Date : 19981112
Dossier : T-2449-97
AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ,
L.R.C. (1985), ch. C-29,
ET un appel de la décision d'un juge de la citoyenneté,
ET LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,
appelant,
- et -
PIK YEUNG LUK,
intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT
LE JUGE BLAIS
[1] Il s'agit d'un appel formé par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration contre la décision en date du 15 septembre 1997 par laquelle le juge de la citoyenneté a approuvé la demande de citoyenneté présentée par Pik Yeung Luk sous le régime du paragraphe 5(1) de la Loi sur la citoyenneté.
[2] L'appelante est entrée au Canada pour la première fois le 10 décembre 1993 et a obtenu la résidence permanente le même jour. Elle a demandé la citoyenneté canadienne le 24 décembre 1996.
[3] La décision du juge de la citoyenneté est la suivante :
[traduction] Bien qu'il lui manque 598 jours pour satisfaire aux conditions minimales prescrites en matière de résidence, l'intimée a fourni la preuve, dans le cadre défini par le juge Thurlow, qu'elle a établi et conservé un mode de vie centralisé au Canada qui est compatible avec le profil de personnes qui étudient à temps plein. |
[4] L'appel formé par le ministre repose sur le motif que dans les quatre années qui ont précédé la date de sa demande de citoyenneté, l'intimée n'a pas satisfait aux conditions prévues à l'alinéa 5(1)c) de la Loi sur la citoyenneté.
[5] L'intimée a donné des précisions dans son témoignage; peu de temps après son arrivée au Canada le 10 décembre 1993, soit neuf jours plus tard, elle est partie pour Taïwan pour terminer un baccalauréat ès lettres à la National Central University de Taïwan.
[6] D'après la transcription de son dossier universitaire, l'intimée a commencé ses études universitaires en 1991, de sorte qu'en décembre 1993, elle avait déjà terminé deux années et demie d'études sur les quatre années du programme de baccalauréat ès lettres en littérature chinoise.
[7] Elle est revenue au Canada durant les vacances d'été en août et en septembre 1994, et lorsqu'elle a finalement obtenu son diplôme en 1995, elle est retournée au Canada où elle s'était déjà établie avec sa mère et ses frères vivant au Canada.
[8] Elle est retournée à Hong Kong pendant un mois pour rendre visite à sa grand-mère après le décès de son père.
[9] Dès son retour chez elle, elle s'est inscrite à des cours d'anglais donnés dans le cadre d'un programme d'éducation permanente à la Langstaff School for Adult Education. Par la suite, elle a amélioré ses compétences en prenant des cours d'informatique à l'école secondaire York Dale. Enfin, elle s'est inscrite au Seneca College, situé en Ontario.
[10] Pendant son séjour à Taïwan comme étudiante, l'intimée vivait dans une résidence d'étudiants parce que sa famille avait déménagé au Canada. Ses parents ont payé ses études à Taïwan et au Canada.
[11] Comme l'a déclaré le juge Rouleau dans l'affaire Chan, T-1981-9 (1997), au paragraphe 12 :
La jurisprudence de la Cour à l'égard des étudiants semble laisser entendre que si on doit être convaincu que l'appelant demeure une personne à charge de ses parents au Canada, que ceux-ci ont payé ses études, qu'il y est retourné pendant l'été et d'autres types de vacances, qu'il avait toujours l'intention d'y retourner, l'appelant à l'instance satisfait à ces conditions. Il a toujours eu l'intention de revenir au Canada; ses motifs ne sont pas contestés et sa résidence ne devrait pas être considérée comme ayant été interrompue. Il cherche maintenant du travail au Canada et, en fait, il n'a pas d'autre résidence ni foyer sauf dans ce pays. Avec l'accord de l'amicus curiae, j'accueille le présent appel. |
[12] L'avocate de l'appelant a affirmé que l'intimée ne s'était jamais établie au Canada avant son retour à l'été 1995.
[13] Je ne suis pas de cet avis parce que chacun sait qu'une étudiante qui fait des études en vue d'obtenir un baccalauréat loin de chez elle (environ 14 heures d'avion) ne peut pas rentrer chez elle toutes les fins de semaine. Toutefois, quand les possessions de cette étudiante se trouvent chez elle à Toronto, qu'elle est domiciliée à Toronto, que ses frères et sa mère vivent dans cette ville, qu'elle rentre chez elle durant les vacances estivales et que, dès l'obtention de son diplôme, elle retourne chez elle au Canada, cela veut dire qu'elle a réellement établi son mode de vie au Canada.
[14] Il paraît évident que la seule raison pour laquelle l'intimée s'est absentée du Canada était la poursuite de ses études à Taïwan, qu'elle avait commencées deux ans et demi avant son arrivée au Canada. Je suis convaincu que l'intimée a centralisé son mode de vie au Canada et il n'y a, selon moi, aucune raison d'annuler la décision prise par le juge de la citoyenneté.
[15] Pour ces motifs, il convient de rejeter l'appel de l'appelant.
" Pierre Blais "
Juge
Toronto (Ontario)
Le 12 novembre 1998
Traduction certifiée conforme
Marie Descombes, LL.L.
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Noms des avocats et avocats inscrits au dossier
NUMÉRO DU DOSSIER DE LA COUR : T-2449-97
INTITULÉ : AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ, L.R.C. (1985), ch. c-29 |
ET un appel de la décision d'un juge de la citoyenneté |
ET LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION, |
appelant,
- et -
PIK YEUNG LUK, |
intimée.
DATE DE L'AUDIENCE : LE MARDI 10 NOVEMBRE 1998 |
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO) |
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT DU JUGE BLAIS
EN DATE DU : JEUDI 12 NOVEMBRE 1998 |
COMPARUTIONS :
A. Leena Jaakkimainen |
Pour l'appelant
Pik Yeung Luk
Pour l'intimée |
Peter K. Large
Amicus Curiae |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Pour l'appelant
Pik Yeung Luk |
12, av. Headford |
Richmond Hill (Ontario) |
L4B 3V7 |
Pour l'intimée |
Peter K. Large |
610-372, rue Bay |
Toronto (Ontario) |
M5H 2W9 |
Amicus Curiae |
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
Date : 19981112
Dossier : T-2449-97
AFFAIRE INTÉRESSANT LA LOI
SUR LA CITOYENNETÉ,
L.R.C. (1985), ch. C-29,
ET un appel de la décision
d'un juge de la citoyenneté,
ET LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L'IMMIGRATION,
appelant,
- et -
PIK YEUNG LUK,
intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT