Date : 20180515
Dossier : T-1542-17
Référence : 2018 CF 508
Ottawa (Ontario), le 15 mai 2018
En présence de madame la juge McDonald
ENTRE :
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DARYLE WILLIAM HAUG
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demandeur
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et
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LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
[1]
Le demandeur, Daryle Haug, qui se représente lui-même, demande le contrôle judiciaire d’une décision de la Commission des libérations conditionnelles du Canada [CLCC]. L’audition de cette demande s’est faite par voie de vidéoconférence tenue à Halifax (Nouvelle-Écosse), le 11 avril 2018.
[2]
M. Haug soutient que la CLCC a commis une erreur en refusant d’examiner sa demande de libération conditionnelle parce qu’elle n’a pas été présentée dans le délai prescrit. Il soutient qu’il aurait dû avoir le droit de présenter une nouvelle demande de libération conditionnelle dans les six mois suivant un refus. À l’appui de cet argument, il invoque les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition [LSCMLC] en vigueur au moment où il a été condamné. La LSCMLC a été modifiée en 2012 afin que le délai exigé avant la présentation d’une nouvelle demande soit prolongé à un an.
[3]
Pour les motifs qui suivent, je conclus que la CLCC n’a pas commis d’erreur en appliquant la version la plus récente de la LSCMLC à l’examen du dossier de M. Haug. La décision de la CLCC est donc raisonnable, et la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens.
I.
Exposé des faits pertinents
[4]
M. Haug est un détenu au Pénitencier de Dorchester. En 2003, il a été arrêté et incarcéré pour des infractions d’agression sexuelle. En 2006, il a été reconnu coupable et condamné. L’appel interjeté par M. Haug a été rejeté et, lors de l’appel, il a été déclaré délinquant dangereux et condamné à une peine d’emprisonnement pour une période indéterminée qu’il purge actuellement.
[5]
Lorsque la peine d’emprisonnement initiale de M. Haug a été prononcée en 2006, puis lorsqu’il a été déclaré délinquant dangereux en 2008, les dispositions de la LSCMLC établissant les délais pour la présentation d’une nouvelle demande de libération conditionnelle après un refus étaient différentes. À l’époque, le paragraphe 122(4) de la LSCMLC prévoyait qu’un détenu qui se voyait refuser une demande de semi-liberté pouvait présenter une nouvelle demande dans les six mois suivant le refus. De même, le paragraphe 123(6) prévoyait un délai de six mois pour la présentation d’une nouvelle demande après le refus d’une libération conditionnelle totale.
[6]
En 2012, les délais prévus dans la LSCMLC pour la présentation d’une nouvelle demande après le refus d’une libération conditionnelle totale ou d’une semi-liberté sont passés de six mois à un an.
[7]
Le 17 février 2017, la première demande de libération conditionnelle de M. Haug a été refusée, et son appel auprès de la Section d’appel de la CLCC a été rejeté le 26 juin 2017.
[8]
Le 29 juillet 2017, M. Haug a présenté une autre demande de libération conditionnelle totale à la CLCC. Le 3 août 2017, la CLCC a informé M. Haug que sa demande ne serait pas examinée avant le 2 février 2018. M. Haug a interjeté appel à la Section d’appel de la CLCC, qui a confirmé la décision de la CLCC de refuser d’examiner la demande. M. Haug a présenté une autre demande de libération conditionnelle totale à la CLCC, qui a de nouveau refusé de l’examiner.
[9]
Le 21 septembre 2017, M. Haug a présenté une troisième demande de libération conditionnelle. Le 26 septembre 2017, la CLCC l’a informé qu’elle n’y donnerait pas suite, car la demande n’avait pas été présentée dans le délai prescrit par la LSCMLC.
[10]
Le 28 septembre 2017, la CLCC a rejeté la demande de M. Haug en lui indiquant qu’il ne pouvait pas présenter de nouvelle demande de libération conditionnelle avant le 2 février 2018. C’est cette dernière décision qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire de la part de M. Haug.
II.
Décision de la CLCC
[11]
Tel qu’il a été indiqué précédemment, c’est la décision rendue par la CLCC le 28 septembre 2017 qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire. Dans sa lettre à M. Haug, la CLCC indique ce qui suit :
[traduction]
La Commission a rejeté la demande qu’elle a reçue le 25 septembre 2017, car celle-ci a été présentée avant l’expiration du délai d’un an après un refus exigé par les paragraphes 122(4) et 123(3) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC). Vous n’êtes donc pas admissible à la présentation d’une nouvelle demande de semi-liberté ou de libération conditionnelle totale avant le 2 février 2018.
Lorsque ces dispositions de la LSCMLC ont été modifiées en 2012 à la suite de l’adoption de la Loi sur la sécurité des rues et des communautés (officiellement, le projet de loi C-10), le délai d’attente avant la présentation d’une nouvelle demande de semi-liberté ou de libération conditionnelle totale après un refus de la Commission a été prolongé de six mois à un an. Cette modification s’applique aux délinquants purgeant déjà une peine.
[12]
La CLCC a par la suite relevé une erreur dans sa décision et confirmé que, puisque la demande de libération conditionnelle de M. Haug avait été refusée le 17 février 2017, ce dernier ne pouvait en réalité présenter de nouvelle demande avant le 17 février 2018, et non le 2 février 2018.
[13]
Malgré un renvoi au paragraphe 123(3), lequel ne semble pas s’appliquer à la situation de M. Haug (tel qu’il a été indiqué précédemment, la nouvelle demande de libération conditionnelle totale de M. Haug est régie par le paragraphe 123(6)), la décision de la CLCC est claire : M. Haug ne peut présenter de nouvelle demande de libération conditionnelle avant l’expiration du délai d’un an à partir de la date de son dernier refus.
III.
Questions en litige
[14]
Les questions à trancher sont les suivantes :
- Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de la CLCC?
- La CLCC a-t-elle appliqué les bonnes dispositions de la LSCMLC?
- Cette affaire soulève-t-elle des questions relevant de la Charte canadienne des droits et libertés [la Charte]?
IV.
Discussion
A.
Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de la CLCC?
[15]
M. Haug affirme que la norme de contrôle applicable à la décision de la CLCC est celle de la décision correcte. Il invoque à l’appui la décision Dixon c. Canada (Procureur général), 2008 CF 889 [Dixon], dans laquelle le juge a déclaré qu’une question de droit relève de la norme de la décision correcte, car elle met en jeu l’interprétation de dispositions législatives. M. Haug fait valoir que, puisque la CLCC interprète les dispositions de la LSCMLC, la décision devrait, selon Dixon, être examinée en fonction de la norme de la décision correcte.
[16]
La jurisprudence concernant la norme de contrôle a toutefois évolué après le prononcé de la décision dans Dixon. Ainsi, l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir] et d’autres affaires qui ont suivi ont conclu qu’il convient de faire montre de déférence envers le décideur sur les questions de droit (Smith c. Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7, au paragraphe 37). Il convient ainsi de faire montre de déférence lorsqu’un décideur (la CLCC en l’espèce) interprète sa propre loi constitutive ou des lois étroitement apparentées à son mandat (la LSCMLC et le Code criminel), et la norme de contrôle applicable est présumée être celle de la décision raisonnable (Edmonton (Ville) c. Edmonton East (Capilano) Shopping Centres Ltd., 2016 CSC 47, au paragraphe 22).
[17]
Cette présomption peut être réfutée selon les catégories définies dans l’arrêt Dunsmuir (aux paragraphes 43 à 65). En l’espèce, la seule catégorie qui pourrait s’appliquer est celle des questions constitutionnelles. Dans ses observations écrites, M. Haug fait valoir que l’application des dispositions modifiées de la LSCMLC constitue une violation des droits que lui garantit l’alinéa 11h) de la Charte, car cela a pour effet d’imposer une peine rétroactive. Bien que cela puisse être considéré comme une question constitutionnelle assujettie à la norme de la décision correcte, la Cour suprême du Canada a aussi tranché que la norme de la décision raisonnable peut s’appliquer aux décisions de nature discrétionnaire qui sont prises par des décideurs administratifs et qui mettent en cause des droits constitutionnels, lorsque les dispositions législatives ne sont pas directement contestées (Doré c. Barreau du Québec, 2012 CSC 12).
[18]
En l’espèce, M. Haug ne conteste pas directement ces dispositions de la LSCMLC. Il allègue plutôt qu’elles ne devraient pas s’appliquer à lui. Ultérieurement durant sa plaidoirie, M. Haug a confirmé qu’il ne soulevait pas de question en vertu de la Charte. Ayant admis cela, et reconnu que la norme de la décision raisonnable est la norme de contrôle qui est présumée s’appliquer, je conclus que la décision de la CLCC doit être examinée en fonction de la norme de la décision raisonnable.
B.
La CLCC a-t-elle appliqué les bonnes dispositions de la LSCMLC?
[19]
M. Haug soutient que la CLCC aurait dû appliquer les dispositions de la LSCMLC concernant le délai pour la présentation de nouvelles demandes de libération conditionnelle qui étaient en vigueur au moment où il a commis ses infractions. Il fait valoir que les modifications qui ont été apportées à la LSCMLC en 2012 ne devraient pas s’appliquer rétroactivement ou rétrospectivement à sa situation.
[20]
Il existe en droit une présomption selon laquelle les lois ne doivent pas s’appliquer rétrospectivement ou rétroactivement. Tel que l’indique l’arrêt Tran c. Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2017 CSC 50, au paragraphe 43 [Tran], la présomption vise « à protéger les droits acquis et à éviter une modification de la loi qui découle d’un regard [traduction] “orient[é] vers le passé et [qui] joi[gne] de nouvelles conséquences préjudiciables à une transaction complétée” »
. Selon la présomption, « les lois ne doivent pas être interprétées comme ayant une portée rétroactive à moins que le texte de la Loi ne le décrète expressément ou n’exige implicitement une telle interprétation »
(voir aussi Colombie-Britannique c. Imperial Tobacco Canada Ltée, 2005 CSC 49, au paragraphe 71).
[21]
Pour appuyer cet argument concernant la rétroactivité, M. Haug invoque Abel v. Canada (Director of Edmonton Institution for Women), 2000 ABQB 851 [Abel], et plus particulièrement le dernier paragraphe de cette décision qui s’énonce comme suit :
[traduction]
16 L’arrêt Gamble établit clairement qu’il est essentiel à tout système juridique qui reconnaît la primauté du droit qu’un inculpé soit jugé et puni en vertu du droit en vigueur au moment où l’infraction a été commise. L’arrêt Gamble précise en outre que cette déclaration inclut l’admissibilité à la libération conditionnelle comme l’un des éléments de la « peine ». Bien que les défendeurs soutiennent que les affaires qui respectent clairement ce principe portent toutes sur des questions se posant au moment où le juge qui préside fixe la peine, elles ne s’appliquent pas lorsque les dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition influent sur l’admissibilité à la libération conditionnelle. Cette distinction ne crée toutefois pas une différence substantielle. Il est fermement établi dans nos lois que l’admissibilité à la libération conditionnelle est un élément qui cadre avec la notion de peine; la loi qui était en vigueur au moment où l’infraction s’est produite devrait donc être celle qui régit les modalités de la peine infligée à l’accusé. Par conséquent, je conclus qu’il y a lieu pour notre Cour de prononcer une déclaration selon laquelle l’admissibilité à la libération conditionnelle du demandeur devrait être déterminée en fonction des dispositions de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en vigueur au moment où l’infraction a été commise.
[22]
Ce paragraphe de l’arrêt Abel traite de l’admissibilité à la libération conditionnelle, relativement aux dispositions de la LSCMLC en vigueur au moment de la perpétration de l’infraction. Il ne traite pas de la présentation de nouvelles demandes de libération conditionnelle après un refus. L’admissibilité et la présentation de nouvelles demandes sont deux processus différents, qui sont régis par des dispositions législatives différentes.
[23]
En l’espèce, les dates d’admissibilité de M. Haug à la libération conditionnelle ont été déterminées par le paragraphe 119(1) de la LSCMLC et l’article 761 du Code criminel, présentés à l’annexe A.
[24]
Ces dispositions, qui étaient en vigueur au moment où M. Haug a commis ses infractions, ainsi qu’au moment où il a été déclaré délinquant dangereux en 2008, sont celles qui fixent ses dates d’admissibilité à la libération conditionnelle. Selon le paragraphe 119(1) de la LSCMLC, sa date d’admissibilité à une semi-liberté était août 2007, et sa date d’admissibilité à une libération conditionnelle totale était août 2010 aux termes du paragraphe 761(1) du Code criminel. Ces dates figurent dans le rapport d’évaluation en vue d’une décision, qui a été préparé afin de formuler des recommandations à la CLCC en prévision de l’examen automatique de la semi-liberté et de la libération conditionnelle totale de M. Haug. M. Haug ne conteste pas ces dates. Et, fait important à souligner, ces dates n’ont pas été modifiées par les dispositions de la LSCMLC que la CLCC a utilisées pour examiner le dossier de M. Haug.
[25]
Il s’agit d’une distinction importante, qui distingue le cas de M. Haug de l’arrêt Abel. Un détenu ne peut présenter une demande de libération conditionnelle avant sa date d’admissibilité à la libération conditionnelle. Les dispositions qui fixent les dates d’admissibilité à la libération conditionnelle de M. Haug ne sont pas les dispositions en cause en l’espèce, ni celles que la CLCC a appliquées pour rendre la décision contestée. En l’espèce, la CLCC a appliqué les paragraphes 122(4) et 123(6) de la LSCMLC qui fixent les délais pour la présentation d’une nouvelle demande de libération conditionnelle après un refus. Les modifications apportées en 2012 ont eu pour effet de prolonger, de six mois à un an, le délai avant de pouvoir présenter une nouvelle demande de libération conditionnelle après le refus d’une libération conditionnelle. Ces modifications n’ont pas modifié les dates d’admissibilité à la libération conditionnelle de M. Haug.
[26]
Aucun élément au dossier n’indique que M. Haug a présenté une demande de libération conditionnelle avant 2017. Par conséquent, lorsque ces modifications ont été apportées à la LSCMLC en 2012, M. Haug n’a perdu ni avantage ni droit dont il aurait autrement bénéficié à l’époque. En réalité, il n’a obtenu le droit de présenter une nouvelle demande de libération conditionnelle qu’après que sa demande initiale a été refusée, en 2017. Ce refus signifié en 2017 est survenu bien après les modifications apportées à la LSCMLC en 2012. Par conséquent, la modification des délais pour la présentation d’une nouvelle demande n’a pas eu d’incidence sur les droits de M. Haug au moment où il pouvait exercer ces droits (R c. Puskas, [1998] 1 RCS 1207, au paragraphe 14). En d’autres termes, les modifications aux paragraphes 122(4) et 123(6) de la LSCMLC n’entraînent aucune conséquence future pour un événement qui s’est produit dans le passé de M. Haug. L’événement déclencheur – le refus de la libération conditionnelle de M. Haug – n’avait pas encore eu lieu au moment où ces dispositions ont été modifiées.
[27]
Cette distinction entre l’admissibilité à la libération conditionnelle et le droit de présenter une nouvelle demande de libération conditionnelle ressort clairement de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Whaling, 2014 CSC 20 [Whaling CSC]. Dans l’arrêt Whaling CSC, la question en litige concernait l’abolition de la procédure d’examen expéditif ayant eu pour effet d’abroger rétrospectivement l’admissibilité à la libération anticipée pour les délinquants qui purgeaient déjà leur peine. La Cour a conclu que ce changement rétrospectif mettait en cause des droits garantis par la Charte. Dans l’affaire de M. Haug, toutefois, les modifications à la LSCMLC n’ont pas eu d’incidence sur son admissibilité à la libération conditionnelle dans le passé, celles-ci n’ayant un effet que sur son droit de présenter une nouvelle demande dans l’avenir.
[28]
Par conséquent, l’application des paragraphes 122(4) et 123(6) de la LSCMLC à la situation de M. Haug ne constitue pas une application rétrospective ou rétroactive de la loi. La CLCC a appliqué les dispositions de la LSCMLC qui étaient en vigueur au moment de la demande de M. Haug. Dans les circonstances, la CLCC a bien agi.
C.
Cette affaire soulève-t-elle une question qui relève de la Charte?
[29]
Dans ses observations écrites, M. Haug s’appuie sur l’arrêt Whaling v. Canada (Attorney General), 2012 BCCA 435 (confirmé par Whaling CSC) et soutient que la décision de la CLCC est une forme de mesure punitive plus sévère qui fait intervenir l’alinéa 11h) de la Charte. Bien que, dans sa plaidoirie, M. Haug ait déclaré qu’il n’invoquait pas la Charte, il a toutefois fait valoir que la CLCC utilisait l’expression [traduction] « non admissible »
dans sa lettre de refus et qu’elle a indiqué clairement qu’elle ne réexaminera pas sa demande avant l’expiration du délai d’un an. Selon M. Haug, cela a pour effet d’accroître la « peine »
.
[30]
L’alinéa 11h) de la Charte s’énonce comme suit :
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Dans le contexte de la libération conditionnelle, les dispositions de l’alinéa 11h) de la Charte s’entendent de « la mesure selon laquelle l’attente légitime en matière de liberté aura été trompée par l’action législative rétrospective
. La peine se cristallise par l’effet rétrospectif de l’atteinte aux attentes légitimes de liberté »
(Whaling CSC, au paragraphe 60). Par conséquent, un changement prospectif (futur) ne fait pas intervenir les mêmes règles de droit ni les mêmes préoccupations constitutionnelles qu’un changement rétrospectif ou rétroactif (Tran, au paragraphe 44).
[32]
En l’espèce, l’application des paragraphes 122(4) et 123(6) de la LSCMLC n’a pas augmenté ni prolongé la période d’incarcération de M. Haug avant qu’il soit admissible à une libération conditionnelle. Ce qui a été prolongé, c’est le délai devant s’écouler avant qu’il puisse présenter une nouvelle demande de libération conditionnelle après un refus. Ces prolongations n’ont pas eu d’effet rétrospectif sur son admissibilité à la libération conditionnelle ou sa peine; tel qu’il a été indiqué précédemment, elles sont au contraire prospectives et sont entrées en vigueur avant que le droit de M. Haug de présenter une nouvelle demande soit déclenché par un refus. On ne peut donc pas dire que ces dispositions viennent alourdir la « peine »
et qu’elles portent atteinte aux droits garantis à M. Haug en vertu de l’alinéa 11h) de la Charte.
[33]
Même si les modifications apportées à la LSCMLC en 2012 pourraient être qualifiées de rétrospectives, l’analyse ne s’arrête pas là. Dans l’arrêt Whaling CSC, la Cour suprême du Canada a déclaré ce qui suit au paragraphe 63 :
En règle générale, un changement rétrospectif aux conditions de la peine n’est pas punitif s’il n’augmente pas considérablement le risque d’une incarcération prolongée. Une procédure prévoyant une prise de décisions reposant sur la situation particulière du délinquant et le respect des droits procéduraux dans le calcul du temps d’épreuve sont des indices d’un faible risque d’une incarcération prolongée.
[34]
La LSCMLC prévoit suffisamment de garanties pour permettre, en l’espèce, la prise de décisions personnalisées comme celle prévue dans l’arrêt Whaling CSC. Le paragraphe 123(5) de la LSCMLC et le paragraphe 776(1) du Code criminel obligent ainsi la CLCC à mener un examen tous les deux ans lorsque la libération conditionnelle est refusée. Le paragraphe 123(6) de la LSCMLC permet également qu’un examen soit réalisé plus tôt, à la demande de la CLCC, comme en témoigne ce qui suit :
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Ces garanties dans la LSCMLC permettent d’examiner la situation de M. Haug en dehors du délai d’un an prévu pour la présentation d’une nouvelle demande.
V.
Dépens
[36]
Même si des dépens seraient normalement adjugés à la partie ayant gain de cause, je refuse d’adjuger des dépens à l’encontre de M. Haug étant donné sa situation.
JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1542-17
LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée;
Aucuns dépens ne sont accordés.
« Ann Marie McDonald »
Juge
ANNEXE A
Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition
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Code criminel
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COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
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T-1542-17
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INTITULÉ :
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DARYLE WILLIAM HAUG c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA
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LIEU DE L’AUDIENCE :
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Halifax (Nouvelle-Écosse)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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Le 11 avril 2018
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JUGEMENT ET MOTIFS :
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LA JUGE MCDONALD
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DATE DES MOTIFS :
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LE 15 MAI 2018
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COMPARUTIONS :
Daryle William Haug
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Pour le demandeur
(POUR SON PROPRE COMPTE)
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Tokunbo Omisade
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Pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Procureur général du Canada
Halifax (Nouvelle-Écosse)
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Pour le défendeur
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