sillon à une profondeur inférieure à la surface originale du sol, en d'autres termes, * dans le sillon +.
[235] Cette dernière série de mesures doit être comparée aux résultats obtenus par M. Schaaf, donnés précédemment. Monsieur Schaaf a déterminé que le sillon creusé par le couteau de fertilisation mesurait 3 pouces tandis que le sillon creusé par les deux couteaux mesurait 4 pouces et quart. Le docteur Tessier dit que le sillon creusé par le couteau de fertilisation uniquement mesure 4,37 pouces. Le docteur Tessier inclut probablement dans sa définition de sillon la zone d'influence du traceur de sillon qui s'étend au-delà de la coupe en forme de V faite par le traceur de sillon. Je préfère les résultats de M. Schaaf qui s'accordent davantage avec la définition de sillon dont les autres témoins, y compris M. Halford, semblent convenir.
[236] De fait, les résultats que le Dr Tessier donne au paragraphe 190 de son affidavit (relativement à une machine Seed Hawk différente) semblent confirmer la position des demandeurs. La largeur de la trace laissée par l'ensemble, 4,6 pouces, correspond à un pneu de 4 pouces qui s'étend sous la charge. Voir la pièce 1 - onglet 59, vidéo promotionnel produit par Seed Hawk. La mesure de la roue de tassement du Dr Tessier, 3,9 pouces, est basée sur une mesure de la partie de la roue lorsqu'elle est en contact avec le sol. Voir pièce LL de l'affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 25 octobre 2000. Étant donné que la roue de tassement est un pneu et qu'elle est sujette à une flexion sous la charge, il est fort possible que la largeur de la roue, lorsqu'elle roule dans le sillon, soit supérieure à 4 pouces. Je ne conclus pas qu'elle l'est. Je conclus simplement que les mesures de la roue de tassement prises par le Dr Tessier ne prouvent pas que la roue n'a pas plus de 4 pouces de largeur à son point de contact avec le sillon. Par contre, ses mesures de la trace laissée par le passage de l'ensemble du composant, 4,6 pouces, donnent à entendre que la largeur de la roue de tassement dans la rainure peut dépasser 4 pouces, et peut en fait dépasser la largeur du sillon mesurée par M. Schaaf.
[237] Le docteur Tessier entendait démontrer que la roue de tassement du dispositif Seed Hawk avait une fonction de direction en tirant un semoir Seed Hawk et en faisant des cercles de différents rayons. Lors d'un premier passage, le Dr Tessier a tiré les machines avec les [traduction] * dispositifs d'ensemencement + (probablement les couteaux de fertilisation et d'ensemencement et les roues de tassement à l'extérieur du sol). Les rayons des cercles faits par le tracteur, environ deux cercles, mesuraient 15,2 mètres et 32 mètres tandis que les rayons des cercles faits par le semoir mesuraient 12,1 mètres et 31,1 mètres. Le docteur Tessier a alors fait le même trajet avec les dispositifs d'ensemencement dans le sol. Selon les conditions du sol, les rayons des cercles faits par le semoir mesuraient 12,6 mètres et 13,1 mètres et 31,7 mètres et 31,4 mètres tandis que les rayons de virage du tracteur demeuraient à 15,2 mètres et 32 mètres. La conclusion du Dr Tessier est la suivante :
[traduction] 278. Par conséquent, lorsque les dispositifs d'ensemencement du semoir Seed Hawk 357 sont enfoncés dans la terre, ils permettent des rayons de virage plus courts de 0,3 à 0,9 mètre que ceux du tracteur, ce qui veut dire que le fait de placer les dispositifs d'ensemencement dans la terre aide tout le cadre du semoir à suivre de plus près la trajectoire adoptée par le tracteur. Il s'agit d'une manifestation de la caractéristique de * guidage + latéral transmise par le dispositif d'ensemencement au cadre du semoir. [...]
[238] Avec égards, il n'est pas question de la fonction de guidage du dispositif dans son ensemble, y compris les roues de tassement, mais des roues de tassement elles-mêmes. Par conséquent, cette expérience ne me dit rien au sujet de la fonction de guidage des roues de tassement d'un semoir Seed Hawk. De plus, les différences de rayon étaient de 2,4 (0,3/12,2 x 100) et 2,8 (0,9/31,1 x 100) pour cent respectivement. Je ne sais absolument pas si cette différence est significative.
[239] Monsieur Schaaf n'a pas tenté de prendre des mesures, mais il a offert une explication sur le guidage :
[traduction] 87. Pour ce qui est du mot * guidage +, s'il y a une charge latérale sur l'ensemble de traceur de sillon causée, par exemple, par une pente latérale ou un terrain vallonneux ou ondulé, cette charge peut causer un mouvement latéral général de l'ensemble ou un désalignement de l'outil pour tous les traceurs de sillon fixés à l'outil. Étant donné que la roue de tassement roule dans le sillon, elle peut transporter ou décaler cette charge latérale. En transportant la charge latérale, la roue de tassement stabilisera ou * guidera + l'ensemble de traceur de sillon. Puisqu'un pneu peut fléchir pour épouser la forme du sillon, il convient bien au transport de la charge latérale et au guidage. De plus, le rayon ou le profil ovale d'un pneu lui permet de se conformer à la forme du sillon et de rouler dans celui-ci.
Affidavit de David Schaaf établi sous serment le 30 octobre 2000.
[240] Le problème que posent ces explications, comme c'est le cas pour les mesures du Dr Tessier, c'est qu'elles ne tiennent pas compte de la présence des couteaux dans le sol et du déplacement vers l'avant du semoir. Le docteur Tessier a expliqué pourquoi les pneus offrent plus de résistance au déplacement latéral que les couteaux :
[traduction] LE JUGE : Si je me fie à l'expérience courante, il me semble que quelque chose qui est enfoncé trois à quatre pouces dans le sol offre une plus grande résistance à la rotation que quelque chose qui tourne librement, comme une roue.
LE TÉMOIN : Exact. Exact. Vous parlez d'un déplacement vers l'avant. Mais je parle d'une force latérale. Et la largeur dont je parle ici -- Vous avez raison, vous faites référence à la résistance au roulement contre la force de traction exercée sur l'outil.
Ce dont je parle se produit lors d'un virage. Même si la force est toujours là, il est possible que les outils d'ensemencement exercent une force latérale importante et que l'outil de fertilisation exerce une force latérale importante. Maintenant, les deux, de par leur conception, ne sont pas conçus, parce qu'ils sont très minces, ne sont pas conçus pour résister à une force latérale. Mais il y a une force latérale. Tout le semoir est poussé jusqu'à trois pieds plus près du semoir. Ce n'est pas parce que l'outil de fertilisation et l'outil d'ensemencement exercent une force latérale supérieure à la force exercée dans une autre situation mais parce que le pneu de la roue de tassement appuie contre la paroi du sillon latéralement, tout en offrant une résistance au roulement.
Transcription, 26 octobre 2001, aux pages 1446 et 1447.
[241] Je ne suis pas certain que le Dr Tessier ait compris ma question. Je faisais simplement remarquer que des pièces de métal rigides enfoncées dans le sol risquent d'offrir une plus grande résistance au mouvement latéral que des pneus qui tournent. En tournant, les pneus auront tendance à rouler du côté sur lequel des forces latérales sont exercées. Les couteaux enfoncés dans le sol, par contre, mais s'ils sont étroits, comme le Dr Tessier l'a indiqué, auront tendance à résister au mouvement latéral. De plus, les couteaux sont rigides tandis que les pneus sont élastiques. Par conséquent, je ne suis pas certain que le Dr Tessier ait répondu à ma question.
[242] Enfin, je ne suis pas convaincu qu'il ait été démontré que les roues de tassement du dispositif Seed Hawk exercent une fonction de guidage sur le tube d'ensemencement. À supposer qu'elles ne le font pas, est-ce que cela influence de façon appréciable le fonctionnement de l'invention?
[243] D'après moi, non. Mon interprétation du brevet me porte à croire que la fonction de tassement de la roue de tassement est beaucoup plus importante que sa fonction de guidage. Le rôle de la roue de tassement dans l'évaluation de la profondeur de mise en place a déjà été longuement examiné. Les avantages du guidage ne sont mentionnés qu'en passant dans le brevet :
[traduction] (21) Compte tenu de l'énoncé précédent, la roue 38, par son mouvement, sert de dispositif de recouvrement et de tassement de la semence et de l'engrais. Il faut aussi noter que le tube 44 est fixé au levier coudé 35 qui porte aussi la roue 38, pour qu'ils se déplacent ensemble et maintiennent le rapport entre eux.
Brevet, à la page 15.
[...]
Les roues de tassement moulées de manière à tourner [...] peuvent aussi suivre le sillon lorsque la machine ne se déplace pas tout à fait en ligne droite, par exemple lors d'un virage.
Brevet, à la page 20.
[244] En fin de compte, je suis convaincu que l'invention fonctionnerait sensiblement de la même manière pour fournir le même résultat sans la fonction de guidage de la roue de tassement.
b) Évidence de la variante pour la personne versée dans l'art à la date de publication du brevet.
[245] Je ne suis au courant d'aucun élément de preuve qui traite de cette question. Étant donné le rôle relativement mineur que cet élément a, selon moi, dans le fonctionnement de l'invention, je conclus que la personne versée dans l'art aurait conclu que l'invention pourrait fonctionner adéquatement sans cet aspect de la roue de tassement.
c) Est-ce que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion aux termes de la revendication était essentielle?
[246] Aucun élément de preuve ne permet d'arriver à la conclusion que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion à cet aspect du brevet était essentielle. Je conclus donc que l'absence de cet élément ne permet pas au dispositif Seed Hawk d'éviter une conclusion de contrefaçon.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 19
[247] La revendication 19 est reproduite ci-dessous en la comparant avec le dispositif Seed Hawk. Les éléments de la revendication 19, qui n'apparaissent pas dans les autres revendications, sont en caractères gras pour bien montrer les éléments en litige dans la revendication 19.
Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un moyen de creuser un sillon dans le sol formé uniquement d'un couteau,
-un moyen de fixer le couteau au cadre disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol,
-un premier tube,
-un moyen de fournir un premier matériau au premier tube, -un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé uniquement d'un second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol,
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau,
-ledit moyen de fixer le second tube comportant un élément placé au-dessus du sillon et à partir duquel le second tube fait saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier,
-ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau,
-un moyen d'exercer une force sur ledit second tube pour maintenir ledit second tube en contact avec le sol. |
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Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un moyen de creuser des sillons dans le sol formé uniquement d'un couteau,
-un moyen de fixer le couteau au bras de mise en place disposé de manière à creuser des sillons dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol, (1)
-un premier tube,
-un moyen de fournir un premier matériau au premier tube, -un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé d'un couteau auquel est fixé le second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol, (2)
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau de fertilisation,
-ledit moyen de fixer le second tube comportant un couteau fixé au bras de mise en place et faisant saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier;
-ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau de fertilisation,
-un moyen d'exercer une force sur ledit second tube pour maintenir ledit second tube en contact avec le sol. |
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[248] Le dispositif Seed Hawk comporte deux différences par rapport à l'invention visée par la revendication 19. La première est le fait que le couteau, qui désigne le couteau de fertilisation sur le dispositif Seed Hawk, est fixé au bras de mise en place et non au cadre. Cette variante a été examinée en détail à l'égard des revendications 1 et 6 et j'ai alors conclu qu'à cause de cette variante, le dispositif Seed Hawk fonctionnait d'une façon qui différait d'une façon appréciable du mode de fonctionnement de l'invention. Je n'ai pas besoin de répéter toute l'analyse pour en arriver à la même conclusion à l'égard de la présente revendication.
[249] La deuxième variante est le fait que le moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre du moyen de distribution du second matériau n'est pas formé uniquement d'un second tube formé par un seul tube. Cela ressemble à l'exigence de la revendication 1, soit [traduction] * un moyen [...] pouvant s'enfoncer dans le sol à l'intérieur du sillon [...] et formé uniquement d'une surface extérieure du second tube +. La revendication 19 remplace le second tube. La revendication 19 précise aussi que la seconde fonction d'ouverture du sol pour l'enfoncement dans le sol du système de distribution de matériau est formée uniquement d'un second tube qui est formé d'un seul tube. Dans mon analyse de cet élément en ce qui concerne la revendication 1, j'ai conclu que le fait que le dispositif Seed Hawk creusait un second sillon au moyen d'un second couteau ne modifiait pas de façon appréciable le mode de fonctionnement de l'invention. J'ai la même opinion en ce qui concerne la revendication 19.
[250] Cette variante est différente de ce qui a été discuté lors de l'examen de la revendication 1, car il est question ici de la construction du second tube plutôt que de son rendement. Encore une fois, il faut tenir compte de l'intention de l'inventeur lorsqu'il a utilisé le mot [traduction] * uniquement + par rapport à la variante. Comme je l'ai mentionné pour la revendication 1, l'utilisation du mot [traduction] * uniquement + montre selon moi que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion aux termes de la revendication était essentielle. Par conséquent, le dispositif Seed Hawk ne tomberait pas sous le coup de la revendication 19, car le moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre du moyen de distribution du second matériau ne comporte pas uniquement un second tube formé d'un seul tube.
[251] Pour ces raisons, je conclus que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 19.
CONTREFAÇON : REVENDICATION 20
[252] La revendication 20 est reproduite ci-dessous avec mon opinion sur son application au dispositif Seed Hawk. Pour aider le lecteur à suivre cette longue revendication, les parties qui n'ont pas été discutées lors de l'examen des autres revendications sont en caractères gras. Les parties de la description du dispositif Seed Hawk, dans la colonne de droite, qui diffèrent de la revendication, sont en italiques.
Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un moyen de creuser un sillon dans le sol formé uniquement d'un couteau,
-un moyen de fixer le couteau au cadre disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol, -un premier tube,
-un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé uniquement
-d'un second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol,
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du couteau;
-ledit moyen de fixer le second tube comportant
-un élément placé au-dessus du sillon et à partir duquel le second tube fait saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier,
-ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau,
-un ensemble de roue de tassement comportant
-une roue de tassement et
-un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube,
-ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant -un élément de fixation unique[...] fixé par rapport au dit couteau pour que
-le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement,
-un moyen d'exercer une tension sur ledit élément de fixation unique pour maintenir ledit second tube et ladite roue de tassement en contact avec le sol,
-ladite roue de tassement et ledit couteau ayant des largeurs respectives concourantes faisant en sorte que la roue de tassement est plus large que le couteau à son point le plus bas et plus étroite que la partie la plus large du sillon creusé par le couteau afin que la roue de tassement roule dans le sillon à une position sous le niveau du sol de manière à guider ledit second tube dans le sillon. |
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Appareil pour planter deux matériaux différents dans le sol comportant
-un cadre conçu pour être déplacé sur le sol,
-un moyen de distribution du premier matériau comportant
-un moyen de creuser un sillons dans le sol formé uniquement d'un couteau, (1)
-un moyen de fixer le couteau au bras de mise en place disposé de manière à creuser un sillon dans le sol lorsque le cadre est déplacé vers l'avant sur le sol, (2) -un premier tube,
-un moyen de fournir un premier matériau au premier tube,
-un moyen de fixer le premier tube au couteau à une position immédiatement vers l'arrière de ce dernier pour déposer ledit premier matériau dans le sillon,
-un moyen de distribution du second matériau comportant
-un moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé [...] (3)
-d'un couteau et d'un second tube constitué d'un seul tube comportant une ouverture au point d'enfoncement dans le sol, (3)
-un moyen de fournir un second matériau au second tube,
-un moyen de fixer le second tube vers l'arrière et à part du premier couteau;
-ledit moyen de fixer le second tube comportant
-un élément couteau [...] faisant saillie vers le bas dans le sillon pour s'enfoncer dans la terre de ce dernier, (4)
-ledit moyen de fixer le second tube fixant ledit second tube à une certaine distance du premier tube de manière à laisser un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon lorsque le premier et le second tube se déplacent le long du sillon derrière le couteau,
-un ensemble de roue de tassement comportant
-une roue de tassement et
-un moyen de fixer la roue de tassement vers l'arrière par rapport au second tube pour qu'elle suive dans le sillon derrière le second tube,
-ledit moyen de fixer ladite roue de tassement et ledit moyen de fixer ledit second tube comportant -un élément de fixation unique fixé par rapport au cadre pour que (5)
-le second tube soit soutenu de façon rigide par rapport à la roue de tassement,
-un moyen d'exercer une force sur ledit élément de fixation unique pour maintenir ledit second tube et ladite roue de tassement en contact avec le sol, (6)
-ladite roue de tassement et ledit couteau ayant des largeurs respectives concourantes faisant en sorte que la roue de tassement est plus large que le couteau à son point le plus bas et plus étroite que la partie la plus large du sillon creusé par les couteaux de fertilisation et d'ensemencement afin que la roue de tassement roule dans les sillons à une position sous le niveau du sol. (7) |
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[253] La revendication 20, qui est d'une certaine façon une revendication récapitulative, est la revendication qui comprend le plus de renseignements dans le brevet. Plusieurs de ses éléments ont été vus et discutés lors de l'examen d'autres revendications. Par conséquent, plusieurs points du dispositif Seed Hawk qui diffèrent de la revendication 20 ont aussi été discutés lors de l'examen d'autres revendications. Par exemple, il a été déterminé que la variante (1), le fait de creuser deux sillons plutôt qu'un, était une variante qui ne faisait pas en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup des conditions de la revendication 1. Par contre, la variante (2), le fait de fixer le couteau de fertilisation au bras de mise en place, ferait en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 1. La variante (3), qui traite du moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé d'un second tube constitué d'un seul tube, diffère de la revendication 19 par le retrait du qualificatif [traduction] * uniquement + que l'on retrouve dans la revendication 19. La variante (4), qui traite du moyen de fixer le second tube, a été traitée lors de l'examen des revendications 12 et 19 et il a été déterminé qu'elle ne faisait pas en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de ces revendications. La variante (5) diffère de la revendication 1, car elle traite du moyen de fixer l'élément de fixation unique par rapport au couteau sans que la fixation ait besoin d'être pivotante. La variante (6) traite de l'application d'une tension sur l'élément de fixation unique tandis que le dispositif Seed Hawk exerce une force sur cet élément. Je suis tenté de penser qu'il s'agit d'une erreur d'écriture, qui ne serait pas la seule dans le brevet, et je ne me propose pas d'en parler plus longuement. La variante (7) donne des précisions sur le rapport entre les outils d'ouverture du sol et la roue de tassement, lesquelles sont données sous une nouvelle forme dans cette revendication.
[254] D'après moi, les variantes (1), (2) et (4) ont le même effet dans la présente revendication que dans les revendications où elles déjà ont été examinées, soit que la variante (1) ferait en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 20 tandis que les variantes (2) et (4) ne le feraient pas. Je n'ai pas l'intention de parler davantage de la variante (6). Il reste donc à examiner les variantes (3), (5) et (7).
Troisième variante : moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre formé uniquement d'un second tube constitué d'un seul tube
[255] Dans mon analyse de cet élément lors de l'examen de la revendication 19, j'ai trouvé des éléments de preuve montrant que l'inventeur considérait qu'une stricte adhésion était essentielle pour ce qui est de la composition du second tube en utilisant le mot [traduction] * uniquement +. Ce mot a maintenant été retiré. Je suis encore d'avis que cet élément ne ferait pas en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 19. D'après moi, l'absence du mot [traduction] * uniquement + dans la revendication 20 montre que la stricte adhésion n'était pas exigée pour ce qui est de cette revendication. Je conclus donc que le dispositif Seed Hawk est compris dans cet aspect de la revendication 20.
Cinquième variante : élément de fixation unique fixé par rapport au couteau
[256] L'analyse du fonctionnement de l'invention effectuée lors de l'examen de la revendication 1 était basée sur le principe que l'élément de fixation unique, qui fournit un soutien structural à la roue de tassement et au second tube, était fixé de manière à pivoter par rapport au couteau et que cela permettait à la roue de tassement d'évaluer la profondeur de mise en place dans certaines conditions. L'absence de l'expression [traduction] * de manière à pivoter + dans la revendication 20 n'indique pas que l'élément de fixation unique ne doit pas être fixé de manière à pivoter par rapport au couteau; cela indique simplement qu'il n'a pas besoin de l'être.
[257] Lorsqu'on essaie d'interpréter la revendication 20 comme s'appliquant au dispositif Seed Hawk, on se rend compte que la question ne porte pas sur la façon dont l'élément de fixation unique est fixé, mais sur le fait qu'il est fixé ou non [traduction] * par rapport au couteau +. Étant donné que le couteau du dispositif Seed Hawk, c.-à-d. le couteau de fertilisation, est lui-même fixé à l'élément de fixation commun, il est difficile de parler de fixer l'élément de fixation commun par rapport au couteau. Il faut donc conclure que cet élément est absent dans le dispositif Seed Hawk.
[258] Par conséquent, la revendication 20 ne s'applique pas au dispositif Seed Hawk, pas plus que la revendication 1. Elle représente aussi un mode de fonctionnement qui diffère de façon appréciable, tout comme le fait de fixer le couteau de fertilisation au cadre.
Septième variante : largeurs relatives du couteau, du sillon creusé par le couteau et de la roue de tassement
[259] Les mesures prises par M. Schaaf confirment que la roue de tassement du dispositif Seed Hawk est plus large que le couteau et est aussi plus large que le sillon creusé par le couteau de fertilisation. Le couteau d'ensemencement élargit le sillon jusqu'à ce qu'il soit plus large que la largeur nominale de la roue de tassement, mais la véritable question se rapporte à la largeur de la roue de tassement dans le sillon. Cette revendication ne contient pas plus de renseignements que la revendication 12 permettant de tirer une conclusion au sujet du guidage et comme pour la revendication 12, rien ne donne à entendre que cet élément a des répercussions appréciables sur le fonctionnement de l'invention. Par conséquent, qu'il y ait guidage ou non, cela n'est pas suffisant pour faire en sorte que le dispositif Seed Hawk ne tombe pas sous le coup de la revendication 20.
CONCLUSIONS RELATIVES À LA CONTREFAÇON
[260] Après avoir analysé les revendications du brevet et le dispositif Seed Hawk, je conclus que le dispositif Seed Hawk ne constitue pas une contrefaçon des revendications du brevet, et ce, pour les raisons suivantes :
1- La revendication 1 n'est pas contrefaite parce que le couteau de fertilisation du Seed Hawk n'est pas fixé au cadre mais plutôt à un bras de fixation commun avec le couteau d'ensemencement, le tube d'ensemencement et la roue de tassement. Cette disposition fait en sorte qu'il y a une différence appréciable entre le mode de fonctionnement du dispositif Seed Hawk et celui du dispositif de la revendication 1. Pour plus de commodité, j'appellerai ce motif le motif relatif à la fixation du couteau.
2- La revendication 1 n'est pas contrefaite parce que le moyen de fournir un second matériau n'est pas formé d'un moyen pouvant s'enfoncer dans le sol formé uniquement d'une surface extérieure du second tube, nommément le tube d'ensemencement. Pour plus de commodité, j'appellerai ce motif le motif relatif au tube d'ensemencement.
3- Les revendications 2, 3, 6 et 10 ne sont pas contrefaites en raison des motifs relatifs à la fixation du couteau et au tube d'ensemencement.
4- La revendication 12 n'est pas contrefaite en raison du motif relatif à la fixation du couteau.
5- La revendication 19 n'est pas contrefaite parce que le moyen pouvant s'enfoncer dans la terre et ouvrir la terre du moyen de fournir un second matériau n'est pas formé uniquement d'un second tube formé par un seul tube, mais est formé d'un couteau d'ensemencement et d'un tube d'ensemencement. Pour plus de commodité, j'appellerai ce motif le motif relatif à la revendication 19.
6- La revendication 19 n'est pas contrefaite en raison du motif relatif à la fixation du couteau.
7- La revendication 20 n'est pas contrefaite en raison du motif relatif à la fixation du couteau et du motif relatif à la revendication 19.
INVALIDITÉ
[261] Les défendeurs Seed Hawk ont invoqué la question de la validité des revendications du brevet comme un moyen de défense contre les allégations de contrefaçon et dans le cadre d'une demande reconventionnelle relative à l'allégation de contrefaçon. Ils ont invoqué plusieurs motifs d'invalidité, y compris l'antériorité, l'évidence, la revendication excessive, l'insuffisance de l'exposé et l'absence d'utilité.
[262] L'antériorité a été invoquée surtout par rapport aux travaux effectués par le Dr Heinonen, professeur à l'Université suédoise d'agronomie. Le Dr Heinonen et son collègue, M. Huhtapalo, ont mis au point une série de semoirs capables d'effectuer des semis en bandes en un passage. Le Dr Heinonen a donné des conférences dans l'Ouest du Canada et a distribué un document décrivant ses travaux. Il est allégué que ses travaux et ses publications antériorisaient l'invention décrite dans le brevet Halford.
[263] L'argument voulant que les revendications du brevet soient invalides à cause de l'évidence est basé sur un examen de l'état antérieur de la technique. L'argument visant la revendication excessive est basé sur l'absence d'un élément important, l'espacement entre le tube de fertilisation et le tube d'ensemencement, dans les revendications. La revendication 1 et les revendications qui en dépendent ne mentionnent pas du tout cet espacement. Les revendications 12, 19 et 20 mentionnent l'espacement, mais ne précisent pas l'ampleur de l'espacement requis pour un fonctionnement efficace de la machine. L'absence d'utilité est aussi invoquée à l'égard de la revendication 19, parce qu'elle ne comporte pas une roue de tassement qui, selon le témoignage des experts des demandeurs, est nécessaire au fonctionnement de l'invention.
[264] L'argument portant sur l'insuffisance de l'exposé est soulevé à l'égard des revendications 12 et 20 concernant une fonction de guidage pour la roue de tassement, fonction qui n'est pas divulguée dans le mémoire descriptif du brevet.
[265] Il est possible de statuer d'une façon passablement rapide sur certains de ces points.
ABSENCE D'UTILITÉ ET REVENDICATION EXCESSIVE
[266] Dans leurs observations écrites, sous le titre [traduction] * Inutilité des revendications 1, 2, 3, 6, 10, 12, 19 et 20 +, les défendeurs Seed Hawk font valoir qu'un élément essentiel à la fonctionnalité de l'invention n'a pas été revendiqué, car ces revendications n'énoncent pas la nécessité d'avoir un espacement de 6 à 12 pouces entre le second tube et le premier couteau. Les défendeurs Seed Hawk concluent [traduction] qu' * en conséquence, les revendications du brevet Halford ne font pas état d'un dispositif qui sera utilisable, de sorte que les revendications sont invalides parce qu'elles ne font pas état d'un dispositif utilisable +. (Observations écrites des défendeurs Seed Hawk, au paragraphe 519.) Aucune décision faisant autorité n'est citée pour appuyer cette position.
[267] Il est vrai que dans leurs témoignages les experts des demandeurs précisaient que l'espacement des ouvertures des deux tubes de distribution de matériau était essentiel. Voir l'affidavit de David Schaaf, établi sous serment le 30 octobre 2000, au paragraphe 70, et l'affidavit du Dr Tessier, établi sous serment le 25 octobre 2000, au paragraphe 167. Lors de son contre-interrogatoire, le Dr Tessier a convenu qu'un dispositif avec un espacement inadéquat entre les deux outils de distribution de matériau ne fonctionnerait pas bien :
[traduction] Q. Mais, de la façon dont les choses se présentent actuellement, pensez-vous que, si nous prenons par exemple la revendication 1, si quelqu'un produisait une machine avec un espacement de 1 à 3 pouces, cette machine serait visée par la description figurant dans la revendication?
R. Peut-être, mais elle ne sera pas fonctionnelle.
Transcription, 29 octobre 2004, aux pages 1598 et 1599.
[268] Lors de son contre-interrogatoire, M. Schaaf a dit ce qui suit à propos des dimensions :
[traduction] Q. D'accord. Alors vous dites et je cite: * L'espacement essentiel est décrit dans le brevet Halford. + Vous avez donc utilisé une expression assez forte * espacement essentiel +.
R. Oui.
Q. Il faut qu'il soit là. C'est essentiel n'est-ce pas?
R. Oui.
Q. D'accord. Et l'espacement doit être de 6 à 12 pouces.
R. Oui.
Q. D'accord. Ensuite, plus loin au paragraphe 73 vous dites, et je cite : * Je ne peux souligner assez l'importance de cet espacement pour le rendement adéquat du traceur de sillon. + Si vous n'avez pas cet espacement, le traceur ne fonctionnera pas correctement, n'est-ce pas?
R. C'est exact.
Transcription, 20 juin 2002, aux pages 3015 et 3016.
[269] Je peux donc conclure, sans risque d'erreur, que l'espacement des ouvertures des deux tubes de distribution de matériau est essentiel au fonctionnement, et que sans cet espacement adéquat, l'invention décrite dans le brevet ne fonctionnera pas correctement.
[270] Par contre, il n'est pas clair que les revendications soient toutes sur le même pied à cet égard. La revendication 1 et les revendications qui en dépendent ne mentionnent pas du tout cet espacement. Les revendications 12, 19 et 20 mentionnent l'espacement, mais ne précisent pas les dimensions de l'espacement adéquat. Elles mentionnent uniquement [traduction] * [...] que le second tube soit espacé du premier tube d'une distance suffisante pour permettre à la terre de retomber dans le sillon entre les deux tubes [...] + (revendication 12) ou [traduction] * [...] un espace libre derrière ledit premier tube et devant ledit second tube dans lequel la terre retombe dans le sillon [...] + (revendications 19 et 20). Par conséquent, ces trois revendications ont peut-être droit à un traitement différent de celui de la revendication 1 et des revendications qui en dépendent.
[271] Ceci dit, les défendeurs Seed Hawk n'ont pas fait valoir cette lacune des revendications et n'ont pas demandé de modification pour que les plaidoiries soient conformes à la preuve. Les demandeurs n'ont pas répondu à ces allégations. Par conséquent, je ne suis pas en mesure de me prononcer sur la validité des différentes revendications sur ces fondements.
[272] Dans leurs observations écrites, les défendeurs Seed Hawk mentionnent aussi cette même lacune à l'égard de la revendication excessive. Ils allèguent qu'en omettant d'inclure cette limite dans les revendications, le brevet revendique plus que ce qui a été divulgué. Cette allégation est soumise à la même critique que l'allégation d'absence d'utilité. Elle n'a pas été débattue. Dans les circonstances, je ne peux donner suite à cette allégation.
[273] Par contre, les défendeurs Seed Hawk ont plaidé l'invalidité de la revendication 19, car elle omettait de revendiquer une partie essentielle de l'invention, nommément la roue de tassement. Le docteur Tessier, même s'il a admis que la roue de tassement était un élément essentiel, ne convenait pas que son absence rendait l'invention inutilisable :
[traduction] Et il dit ceci, et je cite à la ligne 3 : * Si l'on retourne aux illustrations, la partie suivante du dispositif qui est essentielle, Monsieur le juge, est la roue de tassement. + Il utilise le mot essentiel. Avez-vous remarqué?
R. (Il fait oui de la tête).
Q. * La roue de tassement est fixée dans une position par rapport au tube d'ensemencement de manière à suivre dans le sillon. La roue de tassement est fixée à un ensemble rigide, Monsieur le juge, qui est rattaché au cultivateur d'ensemencement et vous verrez aussi dans les trois cas +, et il continue en parlant de la différence, etc. etc. Il parle ensuite de la roue de tassement.
Maintenant, c'est ce que l'avocat des demandeurs a dit sur le sujet, et je crois que vous êtes d'accord avec les commentaires de M. Raber?
R. Je suis entièrement d'accord.
Q. Merci. Et puisqu'elle est essentielle, constitue une partie essentielle de l'invention, je crois, Monsieur, en tant que personne ayant une connaissance générale dans le domaine qui lit la revendication, qu'il faut que la roue de tassement soit présente.
R. Dans la revendication 19, nous parlons d'une variante de l'invention Halford, une variante qui peut être utilisée sans roue de tassement. Cependant, les revendications 1, 12 et 20, d'après moi, proposent une meilleure mise en application dans laquelle la roue de tassement a une fonction particulière de contrôle de la profondeur; tandis que dans la revendication 19 cette fonction est exécutée par d'autres mécanismes.
Transcription, 29 octobre 2001, aux pages 1592 et 1593.
[274] Monsieur Schaaf était du même avis pour ce qui a trait à la présence de la roue de tassement. Voir la transcription, 20 juillet 2002, à la page 3020 ainsi qu'aux pages 3111 et 3112.
[275] Les défendeurs Seed Hawk n'ont pas présenté d'élément de preuve sur ce point par l'intermédiaire de leur expert, M. Anderson. Par conséquent, la seule preuve que j'ai sur ce point est celle des experts des demandeurs. Dans les circonstances, je ne suis pas en mesure de dire que l'invention ne fonctionnera pas sans la roue de tassement et l'élément de fixation unique.
[276] Ceci dit, la conclusion qui découle de tout ceci est que la roue de tassement et l'élément de fixation unique ne sont pas des éléments essentiels de l'invention. Cela m'amène à me demander ce qui constitue l'étape inventive par rapport à l'état antérieur de la technique. Tout ceci mène à une discussion sur l'évidence.
ÉVIDENCE
[277] Pour traiter de l'évidence, il faut avoir une certaine idée de la façon dont l'invention constitue un progrès par rapport à l'état antérieur de la technique. Si l'on se reporte au brevet et, en particulier, à la partie intitulée [traduction] * Historique de l'invention +, il est difficile d'identifier ce qui est revendiqué comme une invention.
[278] Il est dit que l'invention [traduction] * porte sur un appareil servant à mettre en place dans le sol deux matériaux différents, comme de la semence et de l'engrais, et utilisé plus particulièrement, mais non exclusivement, pour des techniques de culture à labourage minimal ou à semis direct +. Rien n'indique si ces deux matériaux doivent être placés de façon particulière. Cette description est suivie par une brève discussion sur la culture sans labourage. Le brevet précise que [traduction] * plusieurs machines existantes ont été mises au point expressément pour mettre en place la semence et l'engrais dans la terre selon ce système [sans labourage] +. Il est aussi précisé que [traduction] * plusieurs tentatives ont été faites, au moyen de diverses conceptions, pour utiliser divers cultivateurs, lourds et légers, comme semoirs avec des systèmes de distribution à air ou par gravité +. Les principaux problèmes sont [traduction] * un manque de contrôle de profondeur et une grande difficulté à obtenir un tassement suffisant de la terre autour de la semence +. Des machines multi-fonctions ont donc été conçues, mais celles-ci se sont avérées [traduction] * des combinaisons trop compliquées de pièces difficiles à contrôler et à régler les unes par rapport aux autres +. Le but premier de l'invention est, par conséquent, [traduction] * de fournir un appareil de plantage permettant de mettre en place deux matériaux différents, comme de la semence et de l'engrais, en une seule opération, simple, peu coûteuse et efficace +.
[279] On se demande quelle invention est revendiquée et comment elle diffère de ce qui a été fait auparavant. Les avantages de l'invention sont énoncés plus loin dans le brevet, après la description détaillée de la première réalisation de l'invention. Le brevet donne 21 avantages perçus, mais très peu d'entre eux indiquent ce qui peut constituer l'invention. Par exemple, il est dit que l'invention permet un ajustement indépendant de la profondeur de fertilisation, de la position de l'ensemencement et de la pression de tassement. Le lecteur ne sait pas s'il s'agit simplement d'avantages du point de vue de la commercialisation ou d'un progrès par rapport à l'état antérieur de la technique.
[280] L'article 34 de l'ancienne Loi sur les brevets, qui s'applique à ce brevet, précise ce que l'on doit retrouver dans le mémoire descriptif :
34. (1) Dans le mémoire descriptif, le demandeur :
a) décrit d'une façon exacte et complète l'invention et son application ou exploitation, telles que les a conçues l'inventeur;
b) expose clairement les diverses phases d'un procédé, ou le mode de construction, de confection, de composition ou d'utilisation d'une machine, d'un objet manufacturé ou d'un composé de matières, dans des termes complets, clairs, concis et exacts qui permettent à toute personne versée dans l'art ou la science dont relève l'invention, ou dans l'art ou la science qui s'en rapproche le plus, de confectionner, construire, composer ou utiliser l'objet de l'invention;c) s'il s'agit d'une machine, en explique le principe et la meilleure manière dont il a conçu l'application de ce principe;
d) s'il s'agit d'un procédé, explique la suite nécessaire, le cas échéant, des diverses phases du procédé, de façon à distinguer l'invention d'autres inventions;
e) indique particulièrement et revendique distinctement la partie, le perfectionnement ou la combinaison qu'il réclame comme son invention.
(2) Le mémoire descriptif se termine par une ou plusieurs revendications exposant distinctement et en termes explicites les choses ou combinaisons que le demandeur considère comme nouvelles et dont il revendique la propriété ou le privilège exclusif. |
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34. (1) An applicant shall in the specification of his invention
(a) correctly and fully describe the invention and its operation or use as contemplated by the inventor;
(b) set out clearly the various steps in a process, or the method of constructing, making, compounding or using a machine, manufacture or composition of matter, in such full, clear, concise and exact terms as to enable any person skilled in the art or science to which it appertains, or with which it is most closely connected, to make, construct, compound or use it;
(c) in the case of a machine, explain the principle thereof and the best mode in which he has contemplated the application of that principle;
(d) in the case of a process, explain the necessary sequence, if any, of the various steps, so as to distinguish the invention from other inventions; and
(e) particularly indicate and distinctly claim the part, improvement or combination that he claims as his invention.
(2) The specification referred to in subsection (1) shall end with a claim or claims stating distinctly and in explicit terms the things or combinations that the applicant regards as new and in which he claims an exclusive property or privilege.
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[281] On peut voir que le paragraphe 34(2) exige que la revendication ou les revendications décrivent * en termes explicites les choses ou combinaisons que le demandeur considère comme nouvelles et dont il revendique la propriété ou le privilège exclusif +. Après avoir examiné attentivement le mémoire descriptif et les revendications afin de prendre une décision sur l'allégation de contrefaçon des demandeurs, je n'ai trouvé aucun énoncé explicite des choses que l'inventeur considère comme nouvelles.
[282] Il ne faut pas oublier que le Bureau des brevets a examiné ce mémoire descriptif et a délivré un brevet sur la foi de son contenu. Les experts vérificateurs du Bureau des brevets ont probablement vu un élément inventif qui ne m'est pas apparent. Qu'est-ce que les témoins experts ont à dire sur le sujet? Selon le témoignage du Dr Tessier, un seul élément de l'invention est nouveau :
[traduction] 125. En résumé, est-ce que l'état de la technique dont Anderson fait mention démontre que les fonctions de chaque composant utilisé dans le dispositif Halford étaient connues en 1983? D'après moi, oui, à l'exception des modifications apportées à l'outil d'ensemencement, enseignées dans le brevet Halford, qui lui permet de fléchir lorsqu'il entre en contact avec des obstacles [...]
Affidavit du Dr Tessier établi sous serment le 25 octobre 2000.
[283] Par contre, le Dr Tessier a aussi témoigné comme suit :
[traduction] Q. Donc, si je peux me permettre, vous ne vous préoccupez pas de ce qui a déjà pu être utilisé couramment avec un cultivateur dans un sol cultivé?
R. Malgré le fait que je me suis concentré sur la culture sans labourage et sur les techniques de culture sans labourage, je n'ai pas trouvé B il y aurait pu y en avoir, mais je n'ai pas trouvé lors de mes travaux à partir du début des années 1980, en tant que personne versée dans l'art, de machine qui effectuait du labourage en bandes latérales distinctes avec un seul outil.
Transcription, 29 octobre 2001, à la page 1571.
[284] Je suppose donc à partir de ces renseignements que l'inventivité de l'invention Halford réside dans le fait qu'elle pouvait effectuer de la culture en bandes latérales avec un seul outil. Puisque le brevet parle d'un moyen de distribution du premier matériau comportant un couteau et un tube et d'un moyen de distribution du second matériau comportant un second tube, je ne sais pas exactement ce que le Dr Tessier considère comme un seul outil. Il mentionne à plusieurs reprises dans son témoignage l'outil de fertilisation et l'outil d'ensemencement. Voir par exemple le paragraphe 49 de son affidavit établi sous serment le 30 novembre 1999.
[285] L'affidavit de M. Schaaf, établi sous serment le 30 octobre 2000, inclut un examen de l'état antérieur de la technique relativement aux dispositifs d'ensemencement. Sa conclusion au paragraphe 28 est la suivante :
[traduction] 28. Par conséquent, en 1983, il n'y avait aucun dispositif qui utilisait un seul traceur de sillon pour déposer avec précision et régularité de l'engrais et de la semence à des endroits distincts lors d'un seul passage. C'est précisément ce qui est enseigné dans le brevet Halford.
[286] Au paragraphe 64 de son affidavit, M. Schaaf conclut :
[traduction] 64. L'invention Halford, telle qu'elle est revendiquée, accomplit ce qui n'a jamais été accompli auparavant. Elle permet de mettre en place la semence et l'engrais séparément, et de tasser, avec un seul traceur de sillon. [...]
[287] Je remarque que je ne dispose d'aucun élément de preuve au sujet de l'exploitation commerciale de l'invention Halford qui puisse m'amener à conclure que l'invention permet réellement de déposer de façon précise et constante l'engrais et la semence à des endroits distincts. Je ne suis au courant d'aucun élément de preuve qui permettrait à M. Schaaf de conclure que l'invention Halford atteint cet objectif.
[288] L'allégation voulant que l'inventivité de l'invention repose sur l'utilisation d'un traceur de sillon unique est ambiguë. Si elle a pour but d'indiquer que l'invention est la seule à utiliser un seul assemblage pour mettre en place la semence et l'engrais séparément et pour tasser le sillon, je ne peux la concilier avec l'état antérieur de la technique qui comprend plusieurs dispositifs qui utilisent un seul assemblage pour mettre en place la semence et l'engrais et tasser le sillon. Voir les pièces K, L et N de l'affidavit de Clifford Anderson. Si elle revendique comme inventive l'utilisation d'un traceur de sillon unique, par opposition à deux traceurs distincts, pour la semence et l'engrais, je me demande pourquoi une si grande partie de la preuve des demandeurs visait à établir que le tube d'ensemencement était un traceur de sillon à houe étroit.
[289] Cela place les demandeurs dans une position peu enviable. Si j'avais admis leur preuve voulant que le second tube soit un traceur de sillon à houe étroit, il m'aurait été loisible de conclure que l'invention était évidente par rapport à l'état antérieur de la technique. Dans le même ordre d'idées, la mention par M. Schaaf du fait que la mise en place de la semence et de l'engrais et le tassement au moyen d'un seul assemblage démontre l'inventivité nous ramène à la revendication 19 dans laquelle aucune roue de tassement n'est revendiquée. Autrement dit, la preuve relative à l'élément inventif de l'invention pose des problèmes.
[290] L'état antérieur de la technique a été présenté à la Cour au moyen de l'affidavit de M. Anderson. En examinant l'état antérieur de la technique, je n'essaie pas d'appliquer les revendications du brevet aux dispositifs identifiés comme visés par l'antériorité. J'essaie d'établir l'état de la technologie du point de vue de la personne versée dans l'art afin de déterminer si cette personne, ne possédant aucune étincelle d'esprit inventif, en arriverait à l'invention. Compte tenu de ce qui a été dit à propos de l'invention Halford, je me propose de concentrer mes efforts sur la mise en place de la semence et de l'engrais à des endroits distincts, sur le traceur de sillon unique et sur le tassement.
[291] Le premier brevet mentionné par M. Anderson est le brevet américain no 2 357 760 (le brevet Peacock). Selon M. Anderson, ce brevet divulgue [traduction] * une paire de bras pivotant autour du premier couteau entre lesquels sont fixés le tube d'ensemencement et la roue de tassement, les bras étant inclinés pour entrer en contact avec le sol au moyen d'un ressort, correspondant exactement à la disposition mécanique du dispositif Halford + (paragraphe 69). De plus, le brevet Peacock décrit [traduction] * une roue tasseuse fixée sur un bras pivotant qui contrôle la profondeur de mise en place de la semence et tasse la terre au-dessus de la semence + (paragraphe 70).
[292] Je reconnais que l'élément de fixation unique auquel sont fixés une roue de tassement et un outil d'ensemencement de manière à pivoter par rapport à l'outil de traçage de sillon se retrouve dans le brevet Peacock. Ce brevet enseigne aussi le concept de roue de tassement qui contrôle la profondeur de mise en place de la semence. Les critiques formulées par M. Schaaf au paragraphe 47 de son affidavit n'y changent rien et rien dans le contre-interrogatoire ne vient modifier cette description de l'invention donnée dans le brevet Peacock.
[293] Le brevet suivant est le brevet américain no 4 116 140 délivré à Anderson et Neukom le 26 septembre 1978 et cédé à Haybuster Manufacturing, Inc. (le brevet Haybuster). L'abrégé décrit l'invention comme étant [traduction] * un contrôleur de profondeur pour semoirs à grains, semoirs ou dispositifs semblables qui utilisent une roue tasseuse ajustable pour contrôler la profondeur de chaque traceur de sillon individuel afin d'assurer une profondeur uniforme de plantation sur toute la largeur des larges machines utilisées actuellement +. Je remarque que chaque assemblage est formé d'un traceur de sillon qui dépose à lui seul la semence et l'engrais et dont la profondeur est contrôlée par une roue de tassement inclinée par ressort. Pour ce qui est de la fonction de tassement, on peut lire ce qui suit aux colonnes 3 et 4 :
[traduction] Les figures (1) et (3) montrent deux différentes profondeurs de contrôle dans deux différents types de sol ou conditions d'utilisation. À la figure (1), la roue de tassement est placée de manière que le bord inférieur de la roue de tassement 45 se trouve en fait sous le bord inférieur du disque 33, et dans un sol meuble, les disques 33 creuseront un sillon 34 tandis que la roue tasseuse 45 s'enfoncera dans le sol et couvrira la semence en se déplaçant. Une très petite tension de ressort est requise dans cette configuration ou condition et le dispositif qui exerce la force de ressort sera ajusté pour fournir uniquement une légère pression.
Cependant, dans un sol dur, comme par exemple lorsque le sol est relativement sec et que des méthodes de culture à labourage minimal sont utilisées, la roue tasseuse 45 peut être ajustée de manière à rouler essentiellement sur le dessus du sol pour couvrir la semence, et les disques 33 peuvent être poussés vers le bas en augmentant la pression sur le ressort 25 jusqu'à une positon où les traceurs de sillon creuseront un sillon 34A suffisamment profond pour bien planter la semence.
[294] Ces paragraphes démontrent que la roue tasseuse peut rouler à l'intérieur du sillon ou sur le sillon. Ils montrent aussi que l'invention peut être utilisée pour la culture à labourage minimal. Les experts des demandeurs n'ont pas contesté la présence de ces éléments dans le brevet Haybuster.
[295] Le brevet suivant auquel M. Anderson fait référence est le brevet américain no 4 417 530 délivré à Ivyl Kopecky le 29 novembre 1983 (le brevet Kopecky). L'abrégé décrit l'invention comme suit :
[traduction] Un dispositif servant à planter de la semence et à répandre de l'engrais comportant un cadre conçu pour être déplacé sur le sol et une tige de traçage de sillon fixée au cadre. Un premier tube de distribution, pour engrais, est fourni dans la tige, et comporte une extrémité inférieure placée à un premier niveau prédéterminé sous le sol. Un second tube de distribution, pour la semence, est aussi fourni et comporte une extrémité inférieure placée à un deuxième niveau prédéterminé moins profond. Le second tube est placé derrière le premier tube en fonction du sens du déplacement. La terre a tendance à retomber autour de l'engrais lorsque la tige se déplace. Cela fournit un lit de semence qui sépare la semence de l'engrais. Une roue de tassement est fixée au cadre et suit le second tube de chaque tige. La roue de tassement tasse le sol après la distribution du matériau sur le sol et règle aussi la profondeur de la tige.
[296] Plusieurs caractéristiques du brevet Halford se retrouvent dans cette invention : l'utilisation d'un traceur de sillon unique, le dépôt de la semence et de l'engrais en un passage avec une séparation prédéterminée, le déplacement de la terre dans l'espace entre l'ouverture de fertilisation et l'ouverture d'ensemencement de manière à créer un lit pour la semence, la distribution de la semence au moyen d'un tube et une roue de tassement qui ajuste la profondeur.
[297] Le brevet suivant mentionné par M. Anderson est le brevet canadien no 638 550 délivré le 20 mars 1962 à Van Dorn (le brevet Van Dorn). Au paragraphe 77 de son affidavit, M. Anderson décrit l'invention comme suit :
[traduction] [...] Il décrit une invention qui permet de planter et de fertiliser un champ en un seul passage, c.-à-d. un semoir à labourage minimal. Cette invention enseigne clairement le concept qui vise à déposer la semence bien à l'arrière de l'engrais après que la terre meuble soit amenée à * retomber dans le sillon +. Les systèmes de distribution de l'engrais et de la semence sont suivis d'une roue de tassement qui * sert à comprimer la terre au-dessus de la semence et agit aussi comme contrôleur de la profondeur pour le traceur de sillon. Ces éléments d'ensemencement sont classiques et bien connus dans les semoirs à grains. [...]
[298] En fait, le corps du brevet Van Dorn indique clairement qu'il traite expressément des problèmes d'érosion du sol et qu'il est destiné à la culture à labour minimal. Il traite aussi expressément de l'espacement entre les ouvertures de distribution d'engrais et de semence :
[traduction] La figure 3 montre approximativement l'espacement horizontal adéquat des becs verseurs d'engrais et de semence par rapport à la lame 12 [outil de traçage de sillon] pour une vitesse de déplacement approximative de 3 mi/h. L'échelle des dessins est telle que le point de distribution de la semence 58 est à environ 10 pouces derrière le bec verseur 28 [bec verseur d'engrais]. [...]
Colonne 3, lignes 49 à 54.
[299] Ces brevets enseignent tous les éléments des revendications Halford en litige dans la présente instance, sauf la mise en place de la semence à côté de l'engrais au moyen d'un tube qui peut être ajusté latéralement.
[300] On retrouve tous les autres éléments du brevet Halford, y compris l'espacement essentiel entre les tubes d'ensemencement et de fertilisation, dans l'état antérieur de la technique. Est-ce que l'absence de l'ajustement latéral du tube d'ensemencement dans l'état antérieur de la technique permet de conclure que l'invention n'est pas évidente? L'ajustement latéral du tube d'ensemencement est important en ce sens qu'il permet la culture en bandes latérales. On parle de la culture en bandes latérales, même si l'expression n'est pas utilisée dans le mémoire descriptif lorsqu'il est question, à la page 14 du brevet, de la semence qui sort par la paroi latérale de la fente.
[301] Les décisions faisant autorité citées par les demandeurs sur la question de l'évidence démontrent clairement que l'évidence fait appel à plus qu'une évaluation a posteriori. Bayer Aktingesellschaft et al. c. Apotex Inc. (1965), 60 C.P.R. (3d) 58 (Div. gén. Ont.), à la page 81. Les conclusions relatives à l'évidence ne peuvent dépendre du fait que la personne versée dans l'art fait preuve d'inventivité ou d'imagination. Par définition, elle manque d'inventivité et d'imagination. Beloit Canada Ltd., précité, à la page 294. Le critère applicable à l'évidence est énoncé succinctement dans Procter & Gamble Co. c. Beecham Canada Ltd. (C.A.F.), (1982) 61 C.P.R. (2d) 1:
La question est de savoir si, à l'époque de l'invention [...] un technicien qualifié mais peu imaginatif, se fondant sur ses connaissances générales, sur ce qui avait été écrit dans le domaine et sur les renseignements qu'il avait à sa disposition, aurait été amené directement et sans aucune difficulté à l'invention. [...]
[302] Dans leurs conclusions finales, les demandeurs se fondent sur la preuve présentée par John Harapiak, qui dit qu'à ses yeux, l'invention Halford n'était pas évidente. Je ne puis trouver cette preuve ni dans l'affidavit ni dans le témoignage de M. Harapiak. Les demandeurs se fondent aussi sur la preuve soumise par Kenneth Domier, qui dit qu'aucune machine d'ensemencement direct en un passage ne permet d'obtenir un bon emplacement de l'engrais et de la semence. Je ne dispose d'aucun élément de preuve montrant que l'invention décrite dans le brevet permet de fait d'obtenir un emplacement adéquat de la semence et de l'engrais.
[303] Les défendeurs Seed Hawk ont le fardeau de démontrer que l'invention décrite dans le brevet Halford est évidente. Après avoir examiné l'état antérieur de la technique, je ne puis conclure que le technicien qualifié mais peu imaginatif serait amené directement et sans aucune difficulté à l'invention à partir des éléments de la mosaïque de l'état antérieur de la technique. Il faudrait une étape inventive pour concevoir un outil d'ensemencement ajustable d'un côté à l'autre permettant un ensemencement en bandes latérales. Je conclus donc que le brevet n'est pas invalide pour cause d'évidence.
[304] La conclusion de M. Anderson relativement à l'évidence était basée sur son évaluation des éléments de la machine Victoria. Le dispositif Victoria utilise un second traceur de sillon à l'avant du tube d'ensemencement. Il fixe le couteau et le tube de fertilisation, le couteau et le tube d'ensemencement et la roue de tassement à un élément de fixation unique. Aucun de ces éléments n'est enseigné dans l'invention décrite dans le brevet Halford. Par conséquent, je ne peux être d'accord avec les conclusions de M. Anderson voulant qu'un technicien qualifié, qui examine le dispositif Victoria et les brevets mentionnés, serait mené directement et sans aucune difficulté à l'invention décrite dans le brevet Halford. Sur la foi des éléments de preuve qui m'ont été fournis, je ne pourrais pas arriver à une telle conclusion, sauf au moyen d'une évaluation a posteriori.
[305] Cependant, si le brevet Halford est interprété de manière à inclure un élément de fixation unique pour l'ensemble de fertilisation, l'ensemble d'ensemencement et la roue de tassement, la question de l'évidence devient alors beaucoup plus difficile. Cependant, je remarque que le couteau d'ensemencement du dispositif Victoria peut se déplacer latéralement, mais non d'un côté à l'autre selon le sens donné à cette expression dans le brevet. À cette fin, le technicien qualifié devrait penser à quelque chose qui n'est pas présent dans l'état antérieur de la technique pour en arriver à l'invention Halford. Je conclus donc que même si le brevet Halford était soumis à une interprétation large, l'invention Halford n'est toujours pas évidente à la lumière du dispositif Victoria.
[306] Je conclus, selon mon interprétation du brevet Halford, que l'invention qu'il décrit et revendique n'est pas évidente. Elle n'est pas évidente parce que l'état antérieur de la technique n'inclut pas un semoir avec un outil d'ensemencement ajustable d'un côté et de l'autre. Tous les autres éléments de l'invention Halford se trouvent dans l'état antérieur de la technique. Cependant, si l'interprétation de l'invention Halford proposée par les experts des demandeurs relativement à la contrefaçon est adoptée, le brevet Halford ne décrira toujours pas une invention qui était évidente à l'époque pertinente. Par conséquent, le brevet Halford n'est pas invalide pour cause d'évidence.
ANTÉRIORITÉ
[307] La discussion du dispositif Victoria a mené à l'examen de l'antériorité. L'antériorité par publication est très bien décrite par le juge Hugessen dans l'arrêtBeloit Canada Ltd., précité, à la page 297 :
On se souviendra que celui qui allègue l'antériorité, ou absence de nouveauté, prétend que l'invention était connue du public avant la date pertinente. L'enquête porte sur l'invention litigieuse elle-même et non, comme dans le cas de l'évidence, sur l'état de la technique et des connaissances générales. De plus, ainsi qu'il ressort du passage précité de la Loi, l'antériorité doit se trouver dans un brevet particulier ou dans un autre document publié; il ne suffit pas de recueillir des renseignements à partir de diverses publications antérieures et de les ajouter les uns aux autres et d'en arriver à l'invention revendiquée. Il faut en effet pouvoir s'en remettre à une seule publication antérieure et y trouver tous les renseignements nécessaires, en pratique, à la production de l'invention revendiquée sans l'exercice de quelque génie inventif. Les instructions contenues dans la publication antérieure doivent être d'une clarté telle qu'une personne au fait de l'art qui en prend connaissance et s'y conforme arrivera infailliblement à l'invention revendiquée. Lorsque, comme c'est le cas ici, l'invention consiste en une combinaison de plusieurs éléments connus, une publication qui ne révèle pas la combinaison de tous ces éléments ne peut avoir un caractère d'antériorité.
[308] L'antériorité peut aussi être le résultat d'une utilisation ou d'une vente antérieure. Il y a plusieurs réserves à apporter au sujet du type de divulgation publique qui est suffisant pour constituer une antériorité, et cette question est examinée avec soin dans Baker Petrolite Corp. c. Canwell Enviro-Industries Ltd. (C.A.), [2003] 1 C.F. 49, 2002 CAF 158.
[309] L'argument voulant que les dispositifs mis au point par le Dr Heinonen et son équipe à l'Université suédoise d'agronomie, le Victoria et le Kamelin, (* les dispositifs suédois +) antériorisent l'invention Halford est fondé sur la prémisse selon laquelle le brevet Halford peut s'appliquer au dispositif Seed Hawk. Ainsi, le paragraphe introductif des observations écrites des défendeurs Seed Hawk sur ce point se lit comme suit :
[traduction] 503. Les défendeurs Seed Hawk, dans l'éventualité où les revendications seraient soumises à une interprétation large, énoncent que les revendications 1, 2, 3, 6, 10, 12, 19 et 20 du brevet Halford sont invalides pour les raisons suivantes :
i) les revendications susmentionnées sont toutes antériorisées en vertu de l'alinéa 27(1)a) de la Loi sur les brevets parce que les dispositifs suivants étaient déjà utilisés de manière à être à la disposition du public, nommément :
- utilisation publique du dispositif Victoria en Suède, de 1966 à 1979,
- utilisation publique du dispositif Kamelin en Suède, de 1961 à 1963;
ii) les revendications susmentionnées sont antériorisées en vertu de l'alinéa 27(1)b) de la Loi sur les brevets parce que l'objet a été divulgué dans les publications antérieures suivantes, nommément :
* Fertilizer Placement for Small Grains +, rédigé par le Dr Reijo Heinonen et publié au Canada en 1978 (pièce 66)
* The Chisel-Planter Minimum Tillage System +, rédigé par C.L. Peterson, publié au Canada en 1982 (pièce 133)
* Problems in Soil Cultivation +, rédigé par Ake Huhtapalo, publié en juin 1966 (pièce 134)
iii) les revendications susmentionnées sont antériorisées parce que l'objet était déjà connu et divulgué au moyen de présentations au public de manière à être à la disposition du public, ces présentations étant :
- Présentation par le Dr Reijo Heinonen de son document * Fertilizer Placement for Small Grains + à Winnipeg, Saskatoon et Edmonton, Canada, en avril 1978 (pièce 66).
[Non souligné dans l'original.]
[310] Puisque j'ai rejeté l'interprétation large du brevet Halford qui sous-tend cet argument, il n'est pas nécessaire que je tienne compte de cette question. Pour résumer, je dirais que les dispositifs suédois n'antériorisent pas l'invention Halford, et ce, pour les raisons suivantes :
1) les dispositifs suédois fixent l'outil de fertilisation, l'outil d'ensemencement et la roue de tassement sur un élément simple tandis que le brevet Halford enseigne que l'outil de fertilisation est fixé au cadre et que l'outil d'ensemencement et la roue de tassement sont fixés à un élément de fixation unique qui est fixé de manière à pivoter par rapport au couteau de fertilisation;
2) les dispositifs suédois utilisent un couteau de traçage de sillon et un tube de distribution pour chaque matériau tandis que le brevet Halford enseigne l'utilisation d'un dispositif de traçage de sillon, le second matériau étant distribué dans ce même sillon uniquement par un second tube;
3) les dispositifs suédois prévoient le passage de la roue de tassement sur le sillon plutôt que dans le sillon.
[311] Étant donné ces distinctions, il est difficile de voir comment l'invention Halford aurait pu être antériorisée par les dispositifs suédois.
INSUFFISANCE DE L'EXPOSÉ
[312] Les défendeurs Seed Hawk prétendent que chacune des revendications du brevet est invalide parce que l'exposé n'enseigne pas certains éléments qui sont jugés essentiels à l'invention. En particulier, les défendeurs Seed Hawk signalent l'absence de divulgation concernant la capacité revendiquée de la roue de tassement de guider le second tube.
[313] Les revendications ne traitent pas toutes de la capacité de guidage de la roue de tassement. La revendication 1 n'en fait pas mention, ni aucune des revendications qui en dépendent. Il en va de même pour la revendication 19 qui ne mentionne même pas la roue de tassement. Par contre, les revendications 12 et 20 font état de la fonction de guidage de la roue de tassement.
[314] Le mémoire descriptif parle des avantages des roues de tassement moulées de manière à tourner, un des avantages étant qu'elles peuvent suivre le sillon lorsque la machine ne se déplace pas tout à fait en ligne droite, par exemple dans un virage (brevet, à la page 20). Les éléments de preuve précisent que l'effet de guidage de la roue de tassement ne se produit pas dans les virages, mais plutôt dans les situations où le cadre est soumis à des forces latérales, par exemple dans le cas du labourage dans une pente ou dans des courbes légères, à cause de l'ondulation du terrain (transcription, 19 juin 2002, aux pages 2909 à 2911). Monsieur Schaaf a préféré qualifier cet effet comme étant une [traduction] * stabilisation + plutôt qu'un [traduction] * guidage +. Le docteur Tessier a témoigné que le fait que la roue de tassement entre dans le sillon servait à [traduction] * guider l'emplacement dans le sillon de l'outil d'ensemencement + (transcription, 25 octobre 2001, à la page 1304) et à forcer le semoir à [traduction] * suivre pour ainsi dire derrière le tracteur + (transcription, idem, à la page 1305). Par contre, M. Anderson a contesté cela en faisant remarquer qu'il n'y avait aucune articulation entre la roue de tassement et le tube d'ensemencement pour que la roue de tassement puisse guider son trajet. L'outil ne peut que suivre (transcription, 3 février 2003, à la page 4339).
[315] À mon avis, il n'y a aucune anomalie dans l'exposé relativement à l'élément de guidage. Le contexte dans lequel le terme est utilisé dans le brevet et le témoignage des experts des demandeurs me persuadent que * guidage + fait référence à une tendance à conserver le tube d'ensemencement à l'intérieur du sillon en résistant à des forces latérales. Le mémoire descriptif fait un lien clair entre l'effet de guidage et le fait que la roue de tassement suit dans le sillon. À mon avis, il s'agit d'un exposé suffisant pour soutenir l'effet de guidage revendiqué dans les revendications 12 et 20.
CONCLUSION RELATIVE À L'INVALIDITÉ
[316] En fin de compte, je conclus que les défendeurs Seed Hawk n'ont pas réussi à établir l'invalidité ou n'ont pas réussi à faire valoir les motifs d'invalidité qu'ils pouvaient prouver.
RESPONSABILITÉ PERSONNELLE DES DÉFENDEURS
Pat Beaujot, Norbert Beaujot et Brian Kent
[317] Les défendeurs ont déposé une réclamation contre Pat Beaujot, Norbert Beaujot et Brian Kent en alléguant que leur participation aux actes de contrefaçon commis par la personne morale défenderesse Seed Hawk Inc. les expose à une responsabilité personnelle. Compte tenu de mes conclusions sur l'absence de contrefaçon par le dispositif Seed Hawk, cette question ne se pose pas. Cependant, comme je suis conscient des possibilités d'erreur, je me propose maintenant de traiter de cette question comme si j'avais conclu qu'il y avait contrefaçon.
[318] Étant donné que cette question est soulevée de manière subsidiaire, je me propose de procéder d'une manière plus sommaire que je ne le ferais dans d'autres circonstances. Les demandeurs veulent établir la responsabilité personnelle de chacun des défendeurs individuels Seed Hawk sur les bases suivantes :
- La personne morale défenderesse a été constituée dans le seul but de produire les dispositifs qui, à ces fins, sont réputés constituer une contrefaçon (aux paragraphes 717 et 776 des conclusions finales des demandeurs; sauf indication contraire, tous les paragraphes mentionnés renvoient aux conclusions finales des demandeurs);
- Les défendeurs individuels ont expressément ordonné et encouragé la perpétration de l'acte de contrefaçon (au paragraphe 720);
- Les défendeurs individuels, et en particulier Norbert Beaujot, connaissaient le brevet Halford aux premières étapes de mise au point du dispositif Seed Hawk (aux paragraphes 729 à 731);
- Norbert Beaujot a été informé des problèmes possibles de contrefaçon par Joe Willmott dès le 17 janvier 1992 (au paragraphe 751);
- Norbert Beaujot a été averti par les représentants du Prairie Agricultural Machinery Institute (P.A.M.I.), en février 1992, que le dispositif qu'il proposait pouvait constituer une contrefaçon du brevet Halford, ou même, qu'il constituait une contrefaçon du brevet Halford (aux paragraphes 761 et 762);
- Après avoir effectué une recherche de brevets, Joe Willmott a averti Norbert Beaujot que son concept était [traduction] * très près + de celui du brevet Halford (au paragraphe 765);
- Une évaluation technique préliminaire préparée par le P.A.M.I. renvoyait à plusieurs similitudes entre le brevet Halford et le concept de Norbert Beaujot (au paragraphe 767);
- Les défendeurs individuels ainsi que la personne morale défenderesse ont reçu une lettre de cesser et de s'abstenir, envoyée par les représentants des demandeurs, le 24 juillet 1992 ou vers cette date et le 8 mars 1993;
- Les défendeurs individuels ont été avertis des possibilités de contrefaçon par leur propre avocat. Les parties importantes de cette lettre sont les suivantes :
[traduction]
87981
Le 2 septembre 1992
CO N F I D E N T I E L
M. Pat Beaujot, P. Ag.
Seed Hawk Inc.
C.P. 123
LANGBANK (Saskatchewan)
SOG 2X0
Pat,
Suite à vos instructions, j'ai examiné tout le matériel fourni et je vous écris pour vous donner mon opinion sur la contrefaçon du brevet canadien Halford 1 239 835 par l'appareil Seed Hawk.
J'avais évalué le travail à 1 500 $ avant de commencer. J'ai travaillé plusieurs heures sur le dossier pour une valeur de 3 867,50 $ et je vous envoie une facture de 2 500 $ - si cela pose problème, prière de m'appeler.
Puisque j'ai déjà passé les documents en revue avec vous par téléphone, je me propose d'être bref, de façon à réduire les coûts au minimum.
Les questions sont très difficiles à évaluer. Mon point de vue est le suivant :
(1) Si Halford devait engager des procédures, il est possible que Halford soit considéré par la Cour fédérale comme un inventeur * pionnier + qui a travaillé sans aucune aide pendant plusieurs années pour produire une machine acceptable. Vous pourriez être considérés comme des contrefacteurs qui ont pris la teneur de son invention et qui l'ont améliorée;
Ainsi, la Cour pourrait bien sympathiser avec la situation de Halford et il se peut qu'elle soit prête à faire abstraction de certaines des énonciations et des omissions dans ses revendications, pour les déclarer valides et contrefaites;
(2) L'état antérieur de la technique est assurément rapproché et pertinent. J'ai joint, à titre d'information, mes notes sur les anciens brevets qui sont selon moi les plus pertinents;
(3) Mon opinion préliminaire est que Halford a créé une invention brevetable et que vous avez incorporé cette invention dans votre machine;
(4) Sauf pour la revendication 19, les revendications de Halford, interprétées strictement, ne sont pas contrefaites par votre machine et la revendication 19 est peut-être invalide;
Somme toute, il me semble que le brevet Halford devrait être traité avec prudence et respect. Si vous pouvez obtenir une licence à des conditions raisonnables, je vous recommande de prendre les mesures pour l'obtenir. Cependant, s'il n'est pas raisonnable, alors il y a certains motifs soutenables permettant de considérer que votre appareil ne constitue pas une contrefaçon ou que la revendication 19 est invalide, et de procéder à la fabrication (même si je considère que cette solution devrait être adoptée en dernier recours et qu'elle comporte des risques financiers réels).
Je veux souligner qu'il s'agit de mon point de vue préliminaire. Les opinions sur la validité et la contrefaçon peuvent varier parce qu'à mesure que l'on avance vers un litige, d'autres références à l'état antérieur de la technique peuvent être découvertes ou d'anciens dispositifs peuvent se présenter et les renseignements qu'ils contiennent peuvent me faire changer d'idée. Laissez-moi m'expliquer. Nous pourrions, par exemple, effectuer des recherches approfondies sur l'état antérieur de la technique et trouver un ancien catalogue de machinerie qui antériorise une revendication de Halford ou nous amène à conclure que la revendication Halford devrait être interprétée de façon rigoureuse et limitée à exactement ce que les mots de la revendication précisent. Ou bien, vous pourriez déterminer d'une façon concluante que votre tube d'ensemencement peut fonctionner entièrement à l'extérieur du premier sillon. Donc les points de vue que je donne ici sont basés sur les documents présentement dans le dossier.
D'après moi, il est clair que l'état antérieur de la technique enseignait ou divulguait ce qui suit :
- Le concept de la méthode de creuser un profond premier sillon avec un traceur de sillon (comme un disque), de déposer de l'engrais dans le sillon au moyen d'un tube qui suit d'une façon très rapprochée, de creuser un second sillon moins profond décalé sur le côté avec un moyen comme un disque, de déplacer la terre dans le premier sillon pour couvrir l'engrais, de déposer la semence dans le second sillon à travers un tube et de tasser la semence ou de la couvrir de terre, de manière que l'engrais et la semence soient près l'un de l'autre mais non en contact, l'engrais étant plus profond et la semence moins profonde, les deux étant couverts de terre et la terre sur la semence étant tassée (Shriver et Morrison);
- Appareil pour appliquer la méthode comprenant :
- un cadre portant des trémies d'engrais et de semence qui peuvent fournir le matériau de manière pneumatique à travers des tubes;
- un réseau linéaire formé d'un semoir d'engrais suivi d'un semoir de semence espacé vers l'arrière qui est fixé au semoir d'engrais de manière à pivoter et qui peut être incliné vers le bas pour enfoncer le semoir de semence fermement dans le sol et contrôler la profondeur de la mise en place de la semence avec une roue de tassement ou de jaugeage de profondeur (Main, Morrison, O'Neil);
- dans lequel le semoir d'engrais peut être un traceur de sillon relativement étroit (p. ex. cultivateur sous-soleur (Main), disque (Shriver) ou ce qui me semble être un couteau (Morrison)) qui supporte le tube de fertilisation sur sa surface arrière;
- et sur lequel le semoir de semence comprend un moyen de former un second sillon décalé sur le côté, un tube d'ensemencement placé vers l'arrière et suivi d'une roue de tassement inclinée vers le bas.
Il me semble que les composants ou moyens, l'architecture (emplacement des pièces, relation entre les pièces) et la méthodologie de l'état antérieur de la technique sont assurément rapprochés et applicables à ce que Halford a mis au point.
Je vais maintenant expliquer à ma façon ce que Halford a divulgué expressément et ensuite je donnerai mon point de vue sur ce que Halford a * inventé + d'une façon générale.
Le système Halford de la figure 5, d'après moi, comporte :
- Une tige en acier à ressort, fixée au cadre de l'appareil soutenu par des roues;
- Un couteau, fixé de façon rigide à la tige. Le couteau sert à creuser un sillon étroit. Le couteau est essentiellement fixé de façon rigide afin de creuser un sillon à une profondeur constante par rapport à la surface du sol en se déplaçant en même temps que les roues et le cadre;
- Un tube d'épandage ou de mise en place en bandes d'engrais, fixé au couteau et très près derrière celui-ci pour déposer l'engrais dans le sillon qui a été creusé;
- Une poutre de soutien, fixée de manière à pivoter à l'extrémité arrière de la tige. La poutre de soutien comporte une roue de tassement sur son extrémité arrière. Une force de pression peut être exercée de manière souple sur la poutre de manière à faire pivoter, à maintenir et à enfoncer la roue. Un tube d'ensemencement coudé s'étend vers le bas à partir de la poutre et creuse son propre sillon dans la paroi du sillon principal, à une hauteur plus élevée que la base du sillon principal - ainsi le tube d'ensemencement en se déplaçant fait tomber de la terre dans la base du sillon principal pour couvrir l'engrais. Le tube d'ensemencement dépose la semence dans le second sillon. La roue de tassement sert à placer l'extrémité du tube d'ensemencement par rapport à la surface du sol de manière que la profondeur de l'ouverture demeure constante et sert aussi à tasser la terre sur la semence.
Je vais maintenant exposer * l'invention + Halford de la façon dont je la vois en vertu de l'état antérieur de la technique :
- dans le contexte d'un assemblage connu comprenant
- un semoir d'engrais comportant un traceur de sillon et un tube d'épandage en bandes d'engrais qui suit le traceur, et
- un semoir de semence placé vers l'arrière et fixé de manière à pivoter qui peut être incliné vers le bas, ledit semoir de semence comportant un tube d'ensemencement et suivant une roue de tassement (le tube d'ensemencement étant de préférence décalé latéralement par rapport au tube de fertilisation);
- l'amélioration comportant
- le tube d'ensemencement étant fourni seul, sans un traceur de sillon connexe, ledit tube d'ensemencement étant placé de manière à travailler dans le sillon creusé par le traceur de sillon de fertilisation;
- le traceur de sillon de fertilisation étant un * couteau + (qui n'est pas défini dans le brevet) permettant de creuser un sillon étroit, qui permet à la terre de tomber pour couvrir l'engrais avant l'arrivée du tube d'ensemencement;
- le tube d'ensemencement étant enfoncé dans la terre du sillon (de préférence à une position décalée latéralement par rapport à l'axe longitudinal du sillon de fertilisation de manière que le tube d'ensemencement pousse la terre par-dessus l'engrais).
Aucun des brevets antérieurs que j'ai en ma possession ne propose l'invention que je viens de décrire.
La revendication 19 ne correspond pas à l'invention que je viens de décrire parce qu'elle ne parle pas :
- de la roue de tassement (qui d'après moi est nécessaire pour un système fonctionnel);
- du décalage latéral du second tube par rapport au premier tube (qui est nécessaire s'ils doivent déposer les matériaux à différents niveaux et si le tube d'ensemencement doit s'enfoncer dans la terre du sillon).
Cela m'amène à remettre en cause la validité de la revendication 19.
On peut aussi se demander si la revendication 19 est contrefaite par le dispositif Seed Hawk, car la revendication exige que le tube d'ensemencement fasse saillie vers le bas dans le sillon de fertilisation pour s'enfoncer dans la terre du sillon. Je comprends que l'axe du tube d'ensemencement du dispositif Seed Hawk est décalé latéralement d'un pouce par rapport à l'axe longitudinal du pied du sillon de fertilisation - mais il se peut que dans certains cas le tube d'ensemencement s'enfonce dans le bord supérieur de la paroi du sillon de fertilisation.
En résumé :
- la revendication 19 énonce * l'invention + Halford de la façon dont je la conçois;
- la revendication 19 semble être contrefaite;
- et il est impossible d'affirmer d'une façon concluante que la revendication 19 est invalide.
Par conséquent, la revendication 19 fournit de bonnes raisons d'envisager d'obtenir une licence. Cependant, il serait avec raison possible de contester la validité de la revendication, si l'on devait en arriver là, en alléguant qu'elle ne mentionne pas la roue de jaugeage de profondeur/de tassement inclinée nécessaire au fonctionnement. (Cependant, je crois qu'il faudrait effectuer des recherches beaucoup plus approfondies et discuter avant de mettre en oeuvre le deuxième plan d'action.)
Il faut aussi prendre attentivement en considération la revendication 3. La revendication 3 mentionne la roue de tassement, mais elle exige que la roue agisse comme roue tassante * dans le sillon +. Elle exige aussi que le tube d'ensemencement soit décalé latéralement de manière à travailler sur la paroi du sillon de fertilisation. Donc, la revendication 3 est exempte de toute anomalie identifiée relativement à la revendication 19.
Je ne crois pas que la revendication 3 soit évitée parce que le dispositif Seed Hawk n'a pas de caractéristique * d'ajustement d'un côté à l'autre +. D'après moi, la Cour fédérale conclurait que la position fixe décalée latéralement du tube d'ensemencement serait visée par les mots et expressions utilisés dans la revendication (je joins les décisions rendues en première instance et en appel dans l'affaire Computalog qui appuie mon point de vue.)
Je crois que la revendication 3 est dangereuse et constitue une meilleure incitation à obtenir une licence que la revendication 19.
Pour terminer, je vous recommande d'essayer d'obtenir une licence exclusive de Halford à des conditions raisonnables (c.-à-d. meilleures que des conditions constituant une * nuisance +. Si vous n'arrivez pas à vous entendre avec lui, il faudra alors considérer l'étape suivante avec énormément de soin.
Notre compte est joint à la présente.
Veuillez agréer l'expression de nos sentiments les meilleurs,
OCILVIE AND COMPANY
Par :
E. PETER JOHNSON
EPJ:DLM
Ligne directe : 429-6291
Pièces jointes
- Manque de crédibilité des défendeurs individuels; (aux paragraphes 723, 731, 744 à 746, 748, 755, 763, 769, 772, 774, 785, 795 à 797 et 799)
[319] Je dois dire que le témoignage de Norbert Beaujot était loin d'être satisfaisant du point de vue de la crédibilité. Les paragraphes énumérés ci-dessus démontrent des souvenirs imparfaits ou inexacts qui étaient toujours à l'avantage de M. Beaujot. Il donnait l'impression d'une personne convaincue du bien-fondé de sa cause, qui refusait tout simplement d'admettre qu'elle puisse en fait se tromper. J'aborde le témoignage de Norbert Beaujot avec beaucoup de circonspection, et lorsqu'il y a conflit entre son témoignage et celui des autres, je préfère celui des autres. J'ai trouvé que Pat Beaujot était plus digne de foi, mais je ne crois tout simplement pas son témoignage relativement au premier et au second prototype. Un tel témoignage, intéressé et venant trop tard, est tout simplement impossible à croire. Brian Kent n'a pas témoigné, même s'il était un défendeur. En l'absence de toute preuve contraire, je conclus que Brian Kent avait les mêmes connaissances des événements que Pat et Norbert Beaujot.
[320] J'ai trouvé que James Halford était généralement digne de foi, mais qu'il était tout aussi convaincu du bien-fondé de sa position que Norbert Beaujot. Cela étant, certaines parties de son témoignage peuvent avoir été teintées par le préjudice qu'il croyait avoir subi. Par exemple, M. Halford a témoigné que lorsqu'il a été informé que Norbert Beaujot prévoyait construire et peut-être mettre un semoir sur le marché, sa réponse a été d'avertir Norbert Beaujot que s'il copiait son dispositif, il prendrait toutes les mesures possibles, malgré le fait qu'il n'avait absolument aucun renseignement sur le type de semoir que Norbert Beaujot prévoyait construire. Il est possible que M. Halford ait dit cela. Cependant, le fait qu'il n'avait tout simplement aucune raison d'avoir ces préoccupations au moment de la conversation donne à entendre que son souvenir peut avoir été influencé par les événements qui ont suivi. Tout cela pour dire que même si je préfère généralement le témoignage de M. Halford à celui de Norbert ou Pat Beaujot, lorsqu'il y a conflit, j'aborde également le témoignage de M. Halford avec certaines réserves.
[321] Une bonne partie de la cause contre les défendeurs individuels Seed Hawk est basée sur leurs connaissances du brevet Halford et du semoir Conserva Pak. Même si cela a une certaine importance sur le plan de la responsabilité individuelle, il est essentiel de se souvenir que la contrefaçon n'est pas une question d'intention. La contrefaçon peut se produire dans des circonstances où le contrefacteur ignorait complètement l'existence du brevet ou d'une réalisation de l'invention décrite dans le brevet :
J'ajoute que je fais une distinction entre l'intention dont j'ai parlé lorsque j'ai traité de la responsabilité d'une personne à titre d'administrateur et l'intention prise dans son sens global concernant la contrefaçon en général. Ce dernier aspect a été examiné dans Fox, (supra) à la page 381 :
[traduction] [...] L'intention d'un contrefacteur ne compte pas. La contrefaçon est autant le produit de l'ignorance que de la véritable intention. On présume que toute personne est au courant des nouveaux brevets d'invention mais cependant, un brevet d'invention peut être contrefait par une personne ignorante de son existence. Tel qu'il a été déclaré dans Stead v. Anderson, la question de la contrefaçon ne dépend pas de ce que le défendeur a l'intention de faire, mais de ce qu'il fait. Ainsi, dans Young v. Rosenthal, le juge Grove a déclaré : * L'intention ne fait pas partie de la contrefaçon. Un homme peut contrefaire un brevet d'invention tout en ignorant comment il l'a contrefait, puisqu'un breveté peut revendiquer la paternité d'une nouveauté qui en fait n'est pas nouvelle. Mais alors, si ce n'est pas une nouveauté, il doit en subir les conséquences; et si un homme se rend coupable de contrefaçon, il doit en subir les conséquences, qu'il l'ait fait intentionnellement ou non.+
Mentmore Manufacturing Co. Ltd. et al. c. National Merchandise Manufacturing Co. Inc. et al. (1978), 40 C.P.R. (2d) 164, à la page 169 (Mentmore).
[322] Le corollaire de tout cela est que même en présence d'une intention de contrefaire, il n'y a pas nécessairement contrefaçon. C'est ce que le défendeur fait qui est important, et non ce qu'il a l'intention de faire. Par contre, l'intention peut être pertinente quant aux recours disponibles si la contrefaçon est établie.
[323] Par conséquent, la connaissance du semoir Conserva Pak et du brevet Halford n'est pas, à mon avis, pertinente pour ce qui est de la question de la contrefaçon par les défendeurs Seed Hawk, qu'il s'agisse de la personne morale défenderesse ou des défendeurs individuels.
[324] On a tendance à considérer la responsabilité personnelle des administrateurs en matière de contrefaçon comme un aspect du droit des brevets. D'après moi, la question de la responsabilité personnelle des administrateurs d'une société relativement à la contrefaçon par la société n'est qu'un cas particulier de la question plus générale de la responsabilité des administrateurs à l'égard des actes qu'ils ont commis dans le cadre des activités de la société lorsqu'ils exerçaient les fonctions d'administrateur. Un résumé succinct des principes généraux est donné dans la décision rendue par la Cour d'appel de l'Ontario dans Scotia MacLeod Inc. et al. c. Peoples Jewellers Ltd. et al., [1995] 26 O.R. (3d) 481 :
[traduction] D'abord je me propose de faire référence à certaines décisions faisant autorité quant au rôle et à la responsabilité des âmes dirigeantes d'une société en l'absence de législation.
Dans Lennard's Carrying Co. c. Asiatic Petroleum Co., [1915] A.C. 705, à la page 713, [1914-15] All E.R. Rep. 280 (C.L.), le vicomte Haldane pour la Chambre des lords a dit :
[...] une société est une abstraction. Dénuée de corps et d'esprit, sa volonté ne peut se manifester que par l'intermédiaire d'une personne qui, à certaines fins, peut être appelée un mandataire, mais qui est en réalité l'âme dirigeante de ladite société, l'incarnation même de celle-ci. [...] Donc, si M. Lennard était l'âme dirigeante de la société, ses actes doivent, à moins que la société ne soit pas du tout responsable, avoir été des actes de la société elle-même [...] +
Le concept voulant que les administrateurs fusionnent avec la société dans le but de donner à la société une âme dirigeante est souvent appelé * la théorie de l'identification +. Cette théorie a été énoncée par lord Reid dans Tesco Supermarkets Ltd. c. Nattrass, [1972] A.C. 153, à la page 170, [1971] 2 All E.R. 127 (C.L.) :
Une personne vivante a une volonté qui peut avoir une connaissance ou une intention ou être négligente et a des mains pour persévérer dans ses intentions. Une société n'a rien de cela : elle doit agir par l'intermédiaire de personnes vivantes, mais pas toujours une seule personne ou la même personne. Donc, la personne qui agit ne parle pas ou n'agit pas pour le compte de la société. Elle agit en tant que société et sa volonté qui dirige ses actes est la volonté de la société. Il n'est pas question que la société soit responsable du fait d'autrui. Elle n'agit pas comme préposé, représentant ou mandataire. Elle est l'incarnation de la société où elle entend et parle pour ainsi dire par l'entremise de la société, dans sa sphère donnée, et sa volonté est la volonté de la société. S'il s'agit d'une volonté coupable, la culpabilité est la culpabilité de la société. Doit constituer un point de droit la question de savoir si, une fois les faits établis, une personne qui fait certaines choses particulières doit être considérée comme étant la société ou simplement comme un préposé ou un mandataire de la société. Dans ce cas, toute responsabilité de la société ne peut être qu'une responsabilité d'origine législative ou responsabilité du fait d'autrui.
L'envers de la médaille est que la société n'agit pas en tant que mandataire des administrateurs. Même si les administrateurs peuvent être responsables en tant que mandants de la société, le mandat de la société doit être établi et ne sera pas inféré à partir du fait qu'ils sont des administrateurs de la société : voir British Thomson-Houston Co. c. Sterling Accessories Ltd., [1924] 2 Ch. 33, à la page 38, 93 L.J. Ch. 335.
La théorie de l'identification a été adoptée par la Cour suprême du Canada dans des poursuites au criminel pour fournir l'élément de l'intention criminelle qui est absent dans une personne morale mais présent dans la personne ou les personnes physiques qui constituent son âme dirigeante. Dans Canadian Dredge & Dock Co. c. R., [1985] 1 R.C.S. 662, à la page 693, 19 D.L.R. (4th) 314, le juge Estey au nom de la Cour a dit :
Une compagnie n'est qu'une entité constituée par la loi, générale ou spéciale, et ni les lois provinciales relatives aux compagnies et aux sociétés commerciales, ni les lois fédérales dans le même domaine ne parlent de la responsabilité criminelle ou de la responsabilité en common law en général, fondées sur la doctrine de l'identification. Cette doctrine a été conçue par les tribunaux afin qu'il y ait un rapport rationnel entre la responsabilité criminelle d'une personne morale et celle d'une personne physique. La doctrine de l'identification réunit le conseil d'administration, le directeur général, le directeur, le gérant et n'importe quelle autre personne ayant reçu une délégation du conseil d'administration à qui est déléguée l'autorité directrice de la compagnie, et la conduite de l'une quelconque des entités ainsi réunies est alors imputée à ladite compagnie.
Il y a eu beaucoup de discussions dans cette cour et devant le juge des requêtes au sujet de la conduite des administrateurs qui serait suffisante pour faire perdre aux administrateurs leur identité au sein de la société et les exposer à une responsabilité personnelle pour des fautes censément commises par la société. On nous a référés à Mentmore Manufacturing Co. c. National Merchandise Manufacturing Co. (1978), 89 D.L.R. (3d) 195, 22 N.R. 161 (C.A.F.), White Horse Distillers Ltd. c. Gregson Associates Ltd., [1984] R.P.C. 61 (Ch. D.), et d'autres décisions à l'appui de divers critères.
[325] La Cour d'appel a réaffirmé sa position dans Normart Management Ltd. c. West Hill Redevelopment Co. (1998), 37 O.R. (3d) 97, où l'on peut lire ce qui suit à la page 102 :
[traduction] Il est bien établi que les âmes dirigeantes des sociétés ne peuvent être tenues civilement responsables des actes de la société qu'elles contrôlent et dirigent, à moins que la conduite de ces âmes dirigeantes n'ait été délictueuse en soi ou ne démontre une identité ou un intérêt séparé de celui de la société, de façon que les actes ou la conduite reprochés sont ceux des âmes dirigeantes : voir Scotia McLeod Inc. c. Peoples Jewellers Ltd. (1995), 26 O.R. (3d) 481, à la page 491, 129 D.L.R. (4th) 711 (C.A.). Dans la déclaration en appel, il n'y a aucun fondement factuel permettant d'appuyer une allégation que les défendeurs personnels agissaient en une qualité autre que celle d'administrateur ou de dirigeant de la société dont ils étaient l'âme dirigeante.
[326] J'en conclus que les administrateurs et dirigeants d'une société sont personnellement responsables de toute conduite adoptée dans l'exercice de leurs fonctions, si cette conduite en soi est délictueuse ou si elle sert des intérêts autres que ceux de la société. En gardant ce principe à l'esprit, je passe maintenant à l'examen de la décision rendue par la Cour d'appel fédérale dans Mentmore, précité. La question de principe sous-jacente a été énoncée par le juge Le Dain :
La présente affaire soulève une délicate question de principe. D'une part, il y a le principe voulant qu'une société soit distincte, aux yeux de la loi, de ses actionnaires, administrateurs et dirigeants, et l'intérêt des buts commerciaux poursuivis par l'entreprise exige que ces personnes jouissent, en règle générale, du bénéfice de la responsabilité limitée qu'offre la constitution en société. D'autre part, il y a la règle selon laquelle chacun doit répondre de ses actes délictueux. Dans le domaine de la violation de brevet, la conciliation de ces deux principes est particulièrement difficile. En effet, la fabrication et la vente qu'un tribunal tient finalement pour des actes de contrefaçon participent de l'activité commerciale générale d'une société que les administrateurs et dirigeants de celle-ci peuvent être présumés avoir ordonnée ou autorisée, du moins de façon générale. Les questions de validité et de contrefaçon sont souvent fort confuses et leur résolution exige de longs et coûteux procès. Cela rendrait les postes d'administrateur ou de dirigeant principal excessivement hasardeux si le degré d'administration normalement requis en matière de fabrication et de vente dans une société pouvait par lui-même rendre l'administrateur ou le dirigeant personnellement responsable des actes de contrefaçon de sa société.
Il s'agit là d'un principe qui devrait, à mon avis, s'appliquer non seulement à une grande société, mais aussi à une petite société dont les actions sont concentrées en quelques mains. Il n'y a pas de raison pour qu'une petite société à dirigeant unique ou dirigée par deux personnes ne soit régie par des principes de responsabilité différents du seul fait que ses actionnaires et administrateurs jouent généralement, par la force des choses, un rôle direct et actif plus grand dans la gestion des affaires de la société.
[327] La clé de ce passage est la remarque selon laquelle * chacun doit répondre de ses actes délictueux +. Si on lit ce passage d'une façon qui s'harmonise avec les passages précités portant sur l'état du droit en général relativement à la responsabilité des administrateurs et dirigeants, cela donne à entendre que les administrateurs peuvent être tenus personnellement responsables des actes de la société si leur conduite est délictueuse. Le juge Le Dain a poursuivi son analyse :
J'estime que cette opinion est confirmée par la jurisprudence. Il a déjà été jugé que le fait que des défendeurs étaient les deux seuls actionnaires et administrateurs d'une société n'autorisait pas à lui seul à conclure que la société était leur mandataire ou instrument dans la perpétration des actes de contrefaçon, ou qu'ils avaient autorisé ces actes et engagé leur responsabilité personnelle (British Thompson-Houston Co., Ltd. v. Sterling Accessories, Ltd. (1924), 41 R.P.C. 311; Prichard & Constance (Wholesale), Ltd. v. Amata, Ltd. (1924), 42 R.P.C. 63). Il s'ensuit nécessairement, à mon avis, que l'existence des ordres ou autorisations formels requis pour que soit engagée la responsabilité personnelle non seulement ne sera pas déduite du contrôle exercé sur une société, mais ne sera non plus déduite de l'exercice indispensable par ceux qui ont ce contrôle d'un pouvoir général de direction des affaires de celle-ci. Je me vois donc forcé de conclure que c'est à raison que le juge de première instance a décidé que le fait que * Goldenberg et Berkowitz (étaient) à la source des politiques et directives pratiques, commerciales, financières et administratives qui (avaient) finalement résulté dans l'assemblage et la vente de certaines marchandises (de l'inventaire global de National) empiétant ainsi sur les droits du demandeur + ne suffisait pas à donner lieu à leur responsabilité personnelle.
[328] Le simple fait d'exercer le contrôle n'est pas suffisant pour établir une responsabilité personnelle. Cet énoncé soulève la question du type de conduite qui est suffisant pour établir cette responsabilité. Le juge Le Dain exprime ensuite son point de vue :
Mais quand donc la participation aux actes de la société engage-t-elle la responsabilité personnelle? C'est là une délicate question. Il semblerait que ce soit lorsque la nature et l'étendue de la participation personnelle de l'administrateur ou du dirigeant fasse de l'acte délictueux leur acte délictueux. Il s'agit manifestement d'une question de fait qui doit être appréciée à la lumière des circonstances de chaque cas.
[...]
À mon avis, il existe toutefois certainement des circonstances à partir desquelles il y a lieu de conclure que ce que visait l'administrateur ou le dirigeant n'était pas la conduite ordinaire des activités de fabrication et de vente de celle-ci, mais plutôt la commission délibérée d'actes qui étaient de nature à constituer une contrefaçon ou qui reflètent une indifférence à l'égard du risque de contrefaçon. De toute évidence, il est difficile de formuler précisément le critère approprié. Il convient de pouvoir dans chaque cas apprécier toutes les circonstances pour déterminer si celles-ci entraînent la responsabilité personnelle.
Mentmore, précité, aux pages 172 à 174.
[329] Je dois avouer que je ne sais pas très bien ce à quoi le juge Le Dain pensait en mettant en opposition * la commission délibérée d'actes qui étaient de nature à constituer une contrefaçon + et * la conduite ordinaire des activités de fabrication et de vente de celle-ci +. S'il parle d'une conduite de l'administrateur qui entraîne une contrefaçon, sa position est conforme à la teneur générale du droit relativement à la responsabilité de l'administrateur ainsi qu'à ses commentaires antérieurs. Par contre, si le juge Le Dain dit qu'une conduite qui n'entraînerait pas de contrefaçon si elle était attribuée à la société crée une responsabilité personnelle pour contrefaçon si elle est attribuée aux administrateurs, je crois qu'il s'écarte alors du principe.
[330] Il me semble que le principe sous-tendant le commentaire du juge Le Dain est que les tribunaux judiciaires ne permettront pas qu'une société soit utilisée comme instrument de fraude. Un exemple de ce principe, dans le contexte d'opérations garanties, se trouve dans Carson Restaurants International Ltd. c. A-1 United Restaurant Supply Ltd., [1989] 1 W.W.R. 266. Avec égards, je dirais que le juge Le Dain avait un critère similaire à l'esprit en ce qui concerne la responsabilité personnelle des administrateurs lorsqu'il a dit ce qui suit :
Mais quand donc la participation aux actes de la société engage-t-elle la responsabilité personnelle? C'est là une délicate question. Il semblerait que ce soit lorsque la nature et l'étendue de la participation personnelle de l'administrateur ou du dirigeant fasse de l'acte délictueux leur acte délictueux. (À la page 172)
[331] En d'autres termes, il y a responsabilité lorsque les actes de l'administrateur ou du dirigeant sont tels que le comportement de l'administrateur lui-même est délictueux ou lorsque la société sert simplement de masque à l'égard des activités personnelles de l'administrateur. Les deux possibilités sont conformes aux principes généraux régissant la responsabilité personnelle de l'administrateur et du dirigeant et évitent de créer un type de responsabilité personnelle des administrateurs qui est propre à la contrefaçon de brevet.
[332] C'est pourquoi je crois qu'il faut faire preuve de diligence en appliquant un critère fondé sur une * analyse [de] la conduite de la défenderesse [personnelle] aux fins de déterminer si ses activités peuvent être qualifiées de malhonnêtes +, si elle a eu * un comportement trompeur et délibérément insouciant + ou si elle a agi * avec indifférence à l'égard des risques que ces activités comportaient, de sorte que la Cour puisse conclure à sa responsabilité personnelle +. Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique c. 1007442 Ontario Ltd. (2002), 20 C.P.R. (4th) 68 (C.F. 1re inst.). Cela donne à entendre que la responsabilité personnelle des administrateurs dépend de la qualité morale de leur comportement. La malhonnêteté n'est pas digne de mention, mais n'emporte pas nécessairement contrefaçon.
[333] Je me tourne maintenant vers les plaidoiries pour voir ce que les demandeurs ont allégué à l'encontre des défendeurs individuels Seed Hawk :
[traduction] 16. Les défendeurs Pat Beaujot, Norbert Beaujot et Brian Kent étaient, pendant la période pertinente, des dirigeants et administrateurs de Seed Hawk. Cela étant, ils étaient, pendant la période pertinente, en mesure de contrôler les activités de Seed Hawk et ont de fait exercé ce contrôle. Les défendeurs Pat Beaujot, Norbert Beaujot et Brian Kent ont délibérément demandé à Seed Hawk de contrefaire les droits exclusifs des demandeurs et d'inciter d'autres personnes à le faire.
Déclaration modifiée, 14 septembre 1999.
[334] Ce paragraphe révèle deux causes d'action différentes. La première est que les défendeurs individuels ont * délibérément demandé à Seed Hawk d'effectuer la contrefaçon +. La deuxième est que les défendeurs individuels ont incité d'autres personnes à contrefaire les droits des demandeurs. Aucun des faits sur lesquels les demandeurs se fondent n'appuie la deuxième cause d'action.
[335] Pour ce qui est de la première cause d'action, les demandeurs ont simplement invoqué la formule qui se trouve dans Mentmore, précité. Ils n'ont pas allégué de faits précis pour indiquer que la conduite était en soi délictueuse et, à mon avis, n'ont pas non plus prouvé de tels faits. Même s'ils ont allégué, sans toutefois plaider, que la société a été mise sur pied uniquement dans le but de contrefaire leurs droits, la seule chose qu'ils ont prouvée à cet égard se rapporte à l'enchaînement des événements. À mon avis, aucune conclusion ne peut être tirée de l'enchaînement des événements. Il n'y a rien non plus d'intrinsèquement suspect à utiliser une personne morale pour mettre sur pied une nouvelle entreprise. Cette façon de faire comporte de nombreux avantages, y compris la planification fiscale, la répartition des parts et le partage des revenus.
[336] Les demandeurs ont beaucoup insisté sur le fait que d'autres personnes avaient averti les défendeurs individuels de la possibilité de contrefaçon, faisant valoir que leur décision d'aller de l'avant malgré de tels avertissements était une preuve de conduite délibérée. Je ne connais pas de façon plus sûre de mettre un frein à l'innovation que de dire qu'un avertissement de contrefaçon possible est suffisant pour établir une responsabilité personnelle de la part des employés, des administrateurs et des dirigeants de la société. La détermination de la contrefaçon comporte un jugement très complexe auquel des personnes raisonnables peuvent facilement ne pas souscrire. Messieurs Willmott, Hultgren et Leduc croyaient apparemment que le dispositif Seed Hawk contrefaisait l'invention Halford ou [traduction] * se rapprochait + de cette invention. Cette analyse est effectuée * à titre subsidiaire +, parce que j'ai conclu à l'absence de contrefaçon. Il n'y a pas de critère établissant une ligne de démarcation nette pour la contrefaçon, sauf dans le cas d'une copie honteuse. Si un inventeur était forcé d'aller de l'avant au risque d'encourir une responsabilité personnelle simplement parce qu'il a reçu une opinion ou des opinions relativement à la possibilité de contrefaçon, l'innovation serait freinée artificiellement. Les détenteurs de droits existants essaieraient d'intimider les nouveaux venus sur le marché par des menaces de responsabilité personnelle, tandis que ceux qui conseillent les nouveaux venus veilleraient à souligner la possibilité de responsabilité personnelle de crainte d'être poursuivis pour avoir omis d'aviser adéquatement leurs clients.
[337] Est-ce que les conseils que les défendeurs individuels ont reçus de leur avocat, M. Johnston, reposent sur un fondement différent? À mon avis, non. Je crois que les conseils de M. Johnston sont plus nuancés que ce que les demandeurs allèguent. Monsieur Johnston indique le risque de contrefaçon d'une revendication qu'il croit être invalide. Il a averti M. Beaujot qu'il pourrait y avoir un problème de perception qui pourrait influer sur la façon dont le juge conçoit l'affaire. Il fait remarquer des similitudes et des différences entre le dispositif Seed Hawk et le brevet. Je ne vois dans la lettre de M. Johnston aucune assertion claire de contrefaçon, même s'il fait une mise en garde. Cela était à prévoir puisque, à mon avis, les conseillers professionnels sont par nature prudents lorsqu'ils expriment leur opinion étant donné qu'ils peuvent uniquement se faire critiquer pour ne pas avoir décelé de risques et non pour en avoir décelé trop. Ce n'est pas nécessairement faire preuve d'entêtement que d'adopter un point de vue plus agressif que ses conseillers professionnels sur le bien-fondé de sa position.
[338] De plus, je rejette l'idée selon laquelle le dispositif Seed Hawk est simplement une copie et une modification de l'invention Halford. Monsieur Norbert Beaujot est un ingénieur qui a passé énormément de temps à mettre au point le concept de son invention. Il s'agit d'un concept qui, à mon avis, est distinct de celui des demandeurs et supérieur à celui-ci. Le fait qu'il a été capable de mettre sa machine sur le marché plus rapidement que M. Halford peut être attribuable à de nombreux facteurs simples comme de meilleures aptitudes et de plus grandes ressources financières que celles de M. Halford. En disant cela je ne veux pas dénigrer les aptitudes de M. Halford.
[339] Somme toute, je conclus que la preuve à l'encontre des défendeurs individuels montre tout au plus qu'ils ont décidé de prendre un risque en disant qu'ils avaient raison au sujet de la contrefaçon et que M. Halford avait tort. On est loin d'un stratagème délibéré de s'approprier l'invention des demandeurs. Je conclus donc que les défendeurs individuels ne sont pas responsables envers les demandeurs, même s'il est conclu que la société défenderesse a contrefait certaines revendications du brevet Halford. Cependant, je dirai que si j'avais conclu qu'ils étaient personnellement responsables, je rejetterais d'emblée leur plaidoyer voulant qu'ils soient exemptés des conséquences d'une telle conclusion. Ils avaient le droit de prendre le risque qu'ils ont pris. Par contre, s'ils avaient eu tort, ils auraient eu à en subir les conséquences.
SIMPLOT
EST-CE QUE SIMPLOT A INCITÉ À LA CONTREFAÇON OU ENCOURAGÉ LA CONTREFAÇON?
[340] La dernière chose qu'il reste à examiner est la revendication contre le défendeur Simplot pour avoir incité ou encouragé les défendeurs Seed Hawk à contrefaire le brevet des demandeurs. Puisque j'ai conclu à l'absence de contrefaçon, il n'est donc pas nécessaire, strictement parlant, d'examiner cette allégation. Cependant, comme c'est le cas pour la responsabilité personnelle des défendeurs individuels, je vais examiner cette allégation en supposant que la contrefaçon a été prouvée.
[341] Les éléments du délit qui consiste à inciter à la contrefaçon ont été établis par la Cour d'appel fédérale dans Dableh c. Ontario Hydro, [1996] 3 C.F. 751, au paragraphe 43 (demande d'autorisation de pourvoi rejetée, [1996] A.C.S. no 441) :
Cet énoncé ancien a été à peine atténué au fil des ans et il énumère les éléments essentiels d'une action pour incitation à la contrefaçon. Plus récemment, ces éléments ont été confirmés dans l'arrêt Warner-Lambert Co. c. Wilkinson Sword Canada Inc. [(1988), 19 C.P.R. (3d) 402 (C.F. 1re inst.)], par le juge en chef adjoint Jerome, qui a énoncé les critères suivants, à la page 407 :
1) Que l'acte de contrefaçon a été exécuté par le contrefacteur direct [...]
2) Que l'exécution de l'acte de contrefaçon a été influencée par les agissements de l'incitateur. Sans cette influence, la contrefaçon n'aurait pas eu lieu [...]
3) L'influence doit être exercée sciemment par le vendeur, autrement dit le vendeur sait que son influence entraînera l'exécution de l'acte de contrefaçon.
Ce sont là les trois critères auxquels il doit être satisfait dans une action pour incitation à la contrefaçon, et dans chaque espèce, la question de savoir si l'incitation a été prouvée est une question de fait.
[342] Le passage cité par le juge en chef adjoint Jerome est en fait tiré d'un article de François Grenier intitulé * Contributory and/or Induced Patent Infringement + (1987), 4 Canadian Intellectual Property Review 26. Il est bon de noter que toutes les affaires mentionnées par Me Grenier, sauf une, sont des affaires de vente de produits à un tiers qui est reconnu coupable de contrefaçon de brevet. Il s'agit de savoir si l'intermédiaire est responsable d'avoir incité à la rupture de contrat. L'affaire qui ne se rapportait pas à des ventes mettait en cause un appel d'offres, Reading & Bates Construction Co. et al. c. Baker Energy Resources Corp. et al. (1986), 9 C.P.R. (3d) 158, dans laquelle le propriétaire d'un projet avait censément incité à la contrefaçon lorsque le soumissionnaire retenu avait contrefait le brevet des demanderesses. Il s'agit ni plus ni moins d'une vente de service par opposition à une vente de produits, de sorte que les mêmes considérations s'appliquent.
[343] Je fais cette distinction parce qu'il me semble que la question qui est ici en litige est plutôt différente. Il ne s'agit pas d'un cas où Simplot a censément fait le trafic de composants du dispositif breveté, de sorte qu'en achetant les produits de Simplot les clients contrefaisaient le brevet. Il s'agit d'un cas d'accord sans lien de dépendance dans lequel une personne a fourni de l'aide à une autre personne dans le but d'établir sa propre entreprise. Simplot n'a rien vendu à Seed Hawk, et rien de ce que Simplot a vendu aux clients de Seed Hawk ne contrefait le brevet des demandeurs d'aucune façon.
[344] Dans ses observations écrites, Simplot soulève la question de la distinction entre inciter à la contrefaçon et aider et encourager la contrefaçon. Je suis d'accord avec l'observation, au paragraphe 26 des observations écrites, selon laquelle la décision Procter & Gamble Co. c. Bristol-Myers Canada Ltd. (1978), 39 C.P.R. (2d) 145 (C.F. 1re inst.) (Procter & Gamble), qui est fort souvent citée comme faisant autorité pour ce qui est d'aider et d'encourager, ne fait pas la distinction entre aider et encourager et inciter à la contrefaçon. De plus, les décisions subséquentes qui traitent de la question d'aider et d'encourager le font compte tenu des termes employés dans Procter & Gamble, précité. Étant donné qu'il s'agit d'une distinction judiciaire plutôt que d'origine législative, il incombe à ceux qui allèguent l'existence d'un délit actionnable indépendant d'aider et d'encourager la contrefaçon d'établir son existence et ses éléments. Je ne vois rien dans les conclusions finales des demandeurs qui puisse le faire. C'est pourquoi mon examen de la demande présentée contre Simplot est limité à la question d'inciter à la contrefaçon.
[345] Les faits que les demandeurs invoquent à l'appui de la demande contre Simplot sont les suivants :
- Simplot a été mis au courant de l'existence du brevet Halford de différentes façons :
- la présence d'un employé de Simplot à la ferme Halford;
- la présence de Pat Beaujot, un employé de Simplot, à la ferme Halford;
- la suggestion faite par un employé de Simplot, Smith, que M. Halford rencontre Pat Beaujot au Crop Production Show, à Saskatoon, pour discuter de l'adaptation du semoir Conserva-Pak pour qu'il puisse utiliser de l'engrais liquide;
- la rencontre avec Pat Beaujot au Crop Production Show, à Saskatoon, en janvier 1992;
- le contrat par lequel Simplot s'est engagé à fournir 20 000 $ pour financer la mise au point du dispositif Seed Hawk et à fournir de l'aide pour la commercialisation et la promotion du dispositif;
- les différences entre les ententes conclues par Simplot avec d'autres entreprises de développement et celle conclue avec Norbert Beaujot;
- l'attribution de 6 000 $ comme aide à la promotion avant que le dispositif Seed Hawk ait été fabriqué et utilisé;
- la promotion par Simplot du dispositif Seed Hawk dans le cadre de divers événements publics, avant et après avoir reçu un avis de l'avocat des demandeurs;
- la promotion par Simplot du dispositif Seed Hawk d'autres façons après avoir reçu un avis des avocats des demandeurs;
- le fait que Simplot s'est fié aux conseils donnés par les avocats de Seed Hawk relativement à la contrefaçon au lieu de demander lui-même des conseils indépendants;
- la résiliation partielle de l'entente de développement qui a obligé Seed Hawk à fabriquer néanmoins son semoir;
- la nature et l'effet de la publicité de Simplot.
[346] Les plaidoiries des demandeurs contre Simplot sont les suivantes :
[traduction]
17. Simplot s'est appliqué systématiquement, pour son propre bénéfice, à inciter et à aider et encourager Seed Hawk à contrefaire le brevet et, par conséquent, a lui-même contrefait ledit brevet.
18. Les détails de l'incitation, de l'aide et de l'encouragement fournis par Simplot à Seed Hawk pour la contrefaçon du brevet sont notamment :
a) l'apport de fonds par Simplot à Seed Hawk pour la construction de dispositifs contrefaits;
b) la promotion par Simplot des dispositifs contrefaits de Seed Hawk en les incluant dans ses activités promotionnelles, par exemple :
(i) l'illustration du dispositif Seed Hawk dans le journal de Simplot et dans d'autres imprimés publicitaires;
(ii) la présentation et la diffusion de matériel promotionnel du dispositif Seed Hawk dans le stand de Simplot dans des foires agricoles;
(iii) la présentation et la diffusion de matériel promotionnel du dispositif Seed Hawk par l'entremise du réseau de distribution de Simplot.
19. Les activités des défendeurs décrites ci-dessus ont toujours été effectuées sans la permission des demandeurs et ont commencé à l'insu des demandeurs.
[347] À la lumière de ces plaidoiries, il n'est pas nécessaire d'examiner l'effet de la publicité et de la promotion de Simplot. La position des demandeurs sur la commercialisation et la promotion est résumée au paragraphe 702 de leurs conclusions finales :
[traduction]
702. La vente est réellement définie comme un transfert de titre; tout le reste est de la commercialisation. C'est ce que Simplot a fait pour encourager l'achat et l'utilisation des semoirs Seed Hawk. Grâce à ses efforts de commercialisation, Simplot a amené les utilisateurs éventuels des semoirs Seed Hawk à en acheter. Autrement dit, si cela n'avait pas été du programme de publicité de Simplot, les utilisateurs ultimes éventuels n'auraient pas acheté le semoir Seed Hawk. Il est clair qu'une telle conduite constitue une incitation à la contrefaçon.
[348] Il est de droit constant que le monopole accordé par la Loi sur les brevets accorde * le droit, la faculté et le privilège exclusif de fabriquer, construire, exploiter et vendre à d'autres, pour qu'ils l'exploitent, l'objet de l'invention +. À supposer que l'analyse des demandeurs soit correcte, sans toutefois me prononcer sur ce point, cela établit simplement que Simplot a incité les acheteurs des semoirs Seed Hawk à la contrefaçon. Cependant, ses plaidoiries se limitent à des allégations d'incitation à la contrefaçon du brevet des demandeurs par Seed Hawk. Il n'y a aucune mention d'incitation à la contrefaçon par les utilisateurs éventuels des machines. Par conséquent, il n'est pas nécessaire de déterminer si la publicité de Simplot a incité les agriculteurs à acheter le semoir Seed Hawk.
[349] À mon avis, l'allégation des demandeurs relative à l'incitation à la contrefaçon doit être rejetée en ce qui concerne le deuxième élément du critère, c'est-à-dire la preuve que sans l'aide de Simplot, il n'y aurait pas eu contrefaçon. La preuve des demandeurs sur ce point est énoncée comme suit :
[traduction] 697. Il est soutenu que, si cela n'avait pas été de la subvention de 20 000 $ qui a permis la construction du prototype de semoir; si cela n'avait pas été de la présentation, figurative et littérale, du prototype de machine faite * sous la bannière Simplot + au Farm Progress Show de 1992 et si cela n'avait pas été de la promotion continue et de la promesse de promotion du semoir Seed Hawk faite auprès du public et par l'intermédiaire du propre réseau de distribution de Simplot, les Beaujot n'auraient pas eu les moyens d'aller de l'avant avec le projet, et encore moins de réussir. Selon le témoignage de Halford, il lui a fallu près de huit années pour mettre au point un concept efficace de semoir et le perfectionner au moyen de cinq prototypes avant de réussir à le vendre sans aucune aide externe d'une multinationale. D'une manière ou d'une autre, les Beaujot et Brian Kent ont accompli la même chose en quelques mois seulement. Il est soutenu que cela n'aurait pu se produire sans l'aide de Simplot.
Conclusions finales des demandeurs, au paragraphe 697.
[350] Avec égards, cela ne démontre pas que la contrefaçon n'aurait pas eu lieu si cela n'avait été de l'aide fournie à Seed Hawk par Simplot. Cela peut prouver que la contrefaçon ne s'est peut-être pas produite dès 1992, mais cela ne prouve pas que les défendeurs Seed Hawk auraient abandonné leur projet si cela n'avait été de l'aide de Simplot. Cette question a été discutée lors du témoignage de Norbert Beaujot, qui a déclaré qu'il tenait à construire le prototype avant que Simplot ne s'engage à fournir des fonds :
[traduction]
R. La proposition a fondamentalement été faite comme un appât. Je voulais encourager Simplot à soutenir un projet de recherche que je m'étais déjà engagé à faire, mais je ne leur ai pas fourni ces détails à ce moment-là. J'envisageais déjà d'aller de l'avant avec la machine, d'abord, et j'envisageais déjà d'aller de l'avant avec la machine dans la configuration dans laquelle je l'ai construite.
La proposition leur permettait de me faire changer d'idée. J'avais fait plusieurs dessins préliminaires en utilisant des engrais granulaires. J'avais terminé ma conception des traceurs de sillon, et je n'étais pas en mesure de changer d'idée sur ceux-ci. Mais selon la situation que je leur ai présentée, s'ils acceptaient de financer une partie de la recherche, ils pourraient me convaincre d'utiliser un engrais liquide sur le premier appareil plutôt qu'un engrais granulaire. Cela était probablement trompeur, parce que j'avais déjà planifié d'utiliser un liquide. Mais de toute façon, ils ont mordu à l'appât.
Transcription, 21 juin 2002, aux pages 3200 et 3201.
[...]
Q. Merci, Monsieur. Maintenant, Monsieur, à la date de cette entente, le 2 mars 1992, aviez-vous commencé la production du prototype lui-même? La machine que vous construisiez?
R. Je ne sais pas trop si le soudage avait commencé ou s'il était sur le point de commencer. J'avais des commandes antérieures à cette date qui portaient sur la partie du dispositif servant à mesurer la semence.
Q. Et quand ces commandes ont-elles été, je crois que je vais utiliser le mot passées?
R. Elles ont été passées vers le milieu ou la fin du mois de février 1992.
Q. Pour ce qui est du moment où vous avez été avisé par Simplot qu'ils acceptaient de conclure une entente avec vous et qu'ils vous donneraient un chèque, est-ce que c'était avant ou après cela? Avant ou après que les commandes soient passées?
R. Oh, c'était avant cela, oui.
Transcription, 24 juin 2002, aux pages 3364 et 3365.
[...]
Q. Est-ce que vous collaboriez avec Simplot pour construire ce semoir?
R. Non.
Q. Quel a été leur rôle dans la mise au point du semoir, s'ils ont eu un rôle à jouer?
R. Ils n'ont eu aucun rôle à jouer. Je les voyais plutôt comme un B comme un banquier. J'avais essayé d'obtenir une subvention du PARI, mais le PARI n'avait plus de fonds et cela m'a semblé être une façon d'obtenir les fonds qui me permettraient de construire le prototype.
Transcription, 24 juin 2002, aux pages 3365 et 3366.
[...]
Q. D'accord. Maintenant, Monsieur, j'aimerais attirer votre attention sur le chèque de 20 000 $ que vous avez reçu de Simplot. Qu'avez-vous fait avec ces 20 000 $?
R. Ils ont été déposés dans le compte de réserve Beaujot et je les ai utilisés pour acheter du matériel pour le -- pour le prototype de semoir.
Q. Encore une fois, je sais que cela ressemble un peu à ce que je vous ai déjà demandé, mais à part la décision d'utiliser un engrais liquide, est-ce que l'apport de fonds de Simplot de 20 000 $ ainsi que les autres éléments de l'entente du 2 mars ont influé sur la façon dont vous avez construit le semoir?
R. Non. La commande datée de février portait sur le système Valmar et le système Valmar sert au -- sert à la semence et non à l'engrais mais je -- j'avais déjà déterminé la configuration du semoir avant de recevoir les 20 000 $. Il aurait été beaucoup plus compliqué de construire le dispositif de manière à utiliser de l'engrais granulaire à ce moment-là et je n'avais pas le temps de faire mieux que les systèmes d'ensemencement et de fertilisation disponibles sur le marché. J'ai donc utilisé des méthodes qui, pour cette partie du semoir, qui me permettaient d'acheter simplement le Valmar dans le commerce -- dans le commerce étant un peu trompeur je suppose. Il s'agit d'une pièce d'équipement assez grosse, mais je pouvais acheter des ensembles complets de Valmar et il s'agissait d'éléments complets de systèmes de fertilisation liquide. Et je -- en fin de compte je n'essayais pas d'expérimenter avec le système de distribution de la semence ou le -- ou le système de distribution d'engrais liquide. Mes expériences portaient simplement sur le traceur de sillon.
Q. Pour ce qui est des traceurs de sillon, est-ce que les 20 000 $ ou les autres conditions de cette entente vous ont influencé sur la manière dont vous avez construit ces traceurs de sillon?
R. Non, pas du tout.
Transcription, 24 juin 2002, aux pages 3370 à 3372.
[351] Lors du contre-interrogatoire, les renseignements suivants ont été fournis :
[traduction]
Q. D'accord. Vous avez témoigné au sujet de vos discussions avec Joe Willmott de PIMA, est-ce exact?
R. Oui.
Q. Et n'est-il pas vrai que le 5 février 1992 ou vers cette date, vous avez avisé M. Willmott que Simplot avait provisoirement accepté d'investir 20 000 $ dans la mise au point de votre machine?
R. C'est ce qui est écrit dans ses notes. Oui.
Q. Admettez-vous la B
R. Oui j'admets.
Q. -- véracité de ses notes?
R. J'admets que je dois lui avoir donné cette impression.
Le témoignage de M. Beaujot sur ses intentions relativement à la mise au point de son semoir n'a pas été contesté ou ébranlé sauf sur ce point.
[352] Je conclus donc, en me fondant sur le témoignage précité et sur ma compréhension de l'ensemble des témoignages présentés par Norbert Beaujot et Pat Beaujot, que Norbert Beaujot avait l'intention de mettre au point un semoir, et que la démarche entreprise auprès de Simplot servait simplement à atteindre son but. Je suis convaincu qu'il aurait persisté dans ses efforts d'élaborer son concept, même si Simplot ne lui avait pas fourni d'aide financière et d'aide pour la commercialisation. Il est fort possible que l'aide fournie par Simplot ait accéléré l'élaboration de son concept de semoir, mais il n'y a aucune preuve qui permettrait de conclure que si cela n'avait été du contrat signé avec Simplot il aurait abandonné son projet. Et puisque la preuve relative à cette question incombe aux demandeurs, l'absence de preuve est fatale à leur position.
[353] Pour ces motifs, les allégations faites contre Simplot doivent être rejetées.
CONCLUSION
[354] En fin de compte, je conclus que la demande et la demande reconventionnelle doivent être rejetées. Les allégations de contrefaçon n'ont pas été établies, et ce, pour deux raisons, l'absence d'un couteau de fertilisation fixé au cadre et l'utilisation d'un élément de fixation commun à la place des trois éléments clés, construits de manière à ce que les trois éléments se déplacent autour d'un pivot commun, et un tube d'ensemencement qui ne s'enfonce pas dans la terre uniquement par sa surface extérieure. J'ai constaté qu'il y avait d'autres substitutions et variantes, mais je conclus qu'aucune d'entre elles n'est suffisante pour constituer une contrefaçon.
[355] Les contestations relatives à la validité du brevet sont aussi rejetées, mais pour un plus grand nombre de raisons.
[356] La demande contre les défendeurs individuels Seed Hawk est rejetée, puisqu'il n'y a pas eu contrefaçon. Si j'avais conclu qu'il y avait eu contrefaçon, je ne me serais pas prononcé contre les défendeurs individuels, car j'ai conclu qu'aucun de leurs actes n'était en soi de nature délictueuse. De plus, aucune conduite ne donnait à entendre que la société servait à commettre une fraude, ou servait simplement à masquer les activités personnelles des défendeurs individuels.
[357] La demande contre Simplot est aussi rejetée, parce que je n'ai trouvé aucune contrefaçon. Cependant, si je l'avais fait, je conclus qu'il n'y a rien qui indique que les défendeurs Seed Hawk n'auraient pas commis de contrefaçon si ce n'avait été des activités de Simplot.
[358] Les défendeurs ont droit à une ordonnance rejetant la demande, tandis que les demandeurs ont droit à une déclaration de validité des revendications invoquées. Les défendeurs ont droit à leurs frais mais, dans les circonstances, les frais doivent être traités au moyen d'un avis de requête.
[359] Je désire exprimer ma gratitude aux avocats pour l'aide qu'ils m'ont fournie et pour la courtoisie dont ils ont fait preuve au cours de ce procès difficile, qui a été rendu encore plus difficile du fait qu'il s'est étendu sur une période de quatre ans.
ORDONNANCE
Après avoir entendu les témoignages des témoins cités par les parties, et après avoir entendu les observations des avocats au nom des parties, la Cour statue que :
1- Les demandes contre les défendeurs Seed Hawk Inc., Pat Beaujot, Norbert Beaujot, Brian Kent et Simplot Canada Limited, sont rejetées avec dépens, les dépens devant être traités au moyen d'un avis de requête.
2- La demande reconventionnelle contre les défendeurs dans la demande reconventionnelle James Halford et Vale Farms Ltd est rejetée.
* J.D. DENIS PELLETIER +
Juge
Traduction certifiée conforme
Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.
1. Emplacement de l'engrais (1 po en-dessous et 1-1/4 po à côté de la semence)
2. Emplacement de la semence (peu profond par rapport à la surface tassée)
3. Surface tassée
4. Lames en carbure de tungstène
5. Roue de tassement/de jaugeage pneumatique (bon dégagement de la boue)
6. Couteau d'ensemencement (1/2 po de largeur)
7. Tube de descente de semence
8. Couteau de fertilisation (1/2 po de largeur)
9. Plaque de déclenchement
10. Chaîne
11. Boulon de blocage de profondeur
12. Jauge de profondeur (précision de 1/8 po)
13. Support d'accrochage
14. Vérin hydraulique
15. Bras de mise en place
16. Tube de descente d'engrais
17. Boulons en U (au cadre)
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : T-2406-93
INTITULÉ : James W. Halford et Vale Farms Ltd., c. Seed Hawk Inc., Pat Beaujot, Norbert Beaujot, Brian Kent et Simplot Canada Limited.
LIEU DES AUDIENCES : Winnipeg (Manitoba)
DATE DES AUDIENCES : le 6 novembre 2000, reprise le 15 octobre 2001,
reprise le 17 juin 2002, reprise le 3 février 2003
MOTIFS DE L'ORDONNANCE : le juge Pelletier
DATE DES MOTIFS : le 23 janvier 2004
COMPARUTIONS :
Steven Raber POUR LES DEMANDEURS
Dean Giles
Edward Herman
Alexander Macklin POUR LA DÉFENDERESSE - Seed Hawk
Doak Horne
Irene Bridger
Wolfgang Riedel POUR LA DÉFENDERESSE - Simplot
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Fillmore Riley POUR LES DEMANDEURS
1700 Commodity Exchange Tower
360 Main Street
Winnipeg (MB) R3C 3Z3
Gowlings POUR LA DÉFENDERESSE - Seed Hawk
Bureau 1400
700 - 2nd Street S.W.
Calgary (AB) T2P 4V5
Meighen, Haddad & Co. POUR LA DÉFENDERESSE - Simplot
Avocats
C.P. 22105
110 - 11th Street
Brandon (MB) R7A 6Y9