Dossier : IMM-1149-18
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2018
En présence de monsieur le juge Annis
demanderesse
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I.
Introduction
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Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], à l’encontre d’une décision [la décision] rendue le 11 décembre 2017 par un agent des visas [l’agent], au consulat général du Canada, à Hong Kong, rejetant la demande de permis de travail de deux ans de la demanderesse, pour des motifs liés au bien‑fondé de celle‑ci, qui avait été présentée par cette dernière dans le cadre du programme pilote pour les travailleurs peu spécialisés afin de travailler pour un couple canadien en union libre comme aide familiale préposée à la garde des enfants. Pour les motifs qui suivent, la demande est accueillie.
[2]
Il existe un consensus selon lequel la norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable, et la Cour se doit de faire preuve d’une retenue considérable à l’égard de l’agent. Il est également communément admis que toute équité procédurale à laquelle ont droit les demandeurs donne lieu à l’application de la norme de la décision correcte, qui représente la norme la moins exigeante – Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47; Arenas Pareja c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1333; Sulce c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1132, au paragraphe 5.
La DP [demanderesse principale] est une Philippine célibataire de 37 ans, titulaire d’un passeport. Elle travaille à Hong Kong comme aide familiale et a présenté une demande de permis de travail dans le cadre du programme pilote pour les travailleurs peu spécialisés. L’offre d’emploi fait état de 2 enfants. L’employeuse canadienne potentielle démontre qu’elle est capable financièrement d’embaucher la DP; toutefois, j’ai certaines inquiétudes quant à ses motifs, étant donné que le revenu annuel prévu de 22 880 $ CA par année de la DP, abstraction faite de la rémunération potentielle des heures supplémentaires et du coût du logement, n’est inférieur que de 2 624 $ CA au revenu total de 2016 d’un des 2 employeurs, selon les avis de cotisation. Il serait inhabituel d’utiliser la totalité de son revenu pour embaucher une aide familiale résidante, et je crains que l’offre d’emploi ne serve qu’à faciliter la migration au Canada. La demanderesse travaille comme aide familiale à Hong Kong depuis 2012. Son dossier fait état du refus de ses 6 demandes de permis de travail précédentes, dont certaines étaient liées à des offres d’emploi de sa sœur. Bien que la DP montre qu’elle a de l’expérience dans la garde d’enfants à Hong Kong, elle n’a pas démontré un degré d’établissement ou des liens suffisants dans son pays d’origine. Aucune preuve n’a été présentée à l’appui de son expérience de travail rémunéré acquise précédemment aux Philippines ou de toute autre expérience de travail internationale. Compte tenu des facteurs socioéconomiques et familiaux importants qui attirent les immigrants au Canada, je ne suis pas convaincu que la DP est une travailleuse de bonne foi, qui quittera le Canada à la fin de son séjour autorisé. La demande est rejetée.
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En parallèle avec cette discussion, la Cour constate que la demanderesse a également soutenu que les employeurs avaient reçu un résultat positif à la suite de l’étude d’impact sur le marché du travail [l’EIMT] et que, par conséquent, le revenu d’un des employeurs ne devrait pas être un facteur pertinent. La Cour reconnaît que le fait de se référer au revenu d’un des employeurs peut s’avérer trompeur, s’il n’est pas pleinement expliqué, mais il s’agit tout de même là d’un facteur pertinent, et l’EIMT ne restreint pas la décision que peut rendre l’agent en pareil cas [Sulce c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1132, au paragraphe 29; Sulce c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 1132, au paragraphe 18; Chughtai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 41, au paragraphe 19].
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Même en tenant compte de la nécessité, pour les instances révisionnelles, de faire preuve de retenue en cherchant d’abord « à […] compléter [les motifs] avant de tenter de les contrecarrer »
, conformément à la notion énoncée dans Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), [2011] 3 RCS 708, 2011 CSC 62, au paragraphe 12, il n’en demeure pas moins nécessaire d’examiner la question connexe de l’équité procédurale.
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Eu égard aux circonstances, comme le raisonnement de l’agent n’est pas suffisamment étayé et semble, de surcroît, n’être que pure spéculation quant à la crédibilité, et qu’il appert que la question peut influencer le résultat de la demande de visa, la Cour conclut que l’agent avait l’obligation d’offrir la possibilité aux employeurs éventuels de fournir une explication raisonnable pour justifier le fait qu’ils confieraient à une aidante familiale non résidente des responsabilités importantes liées aux soins de leurs jeunes enfants, dans la mesure où cet arrangement ne leur procure que peu d’avantages financiers, voire aucun, en plus des inconvénients qu’il peut occasionner s’il ne fonctionne pas, ce qui ne cadre pas avec la conception selon laquelle les parents préfèrent habituellement avoir la responsabilité d’élever leurs enfants, lorsqu’ils n’ont aucun autre motif les incitant à agir autrement.
JUGEMENT dans le dossier IMM-1149-18
2. la décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen;
« Peter Annis »
Traduction certifiée conforme.
Ce 2e jour du mois de novembre 2018.
Caroline Tardif, LL.B., B.A.Trad.
MARICEL GALAMAY MAGDAY c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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