Date : 19980121
Dossier : T-2879-96
Affaire intéressant la Loi sur la citoyenneté,
L.R.C. (1985), ch. C-29;
Et un appel contre la décision d'une
juge de la citoyenneté;
Et:
CHIA HSIUNG CHEN,
appelant.
MOTIFS DU JUGEMENT EN APPEL
Le juge MULDOON
[1] Il y a en l'espèce appel formé par l'appelant et son épouse, simultanément mais chacun de son côté, contre la décision rendue par une juge de la citoyenneté à Toronto le 18 décembre 1996 (dossier no 186152). L'appel formé par l'épouse de l'appelant est enregistré auprès de la Cour sous le numéro T-2876-96. Les deux appels sont entendus à Toronto le 5 janvier 1998 en présence de l'avocat de l'appelant et de l'intervenant bénévole.
[2] Voici ce qu'on peut lire dans les motifs de décision de la juge de la citoyenneté :
Je conclus " que vous remplissez toutes les conditions d'acquisition de la citoyenneté, telles que les prévoit la Loi sur la citoyenneté, sauf la condition de résidence que prévoit l'alinéa 5(1)c) de la même loi comme suit : |
Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui " |
c) a été légalement admise au Canada a titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre " et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout " |
Conformément au paragraphe 15(1) de la Loi sur la citoyenneté, j'ai examiné s'il y avait lieu de recommander l'exercice du pouvoir discrétionnaire prévu aux paragraphes 5(3) et 5(4) de la même loi. |
Le paragraphe 5(3) investit le ministre notamment du pouvoir discrétionnaire d'exempter, pour des raisons d'ordre humanitaire, les personnes frappées d'incapacité, c'est-à-dire les mineurs et les personnes mentalement incapables, de la condition de résidence. |
Le paragraphe 5(4) habilite le gouverneur en conseil à ordonner au ministre d'attribuer la citoyenneté à toute personne qui se trouve dans une situation particulière et inhabituelle de détresse ou qui a rendu des services exceptionnels au Canada. |
Je constate que vous n'êtes ni incapable ni mineur. Par ailleurs, vous n'avez produit aucune preuve qui justifie la recommandation prévue au paragraphe 5(4). |
Conformément au paragraphe 14(3) de la Loi sur la citoyenneté, je vous informe en conséquence que, par les motifs ci-dessus, votre demande n'est pas accueillie. |
[3] Il est remarquable que la juge de la citoyenneté ait conclu que l'appelant remplissait " toutes les conditions d'acquisition de la citoyenneté " (sauf la condition de résidence) alors que l'un et l'autre appelants avaient besoin des services d'une traductrice-interprète pour témoigner devant la Cour le 5 janvier 1998! Bien que la Cour ne mette pas en doute l'intégrité de cette dernière, elle ne peut guère être qualifiée d'interprète " neutre " en ce qu'elle était au service de l'avocat de l'appelant.
[4] Voici le principal motif pris dans l'avis d'appel :
[TRADUCTION]
1. La juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que je ne justifiais pas, par attitude mentale et par les faits, d'une vie centrée au Canada. |
2. La juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que je n'ai pas fait la preuve de ma contribution, matérielle ou morale, au maintien d'un domicile au Canada" |
Pareil motif d'appel n'a malheureusement aucun rapport avec le fond de l'affaire.
[5] L'application en justice de la condition de résidence prévue à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C-29, a été contrariée pendant au moins deux décennies. Pendant tout ce temps, le législateur n'a pas changé une seule fois ce texte de loi qui est demeuré le même, jusqu'à cette date, comme suit :
5.(1) The Minister shall grant citizenship to any person who (a) " (b) " (c) has been lawfully admitted to Canada for permanent residence, has not ceased since such admission to be a permanent resident pursuant to section 24 of the Immigration Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner: (i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and (ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence; |
5.(1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois : a) " b) " c) a été légalement admise au Canada à titre de résident permanent, n'a pas depuis perdu ce titre en application de l'article 24 de la Loi sur l'immigration, et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante : (i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent, (ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent; |
Voilà une disposition qui se range parmi les textes les plus clairs et les plus nets que le législateur ait jamais adoptés.
[6] Le mot " résidence " ou " résidant " a incité certains juges à une certaine interprétation fantaisiste au fil des ans, mais ce mot lui aussi est un mot clair et net. Il ne signifie pas absence, mais présence. Ces deux mots ont le même sens en anglais qu'en français. Il n'y a aucune différence de concept d'une langue à l'autre.
[7] Le dictionnaire Gage Canadian Dictionary, édition remaniée et amplifiée de 1988, donne les définitions suivantes :
reside v. -sided, -siding. 1 live (in or at) for a long time; dwell. 2 be (in); exist (in); Her charm resides in her happy smile. |
residence n. 1 a place where a person lives; house; home. 2 the act of residing; living; dwelling. 3 a period of residing in a place. 4 the fact of living or doing business in a place for the performance of certain duties, to comply with certain regulations, or to qualify for certain rights and privileges: a writer in residence. They have not been in residence long enough to apply for citizenship. 5 a building in which students, nurses, etc. live. |
in residence, a living in a place: The owner of the house is not in residence. b living in an institution while on duty or doing active work there: a doctor in residence. |
resident n., adj. - n. 1 a person living in a place, not a visitor. 2 a physician during residency, especially one who has completed internship. 3 an official sent to live in a foreign land to represent his or her country. 4 formerly, a representative of the British Governor General of India at a native court. 5 a bird or animal that is not migratory. 6 a person living or doing business in a place in order to comply with certain regulations, or qualify for certain rights or privileges. |
-adj. 1 staying; dwelling in a place. A resident owner lives on his or her property. 2 living in a place while on duty or doing active work. 3 not migratory: English sparrows are resident birds. 4 of qualities, present; intrinsic; inherent. 5 of a person, living or doing business in a place in order to comply with certain regulations, or to qualify for certain rights or privileges. |
(p. 1247) |
[8] Le dictionnaire " The Oxford Dictionary of Current English ", 1990, définit de son côté ces mots comme suit :
reside v.i. have one's home or dwell permanently (in specified place); (of power or right etc.) be vested in; (of quality) be present or inherent in |
residence n. residing (take up residence); place where one resides, abode of; house esp. of considerable pretension; in residence dwelling at specified place esp. for performance of duties or work |
resident 1 n. permanent inhabitant (of place); guest of hotel staying overnight. 2a. having quarters on the spot (resident housekeeper); residing in residence; located in (feeling resident in the nerves). |
(p. 635) |
[9] Le Petit Robert - nouvelle édition "mise à jour pour 1998 donne les définitions suivantes :
résidant, ante adj. (résident, 1283; n.m., "habitant", 1415; de résider). Qui réside (en un lieu). V. Habitant. Spécialt. (1846) Membre résidant d'une académie, d'une société savante (opposé à correspondant). |
résidence n.f. (1271; lat. residentia). 1 Séjour effectif et obligatoire en un lieu; obligation de résider. Emploi, charge qui demande résidence. La résidence d'un magistrat, d'un évêque. - Par ext. Durée de ce séjour. Spécialt. Résidence forcée, surveillée (d'une personne astreinte par décision de justice à rester dans un lieu). 2 (1283). Le fait de demeurer habituellement en un lieu; ce lieu. V. Demeure, habitation, séjour. " Durant les cinq ans de ma résidence" " (Baudel.). Avoir, établir, fixer sa résidence quelque part. Changer sa résidence. " Les maisons semblaient être de résidence bourgeoise " (Romains). Résidence virilocale. Dr. Lieu où une personne habite effectivement durant un certain temps (ou a un centre d'affaires, d'activités), sans y avoir nécessairement son domicile. Certificat de résidence. Résidence principale. Cour. (sens 3e) Résidence secondaire: maison de campagne, de vacances ou de week-end. 3 (1840). Lieu construit, généralement luxueux, où l'on réside. V. Demeure, logement, maison. " Plus d'un, en apercevant ces coquettes résidences, si tranquilles, enviait d'en être le propriétaire " (Flaub). Une somptueuse résidence (V. Résidentiel ). " Il reçoit dans cette résidence princière le feuilletonniste d'un de nos grands journaux " (Balz.) (v. 1960) Groupe d'immeubles résidentiels assez luxueux. La Résidence X ... 4 Charge de résident; lieu (ville, bâtiments) où habite un résident, où se tiennent ses services. La Résidence de Rabat (à l'époque du protectorat). |
(p. 1683) |
résider v. intr. (v. 1380); lat. residere). 1 Être établi d'une manière habituelle dans un lieu; y avoir sa résidence (surtout admin., dr. ou didact.) " Les ambassadeurs ... prennent les moeurs du pays où il résident " (Chateaub.). Les étrangers qui résidaient aux États-Unis. 2 Fig. Avoir son siège, exister habituellement, se trouver (dans tel lieu, en telle personne ou telle chose). " Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation " (Déclar. Dr. Hom). " L'ordre idéal des peuples réside dans leur bonheur " (Camus). V. Consister . La difficulté réside en ceci. |
(p. 1684) |
[10] Il ressort des dictionnaires cités ci-dessus que ces mots, en anglais et en français, ont la même origine latine, et qu'ils dénotent le fait de demeurer ou d'habiter en un certain lieu (ou pays), d'y vivre et d'y être présent, et non d'en être absent.
[11] Le législateur se montre-t-il rigide ou insensible en imposant des conditions de résidence à ceux qui demandent la citoyenneté? Il pourrait l'être s'il l'avait voulu, mais il ne semble pas cruel ou rigide dans l'adoption des dispositions susmentionnées de l'article 5 de la Loi.
[12] De prévoir qu'un candidat à la citoyenneté peut s'absenter du Canada une année sur quatre, ou un mois sur quatre, au cours des années précédentes, n'est pas du tout excessivement rigide ou insensible à mon avis. Cette obligation ne fait pas d'un candidat à la citoyenneté un " prisonnier " au Canada. Ce qu'elle signifie, c'est que quiconque demande la citoyenneté doit y être prêt, et doit prendre sa demande suffisamment au sérieux pour s'astreindre à quelque petit sacrifice en échange de l'acquisition de la citoyenneté.
[13] Pourquoi une condition de résidence est-elle nécessaire? Il est clair à mon sens que le législateur refuse d'accorder la citoyenneté canadienne aux étrangers, et qu'il exige que le candidat à la citoyenneté réside au Canada pendant trois ans au moins au cours des quatre années qui précèdent la date de sa demande pour qu'il ait le temps de " se canadianiser ". Il se peut que certains puissent atteindre ce stade en moins de temps que la période prescrite par le législateur, mais c'est à celui-ci seul qu'il appartient de prescrire le temps nécessaire, et non au demandeur ou au juge.
[14] Si l'objectif de l'alinéa 5(1)c) est clair, il faut noter que le législateur n'emploie pas le mot " canadianiser " (si tant est qu'il existe), mais fixe les années , composées de jours de résidence.
[15] Depuis 1982 et la promulgation de la Charte canadienne des droits et libertés (tout à son honneur), les juges ont été investis du pouvoir, le cas échéant, d'invalider un texte de loi, d'en restreindre ou étendre la portée et, si nécessaire, quelquefois de le modifier dans les faits. Parfois, ce sentiment d'omnipotence judiciaire s'infiltre dans le travail et le raisonnement de tous les jours de certains juges.
[16] Notre Cour n'est pas un organe d'action sociale, ni un institut de psychologie appliquée qui ait pour attributions d'assurer le bien-être moral tous les candidats à la citoyenneté. Si un candidat a des attentes démesurées et sans aucune mesure avec le texte de loi, il n'y a d'autre choix que d'étouffer ces espoirs (tant que le juge ne prétend pas modifier la loi). La Cour n'en éprouve aucun plaisir, mais la responsabilité en revient peut-être aux conseillers de l'appelant et, bien entendu, au législateur lui-même. Ainsi donc, la Cour ne peut pas tourner la loi, même pour faire plaisir au demandeur, même pour lui épargner le sentiment de frustration, si justifié soit-il. Ses fonctions judiciaires ne font pas non plus obligation au juge de jouer pour la galerie, de jouer au généreux bienfaiteur ou à la généreuse bienfaitrice.
[17] Le Canada se définit comme un pays démocratique, mais la démocratie elle-même est en danger si les juges s'arrogent le rôle de législateur. Pareil état de choses ferait une mascarade de l'exercice par les juges de la citoyenneté de leurs fonctions.
[18] D'offrir libéralement la citoyenneté à ceux qui ne se donnent pas la peine de se conformer aux dispositions solennellement adoptées par le législateur non seulement constitue un crime de lèse-majesté, mais encore avilit la citoyenneté canadienne. Les demandeurs sérieux et sincères doivent se conformer à la loi, comme tous les autres, qu'ils le veuillent ou non. Quel terrible message cette Cour diffuserait en invalidant la décision d'un juge de la citoyenneté pour accorder à quelqu'un la citoyenneté contre la volonté du législateur! La Cour aura bonne mine en dispensant ce genre de faux bienfaits. Elle n'aura pas encouragé le respect de la loi.
[19] Ce qui précède n'est certes pas de simples spéculations ou digressions d'un juge. Le Parlement a modifié la Loi sur la citoyenneté à diverses reprises depuis la promulgation des lois révisées. Pas une seule fois il n'a adopté une disposition quelle qu'elle soit au sujet des conditions de résidence, ni n'a adopté aucune exception ou prescrit l'octroi de la citoyenneté à un demandeur quelconque qui :
- serait probablement un bon citoyen mais qui ne remplit pas le conditions prévues à l'alinéa 5(1)c);
- a sa vie " centrée " au Canada en raison d'une circonstance quelconque, mais est absent du pays;
- a envoyé ou déposé ses biens meubles (c.-à-d. compte en banque, vêtements, automobile, etc.) à demeure au Canada alors que lui-même est absent du pays;
- s'est " canadianisé " en moins de temps que les trois années nécessaires au cours des quatre années précédant la date de la demande;
- a besoin de se trouver à l'étranger pour raisons d'affaires ou autres pendant plus d'un an au cours des quatre années précédant la date de la demande;
- compte un conjoint et/ou des enfants ou autres parents qui sont déjà citoyens.
[20] Cette tendance à ignorer la loi telle que le législateur l'a formulée semble remonter à la cause Papadogiorgakis [1978] 2 C.F. 208. Bien que la décision fût rendue par un juge éminent de l'époque, elle n'est pas passée en force de chose jugée puisque que les jugements rendus par la Cour sur appel en matière de citoyenneté ne sont pas susceptibles d'appel. Ce facteur peut créer, et il crée toujours, une incertitude scandaleuse quant à la règle applicable. Après tout, en page 75 du même recueil des arrêts de la Cour fédérale, il y a le jugement Khoury, rendu par un juge tout aussi éminent de l'époque et qui est parvenu à une conclusion diamétralement opposée; cette dichotomie se poursuit jusqu'à nos jours.
[21] Comme noté supra, le législateur a, dans l'intervalle, modifié à plusieurs reprises la Loi, jusqu'à L.C. 1997, ch. 22, dont certaines dispositions sont entrées en vigueur le 20 mai 1997, c'est-à-dire tout récemment. La dernière modification des conditions de résidence prévues à l'article 5, modification qui traduit la volonté du législateur, s'est faite par la loi S.C. 1987, ch. 53, sanctionnée en décembre 1987, comme suit :
1.. Section 5 of the Citizenship Act is amended by adding thereto, immediately after subsection (1) thereof, the following subsection: (1.1) Any day during which an applicant for citizenship resided with the applicant's spouse who at the time was a Canadian citizen and was employed outside of Canada in or with the Canadian armed forces or the public service of Canada or of a province, otherwise than as a locally engaged person, shall be treated as equivalent to one day of residence in Canada for the purposes of paragraph (1)(c) and subsection 11(1). |
1. La Loi sur la citoyenneté est modifiée par insertion, après le paragraphe 5(1), de ce qui suit: (1.1) Est assimilé à un jour de résidence au Canada pour l'application de l'alinéa (1)c) et du paragraphe 11(1) tout jour pendant lequel l'auteur d'une demande de citoyenneté a résidé avec son conjoint alors que celui-ci était citoyen et était, sans avoir été engagé sur place, au service, à l'étranger, des forces armées canadiennes ou de l'administration publique fédérale ou de celle d'une province. |
[22] Les conditions de résidence sont suffisamment claires, mais le législateur (et non le pouvoir judiciaire) les a encore clarifiées davantage par l'adoption de la modification ci-dessus. Celle-ci prévoit en effet que le candidat à la citoyenneté peut " se canadianiser " en vivant auprès d'un conjoint canadien posté à l'étranger et accumuler ainsi la période de résidence jour par jour . Cette période, et toute la période, de résidence prévue par la Loi s'acquiert par trois années sur quatre de journées of présence, et non d'absence. Pour le législateur, période de résidence s'entend de la résidence accumulée jour par jour, non pas d'absence, mais de présence; non pas de l'envoi de biens meubles, mais de la présence physique; non pas de la vie centrée, mais de la vie vécue jour après jour après jour au Canada, jusqu'à ce que l'accumulation des jours requis rende le candidat admissible au regard du paragraphe 5(1) ou (1.1). La seule exception est prévue au paragraphe (1.1) selon lequel un candidat peut " se canadianiser " tout en résidant à l'étranger, mais aux côtés de son conjoint canadien, chaque jour .
[23] Nul doute que le candidat qui n'obtient pas la citoyenneté n'en sera pas très heureux, mais notre Cour n'a absolument rien à y voir. C'est l'affaire du législateur, qui calcule la période de résidence par le nombre de jours de présence.
[24] La Cour n'est pas un organe législatif. Elle peut adapter aux circonstances les règles générales de common law et d'equity, mais les lois écrites sont inviolables, tant que le législateur ne les aura pas abrogées ou modifiées (ou tant qu'il n'aura pas contrevenu à la Charte). La dernière fois que l'exécutif a voulu légiférer sans passer par le Parlement, c'est notre Cour qui a invalidé cette tentative illégale; v. Saskatchewan Wheat Pool c. Canada (Procureur général) (1994) 67 F.T.R. 98, paragraphes 67, 68 et 69. Notre Cour doit à tout le moins observer les normes qu'elles a fixées elle-même.
[25] L'appelant, dans son propre témoignage et par la voix de son avocat, reconnaît que la juge de la citoyenneté a calculé avec justesse le nombre de jours de résidence qu'il lui manquait encore au moment de sa demande de citoyenneté. Les deux appelants étudiaient l'anglais comme langue seconde et suivaient un " cours sur la citoyenneté " de septembre 1995 à juin 1996. S'ils avaient investi autant de leur temps au Canada que leurs placements d'argent, ils parleraient sans doute mieux une langue officielle, et seraient mieux " canadianisés ".
[26] Par tous ces motifs, l'appel doit être rejeté. L'interprétation correcte du paragraphe 15(1) de la Loi fait que la Cour ne doit pas toucher à l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire dont seule est investie la juge de la citoyenneté, qui l'a exercé en l'espèce; v. Re El-Nahoum (1992) 49 F.T.R. 75, paragraphe [9], et Re Khat, aussi 49 F.T.R., page 252, paragraphes [5] et [6].
F.C. Muldoon
Juge
Ottawa (Ontario),
le 21 janvier 1998
Traduction certifiée conforme
François Blais, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER
NUMÉRO DU GREFFE : T-2879-96 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Re Loi sur la citoyenneté & Chia Hsiung Chen
LIEU DE L'AUDIENCE : Toronto (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE : 5 janvier 1998
MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR LE JUGE MULDOON
LE : 21 janvier 1998
ONT COMPARU :
M. Stephen Green pour l'appelant
M. Peter K. Large intervenant bénévole
PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :
Green & Spiegel pour l'appelant
Toronto (Ontario)
Peter K. Large intervenant bénévole
Toronto (Ontario)