Date : 20180718
Dossier : IMM-5630-17
Référence : 2018 CF 757
Vancouver (Colombie-Britannique), le 18 juillet 2018
En présence de monsieur le juge Shore
ENTRE :
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AMRINDERJEET SINGH GARHA
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demandeur
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et
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LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Résumé des faits
[1]
Le demandeur est un citoyen de l’Inde, né à Kapurthala et âgé de 33 ans.
[2]
Il est arrivé au Canada pour la première fois le 17 décembre 2002, muni d’un permis d’études valide jusqu’au 31 décembre 2004. Le ou vers le 1er janvier 2016, le demandeur est entré au Canada à pied (cette fois-ci, sans visa et sans passer par un point d’entrée) à partir des États-Unis, où il vivait sans statut depuis le mois de février 2011.
[3]
En juin 2016, le demandeur s’est marié avec Satvir Kaur en Colombie-Britannique. Cette dernière a par ailleurs déjà été mariée au frère du demandeur, un citoyen canadien qui l’avait parrainé. Le 18 octobre 2012, Mme Kaur est devenue résidente permanente du Canada au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada. Mme Kaur et le frère du demandeur ont divorcé en 2015.
[4]
En septembre 2016, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente (parrainage par un conjoint au Canada) comme il était désormais parrainé par sa femme, Mme Kaur. En octobre 2017, le demandeur a été avisé par Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) que sa femme ne pouvait pas le parrainer du fait qu’elle n’était pas résidente permanente du Canada depuis au moins cinq ans au moment où elle a parrainé le demandeur.
[5]
Le 21 décembre 2017, un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a rédigé un rapport en application du paragraphe 44(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c. 27 (LIPR). Selon l’agent, le demandeur était interdit de territoire conformément au paragraphe 41(a) et, plus précisément, à l’alinéa 20(1)a) de la LIPR.
[6]
Le 22 décembre 2017, le délégué du ministre (le délégué) a prononcé une mesure d’exclusion à l’égard du demandeur aux termes du paragraphe 44(2) de la LIPR, confirmant ainsi les conclusions de l’agent de l’ASFC.
[7]
Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette mesure d’exclusion conformément au paragraphe 72(1) de la LIPR. Il soutient que le délégué a mal interprété la politique d’intérêt public de CIC en application du paragraphe 25(1) de la LIPR visant à faciliter le processus conformément aux règles de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada (la politique d’intérêt public).
II.
Dispositions pertinentes
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Les dispositions suivantes sont pertinentes en l’espèce :
L’alinéa 20(1)a) et le paragraphe 41(a) de la LIPR :
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Le sous-alinéa 228(1)(c)(iii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (RIPR) :
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III.
Analyse
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La norme de contrôle applicable à une décision du délégué prononçant une mesure d’exclusion est celle de la décision raisonnable (Mancilla Obregon c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2018 CF 526 au paragraphe 6). La Cour n’interviendra que si la décision n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit »
(Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47).
[10]
La seule question en l’espèce consiste à déterminer si la décision du délégué était déraisonnable.
[11]
Pour les motifs exposés ci-dessous, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. La Cour souscrit à la position du ministre. En l’espèce, il n’y a pas d’erreur susceptible de révision par la Cour.
[12]
Le demandeur affirme que le délégué n’aurait pas dû prononcer la mesure de renvoi en fonction de l’alinéa 20(1)a) de la LIPR puisque « les demandeurs [...] qui sont sans statut peuvent obtenir la résidence permanente [...] »
(Khodja c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2011 CF 1087 au paragraphe 30 [Khodja]). La Cour ne retient pas les prétentions du demandeur en l’espèce.
[13]
Dans la décision Khodja précitée, la demanderesse sollicitait le contrôle judiciaire d’une décision d’un agent d’immigration qui rejetait sa demande de statut de résident permanent au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada. La définition d’une personne « sans statut »
retrouvée dans la politique d’intérêt public était pertinente pour le contrôle du caractère raisonnable de la décision. Toutefois, en l’espèce, la demande de contrôle judiciaire renvoie à la mesure d’exclusion rendue contre le demandeur, fondée sur des conclusions d’interdiction de territoire n’ayant aucun lien avec la demande de parrainage conjugal du demandeur.
[14]
Les paragraphes 2, 3, 29, 30, 45 et 54 de la décision Khodja précitée ainsi que les paragraphes 23, 24, et 27, 28, 29 et 30 de la décision Mendoza Duran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2007 CF 738 ont été cités.
[15]
En fait, pendant son entrevue avec un agent de l’ASFC et un interprète punjabi, le demandeur ne contestait pas avoir contrevenu à LIPR et comprenait la raison de la mesure de renvoi (qui ne concernait pas sa demande de parrainage). Le demandeur a reconnu être entré de façon illégale au Canada en 2016, sans détenir de visa ou autres documents requis aux fins du Règlement.
Q : Comment êtes-vous entré au Canada?
R : J’ai marché au travers des fermes.
[...]
Q : Est-il vrai que vous êtes venu au Canada par le passé muni d’un permis d’études?
R : Oui.
Q : Pourquoi n’avez-vous pas simplement demandé de visa canadien plutôt que de vous faufiler en cachette au Canada?
R : Je ne savais pas. Ça ne m’est pas venu à l’esprit. Il n’y avait personne là-bas pour me guider.
[...]
J’ai expliqué au client que selon le rapport, il n’a pas réussi à obtenir un visa de résident permanent avant de venir au Canada et que sa demande pour conjoint n’effaçait pas cette contravention.
Q : Comprenez-vous le rapport?
R : Oui.
[...]
La mesure d’exclusion est prononcée et expliquée au client.
Q : Comprenez-vous la mesure d’exclusion?
R : Mais je ne veux pas m’en aller. Mes enfants sont ici.
Q : Vous comprenez que vous avez contrevenu à la loi sur l’immigration, n’est-ce pas?
R : Oui.
Q : Si vous contrevenez à la loi sur l’immigration, vous recevez une mesure de renvoi.
R : [Le client demeure silencieux.]
Q : Comprenez-vous la mesure?
R : Oui.
(Dossier certifié du tribunal, déclarations solennelles de l’ASFC datées du 22 décembre 2017, aux pages 9, 10 et 12.)
[16]
Dans le contexte d’une mesure de renvoi prononcée en application du paragraphe 44(2) de la LIPR, le délégué n’avait pas l’obligation d’interpréter et d’appliquer la politique d’intérêt public du CIC. En effet, lorsqu’une mesure de renvoi est prononcée, la politique d’intérêt public ne s’applique pas à l’agent de l’ASFC ou au délégué du ministre, tous deux travaillant pour la Sécurité publique et Protection civile. L’objectif de la politique d’intérêt public est de permettre aux époux et aux conjoints de fait de citoyens et résidents permanents canadiens qui n’ont pas de statut juridique d’immigrant de présenter une demande de résidence permanente et d’être évalués en application du paragraphe 25(1) de la LIPR. Par conséquent, la Cour conclut que la décision du délégué était raisonnable et que la mesure d’exclusion a été rendue de plein droit conformément à l’alinéa 20(1)a) et au paragraphe 41(1) de la LIPR ainsi qu’au paragraphe 228(1) du RIPR.
IV.
Conclusion
[17]
La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM-5630-17
LA COUR rejette la présente demande de contrôle judiciaire. Il n’y a aucune question grave de portée générale à certifier.
« Michel M.J. Shore »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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IMM-5630-17
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INTITULÉ :
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AMRINDERJEET SINGH GARHA c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Vancouver (Colombie-Britannique)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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Le 18 juillet 2018
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LE JUGE SHORE
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DATE DES MOTIFS :
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Le 18 juillet 2018
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COMPARUTIONS :
Gurpreet Badh
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Pour le demandeur
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Marjan Double
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Pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Badh & Associates
Surrey (Colombie-Britannique)
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Pour le demandeur
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Procureur général du Canada
Vancouver (Colombie-Britannique)
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Pour le défendeur
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