Date : 20190221
Dossier : IMM-1924-18
Référence : 2019 CF 212
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), 21 février 2019
En présence de monsieur le juge Gleeson
ENTRE :
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BERNICE OFORI
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Demanderesse
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Et
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LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Aperçu
[1]
La demanderesse, Mme Bernice Ofori, est une citoyenne du Ghana. Elle est arrivée au Canada en août 2015 après avoir obtenu le statut de résidente temporaire à titre d’étudiante. Elle a obtenu un diplôme de l’Université d’Ottawa en juin 2017. Son visa d’étudiante a expiré le 31 août 2017. Mme Ofori déclare qu’elle avait l’intention de demander un permis de travail postdiplôme (PTPD) au terme de ses études.
[2]
En octobre 2017, Mme Ofori a présenté une demande de rétablissement de son statut et de PTPD, demande qui a été refusée. L’agent des visas (l’agent) a conclu qu’elle n’était pas admissible au rétablissement de son statut de résidente temporaire étant donné qu’elle ne détenait plus de permis d’études valide, et qu’elle ne pouvait par conséquent pas obtenir un PTPD.
[3]
Mme Ofori fait valoir que l’agent a déraisonnablement interprété et appliqué le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement) en refusant sa demande. Plus précisément, l’agent n’a pas tenu compte du fait que sa demande de rétablissement du statut avait été présentée dans les 90 jours de l’expiration de son visa d’étudiante et qu’elle satisfaisait aux autres critères énoncés dans le Règlement.
[4]
Je ne puis conclure que l’intervention de la Cour est justifiée. La demande est rejetée pour les motifs suivants.
II.
Question
[5]
L’unique question qui se pose est de savoir si l’agent a commis une erreur en interprétant et en appliquant l’article 182 du Règlement.
III.
Norme de contrôle
[6]
L’interprétation et l’application du Règlement par l’agent font intervenir une question mixte de fait et de droit. Les parties s’entendent pour dire que la décision doit être contrôlée selon la norme de la décision raisonnable (Udodong c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 234, paragraphe 5; Abubacker c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1112, paragraphe 17 (Abubacker)).
IV.
Questions préliminaires
[7]
Avant d’examiner le fond de la demande, il convient de traiter de deux questions préliminaires.
A.
Intitulé
[8]
L’avocate du défendeur demande que l’intitulé soit modifié. Elle fait remarquer que la demanderesse a désigné le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada comme défendeur au lieu du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, paragraphe 5(2); Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, paragraphe 4(1) (la LIPR)). La demanderesse ne s’oppose pas à la modification. Par conséquent, l’intitulé est modifié pour désigner le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration comme défendeur.
B.
Demande de prorogation de délai
[9]
Dans la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire, la demanderesse a sollicité une prorogation de délai pour le dépôt de la demande d’autorisation. Le défendeur s’est opposé à cette prorogation dans ses observations écrites, mais la question n’a pas été abordée dans l’ordonnance qui a accordé l’autorisation.
[10]
La jurisprudence nous enseigne qu’on ne peut inférer qu’il y a eu prorogation de délai du simple fait que l’autorisation a été accordée; il faut traiter explicitement de la demande de prorogation de délai. Lorsqu’une ordonnance accordant une autorisation ne traite pas explicitement de la prorogation de délai, c’est au juge qui instruit la demande qu’il appartient de trancher la question (Succession de Deng c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2009 CAF 59, paragraphes 14–17).
[11]
Dans sa plaidoirie, le défendeur a informé la Cour qu’il ne s’opposait pas à la demande de la demanderesse. La prorogation de délai est accordée.
V.
Analyse
A.
Le cadre juridique
[12]
L’agent délivre un visa de résident temporaire lorsque l’étranger établit qu’il respecte les critères énoncés au Règlement (article 179 du Règlement). Le statut du visiteur, du travailleur ou de l’étudiant qui fait une demande dans les quatre-vingt-dix jours suivant la perte de son statut de résident temporaire est rétabli si l’intéressé « satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour »
, s’est conformé à toute autre condition imposée à cette occasion et satisfait autrement aux exigences de la LIPR (paragraphe 182(1) du Règlement). Dans le cas où l’étranger sollicite la résidence temporaire à titre d’étudiant, l’agent lui délivre un permis d’études si, entre autres conditions, l’étranger a été admis à un programme d’études par un établissement d’enseignement désigné (paragraphe 216(1) du Règlement).
[13]
Par souci de commodité, les extraits pertinents du Règlement sont reproduits l’annexe ci‑jointe.
[14]
Pour être admissible à obtenir un PTPD, le demandeur doit posséder un permis d’études valide au moment de la demande. Cette exigence est énoncée dans les instructions d’exécution de programme du défendeur contenues dans un document intitulé Programme de permis de travail postdiplôme. La Cour a, à maintes reprises, jugé qu’il était raisonnable de la part d’un agent d’appliquer strictement les critères énoncés dans les instructions d’exécution de programme (Abubacker, paragraphe 16; Nookala c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2016 CF 1019, paragraphes 11–12 (Nookala)).
B.
L’agent a-t-il commis une erreur en interprétant l’article 182 du Règlement?
[15]
En l’espèce, l’agent a refusé la demande de permis de travail et de rétablissement de son statut de résidente temporaire présentée par Mme Ofori au motif qu’elle ne satisfaisait pas aux conditions de rétablissement de son statut étant donné qu’elle ne détenait [traduction] « pas de permis d’études valide lorsqu’elle a présenté sa demande de permis de travail »
. L’agent a également conclu qu’étant donné qu’elle ne détenait pas de permis d’études valide, elle n’était pas admissible à obtenir un PTPD.
[16]
La demanderesse fait valoir que l’agent a rejeté sa demande de rétablissement sans tenir compte des circonstances. Elle affirme qu’elle cherchait à faire rétablir son statut uniquement pour pouvoir obtenir un PTPD, ce à quoi elle avait droit avant l’expiration de son visa d’étudiante. Selon elle, il n’est pas important pour l’analyse relative à l’article 182 que sa demande ne vise pas l’obtention d’une prolongation de son statut d’étudiante puisque la demande était directement liée à son statut initial d’étudiante. Elle soutient que l’expression « satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour »
vise les exigences initiales du statut que la partie cherche à faire rétablir, peu importe le statut préalablement détenu. Par conséquent, elle n’avait besoin, à ses dires, que d’établir qu’elle satisfaisait aux conditions d’obtention d’un PTPD et non d’un permis d’études. Selon la demanderesse, si l’agent avait tenu compte de sa situation personnelle, il aurait constaté qu’elle avait demandé le rétablissement de son statut dans les quatre-vingt-dix jours ayant suivi l’expiration de son visa pour obtenir un permis de travail, et non d’études, et qu’elle satisfaisait à toutes les autres conditions d’octroi d’un rétablissement. Je ne suis pas d’accord.
[17]
Pour obtenir un permis d’études, le demandeur doit être admis à « un programme d’études par un établissement d’enseignement désigné »
. En cherchant à faire rétablir son permis d’études, Mme Ofori n’avait pas l’intention de poursuivre ses études. En fait, nul ne conteste qu’elle cherchait le rétablissement de son permis d’études dans le seul but de satisfaire aux exigences d’obtention d’un PTPD. Dans ces circonstances, il n’était pas déraisonnable que l’agent conclue que Mme Ofori n’avait pas « satisfait aux exigences initiales de son séjour »
et qu’elle ne pouvait par conséquent pas obtenir le rétablissement de son statut même si elle avait présenté sa demande dans les quatre-vingt-dix jours suivant l’expiration de son statut.
[18]
Mme Ofori soutient que l’agent devait examiner sa demande en tenant compte du fait qu’elle cherchait à obtenir un PTPD.
[19]
L’agent a en fait bel et bien tenu compte du fait que la demande de rétablissement visait l’obtention d’un permis de travail. Ce faisant, il a aussi cherché à savoir si Mme Ofori avait satisfait aux conditions initiales de délivrance d’un PTPD et a conclu par la négative — elle ne détenait pas de permis d’études valide au moment où elle a présenté la demande.
[20]
Comme nous l’avons vu précédemment, l’exigence de détenir un permis d’études valide au moment où on demande un PTPD figure dans les instructions d’exécution de programme du défendeur, et la Cour a jugé qu’il est raisonnable que les agents appliquent de façon stricte cette exigence (Abubacker, paragraphe 16; Nookala, paragraphes 11–12; Rehman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1021, paragraphe 17). Il n’était pas déraisonnable que l’agent le fasse en l’espèce.
VI.
Conclusion
[21]
La demande est rejetée. Les parties n’ont pas relevé de question grave de portée générale aux fins de certification, et l’affaire n’en soulève aucune.
JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-1924-18
LA COUR STATUE que :
la demande de prorogation de délai présentée par la demanderesse est accueillie;
la demande est rejetée;
aucune question n’est certifiée;
l’intitulé est modifié pour désigner le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration comme défendeur.
« Patrick Gleeson »
Juge
Traduction certifiée conforme
Ce 2e jour de mai 2019
Sandra de Azevedo, LL.B.
ANNEXE
Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227
Immigration and Refugee Protection Regulations, SOR/2002-227
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COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-1924-18
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INTITULÉ :
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BERNICE OFORI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 6 FÉVRIER 2019
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LE JUGE GLEESON
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DATE DES MOTIFS :
|
LE 21 FÉVRIER 2019
|
COMPARUTIONS :
Laurence Cohen
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POUR LA DEMANDERESSE
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Amy Lambiris
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Laurence Cohen
Avocat
Toronto (Ontario)
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POUR LA DEMANDERESSE
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Procureur général du Canada
Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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