Date : 20180223
Dossier : T-983-17
Référence : 2018 CF 214
Ottawa (Ontario), le 23 février 2018
En présence de madame la juge Roussel
ENTRE :
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SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
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demanderesse
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et
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NICOLAS MAINVILLE
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défendeur
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JUGEMENT ET MOTIFS
I.
Introduction
[1]
La Société canadienne des postes [SCP] sollicite le contrôle judiciaire d’une décision arbitrale rendue le 5 juin 2017 par l’arbitre Renaud Paquet [l’arbitre], laquelle accueille la plainte de congédiement injuste déposée par Nicolas Mainville en vertu du paragraphe 240(1) du Code canadien du travail, LRC 1985, c L-2 [Code].
[2]
Pour les raisons qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.
II.
Contexte
[3]
Monsieur Mainville est à l’emploi de la SCP depuis 1998. En janvier 2015, il est affecté au poste de gestionnaire régional de la mise en œuvre d’un projet visant à remplacer la livraison à domicile dans certains quartiers par la livraison à des boîtes aux lettres communautaires.
[4]
Le 16 mars 2016, des employés de la SCP signalent à leurs superviseurs que monsieur Mainville a déposé deux (2) colis à destination des États-Unis, dont l’adresse de l’expéditeur est celle du lieu de travail de monsieur Mainville et dont le port est assumé via l’outil d’expédition de la SCP sous un code corporatif. L’enquête interne de la SCP révèle que monsieur Mainville a effectué trente-quatre (34) envois personnels, non autorisés et non payés, en utilisant le code corporatif entre 2015 et 2016, pour une valeur d’environ mille sept cents dollars (1 700 $). Lors d’une rencontre avec les enquêteurs le lendemain, monsieur Mainville admet avoir effectué ces envois personnels, mais affirme ne pas avoir été au courant qu’il ne pouvait pas utiliser gratuitement le service des postes à des fins personnelles. Il signe une déclaration à cet effet le même jour.
[5]
Le 17 mars 2016, la SCP met fin à l’emploi de monsieur Mainville par lettre, invoquant la rupture irrémédiable du lien de confiance inhérent à sa relation d’emploi.
[6]
Le 9 mai 2016, monsieur Mainville dépose une plainte pour congédiement injuste selon le paragraphe 240(1) du Code. L’audition de la plainte se déroule sur trois (3) jours. Durant l’audience, la SCP appelle quatre (4) témoins : la supérieure immédiate de monsieur Mainville, le gestionnaire de la sécurité et des enquêtes, l’inspecteur des postes et le directeur général, John Polak. Monsieur Mainville témoigne également, mais n’appelle aucun autre témoin.
[7]
Le 5 juin 2017, l’arbitre accueille la plainte de monsieur Mainville. Il annule le congédiement pour le remplacer par une suspension d’une année et ordonne la réintégration de monsieur Mainville dans un poste comparable à celui qu’il occupait avant son congédiement ainsi que le versement de la rémunération et des bénéfices qui lui auraient été versés s’il avait toujours été à l’emploi, le tout rétroactivement au 16 mars 2017. L’arbitre ordonne également à monsieur Mainville de rembourser la somme de mille sept cents dollars (1 700 $) pour le coût des envois personnels qu’il a effectués aux frais de la SCP.
[8]
La SCP conteste cette décision. Elle estime que la décision de l’arbitre est déraisonnable tant au niveau du caractère injuste du congédiement qu’au niveau de la mesure corrective imposant la réintégration. Elle reproche notamment à l’arbitre de ne pas avoir reconnu que la relation de confiance employeur-employé a été rompue par les agissements de monsieur Mainville.
III.
Analyse
A.
Norme de contrôle
[9]
Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable à une sentence d’un arbitre en droit du travail chargé d’appliquer les dispositions portant sur le congédiement injuste prévues au Code est celle de la décision raisonnable (Wilson c Énergie Atomique du Canada Ltée, 2016 CSC 29 aux para 15-16; Banque Nationale du Canada c Lavoie, 2014 CAF 268 au para 13 [Lavoie]; Payne c Banque de Montréal, 2013 CAF 33 aux para 32, 35 [Payne]).
[10]
Lorsque la norme du caractère raisonnable s’applique, le rôle de la Cour est de déterminer si la décision appartient aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit »
. Si « le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité »
, il n’appartient pas à cette Cour d’y substituer l’issue qui lui serait préférable (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47 [Dunsmuir]; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 au para 59; Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 aux para 14-18 [Newfoundland Nurses]).
B.
Le congédiement injuste
[11]
La SCP soutient que la décision de l’arbitre est déraisonnable au motif que ses conclusions sont contradictoires et que son analyse ne permet pas de comprendre comment il a pu conclure que la relation de confiance employeur-employé n’a pas été rompue par les agissements de monsieur Mainville.
[12]
La Cour ne peut souscrire à la position de la demanderesse.
[13]
Dans McKinley c BC Tel, 2001 CSC 38 [McKinley], la Cour suprême du Canada enseigne que ce ne sont pas tous les comportements malhonnêtes qui justifient le congédiement d’un employé et que « pour déterminer si un employeur est en droit de congédier un employé pour cause de malhonnêteté, il faut apprécier le contexte de l’inconduite alléguée. Plus particulièrement, il s’agit de savoir si la malhonnêteté de l’employé a eu pour effet de rompre la relation employeur-employé »
. Selon la Cour, ce critère s’énonce de plusieurs façons. Elle mentionne à titre d’exemple qu’un motif de congédiement existera lorsque la malhonnêteté : (1) viole une condition essentielle du contrat de travail; (2) constitue un abus de la confiance inhérente à l’emploi; ou (3) est fondamentalement ou directement incompatible avec les obligations de l’employé envers son employeur (McKinley au para 48). Ces exemples sont repris par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Lavoie aux paragraphes 15 et 16 de la décision.
[14]
La Cour suprême du Canada souligne que cette approche contextuelle exige l’examen de la nature de l’inconduite et des circonstances qui l’ont entourée. Dans certains cas, elle pourra entraîner un congédiement lorsqu’on conclut qu’il y a eu vol, malversation ou fraude grave (McKinley au para 51). Par ailleurs, des cas d’inconduites moins graves pourront mener à des sanctions moins sévères. À cet égard, la Cour donne l’exemple de l’employeur qui déduit du salaire de son employé le montant d’argent perdu à la suite d’une mauvaise utilisation mineure des biens de l’entreprise (McKinley para 52). Selon la Cour, il faut établir un équilibre entre la gravité de l’inconduite d’un employé et la sanction infligée afin de respecter le principe de la proportionnalité qui sous-tend l’approche contextuelle (McKinley au para 53). D’avis que chaque cas doit être considéré comme un cas d’espèce, la Cour rejette ainsi le courant jurisprudentiel selon lequel toutes les formes de malhonnêteté constituent un motif valable de congédiement, peu importe les facteurs et les circonstances ayant entouré le comportement, la nature ou la gravité de cette malhonnêteté, ou encore la question de savoir s’il y a eu violation des conditions essentielles de la relation employeur-employé (McKinley au para 57).
[15]
Après examen de la décision dans son ensemble, la Cour estime que l’arbitre a appliqué le cadre juridique approprié pour déterminer si le congédiement de monsieur Mainville était justifié. Il a examiné la nature de l’inconduite ainsi que les circonstances l’ayant entourée, sa gravité et dans quelle mesure elle a influé sur la relation de confiance employeur-employé, tout en ayant à l’esprit l’objectif d’assurer un équilibre proportionnel entre la gravité de l’inconduite et la sanction infligée à monsieur Mainville.
[16]
L’arbitre conclut d’abord que monsieur Mainville n’a pas voulu frauder son employeur. À la lumière de la preuve fournie par les parties, il estime crédible la version présentée par monsieur Mainville, notamment lorsqu’il affirme avoir ouvertement utilisé les services postaux de son employeur croyant qu’il en avait le droit et qu’il s’agissait d’un privilège qui lui était accordé comme employé. L’arbitre souligne que monsieur Mainville a été très cohérent à cet égard en admettant d’entrée de jeu aux enquêteurs les envois personnels reprochés, en les informant qu’il avait toujours agit ainsi et en détaillant comment il s’y prenait pour faire les envois ouvertement avant que l’outil électronique existe.
[17]
L’arbitre affirme que non seulement monsieur Mainville lui a semblé être un homme d’une grande intégrité qui était pleinement dévoué à l’égard de son employeur, mais en plus, la SCP n’a soumis aucune preuve pour l’amener à douter de l’explication fournie par monsieur Mainville. L’arbitre accorde peu de poids au témoignage de monsieur Polak selon lequel l’explication de monsieur Mainville serait « entièrement malhonnête »
, pour le motif notamment qu’il a pris la décision de congédier monsieur Mainville sur la base du rapport d’enquête seulement, sans le rencontrer et sans avoir essayé d’évaluer sa motivation et sa sincérité. L’arbitre souligne que l’employeur aurait pu vérifier la véracité des propos de monsieur Mainville voulant qu’il agissait ouvertement et qu’il lui arrivait de demander à son assistante ou à celle de son patron de faire ses envois personnels dans ses anciens emplois au sein de la SCP et qu’avant l’outil d’envoi électronique, il complétait le « manifeste d’envoi »
, en gardait une copie et en remettait une à son patron.
[18]
Ayant conclu que la conduite de monsieur Mainville n’était pas frauduleuse, l’arbitre estime néanmoins que monsieur Mainville n’est pas sans blâme et que ses actions justifient l’imposition de mesures disciplinaires sévères en raison de leur caractère répréhensible. Il considère que les actions de monsieur Mainville démontrent un manque de jugement et un comportement nonchalant, qui s’écarte de celui d’une personne raisonnable.
[19]
La SCP fait valoir que les conclusions de l’arbitre sont contradictoires puisque la croyance de monsieur Mainville ne peut être crédible si l’arbitre juge également qu’une personne raisonnable ne pourrait avoir la même croyance. Avec respect, la Cour n’y voit pas nécessairement une contradiction. Un employé honnête et intègre peut également faire preuve de négligence et mériter une sanction autre que le congédiement (Payne au para 82).
[20]
Reconnaissant la gravité de l’inconduite commise par monsieur Mainville, l’arbitre examine ensuite si celle-ci est conciliable avec la relation de confiance employeur-employé. Il décide que l’inconduite de monsieur Mainville n’est pas suffisante pour justifier son congédiement. Pour conclure ainsi, il considère notamment le montant d’argent dont a été privé la SCP, l’absence d’intention frauduleuse de la part de monsieur Mainville, le défaut de la SCP de s’interroger sur la sincérité des explications fournies par monsieur Mainville, l’absence d’entrevue disciplinaire pour discuter des résultats de l’enquête, le poste de gestion qu’occupait monsieur Mainville au sein de la SCP, ses longues années de service et son rendement supérieur lors de l’exercice de ses fonctions. En tenant compte de tous ces facteurs, l’arbitre estime plutôt qu’une suspension d’une année est justifiée.
[21]
La SCP soutient que les motifs de l’arbitre ne permettent pas de comprendre comment il aurait pu conclure que la relation de confiance n’a pas été brisée et à cet égard, elle s’appuie sur la décision Lavoie.
[22]
Il y a lieu de distinguer la décision Lavoie de la présente affaire. Dans l’affaire Lavoie, la Cour d’appel fédérale reproche notamment à l’arbitre de n’avoir ni tenté d’évaluer la gravité des actes posés dans le contexte précis qui était devant lui et de n’avoir non plus tenté d’évaluer les conséquences de ces actes sur la relation employeur-employé afin de déterminer si le lien de confiance a été définitivement rompu (Lavoie au para 24). La Cour d’appel fédérale statue également que les motifs de l’arbitre n’appuient nullement sa conclusion selon laquelle le lien de confiance n’a pas été rompu (Lavoie au para 30).
[23]
En l’instance, les motifs de l’arbitre révèlent au contraire une analyse de chacun des éléments énoncés dans l’arrêt McKinley. De plus, lus dans leur ensemble, ils permettent de comprendre comment l’arbitre a pu conclure que la relation de confiance employeur-employé n’a pas été définitivement brisée. L’arbitre accorde peu de poids au témoignage de monsieur Polak selon lequel il considérait « totalement malhonnête »
l’explication de monsieur Mainville. Ce faisant, le fondement même sur lequel s’appuie monsieur Polak pour conclure que la relation de confiance a été rompue est mis en doute.
[24]
Il est bien établi qu’il n’est pas nécessaire que les motifs de l’arbitre soient parfaits ou exhaustifs. Il suffit que les motifs soutiennent de façon adéquate le fondement de la décision et qu’ils permettent de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables qui se justifient au regard des faits et du droit (Newfoundland Nurses aux para 15, 18; Dunsmuir au para 47). Considérant la norme de contrôle applicable en l’instance, la déférence qui s’impose à l’égard des conclusions de l’arbitre sur la crédibilité des témoignages et l’expertise de l’arbitre en matière de congédiement injuste, la Cour ne peut statuer que la conclusion de l’arbitre ne fait pas partie de ces issues possibles acceptables. Il n’appartient pas à la Cour de soupeser à nouveau la preuve pour se substituer à l’arbitre, et ce même si la Cour aurait pu en arriver à une autre conclusion.
C.
La réintégration
[25]
La SCP avance de manière subsidiaire que la mesure corrective imposant la réintégration de monsieur Mainville est déraisonnable puisque, premièrement, elle fait appel au mauvais critère juridique et, deuxièmement, elle fait fi de la relation de confiance « profondément brésillée »
entre la SCP et monsieur Mainville.
[26]
La SCP affirme que l’arbitre a commis une erreur en se demandant si la réintégration est « impossible »
à réaliser, plutôt que de considérer de manière réfléchie ou judicieuse les sept (7) facteurs énoncés au paragraphe 11 de la décision Banque de Montréal c Sherman, 2012 CF 1513 et repris au paragraphe 88 de la décision Payne, dont notamment ceux concernant la détérioration des relations personnelles entre monsieur Mainville et la direction et d’autres employés ainsi que la disparition de la relation de confiance avec un employé de rang supérieur. La SCP reproche également à l’arbitre de motiver son analyse par des observations de nature spéculative selon lesquelles il conclut qu’à l’avenir, monsieur Mainville sera un employé formé, productif et doublement motivé. L’arbitre aurait plutôt dû examiner si la SCP pourrait un jour de nouveau faire confiance à monsieur Mainville.
[27]
De plus, la SCP argumente que l’arbitre a déraisonnablement fait fi de la rupture de la relation de confiance. Le maintien de la relation de confiance employeur-employé est crucial dans le contexte du droit de l’emploi et du travail et, ainsi, constitue un critère qui revêt une importance centrale lorsqu’il revient à l’arbitre de décider si la réintégration est une mesure corrective appropriée. La SCP reproche à l’arbitre de n’avoir accordé aucun poids au témoignage de monsieur Polak lorsque ce dernier a partagé ses graves préoccupations selon lesquelles la réintégration ne serait pas une mesure corrective appropriée étant donné les circonstances et le bris irréparable de la relation de confiance employeur-employé. Pourtant, l’arbitre aurait lui-même mis l’accent sur le caractère répréhensible des actes posés par monsieur Mainville, son manque de jugement et son comportement nonchalant. Selon la SCP, les motifs de l’arbitre quant à la réintégration de monsieur Mainville se justifient difficilement au vu du dossier et du droit applicable.
[28]
La Cour n’est pas persuadée par les arguments de la SCP.
[29]
Il est bien établi que l’arbitre possède une large discrétion pour accorder les mesures de redressement énumérées au paragraphe 242(4) du Code, y compris l’indemnisation et la réintégration (Transport Réal Ménard inc c Ménard, 2015 CF 616 aux paras 38 et 39; Payne au para 87). Les facteurs pertinents pour juger de l’opportunité de la réintégration recoupent les facteurs contextuels à considérer pour déterminer si le congédiement est injuste. Cela comprend l’évaluation de la relation de confiance employeur-employé de manière prospective (Payne au para 88). Cette évaluation doit se faire également de façon objective puisqu’il va de soi que l’employeur qui a congédié un employé prétendra nécessairement que le lien de confiance est irrémédiablement rompu.
[30]
Contrairement aux prétentions de la SCP, l’arbitre n’applique pas le critère de l’impossibilité pour décider du caractère approprié de la réintégration. Il appert des motifs, lus dans leur ensemble, que la décision de l’arbitre repose sur un ensemble de facteurs, y incluant celui de la viabilité de la relation de confiance employeur-employé. L’arbitre considère l’honnêteté démontrée par monsieur Mainville lorsqu’il a rencontré les enquêteurs, son intégrité, ses longues années de service, son dossier disciplinaire vierge, ses évaluations de rendement positives, le fait que monsieur Mainville aura lourdement payé pour son erreur de jugement avec la suspension d’une année de salaire, l’effet de la suspension sur la réputation de monsieur Mainville lorsqu’il retournera au travail ainsi que la possibilité de réintégrer monsieur Mainville dans le poste et les fonctions qu’il occupait au moment de son congédiement.
[31]
L’arbitre considère également le témoignage de monsieur Polak voulant que le lien de confiance avec monsieur Mainville ait été brisé, qu’il soit important pour l’employeur d’être cohérent dans les mesures disciplinaires prises contre les employés syndiqués et ses cadres, qu’il soit difficile de lui confier de nouveau la gestion d’employés et qu’il soit difficile de le réintégrer, car la direction aurait toujours un doute sur son honnêteté et son éthique, ainsi que sur sa capacité de faire les bons choix. Toutefois, l’arbitre n’y accorde pas beaucoup de poids considérant qu’il rejette la prémisse sur laquelle se fonde la croyance de monsieur Polak, soit le caractère malhonnête de l’explication fournie par monsieur Mainville. À titre de juge des faits, non seulement l’arbitre n’avait aucune obligation d’accepter l’affirmation de la part de l’employeur, mais il était également raisonnable pour lui de conclure que le lien de confiance n’était pas irrémédiablement rompu considérant que monsieur Polak n’a jamais rencontré monsieur Mainville avant d’arriver à la conclusion qu’il avait agi de façon malhonnête et que la relation employeur-employé devait être terminée. C’est dans ce contexte que l’arbitre mentionne que la réintégration ne lui semble pas du tout impossible. Ce n’est pas parce que l’arbitre utilise le mot « impossible »
que l’on doit nécessairement lui imputer une application erronée du cadre juridique applicable. La Cour répète qu’il ne lui appartient pas de soupeser à nouveau la preuve présentée par les témoins.
[32]
La SCP reproche également à l’arbitre de motiver son analyse par des observations de nature spéculative lorsqu’il affirme qu’à l’avenir, monsieur Mainville sera un employé formé, productif et doublement motivé. Avec égards, la Cour est d’avis qu’il ne s’agit pas de spéculation. En considérant les facteurs militant en faveur de la réintégration, l’arbitre tient compte du fait que monsieur Mainville est un employé d’expérience, dont les évaluations de rendement ont toujours été positives. Encore une fois, les propos de l’arbitre doivent être considérés dans leur contexte.
[33]
Il est bien établi qu’une cour de révision se doit d’examiner la décision d’un tribunal administratif dans son ensemble, à la lumière du dossier, pour décider si elle est raisonnable (Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36 au para 53; Newfoundland Nurses au para 18). Le désaccord de la SCP avec la manière dont l’arbitre a examiné la preuve et déterminé les questions à trancher ne rend pas la décision déraisonnable.
[34]
À la lumière de ce qui précède, la Cour est d’avis que la décision de l’arbitre répond aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence et que sa conclusion appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir au para 47).
[35]
Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens au montant de 3 000 $ en faveur de monsieur Mainville.
JUGEMENT au dossier T-983-17
LA COUR STATUE que :
La demande de contrôle judiciaire est rejetée;
Les dépens au montant de 3 000 $ sont accordés au défendeur.
« Sylvie E. Roussel »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER :
|
T-983-17
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INTITULÉ :
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SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES c NICOLAS MAINVILLE
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LIEU DE L’AUDIENCE :
|
OTTAWA (ONTARIO)
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DATE DE L’AUDIENCE :
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LE 12 FÉVRIER 2018
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JUGEMENT ET motifs :
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LA JUGE ROUSSEL
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DATE DES MOTIFS :
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LE 23 février 2018
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COMPARUTIONS :
Karen Jensen
Stéphane Erickson
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Pour lA DEMANDERESSE
|
Sean T. McGee
|
Pour le défendeur
|
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Norton Rose Fulbright Canada
S.E.N.C.R.L., s.r.l.
Avocats
Ottawa (Ontario)
|
Pour lA DEMANDERESSE
|
Nelligan O’Brien Payne
S.E.N.C.R.L, s.r.l.
Avocats
Ottawa (Ontario)
|
Pour le défendeur
|