Date : 19990305
Dossier : T-1023-98
OTTAWA (Ontario), le vendredi 5 mars 1999
EN PRÉSENCE DE : MADAME LE JUGE B. REED
ENTRE :
LE PÈRE ALBERTO ARAUJO CUNHA,
demandeur,
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL, CONNIE-LEE FOND,
CONSULTANTE EN PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE (MINISTÈRE DU
REVENU NATIONAL), LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,
défendeurs.
ORDONNANCE
VU la demande entendue à TORONTO (Ontario) le jeudi 25 février 1999;
ET pour les motifs de l'ordonnance rendus ce jour;
IL EST ORDONNÉ QUE :
la demande est rejetée; sans dépens pour l'une ou l'autre des parties.
B. Reed
Juge
Traduction certifiée conforme :
Laurier Parenteau
Date : 19990305
Dossier : T-1023-98
ENTRE :
LE PÈRE ALBERTO ARAUJO CUNHA,
demandeur,
et
LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL, CONNIE-LEE FOND,
CONSULTANTE EN PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE (MINISTÈRE DU
REVENU NATIONAL), LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA,
défendeurs.
MOTIFS DE L'ORDONNANCE
LE JUGE REED :
[1] Cette requête du demandeur vise l'obtention d'une déclaration portant que ses droits statutaires n'ont pas été respectés. La requête originale visait l'obtention d'autres recours, mais ils ont été abandonnés. Le droit statutaire en cause est celui de toute personne ayant demandé accès à l'information de nature personnelle contenue dans les dossiers gouvernementaux d'obtenir, en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R.C. 1985, ch. P-21, une réponse dans les 30 jours ou un avis qu'un délai additionnel (d'au plus 30 jours) est nécessaire pour donner suite à la demande. Ces délais sont prévus aux articles 14 et 15 de la Loi ".1
[2] Par l'entremise de son avocat, le demandeur a présenté à Revenu Canada une demande de communication de certains renseignements personnels le 13 janvier 1998. Un accusé de réception, daté du 15 janvier 1998, l'informait qu'on donnerait suite à sa demande dans les meilleurs délais. Comme il ne recevait aucune réponse, l'avocat a envoyé des rappels les 3 mars et 14 mai 1998. Ces communications n'ont donné aucun résultat. Dans sa lettre de mai, l'avocat a fait savoir à Revenu Canada qu'à défaut d'une réponse rapide, il s'adresserait aux tribunaux pour obtenir qu'on l'oblige à répondre. (La preuve indique que le demandeur avait cherché à obtenir les renseignements en cause dès avril 1997, mais il s'était d'abord adressé au bureau local et non au siège social de Revenu Canada à Ottawa.) Quoiqu'il en soit, une requête a été déposée en cette Cour le 21 mai 1998. En conséquence, la requête de demandeur a été placée sur la liste prioritaire des demandes présentées à Revenu Canada le 2 juin 1998, et les documents demandés ont été expédiés à son avocat le 8 juillet 1998.
[3] L'avocat des défendeurs plaide que la cause est maintenant sans objet, puisque les documents en cause ont été remis au demandeur. Il plaide aussi que la Cour n'a de toute façon pas compétence, étant donné que le demandeur n'a pas déposé de plainte devant le Commissaire à la protection de la vie privée. Il plaide que ce n'est que lorsqu'une telle plainte a été déposée, et qu'elle s'est soldée par un refus, qu'une requête peut être présentée en cette Cour. L'article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels porte que :
41. Any individual who has been refused access to personal information requested under subsection 12(1) may, if a complaint has been made to the Privacy Commissioner in respect of the refusal, apply to the Court for a review of the matter within forty-five days after the time the results of an investigation of the complaint by the Privacy Commissioner are reported to the complainant under subsection 35(2) or within such further time as the Court may, either before or after the expiration of those forty-five days, fix or allow. |
41. L'individu qui s'est vu refuser communication de renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) et qui a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à la protection de la vie privée peut, dans un délai de quarante-cinq jours suivant le compte rendu du Commissaire prévu au paragraphe 35(2), exercer un recours en révision de la décision de refus devant la Cour. La Cour peut, avant ou après l'expiration du délai, le proroger ou en autoriser la prorogation. |
[4] L'avocat des défendeurs plaide que tous les recours visant la production des documents sont maintenant sans objet, et qu'en conséquence un jugement déclaratoire n'a pas sa raison d'être. En l'instance, la requête vise une déclaration portant qu'il y a eu infraction à un droit statutaire. En l'absence d'une telle déclaration, il semblerait qu'il n'y a pas de mécanisme par lequel le Commissaire à la protection de la vie privée pourrait exiger qu'on respecte le délai de 30 jours (ou de 60 jours si l'avis prévu à l'article 15 est donné), alors que l'intention du Parlement de rendre l'information disponible en temps utile est constamment frustrée. La preuve démontre que le délai moyen de réponse de Revenu Canada à de telles demandes est de plus de 200 jours. Ce délai aurait maintenant été ramené à peu près à 150 jours. (Alors que la requête du demandeur en l'instance a reçu une priorité suite aux procédures en cette Cour, il a fallu à peu près six mois pour qu'il y soit donné suite.) L'avocat demande une déclaration que les droits statutaires de son client ont été violés ainsi que l'octroi des dépens en cette cause, dans le but d'envoyer le message à ceux qui sont responsables de ces délais qu'ils ne respectent pas l'intention du Parlement.
[5] Je me pencherai maintenant sur la question de la compétence de cette Cour. L'article 41 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, précité, prévoit l'exercice d'un recours devant la Cour si on " a déposé ou fait déposer une plainte à ce sujet devant le Commissaire à la protection de la vie privée ". L'avocat des défendeurs plaide que ces dispositions démontrent à l'évidence que l'objectif était qu'un demandeur ne puisse exercer un recours en révision devant la Cour avant d'avoir d'abord déposé une plainte devant le Commissaire à la protection de la vie privée. Pour sa part, l'avocat du demandeur plaide qu'il n'y a pas de mécanisme dans la Loi sur la protection des renseignements personnels qui vise les cas où un ministère fait défaut de répondre à une demande, contrairement à ce qui est prévu aux articles 14 à 16 de la Loi.
[6] Le paragraphe 16(3) prévoit que le défaut de répondre à une demande dans les délais prévus par la Loi vaut décision de refus de communication :
(3) Where the head of a government institution fails to give access to any personal information requested under subsection 12(1) within the time limits set out in this Act, the head of the institution shall, for the purposes of this Act, be deemed to have refused to give access.
(3) Le défaut de communication de renseignements personnels demandés en vertu du paragraphe 12(1) dans les délais prévus par la présente loi vaut décision de refus de communication.
[7] L'article 29 de la Loi précise dans quels cas une plainte peut être déposée devant le Commissaire à la protection de la vie privée. Un geste qui " vaut décision de refus de communication ", au sens du paragraphe 16(3), n'est pas dans cette liste. On y trouve un refus de communication de renseignements demandés en vertu du paragraphe 12(1), ou une prorogation en vertu de l'article 15 considérée comme abusive, mais on ne trouve pas un geste qui " vaut décision de refus de communication " en vertu du paragraphe 16(3).
[8] Voici le texte complet du paragraphe 29(1) :
29. (1) Subject to this Act, the Privacy Commissioner shall receive and investigate complaints |
29. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, le Commissaire à la protection de la vie privée reçoit les plaintes et fait enquête sur les plaintes : |
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[9] Même si le paragraphe 29(1) ne mentionne pas spécifiquement les gestes valant décision de refus de communication en vertu du paragraphe 16(3), je suis convaincue qu'une plainte à cet égard peut être logée en vertu du sous-alinéa 29(1)h)(i). Cette interprétation cadre avec l'économie de la Loi sur la protection des renseignements personnels prise dans un contexte global. Le paragraphe 29(1) recouvre les refus et les défauts de respecter les délais, ainsi que les infractions à plusieurs autres dispositions de la Loi. Ceci fait ressortir l'intention du législateur que les réponses des ministères aux demandes, y compris les gestes qui valent décision de refus de communication, soient d'abord contrôlées par le Commissaire à la protection de la vie privée, avant d'être référées aux tribunaux. Bien qu'à regret, je dois conclure que l'avocat des défendeurs a raison de dire que la Loi prévoit que les plaintes soient d'abord déposées devant le Commissaire à la protection de la vie privée, et que ce n'est qu'après qu'un demandeur s'est vu signifier un refus qu'il peut s'adresser à cette Cour. Ceci est clairement illustré par la description du droit de révision prévu à l'article 41. Je conclus donc que cette Cour n'a pas compétence pour accorder la déclaration recherchée.
[10] Quant aux dépens, chaque partie absorbera les siens. Nonobstant le fait que la question de l'obtention des documents demandés soit devenue caduque le 8 juillet 1998, et que des excuses ont été présentées au demandeur par les agents de Revenu Canada pour le retard, il est clair qu'il y a un problème récurrent dans la façon de traiter les demandes (ou plutôt de ne pas les traiter pendant de longues périodes). Le demandeur a voulu attirer l'attention sur cette situation, ainsi qu'obtenir une forme de recours pour lui et pour tous ceux qui font des demandes d'information. Bien que je conclue que cette Cour n'a pas compétence pour accorder le recours demandé, dans les circonstances le demandeur ne devrait pas se voir condamner aux dépens. L'ordonnance sera en conséquence.
B. Reed
Juge
OTTAWA (ONTARIO)
Le 5 mars 1999
Traduction certifiée conforme :
Laurier Parenteau
COUR FÉDÉRALE DU CANADA
SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE
NOM DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
No DU GREFFE : T-1023-98 |
INTITULÉ DE LA CAUSE : Father Alberto Araujo Cunha c. |
Le Ministre du Revenu national et autres
LIEU DE L'AUDIENCE : TORONTO (ONTARIO) |
DATE DE L'AUDIENCE : Le 25 février 1999 |
MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE REED
EN DATE DU : 5 mars 1999
ONT COMPARU :
M. Rocco Galati POUR LE DEMANDEUR
M. John R. Shipley
M. David Chodikoff POUR LES DÉFENDEURS
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
M. Rocco Galati
Toronto (Ontario) POUR LE DEMANDEUR
M. Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Ottawa (Ontario) POUR LES DÉFENDEURS
__________________14. Where access to personal information is requested under subsection 12(1), the head of the government institution to which the request is made shall, subject to section 15, within thirty days after the request is received, (a) give written notice to the individual who made the request as to whether or not access to the information or a part thereof will be given; and (b) if access is to be given, give the individual who made the request access to the information or the part thereof. 15. The head of a government institution may extend the time limit set out in section 14 in respect of a request for (a) a maximum of thirty days if (i) meeting the original time limit would unreasonably interfere with the operations of the government institution, or (ii) consultations are necessary to comply with the request that cannot reasonably be completed within the original time limit, or (b) such period of time as is reasonable, if additional time is necessary for translation purposes or for the purposes of converting the personal information into an alternative format,by giving notice of the extension and the length of the extension to the individual who made the request within thirty days after the request is received, which notice shall contain a statement that the individual has a right to make a complaint to the Privacy Commissioner about the extension. |
14. Le responsable de l'institution fédérale à qui est faite une demande de communication de renseignements personnels en vertu du paragraphe 12(1) est tenu, dans les trente jours suivant sa réception, sous réserve de l'article 15 : a) d'aviser par écrit la personne qui a fait la demande de ce qu'il sera donné ou non communication totale ou partielle des renseignements personnels; b) le cas échéant, de procéder à la communication. 15. Le responsable d'une institution fédérale peut proroger le délai mentionné à l'article 14 : a) d'une période maximale de trente jours dans les cas où: (i) l'observation du délai entraverait de façon sérieuse le fonctionnement de l'institution, (ii) les consultations nécessaires pour donner suite à la demande rendraient pratiquement impossible l'observation du délai; b) d'une période qui peut se justifier dans les cas de traduction ou dans les cas de transfert sur support de substitution.Dans l'un ou l'autre de ces cas, le responsable de l'institution fédérale envoie à la personne qui a fait la demande, dans les trente jours suivant sa réception, un avis de prorogation de délai en lui faisant part de nouveau délai ainsi que de son droit de déposer une plainte à ce propos auprès du Commissaire à la protection de la vie privée. |