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Date : 20160812


Dossier : T-172-15

Référence : 2016 CF 929

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 12 août 2016

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

THE ROYAL CONSERVATORY OF MUSIC

ET THE FREDERICK HARRIS MUSIC CO., LIMITED

demanderesses

et

CLARKE MACINTOSH FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE NOVUS VIA MUSIC GROUP INC.

ET CONSERVATORY CANADA

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Nature de l’affaire

[1]               La Cour est saisie d’une demande présentée dans le cadre d’une procédure de jugement sommaire en vertu de l’alinéa 34(4)a) de la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. (1985), ch. C-42 [la « Loi »], et de l’alinéa 300b) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106. Les demanderesses font valoir qu’elles détiennent ou contrôlent le droit d’auteur sur 21 œuvres musicales et que les défendeurs ont publié ces œuvres sans leur autorisation. Les demanderesses affirment également que les défendeurs ont apporté un certain nombre de modifications à l’apparence de leurs publications ressemblant à s’y méprendre aux publications des demanderesses au point de créer de la confusion, en faisant passer leurs publications pour celles des demanderesses.

[2]               Les défendeurs nient les deux allégations et prétendent que cette demande a été présentée pour un motif inavoué.

[3]               Pour les motifs qui suivent, je conviens avec les demanderesses que les défendeurs ont violé leur droit d’auteur. Toutefois, je ne suis pas d’accord pour dire qu’il y a eu commercialisation trompeuse.

II.                Faits

[4]               Le Royal Conservatory of Music [le « Royal Conservatory »] est un organisme de bienfaisance enregistré en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), dont l’établissement principal est situé à Toronto. L’organisme a initialement été constitué en personne morale en 1886 en tant que le Toronto Conservatory of Music, et a pris sa forme actuelle à titre d’entité juridique distincte en 1991 en vertu d’une loi spéciale du législateur ontarien (Royal Conservatory of Music Act, 1991, SO 1991, c Pr17, modifiée par la Royal Conservatory of Music Act, 2013, SO 2013, c Pr4). Le Royal Conservatory est l’un des établissements d’enseignement de la musique les plus importants au monde : parmi nombre d’activités, il publie diverses séries de livres de musique gradués à caractère pédagogique, pour une variété d’instruments. Le Royal Conservatory a des revenus globaux annuels d’environ 35 à 40 millions de dollars.

[5]               Frederick Harris Music Co., Limited [« Frederick Harris »] est une société ontarienne sans but lucratif, qui a initialement été constituée en personne morale en 1940. Le Royal Conservatory est l’unique actionnaire inscrit de Frederick Harris, qui est l’éditeur exclusif des séries de livres de musique à caractère pédagogique du Royal Conservatory.

[6]               Clarke MacIntosh est l’ancien président et directeur général de Frederick Harris. M. MacIntosh a commencé à travailler pour Frederick Harris en 1992 à titre de directeur commercial. Il a été promu au poste de vice-président en 1999, puis a occupé le poste de président et directeur général de 2002 à 2006.

[7]               Pendant que M. MacIntosh travaillait pour Frederick Harris, les demanderesses ont élaboré un système de codage couleur pour leurs livres de musique gradués. M. MacIntosh affirme toutefois qu’il n’a pas directement participé à ce processus. Il a quitté la société le 28 février 2006 et, le 1er septembre 2006, il a constitué en personne morale Novus Via Music Group Inc. [« Novus »].

[8]               Peu de temps après, Frederick Harris a intenté une poursuite contre M. MacIntosh et Novus, alléguant que M. MacIntosh avait contrevenu à ses obligations contractuelles et fiduciaires envers elle en publiant une série de livres de piano gradués, semblable à une autre série élaborée par Frederick Harris, mais que cette dernière n’a jamais publié pendant la durée des fonctions de M. MacIntosh. Cette poursuite a finalement été abandonnée le 26 juillet 2007.

[9]               Novus a été dissoute le 30 juin 2014 pour défaut de produire sa déclaration de revenus des sociétés. M. MacIntosh a néanmoins continué d’exercer ses activités sous le nom de Novus. Il soutient que les procédures actuelles l’ont empêché de rétablir la personnalité juridique de Novus.

[10]           Conservatory Canada est un organisme de bienfaisance enregistré et une société sans but lucratif, constituée en société en vertu de la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif, L.C. 2009, ch. 23. Le premier organisme qui a précédé Conservatory Canada, le London Conservatory, a été fondé en 1891, et Conservatory Canada a pris sa forme actuelle en 1997.

[11]           Comme le Royal Conservatory, Conservatory Canada est un établissement d’enseignement de la musique qui, notamment, élabore une série de livres de musique gradués à caractère pédagogique. Contrairement au Royal Conservatory, Conservatory Canada est un petit établissement qui ne comprend que trois membres du personnel administratif et un conseil d’administration constitué de bénévoles. Ses revenus annuels dépassent à peine 500 000 $. En élaborant ses programmes d’études en musique, Conservatory Canada rassemble des programmes et du matériel, puis trouve un éditeur pour gérer ce matériel. Conservatory Canada n’a pas son propre éditeur, comme Frederick Harris.

[12]           En 1999, Conservatory Canada a publié une série de livres de musique en onze niveaux pour piano sous le nom « The New Millennium Series » [la « série »]. Il a choisi Waterloo Music Company Ltd [« Waterloo »] comme éditeur de la série. Comme je l’expliquerai, au fil du temps, d’autres éditeurs ont participé à l’impression de la série, et deux éditions subséquentes de la série ont été publiées : l’une en 2012 et l’autre en 2014.

[13]           La série comprend environ 450 pièces musicales. Frederick Harris a obtenu une licence pour 21 de ces pièces – environ 5 % de l’ensemble des pièces – pièces pour lesquelles Frederick Harris avait soit obtenu une cession du droit d’auteur, soit conservé les droits de publication exclusifs au Canada. Ces œuvres, qui constituent le fondement du litige, ainsi que le nom de leurs compositeurs sont joints à titre d’annexe B aux présents motifs.

[14]           Des négociations visant à obtenir l’autorisation de publier ces 21 œuvres ont eu lieu entre M. MacIntosh, qui, à l’époque, travaillait pour Frederick Harris, et Waterloo, l’éditeur de Conservatory Canada à ce moment-là. Les défendeurs soutiennent que Waterloo a entrepris ces négociations au nom de Conservatory Canada, mais que, malheureusement, ni les demanderesses ni les défendeurs n’ont été en mesure de trouver une copie papier de cette entente [l’« entente de 1999 »]; celle-ci n’a donc pas été produite en preuve devant la Cour.

[15]           Le dossier comprenait d’autre part certains rapports de redevances et des paiements que Waterloo avait versés à Frederick Harris pour la publication des œuvres. Le dernier de ces versements, soit 1 405,81 $, a été effectué par Waterloo en avril 2006 pour l’année civile 2005. En contre-interrogatoire, Debbie Morrissey, la contrôleuse responsable de la comptabilité et des documents financiers de Royal Conservatory et de Frederick Harris, a admis que les demanderesses savaient qu’elles n’avaient pas perçu les redevances sur les œuvres depuis 2006, mais elles n’ont pas pris les mesures pour percevoir les redevances qui leur étaient dues.

[16]           Selon Patricia Frehlich, présidente du conseil d’administration de Conservatory Canada, Waterloo a été acquise par St. John’s Music Ltd. [« St. John’s »], un autre éditeur de musique, aux alentours de 2004. St. John’s a poursuivi la publication de la série pour le compte de Conservatory Canada jusqu’en 2007, jusqu’à ce que Mayfair Music Publications [« Mayfair »] devienne l’éditeur de Conservatory Canada. Mayfair a continué à publier la série jusqu’en 2014, jusqu’à ce que Novus prenne la relève. Comme dans le cas de l’entente initiale de 1999, les défendeurs n’ont pas été en mesure de retrouver d’ententes conclues entre Conservatory Canada et Mayfair.

[17]           En 2011, Conservatory Canada a commencé à élaborer des plans pour une [traduction] « édition visant à souligner le 120e anniversaire » de la série [l’« édition Anniversary »]. Conservatory Canada a décidé de remplacer la couverture de la série de 1999 qui était noire et sur laquelle figurait un piano à queue entouré de couleurs correspondant à des niveaux d’apprentissage précis. Les nouvelles couvertures faisaient mention du 120e anniversaire de Conservatory Canada et remplaçaient la bordure noire par une bordure très colorée, correspondant aux différents niveaux d’apprentissage.

[18]           L’édition Anniversary, publiée par Mayfair, a été mise en vente en 2012. Comme pour la première édition de la série publiée en 1999, l’édition Anniversary comprenait également les 21 œuvres musicales.

[19]           Au printemps 2014, les relations entre Conservatory Canada et Mayfair étaient tendues. Conservatory Canada prétendait qu’il lui était dû beaucoup d’argent en redevances impayées.

[20]           Le 20 mai 2014, Steven Loweth, directeur général de Mayfair, reconnaissant [traduction] « que des redevances impayées étaient dues à Conservatory Canada », a présenté une proposition visant à maintenir la relation professionnelle en tant qu’éditeur, offrant notamment de céder à Conservatory Canada [traduction] « tous les droits rattachés aux livres actuellement protégés par le droit d’auteur par Waterloo ».

[21]       Conservatory Canada a rejeté cette proposition, déclarant dans une lettre de réponse que [traduction] « Conservatory Canada est l’auteur desdites publications et que, de par leurs droits moraux, les auteurs ont toujours le droit de revendiquer leurs créations. Mayfair était notre éditeur, mais a violé le contrat pour avoir omis de verser des redevances. Lorsqu’un éditeur ne verse pas de redevances pendant une période prolongée, les droits reviennent généralement à l’auteur ».

[22]       En avril 2014, M. MacIntosh est devenu un [traduction] « conseiller spécial » et un membre du comité exécutif du conseil d’administration de Conservatory Canada. En juillet 2014, après la détérioration de la relation entre Conservatory Canada et Mayfair, Novus, l’entreprise de M. MacIntosh, est devenue l’éditeur de Conservatory Canada. Novus a alors publié la nouvelle édition 2014 de la série [l’« édition 2014 »]. Les défendeurs affirment que l’édition 2014 est inchangée par rapport à l’édition Anniversary de 2012, car elle ne comprend qu’un balayage numérique de l’édition 2012 ainsi que des modifications très mineures et sans importance.

[23]           En août 2014, les demanderesses ont appris que la série de Conservatory Canada serait publiée par Novus. Le 17 novembre 2014, Elaine Rusk, vice-présidente de Royal Conservatory et éditrice de Frederick Harris, a envoyé un courriel à Victoria Warwick, directrice exécutive de Conservatory Canada pour l’informer que l’on n’avait pas communiqué avec Frederick Harris concernant la reproduction des 21 œuvres dans l’édition la plus récente. Elle s’est exprimée en ces termes :

[TRADUCTION]

Le contenu est-il le même que celui de l’édition précédente? Dans l’affirmative, vous devriez savoir que personne n’a communiqué avec nous concernant l’autorisation de réimprimer les œuvres protégées par le droit d’auteur de FHMC [Frederick Harris] figurant dans la série.

[24]           Mme Rusk n’a reçu aucune réponse de Mme Warwick ni de Conservatory Canada. Elle a écrit à Mme Warwick le 9 décembre 2014, en lui faisant suivre une copie de son courriel daté du 17 novembre. Dans son courriel de suivi du 9 décembre, Mme Rusk a ajouté ce qui suit :
[traduction]

La présente est simplement pour vous aviser que personne n’a communiqué avec nous au sujet de l’autorisation de reproduire les œuvres protégées par le droit d’auteur de Frederick Harris dans la série Millenium [sic] devant être publiée par Novus.

[25]           Le 10 décembre 2014, Derek Oger, le nouveau directeur exécutif de Conservatory Canada, a déclaré qu’il mènerait enquête et fournirait des précisions à Frederick Harris, expliquant ainsi la situation dans le courriel qu’il a envoyé à Mme Rusk :

[TRADUCTION]

« Je m’appelle Derek Oger, et je suis le nouveau directeur exécutif de Conservatory Canada. Victoria [Warwick] ne travaille plus avec nous. J’aborderai la question avec le nouvel éditeur et vous reviendrai le plus rapidement possible avec des précisions.

[26]           Il n’y a eu aucune autre communication entre les parties sur cette question jusqu’à ce que les demanderesses soumettent la présente demande le 5 février 2015.

A.                L’absence de l’entente de 1999

[27]           Tel qu’il a été susmentionné, aucune des parties n’a été en mesure de trouver un exemplaire de l’entente de 1999 conclue entre Frederick Harris et Waterloo. Sans ce document clé, la Cour a dû reconstituer, selon la meilleure preuve disponible, les dispositions financières et contractuelles intervenues entre les parties.

[28]       M. MacIntosh, qui prenait part aux négociations à cette époque en tant qu’employé de Frederick Harris, affirme que Waterloo a négocié l’entente de 1999 pour le compte de Conservatory Canada. Dans son affidavit soumis à notre Cour, il déclare qu’il y a une distinction à faire dans le secteur de l’édition musicale entre [traduction] les « compilateurs » et les [traduction] « éditeurs » : Conservatory Canada est le compilateur en ce sens qu’il conserve généralement les autorisations relatives aux œuvres protégées par le droit d’auteur, tandis que l’éditeur (Waterloo, à l’époque pertinente), négocie et administre généralement les différents droits visés par la publication des œuvres du compilateur, mais, contrairement au [traduction] « compilateur », n’acquiert aucun droit sur les œuvres.

[29]           M. MacIntosh soutient également que l’entente de 1999 visait le cycle de vie de la publication au prorata des redevances. Il comprend par là que [traduction] « dans la mesure où un éditeur conserve un inventaire raisonnable de la publication mise en vente, cette dernière est considérée comme étant “en impression” et “vivante” aux fins de tout engagement contractuel ».

[30]           Les défendeurs font remarquer que le dernier paiement de redevances que Waterloo a versé à Frederick Harris était [TRADUCTION] « des redevances au prorata pour 2005 » et prétend que cela confirme l’interprétation de l’entente par M. MacIntosh.

[31]           Les demanderesses, en revanche, attirent l’attention de la Cour sur une entente d’autorisation intervenue en 1999 entre Waterloo et une compositrice, Beverly Porter [l’« entente Porter »], dans laquelle Mme Porter a accordé à Waterloo, l’éditeur de l’époque, le droit de publier et d’utiliser son œuvre « Chromatic Rag » [traduction] « dans toutes les éditions du répertoire [de la série] actuellement à l’étape de production ». L’entente Porter ne fait aucune mention de Conservatory Canada et indique que [traduction] « les titulaires des droits d’auteur recevront une part égale des redevances au prorata des ventes annuelles de la série sur une période de 10 ans ».

B.                 Demande fondée sur la commercialisation trompeuse

[32]           En 1987, le Royal Conservatory a commencé à publier une série pédagogique pour piano, la « Celebration Series Perspectives » [la « série Celebration »]. La série Celebration propose onze niveaux à difficulté croissante. Chaque niveau comprend des livres de répertoire et de techniques. Les couvertures des livres sont conçues de façon à ce que chaque niveau soit associé à une couleur précise.

[33]           Le système de codage couleur de la quatrième édition de la série Celebration, du niveau préparatoire au niveau 10 se présente ainsi : jaune (0), orange (1), rouge (2), violet pâle (3), bleu pâle (4), vert (5), bleu marine (6), rouge foncé (7), violet foncé (8), brun pâle (9) et vert foncé (10). Ce système de codage couleur a été élaboré en 2001 par l’équipe de commercialisation de Frederick Harris qui, à l’époque, était dirigée par M. MacIntosh, et a depuis été appliqué à d’autres séries et publications du Royal Conservatory. Mme Rusk (de chez Frederick Harris) indique que cette combinaison de couleurs est propre au Royal Conservatory et [traduction] « qu’elle permet aux enseignants et aux étudiants de retrouver simplement la couleur dont ils ont besoin et de choisir facilement tous les livres requis pour un niveau donné ».

III.             Les thèses des parties

[34]           Comme je l’expliquerai plus en détail ci-après, deux questions sont soulevées par les demanderesses dans la présente demande, soit que i) les défendeurs n’étaient pas autorisés à publier les 21 œuvres sur lesquels Frederick Harris exerçait un contrôle dans l’édition 2014; ii) l’édition porte atteinte aux droits du Royal Conservatory suivant l’alinéa 7b) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 [la Loi sur les marques de commerce], en se fondant sur la commercialisation trompeuse. Les défendeurs rejettent ces deux allégations. Ces derniers soulèvent une autre question, soit que la présente demande a été présentée pour un motif inavoué et qu’elle est abusive.

A.                Les demanderesses

[35]           Les demanderesses soutiennent qu’aucun fondement juridique ne permet de conclure que l’autorisation accordée à Waterloo aux termes de l’entente de 1999 peut s’appliquer à l’édition 2014 pour les raisons qui suivent.

[36]           Premièrement, les demanderesses avancent que chacune des éditions, soit l’édition 1999, l’édition Anniversary et l’édition 2014 de la série, nécessitait une autorisation distincte.

[37]           Deuxièmement, elles soutiennent que l’autorisation initiale de l’entente de 1999 avait été accordée à Waterloo et non à Conservatory Canada. Waterloo a alors transmis ces droits à St. John’s Music, qui les a par la suite transmis à Mayfair, puis, lorsque Conservatory a mis fin à sa relation avec Mayfair en 2014, la chaîne d’autorisations liant Conservatory Canada et les demanderesses s’est brisée.

[38]       D’une façon ou d’une autre, l’essentiel pour les demanderesses est que la seule autorisation accordée à Waterloo en 1999 visait la publication des 21 œuvres dans l’édition 1999 de la série, et, puisque Frederick Harris avait accordé cette autorisation à Waterloo et non à Conservatory Canada, aucune autorisation n’a été accordée à Conservatory Canada. Selon les demanderesses, l’entente Porter est compatible avec cette position. Elles prétendent qu’il s’agit de [traduction] « l’unique élément de preuve matérielle dont nous disposons, qui nous donne une idée de ce à quoi l’autorisation aurait pu ressembler » (transcription de l’audience, à la page 25 [la « transcription »]) et que l’entente de 1999 aurait contenu exactement les mêmes conditions d’autorisation (transcription, à la page 28).

[39]           Les demanderesses affirment également que les défendeurs savaient qu’ils n’avaient pas l’autorisation requise pour publier l’édition 2014. Au moment où ces derniers ont réalisé que Mayfair leur devait de l’argent, mais qu’ils n’avaient aucun document établissant l’entente d’édition de Mayfair, ils auraient dû réaliser qu’ils n’avaient pas l’autorisation de publier la nouvelle édition. Qui plus est, Conservatory Canada a officiellement été avisée dans les courriels de novembre et décembre 2014 de Mme Rusk qu’elle n’avait ni cherché à obtenir ni obtenu l’autorisation de reproduire les 21 œuvres contestées dans l’édition 2014.

[40]           Pour ce qui est de l’allégation suivant l’alinéa 7b) de la Loi sur les marques de commerce, les demanderesses soutiennent que Conservatory Canada avait adopté cette combinaison de couleurs dans la série Celebration pour l’édition 2014 de la série. Elles soulignent également que leurs livres sont reliés par des agrafes, et que Conservatory Canada est passé de la reliure spirale dans l’édition 1999 de la série à la reliure avec agrafes au moment de la publication de l’édition Anniversary. Les demanderesses citent la décision Iona Appliances Inc v Hoover Canada Inc (1988), 32 CPR (3d) 304, pour affirmer que les modifications à l’apparence de l’édition Anniversary ont pour effet de rendre cette édition à ce point similaire à la série Celebration de 2008 qu’il est raisonnable de déduire que l’intention était de tromper, entraînant par ce fait même une probabilité de confusion.

[41]           En ce qui a trait aux recours, les demanderesses réclament des dommages-intérêts préétablis suivant l’alinéa 38.1a) de la Loi. Elles affirment que la reproduction de leurs 21 œuvres musicales était à des fins commerciales et qu’elles s’attendraient donc à recevoir un montant se situant entre 500 $ et 20 000 $ en dommages-intérêts pour chacune des œuvres. Pour justifier leur demande, elles font remarquer que, malgré le fait que les défendeurs aient été avisés qu’ils n’avaient pas l’autorisation nécessaire pour publier, ils ont continué à commercialiser et à promouvoir les œuvres. Elles ont particulièrement attiré l’attention de la Cour sur la présence de M. MacIntosh à la conférence de la Music Teachers National Association [« MTNA »] à Las Vegas, en mars 2015, peu de temps après l’introduction de la présente instance, où M. MacIntosh a commercialisé la série 2014.

[42]           En plus des dommages-intérêts préétablis, les demanderesses sollicitent les mesures suivantes :

A.                une déclaration selon laquelle les défendeurs ont appelé l’attention du public sur la série de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion entre leurs marchandises et celles des demanderesses;

B.                 une déclaration selon laquelle les défendeurs ont violé le droit d’auteur des demanderesses à l’égard des 21 œuvres;

C.                 une injonction interdisant aux défendeurs de faire passer les œuvres de la demanderesse pour leurs œuvres;

D.                la remise de tous les exemplaires de l’édition 2014 de la série;

E.                 l’imposition d’intérêts avant jugement sur les dommages-intérêts préétablis;

F.                  les coûts engagés pour la présentation de la présente demande.

B.                     Les défendeurs

[43]           Les défendeurs offrent divers arguments pour expliquer pourquoi la présente demande devrait être rejetée, y compris les trois objections d’ordre procédural suivantes : i) la présente demande a été intentée au-delà de la période de prescription de trois ans prévue au paragraphe 43.1(1) de la Loi; ii) les demanderesses n’ont pas qualité pour intenter une poursuite visant au moins 5 des 21 œuvres en cause; iii) la Cour n’a pas compétence pour entendre la présente affaire puisque cette dernière se rapporte à une rupture de contrat involontaire.

[44]           En ce qui concerne leurs arguments de fond, les défendeurs prétendent que les demanderesses n’ont pas valablement révoqué leur autorisation, et que par conséquent, elles sont empêchées par préclusion de le faire. Du fait de l’existence d’une contrepartie pour l’autorisation, cette dernière ne peut être révoquée unilatéralement. Il aurait fallu que la révocation soit explicite et qu’un préavis raisonnable ait été donné. Or, ces deux conditions n’ont pas été respectées.

[45]           Les défendeurs nient l’allégation de commercialisation trompeuse et s’opposent à ce que les demanderesses déposent en preuve les exemplaires des livres de la série Celebration, alléguant que les parties ne peuvent pas présenter une preuve matérielle dans une demande.

[46]           Au sujet des recours, les défendeurs affirment que si la demande fondée sur la violation du droit d’auteur est bien fondée, cela vaut au plus 1 405,81 $ – le montant figurant dans le dernier paiement de redevances que Waterloo a versé à Frederick Harris en 2006.

[47]           Enfin, les défendeurs soutiennent que la présente demande est abusive, en ce qu’elle aurait été présentée pour des motifs inavoués liés à une certaine hostilité envers M. MacIntosh. Les défendeurs font valoir que ce n’est qu’après avoir appris que M. MacIntosh était associé à Conservatory Canada que les demanderesses ont contesté l’édition 2014 de la série. Les défendeurs allèguent également que la décision d’intenter des poursuites contre Conservatory Canada a été prise à la mi-janvier afin de causer le plus de perturbations possible dans les bureaux de Conservatory Canada. Selon les défendeurs, les effets combinés du motif inavoué, du montant élevé de dommages-intérêts demandé et du manque de diligence raisonnable commandent qu’un montant important de dépens leur soit accordé.

IV.             Analyse

A.                     Objections d’ordre procédural

(1)               La Cour peut-elle accepter une preuve matérielle s’il s’agit d’une demande?

[48]           Les demanderesses ont demandé l’autorisation de la Cour de déposer certaines copies papier de l’édition 2008 de la série Celebration, de l’édition 1999 et de l’édition Anniversary de la série. Elles soutiennent que ces livres physiques aideraient la Cour dans ses délibérations.

[49]           Les défendeurs se sont opposés à cette demande pour les motifs suivants : a) les livres n’avaient pas été fournis avec les documents déposés dûment et en temps opportun; b) s’agissant d’une demande et non d’une action, il n’y a aucun témoin pour servir d’intermédiaire au dépôt des livres comme pièces.

[50]           La Cour a autorisé les demanderesses à produire des documents à l’audience plutôt que de simplement s’en remettre aux photocopies des livres qui avaient déjà été versées au dossier. La Cour en a décidé ainsi pour trois raisons.

[51]           D’abord, les Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [les « Règles »], établissent clairement qu’il est tout à fait possible d’apporter des objets déposés comme pièces. L’alinéa 309(2)g) des Règles, par exemple, énonce que « [l]e dossier du demandeur contient, sur des pages numérotées consécutivement, [...] une description des objets déposés comme pièces qu’il entend utiliser à l’audition ».

[52]           Même si les demanderesses ne se sont pas conformées à une formalité de l’alinéa 309(2)g), les Règles permettent également à la Cour de cerner et de corriger de telles erreurs. L’article 60 des Règles se lit comme suit : « La Cour peut, à tout moment avant de rendre jugement dans une instance, signaler à une partie les lacunes que comporte sa preuve ou les règles qui n’ont pas été observées, le cas échéant, et lui permettre d’y remédier selon les modalités qu’elle juge équitables ».

[53]           En deuxième lieu, les demanderesses avaient déjà présenté des photocopies de tous les livres en version papier qu’elles souhaitaient soumettre à la Cour avant l’audience. Le fait de produire les livres comme éléments de preuve distincts n’a pas modifié fondamentalement le dossier de la Cour, de quelque façon que ce soit.

[54]           Enfin, il est dans l’intérêt de toutes les parties que la Cour examine les copies papier des livres afin qu’elle puisse mieux comprendre le degré de similitude entre les œuvres en cause. Puisque les couleurs des couvertures des livres sont directement en cause dans la demande fondée sur la commercialisation trompeuse, je ne vois aucune raison de me fier aux imprimés possiblement non conformes.

(2)               Les demanderesses ont-elles qualité pour soumettre la présente demande à l’égard de l’ensemble des œuvres?

[55]           Les défendeurs avancent qu’en ce qui concerne au moins 5 des 21 œuvres en cause – « Bozo’s Flippity-Flop », « Butterflies », « Peacock », « Masquerade » et « Sneaky » (voir l’annexe B des présents motifs) – les demanderesses n’ont jamais été cessionnaires d’un droit d’auteur; seule une licence exclusive leur avait été accordée. Elles n’ont donc pas qualité pour présenter une demande fondée sur la violation du droit d’auteur en vertu du paragraphe 41.23(1) de la Loi.

[56]           Je ne suis pas non plus d’accord avec les défendeurs au sujet de cette objection d’ordre procédural. Le libellé de chaque entente portant sur ces cinq œuvres est ainsi rédigé : [traduction] « par la présente lettre, vous nous accordez et nous cédez le droit exclusif de publier (c.-à-d. d’imprimer, de publier et de vendre) l’œuvre dans le monde entier ». Bien que le libellé soit différent de celui qui est exprimé dans les ententes portant sur les 16 autres œuvres (voir l’annexe B), les ententes en litige confèrent néanmoins un intérêt suffisant pour soumettre la présente demande : il ressort clairement du paragraphe 13(7) de la Loi que « la concession d’une licence exclusive sur un droit d’auteur est réputée toujours avoir valu concession par licence d’un intérêt dans ce droit d’auteur ».

[57]           En outre, le paragraphe 13(5) de la Loi précise que, « [l]orsque, en vertu d’une cession partielle du droit d’auteur, le cessionnaire est investi d’un droit quelconque compris dans le droit d’auteur, sont traités comme titulaires du droit d’auteur, pour l’application de la présente loi, le cessionnaire, en ce qui concerne les droits cédés, et le cédant, en ce qui concerne les droits non cédés, les dispositions de la présente loi recevant leur application en conséquence ».

[58]           Par conséquent, les demanderesses i) ont qualité pour soumettre la présente demande à l’égard des 21 œuvres; ii) ayant reçu au moins une cession partielle du droit d’auteur, elles sont considérées comme les « titulaires » aux fins de publication en raison de leurs droits ayant fait l’objet d’une cession. Il n’était pas nécessaire qu’elles ajoutent d’autres parties pour faire valoir leurs réclamations à l’égard des cinq œuvres. En ayant négocié des licences exclusives (concessions d’un intérêt du titulaire du droit d’auteur), les demanderesses avaient fait plus qu’obtenir une autorisation de publier. Comme la Cour suprême l’a déterminé dans l’arrêt Robertson c. Thomson Corp, 2006 CSC 43, au paragraphe 56, citant avec approbation la Cour supérieure de l’Ontario dans Ritchie c. Sawmill Creek Golf & Country Club Ltd. (2004), 35 CPR (4th) 163 :

[traduction] La « concession par licence d’un intérêt », dont il est question au par. 13(4), est le transfert d’un droit de propriété par opposition à l’autorisation de faire une certaine chose. Dans le premier cas, le titulaire de la licence peut présenter en son nom une action en contrefaçon; dans le second, il ne peut que contester cette action. Dans la mesure où il existait une certaine incertitude quant au sens de l’expression « concession par licence d’un intérêt » et quant à savoir si elle visait les licences non exclusives, cette incertitude a été résolue en 1997 lorsque la Loi sur le droit d’auteur a été modifiée pour y inclure le par. 13(7).

(3)               Compétence de notre Cour

[59]           Les défendeurs laissent entendre que, puisque la question en litige est ultimement une [traduction] « autorisation d’ordre purement contractuel en vertu de laquelle peu importe qui était le tiers éditeur à l’époque effectuerait les paiements requis à Frederick Harris », notre Cour n’a pas compétence pour se saisir de cet élément du litige. Les défendeurs s’appuient sur la décision Netbored Inc c. Avery Holdings Inc, 2005 CF 490, au paragraphe 24 [Netbored], où le juge Gibson a confirmé une ordonnance du protonotaire radiant un certain nombre de dispositions de la déclaration modifiée du demandeur pour les raisons suivantes :

Il s’agit d’une action pour violation du droit d’auteur de la demanderesse, et les allégations qu’elle formule dans les paragraphes contestés de sa déclaration concernant l’inexécution de contrat, la violation de devoir fiduciaire et autres obligations ne visent pas à établir la violation du droit d’auteur, mais plutôt à obtenir un dédommagement relativement à l’inexécution de ces obligations elles-mêmes. À ce titre, la Cour n’a pas compétence pour les entendre.

[60]           Comme le juge Gibson l’a souligné au paragraphe 12 de Netbored, le paragraphe 20(2) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7, est très clair :

[La Cour fédérale] a compétence concurrente dans tous les autres cas de recours sous le régime d’une loi fédérale ou de toute autre règle de droit non visée par le paragraphe (1) relativement à un brevet d’invention, un droit d’auteur, une marque de commerce, un dessin industriel ou une topographie [...] au sens de l’alinéa (1)a).

[61]           Les demanderesses réclament des dommages-intérêts préétablis en vertu de l’article 38.1 de la Loi et cherchent à obtenir réparation au moyen des recours énoncés au paragraphe 34(1). Elles réclament ces dommages-intérêts, car elles soutiennent que leur droit d’auteur sur les 21 œuvres a été violé. Elles ne font pas valoir que les défendeurs n’ont pas respecté les conditions de l’entente de 1999 en publiant l’édition Anniversary (c’est-à-dire que les œuvres ont été publiées et qu’elles ont le droit d’être indemnisées selon les conditions de l’entente de 1999). Elles allèguent plutôt que l’édition Anniversary a été publiée sans leur autorisation – autrement dit, puisqu’au départ, il n’y avait aucune entente en place, aucune rupture de contrat n’aurait été possible.

[62]           Par conséquent, je conclus que notre Cour a compétence pour entendre la demande fondée sur la violation du droit d’auteur.

[63]           Après avoir tranché ces trois objections d’ordre procédural, je me pencherai maintenant sur le bien-fondé de la demande.

B.                     Violation du droit d’auteur

[64]           « Le droit d’auteur sur l’œuvre comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l’œuvre [...] » (article 3 de la Loi). Le titulaire du droit d’auteur peut céder entièrement son droit à une autre personne, concéder un intérêt dans ce droit ou encore conserver ce droit. Dans tous les cas, la Loi exige que la concession ou la cession soit rédigée par écrit (paragraphe 13(4) de la Loi). Comme le précise le paragraphe 27(1) : « Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d’un acte qu’en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d’accomplir. »

[65]           En ce qui concerne les 21 œuvres en question, Frederick Harris est titulaire du droit d’auteur ou détient une licence exclusive pour publier chacune des œuvres en litige. Aux fins de la Loi, Frederick Harris est donc titulaire du droit d’auteur en ce qui concerne la publication. En vertu de la Loi, pour publier les œuvres en question, il était donc nécessaire d’obtenir le consentement de Frederick Harris en ce qui a trait à une autre entité – qu’il s’agisse de Waterloo, de St. John’s, de Mayfair, de Novus, de M. MacIntosh, ou de Conservatory Canada. Le fait d’agir autrement constituait une violation.

[66]           Toutes les parties conviennent que, dans l’entente de 1999, les demanderesses ont donné leur consentement à la publication de ces œuvres de la série. Au-delà de cette limite, il n’y a pas de consensus. Puisque ni les demanderesses ni les défendeurs n’ont été en mesure de trouver un exemplaire de l’entente de 1999, chacun d’entre eux a offert à la Cour son interprétation de ce qui était le plus susceptible de se dégager de l’entente.

[67]           Les demanderesses soutiennent qu’il est raisonnable de présumer que l’entente de 1999 comprenait des termes équivalents à ceux de l’entente Porter, soit l’octroi d’une autorisation de publier pendant 10 ans, ainsi que le versement de redevances annuelles.

[68]           Les demanderesses affirment également que rien ne suppose que l’entente de 1999 avait été négociée au nom de Conservatory Canada. L’autorisation a plutôt été accordée à Waterloo, transférée à St. John’s Music, puis de nouveau transférée à Mayfair. Conservatory Canada, M. MacIntosh ou Novus ne détiennent aucun droit sur l’œuvre.

[69]           En revanche, les défendeurs se fondent sur les souvenirs de M. MacIntosh quant au contenu de l’entente de 1999. M. MacIntosh affirme que l’entente de 1999 était l’octroi d’une autorisation visant [traduction] « le cycle de vie de la publication » au « prorata des redevances », et il et fournit les explications suivantes :

[TRADUCTION]

[…] Tant qu’un éditeur conserve un inventaire raisonnable de la publication mise en vente, cette dernière est considérée comme étant « en impression ». Tant qu’une publication est « en impression », elle est considérée comme étant « vivante » aux fins de tout engagement contractuel.

[70]           Puisque les défendeurs font valoir que les trois éditions – 1999, 2012 et 2014 – constituent une seule publication continue de la série, et que cette publication était en vente depuis 1999 jusqu’à ce jour, l’autorisation accordée dans l’entente initiale de 1999 est toujours vivante et active.

[71]           En ce qui a trait à l’entente Porter, les défendeurs interprètent ce document comme étant une concession visant [traduction] « toutes les éditions du répertoire pianistique de la série New Millennium en production à l’heure actuelle », en ce sens que la concession s’étend à l’intégralité de la série, peu importe l’édition en production. Puisque les impressions de 1999, 2012 et 2014 de la série possèdent du contenu identique, l’autorisation est donc demeurée en vigueur.

[72]           Les défendeurs soutiennent également que l’entente de 1999 était une concession à Conservatory Canada, négociée par Waterloo en son nom. Par conséquent, la concession s’étendait à tout éditeur avec lequel Conservatory Canada avait pu collaborer pour l’impression de la série, plutôt qu’à Waterloo en particulier.

[73]           M. MacIntosh déclare que, même s’il incombe habituellement à l’auteur ou au compilateur d’obtenir les autorisations nécessaires, l’éditeur contribuera aux tâches administratives y afférentes :

[TRADUCTION]

[Conservatory Canada] a changé d’éditeur à trois reprises depuis 1999. Il n’est pas rare qu’un auteur ait recours aux services de plusieurs éditeurs, parfois en divisant son catalogue d’œuvres parmi plusieurs d’entre eux, parfois en déplaçant l’ensemble de son œuvre d’un éditeur à un autre. Aux alentours de 2004, l’éditeur du matériel de [Conservatory Canada] est passé de Waterloo Music à St. John’s Music. Aux alentours de 2007, l’éditeur du matériel de [Conservatory Canada] a de nouveau changé, passant cette fois de St. John’s Music à Mayfair Music. Plus récemment, en août 2014, l’éditeur du matériel de [Conservatory Canada] est passé de Mayfair Music à [Novus]. Cette situation n’a rien d’inhabituel ou d’inapproprié. Toutes les autorisations d’utiliser les œuvres protégées par le droit d’auteur de la série pour piano New Millennium ont été accordées à [Conservatory Canada], à titre de compilateur. Et, comme l’a négocié Waterloo, [Conservatory Canada] conserve ces autorisations pendant tout le cycle de vie de la publication, peu importe l’éditeur choisi, aux fins d’impression, de distribution et de vente de son matériel.

[74]           Les défendeurs soulignent également qu’en contre-interrogatoire, Mme Rusk du Royal Conservatory a déclaré à trois reprises que les éditions 1999 et 2014 étaient [traduction] « identiques », ayant le même contenu.

[75]           Enfin, Conservatory Canada affirme que c’est lui, plutôt que l’un quelconque des éditeurs, qui détenait le droit d’auteur des œuvres de la série.

[76]           En examinant les interprétations des demanderesses et des défendeurs de l’entente de 1999, et, en l’absence d’éléments de preuve matérielle de ce document essentiel, l’interprétation des demanderesses voulant que la concession soit en faveur de Waterloo et non de Conservatory Canada me convainc davantage pour trois raisons.

[77]           Tout d’abord, les mentions de droit d’auteur tout au long des trois éditions de la série indiquent que Waterloo, et non Conservatory Canada, est le titulaire du droit d’auteur.

[78]       Ensuite, l’entente intervenue entre Mme Porter et Waterloo ne fait aucunement mention de Conservatory Canada. L’entente Porter vise plutôt à accorder à Waterloo l’autorisation de réimprimer l’œuvre de Mme Porter (« Chromatic Rag ») dans la série New Millenium pendant une période de 10 ans, une autorisation aux termes de laquelle les titulaires du droit d’auteur recevront une part égale des redevances au prorata des ventes annuelles de la série sur une période de 10 ans, couvrant tout le Canada. Il semble très plausible – et je ne dispose d’aucun élément qui semble avancer le contraire – que ces conditions figureraient naturellement dans l’entente de 1999 intervenue entre Waterloo et Frederick Harris.

[79]           En troisième lieu, lorsque la relation entre Mayfair et Conservatory Canada a commencé à se détériorer, Mayfair a bien précisé que c’est elle, et non Conservatory Canada, qui avait conservé l’autorisation de publier ces œuvres. Voir par exemple la proposition de 2014 qu’elle a présentée à Conservatory Canada, où Mayfair a laissé entendre qu’elle transférerait [traduction] « tous les droits rattachés aux livres de Conservatory Canada actuellement protégés par le droit d’auteur par Waterloo » si Conservatory Canada continuait d’avoir recours aux services de Mayfair en tant qu’éditeur. Cela est entièrement conforme avec l’interprétation des demanderesses des modalités de l’entente de 1999 – selon lesquelles les droits avaient été transférés à Waterloo, et non à Conservatory Canada : au moment de la publication de l’édition du 120e anniversaire, l’entente de 1999 était devenue caduque.

[80]           Même si la présomption de validité de 10 ans est erronée, comme je l’ai déjà expliqué, l’entente de 1999 était intervenue entre Frederick Harris et Waterloo. La concession décrite dans l’entente de 1999 est alors passée de Waterloo à St. John’s, puis à Mayfair. Par conséquent, la décision de Conservatory Canada de mettre fin à sa relation d’édition avec Mayfair a mis fin à tout lien contractuel entre eux, Frederick Harris et ses œuvres. Conservatory Canada n’avait donc aucun droit de négocier avec M. MacIntosh/Novus, et ni M. MacIntosh ni Novus n’avaient le droit de publier les œuvres.

[81]           D’ailleurs, j’accorde une faible valeur probante aux souvenirs de M. MacIntosh sur le contenu de l’entente de 1999. Comme l’ont fait remarquer les défendeurs à de nombreuses reprises dans leur thèse, Frederick Harris et le Royal Conservatory avaient des revenus annuels importants parmi lesquels les revenus provenant de ce contrat ne joueraient qu’un rôle infime. Il est difficile de comprendre comment M. MacIntosh, qui était employé par Frederick Harris à l’époque en question, pouvait de souvenir si précisément des modalités de l’entente négociée environ 18 ans auparavant, portant sur un montant d’argent que son employeur, à cette époque, n’a pas estimé si important.

[82]       De plus, les défendeurs prétendent que les demanderesses savaient que Waterloo ne leur avait pas versé d’argent depuis 2006, et que leur décision ne pas prendre de mesures visant à être payées équivalait à [traduction] « autoriser implicitement » les défendeurs à poursuivre la publication.

[83]           Je ne suis pas de cet avis. Comme je l’ai déjà mentionné, l’entente de 1999 avait été conclue entre Waterloo et Frederick Harris. S’il y avait eu autorisation implicite découlant de l’inaction des demanderesses, elle aurait profité à Waterloo (ou ses successeurs) et non aux défendeurs.

[84]           Les défendeurs soutiennent également que des éléments de preuve abondants tendent à démontrer qu’il incombait à Mayfair de verser ces redevances, et non à Conservatory Canada. En outre, les défendeurs font remarquer que les demanderesses ont continué à faire affaire avec Mayfair pendant les huit ans et demi de défaillance, en payant Mayfair à l’égard d’autorisations distinctes. Les défendeurs laissent entendre que, depuis le temps que les demanderesses étaient au courant du manquement, elles auraient pu déduire les redevances annuelles impayées de la série des montants dus à Mayfair.

[85]           Il est toutefois important de souligner qu’en l’espèce, les demanderesses ne contestent pas les redevances impayées. Leur demande repose sur la publication non autorisée des œuvres – et non sur une inexécution de contrat en lien avec l’entente de 1999.

[86]           Enfin, les défendeurs soutiennent que rien n’indique que l’autorisation accordée dans l’entente de 1999 ait déjà été révoquée. Les courriels que Mme Rusk a envoyés à Victoria Warwick, puis à Derek Oger, en novembre et en décembre 2014 indiquent simplement qu’on n’avait pas communiqué avec elle [TRADUCTION] « au sujet de l’autorisation » – et non que l’autorisation avait été refusée.

[87]           Je trouve qu’il est difficile d’interpréter les déclarations de Mme Rusk transmises par courriel de la façon souhaitée par les défendeurs. Pourquoi Mme Rusk communiquerait-elle avec Conservatory Canada concernant l’autorisation si elle croyait que cette autorisation avait déjà été accordée? Il semble déraisonnable de conclure qu’elle a déclaré quelque chose comme [traduction] « Je révoque l’autorisation consentie à Conservatory Canada quant aux œuvres en question » si elle ne croyait pas qu’il y avait au départ une autorisation sous-jacente. Selon moi, les courriels indiquent assez clairement qu’aucune autorisation n’existe quant à l’impression : Mme Rusk, au nom de Royal Conservatory, n’a pas approuvé le statu quo.

(1)               Délai de prescription

[88]           Les défendeurs soulignent que le dernier paiement de redevances a été versé par Waterloo en 2006 et que, même si les demanderesses étaient au courant que des sommes leur étaient dues pour la série, elles n’ont pas fait d’efforts pour régler cette situation avant 2014. Par conséquent, si l’acte contrefaisant donnant ouverture au recours en litige est la publication continue des œuvres sans l’autorisation des demanderesses, ces dernières auraient alors dû engager les présentes procédures au plus tard en 2009, suivant l’alinéa 43.1(1)b) de la Loi.

[89]           À l’opposé, les demanderesses réitèrent que la présente demande porte seulement sur l’édition 2014, et, que puisque chaque édition constitue une nouvelle publication, le délai de prescription ne s’applique pas.

[90]           Je n’ai cependant pas à trancher si chaque édition constitue une nouvelle publication aux fins de l’alinéa 43.1(1)b), car, comme il ressort de la décision Wall v. Horn Abbot Ltd, 2007 NSSC 197, au paragraphe 474 :

[TRADUCTION]

Même si des demandes liées à des violations survenues plus de trois ans avant le début de la présente instance ne sont pas admissibles, les violations continues dans les trois ans du début de la présente instance et après sont admissibles.

[91]           Par conséquent, peu importe si la publication de l’édition 2014 constituait une violation distincte de celle de l’édition Anniversary, la question du délai de prescription n’est pas en litige. Soit que l’édition Anniversary et l’édition 2014 sont considérées comme faisant partie de la publication continue de la série et donc, comme une seule et même violation continue, faisant en sorte que la présente demande a été présentée à l’intérieur du délai de prescription, soit que l’édition de 2014, pour laquelle les demanderesses ont clairement indiqué leur désaccord à l’égard de la violation, est une publication distincte et a été abordée en temps opportun.

C.                     Allégation de demande abusive

[92]           Les défendeurs prétendent que les demanderesses ont exercé leur droit d’auteur de manière abusive, argument sur lequel ils s’appuient essentiellement : Euro-Excellence Inc. c. Kraft Canada Inc., 2007 CSC 37, [2007] 3 RCS 20 [Toblerone], et Access International Automotive Ltd. v. Volkswagen Canada Inc., [2001] 3 CF 311, 2001 CAF 79 [Volkswagen].

[93]            Je ne souscris pas à cette thèse des défendeurs selon laquelle les demanderesses ont exercé leur droit d’auteur de manière abusive ou à mauvais escient. Je ne trouve ni Toblerone ni Volkswagen utiles en l’espèce : la thèse de l’abus du droit d’auteur n’est pas très développée au Canada, et, surtout, même si elle l’était, les faits n’appuient tout simplement pas un méfait ou un acte répréhensible commis par les demanderesses.

[94]           Pour ce qui est de l’argument des défendeurs voulant que les demanderesses aient indûment retardé le dépôt de la présente demande, ces dernières ont envoyé un avis dans un délai raisonnable, après que Mme Rusk, sa vice-présidente, a reçu de Conservatory Canada un courriel au sujet de la prochaine édition publiée par un nouvel éditeur. Elle a constaté pour la première fois la preuve matérielle de l’édition de 2014 environ quatre mois plus tard, chez Remenyi House of Music, un magasin situé en face des locaux des défendeurs, à Toronto.

[95]           Mme Rusk a alors tenté à deux reprises de communiquer avec la personne qu’elle croyait être la directrice exécutive des défendeurs, Mme Warwick, à l’automne 2014, pour lui envoyer l’avis d’absence d’autorisation à l’égard de l’édition de 2014. Après avoir répondu à l’avis, le nouveau directeur exécutif, M. Oger, n’a pas effectué de suivi, et les demanderesses ont ultimement déposé la présente demande environ deux mois plus tard. Je n’estime pas que ce délai ou cet avis donné soit abusif.

[96]           En fait, dans un litige antérieur impliquant certaines des mêmes parties, la juge van Rensburg de la Cour supérieure de justice de l’Ontario a refusé d’accorder la réparation demandée par les mêmes demanderesses, en partie en raison d’un retard de trois mois à porter l’affaire devant les tribunaux.

[97]           En l’espèce, les demanderesses ont agi de manière plus expéditive, et il est difficile de blâmer leur conduite, surtout compte tenu du litige antérieur : voir The Frederick Harris Music Co Ltd v Clarke MacIntosh and Novus Via Music Group Inc, dossier de la Cour no CV-07-00000-383-00, 200/03/22, RR, à la page 213.

[98]           Certaines questions ont été posées pendant les interrogatoires préalables, puis pendant l’audience par les défendeurs en ce qui a trait à la question de savoir pourquoi l’entente de 1999 n’avait jamais été retrouvée. D’autre part, les demanderesses ont souligné que la juge van Rensburg avait soulevé des préoccupations similaires vis-à-vis M. MacIntosh, au paragraphe 19 de sa décision :

[TRADUCTION]

Bien que M. MacIntosh ait offert des explications sur les communications pouvant laisser croire à un motif apparemment de bonne foi, il a refusé, à cette étape, de donner accès à ses courriels reçus ou envoyés à partir de son adresse électronique personnelle pendant cette période, malgré le fait que ces données présenteraient un intérêt pour les questions soulevées, et corroboreraient ou contrediraient les déclarations de son affidavit portant sur l’objet de ses discussions. De plus, la preuve établit qu’avant son départ de chez Frederick Harris, M. MacIntosh a déchiqueté un volume important de ses dossiers et a tenté de supprimer la plupart de ses fichiers informatiques.

[99]           Je ne vois aucune preuve de mauvaise foi de la part de l’une ou l’autre des parties sur la question de déplacement délibéré ou d’altération de la preuve, car il n’existe simplement aucune preuve concluante soumise à la Cour. Du même coup, je ne dispose d’aucun élément de preuve pour conclure que les demanderesses ont exercé leur droit d’auteur de manière abusive ou à mauvais escient. Comme la Cour d’appel fédérale l’a conclu dans la décision Levi Strauss & Co. c. Roadrunner Apparel Inc., 76 CPR (3d) 129, au paragraphe 16, « on ne saurait sous-estimer les difficultés auxquelles est confronté le défendeur qui essaie de faire la preuve d’un abus ou d’un détournement de procédure de la part du demandeur qui tente de faire respecter sa marque de commerce en utilisant des voies de droit ».

[100]       En somme, bien que les défendeurs aient déployé tous les efforts afin d’invoquer leurs moyens de défense d’abus de procédures ou d’exercice du droit d’auteur de manière abusive, dans l’un ou l’autre cas, la preuve est insuffisante.

D.                Autorisation implicite

[101]       Les défendeurs s’appuient sur la décision Pinto c. Centre Bronfman de l’Éducation Juive, 2013 CF 945 [Pinto], pour affirmer qu’ils avaient l’autorisation implicite de donner suite aux droits de publication qui leur avaient été accordés en 1999, et les demanderesses n’ont pas réussi à faire la preuve du contraire.

[102]       Je ne me laisse pas influencer par ce moyen de contestation. Pour reprendre les propos du juge Rennie dans la décision Pinto, au paragraphe 158, citant le professeur Vaver sur lequel l’avocat des défendeurs s’est également appuyé :

Dans l’arrêt Harmony Consulting, la Cour d’appel fédérale a cité en l’approuvant un article de David Vaver, « Consent or No Consent : The Burden of Proof in Intellectual Property Infringement Suits » (2011) 23 IPJ 147, aux pages 148 et 149 :

[traduction]

Le fait pour le demandeur de prouver qu’il n’a pas donné de consentement exprès est rarement une corvée : c’est lui le mieux placé pour dire s’il l’a donné. […] Si, dans l’appréciation de la preuve, la cour est convaincue que le demandeur n’a pas donné son consentement implicite, celui‑ci obtient gain de cause. Si le défendeur parvient à prouver le consentement implicite, le demandeur, qui ne s’est pas acquitté de son fardeau de preuve, perd. En théorie, si la preuve ne permet pas à la cour d’être convaincue que le demandeur n’a pas donné son consentement implicite, le demandeur perd aussi. [Souligné dans l’original.]

[103]       En l’espèce, je n’ai pas vu d’élément de preuve établissant que la demanderesse avait consenti implicitement à publier les œuvres dans l’édition 2014, ni que les défendeurs n’avaient apporté la preuve de ce consentement implicite. Les demanderesses ont plutôt clairement indiqué que, peu de temps après avoir pris connaissance de l’édition 2014, une autorisation de publier n’avait pas été accordée.

E.                 Commercialisation trompeuse

[104]   À l’audience, l’avocat des demanderesses a reconnu que ces dernières ne se concentreraient pas sur cette question, car l’accent était mis sur la question de la violation du droit d’auteur dans une proportion de [traduction] « 99,99 % ». Elles affirment néanmoins que, puisque la combinaison de couleurs des niveaux 1 à 5 de l’édition 2014 de la série est identique à celle des niveaux 1 à 5 de l’édition 2008 de la série Celebration, et que l’édition 2014 de la série utilise une reliure cousue à longs points (comme celle de la série Celebration, mais à la différence de l’édition Anniversary de 2012), les défendeurs tentent de faire passer leurs livres pour ceux des demanderesses.

[105]       En contre-preuve, les défendeurs font remarquer ce qui suit :

A.                rien ne prouve que les demanderesses ont utilisé la combinaison de couleurs de la reliure de la série Celebration comme marque de commerce, de quelque façon que ce soit;

B.                 les demanderesses ont modifié leurs combinaisons de couleurs au fil des ans;

C.                 la combinaison de couleurs qui semble être en cause a été élaborée en 2008, pas avant;

D.                la combinaison de couleurs est de nature fonctionnelle; elle permet aux étudiants et aux enseignants d’identifier les livres qui forment un ensemble, et l’ensemble à acheter lorsque l’étudiant a progressé; les couleurs renvoient alors à des niveaux et non à la source, et sont utilisées dans plusieurs autres publications;

E.                 rien n’indique que la combinaison de couleurs des demanderesses a un rôle à jouer avec son achalandage parmi les étudiants et les enseignants en musique;

F.                  rien ne permet de penser que les couvertures sont de nature à créer de la confusion ou à tromper. La preuve démontre plutôt que les magasins de musique séparent fréquemment différentes séries au moment de les vendre pour s’assurer que les étudiants et les enseignants ne les confondent pas;

G.                rien n’indique que les demanderesses ont subi des dommages découlant de l’utilisation d’une combinaison de couleurs par les défendeurs;

H.                il n’existe aucune preuve de confusion quant à la reliure cousue à longs points adoptée par les demanderesses. Le choix de la reliure est d’ordre fonctionnel, et aucun étudiant n’effectuerait un achat en fonction de la reliure – des millions d’autres publications sont reliées par des agrafes;

I.                   « Conservatory Canada » est une marque de commerce enregistrée, et cette marque apparaît clairement sur toutes les publications visées, réduisant encore davantage le risque de confusion;

J.                   la série a fait [traduction] « peau neuve » dans l’édition Anniversary de 2012, plutôt que dans l’édition 2014, comme l’allèguent les demanderesses. Autrement dit, les modifications apportées à la couverture ont été apportées plus de deux ans avant que M. MacIntosh et Novus n’interviennent. Selon les défendeurs, cela démontre un manque fondamental de diligence raisonnable de la part des demanderesses.

[106]       Le critère applicable à la commercialisation trompeuse vient de l’arrêt Kirkbi AG c. Gestions Ritvik Inc., 2005 CSC 65, au paragraphe 66 : « Les trois éléments nécessaires à une action en passing‑off sont donc : l’existence d’un achalandage, la déception du public due à la représentation trompeuse et des dommages actuels ou possibles pour le demandeur ».

[107]       Il est clair que cette partie de la demande doit être rejetée. Les demanderesses n’ont présenté aucune preuve de tromperie envers le public ni de l’existence d’un achalandage associé à leur combinaison de couleurs. Sans la preuve de ces deux éléments nécessaires, les demanderesses n’ont pas démontré que la commercialisation trompeuse s’est produite.

F.                  Recours

(1)               Dommages-intérêts

[108]       Dans leur plaidoirie, les demanderesses ont souligné la nature commerciale de la vente des livres des défendeurs, en faisant remarquer que leurs livres sont vendus dans des établissements de vente au détail et que les prix varient entre 17,95 $ et 24,95 $. Elles soutiennent que, puisqu’il s’agit d’une activité commerciale et que les défendeurs ont tiré profit de la violation, il devrait leur être ordonné de payer en fonction de la limite supérieure de la fourchette applicable, soit entre 500 $ et 20 000 $, s’agissant d’un cas de violation commise à des fins commerciales en vertu de l’alinéa 38.1(1)a) de la Loi.

[109]       Les défendeurs, en revanche, soulignent le fait que Conservatory Canada est un établissement d’enseignement sans but lucratif et un organisme de bienfaisance enregistré. Puisque les ventes de la série sont intrinsèques aux activités éducatives et de bienfaisance de Conservatory Canada, elles sont essentiellement de nature non commerciale, et doivent être examinées en vertu de l’alinéa 38.1(1)b) de la Loi. En outre, les défendeurs affirment que puisque les demanderesses n’allèguent la violation que depuis 2014 ou environ un an avant le dépôt de la présente demande, la somme réelle due ne pourrait pas dépasser 1 405,81 $, soit le montant versé par Waterloo pour toute l’année 2005.

[110]       Pour déterminer les dommages-intérêts préétablis en vertu de la Loi, il faut d’abord répondre à la question de savoir si la violation reprochée en l’espèce a été commise à des fins commerciales ou non, compte tenu du montant moins élevé de dommages-intérêts préétablis à l’égard des activités non commerciales, soit entre 100 $ et 5 000 $ par violation (voir le paragraphe 38.1(1) de la Loi, par opposition aux montants plus élevés dans le cas d’activités commerciales).

[111]       Une fois que la fourchette des dommages-intérêts éventuels est établie en vertu du paragraphe 38.1(1) de la Loi, la Cour doit déterminer les dommages-intérêts qu’il convient d’attribuer à chaque œuvre. Pour trancher cette question, le paragraphe 38.1(5) de la Loi prévoit que la Cour doit tenir compte de ce qui suit :

(5) Lorsqu’il rend une décision relativement aux paragraphes (1) à (4), le tribunal tient compte notamment des facteurs suivants :

a) la bonne ou mauvaise foi du défendeur;

b) le comportement des parties avant l’instance et au cours de celle-ci;

c) la nécessité de créer un effet dissuasif à l’égard de violations éventuelles du droit d’auteur en question;

d) dans le cas d’une violation qui est commise à des fins non commerciales, la nécessité d’octroyer des dommages-intérêts dont le montant soit proportionnel à la violation et tienne compte des difficultés qui en résulteront pour le défendeur, du fait que la violation a été commise à des fins privées ou non et de son effet sur le demandeur.

(5) In exercising its discretion under subsections (1) to (4), the court shall consider all relevant factors, including

(a) the good faith or bad faith of the defendant;

(b) the conduct of the parties before and during the proceedings;

(c) the need to deter other infringements of the copyright in question; and

(d) in the case of infringements for non-commercial purposes, the need for an award to be proportionate to the infringements, in consideration of the hardship the award may cause to the defendant, whether the infringement was for private purposes or not, and the impact of the infringements on the plaintiff.

[112]       Au départ, j’estime que la violation a été commise à des fins commerciales, puisque les livres étaient vendus sur le marché et visaient le plus de gens possible, même si les ventes ont peut-être été plutôt modestes. Je tire cette conclusion malgré le statut d’entité sans but lucratif de Conservatory Canada, pour les raisons qui suivent.

[113]       D’abord, il ne fait aucun doute que Novus et M. MacIntosh fonctionnaient dans un but de bénéfice, contrairement à Conservatory Canada. De plus, il y a eu un changement important apporté à l’édition 2014 – à l’exception du changement d’éditeurs de Mayfair à Novus – à savoir que Hal Leonard a pris en charge la distribution. Le témoignage devant notre Cour place Hal Leonard parmi les plus importants distributeurs et éditeurs de feuilles de musique à l’échelle mondiale, voire le plus important (dossier des demanderesses, aux pages 498 et 499). Il n’existe aucun distributeur comparable à l’échelle internationale qui ait participé à une quelconque édition antérieure. En outre, l’édition 2014 était unique à la série de Conservatory Canada, étant la première publication à dresser la liste des prix en devises américaines et canadiennes (cette dernière devise étant naturellement plus élevée en raison du taux de change).

[114]       Comme je l’ai mentionné aux parties à l’audience, les circonstances en l’espèce, lorsqu’elles sont examinées comme un tout, penchent en faveur des dommages-intérêts accordés en fonction de la limite inférieure de la fourchette de l’alinéa 38.1(1)a).

[115]       En ce qui a trait au premier facteur du paragraphe 38.1(5), je ne crois pas que les défendeurs aient agi de mauvaise foi, malgré les affirmations contraires des demanderesses – par exemple, les allégations de mauvais comportement, comme la participation de M. MacIntosh à la conférence de la MTNA, à Las Vegas. La preuve indique cependant que cette participation n’avait rien d’inhabituel : M. MacIntosh assistait aux conférences annuelles de la MTNA depuis une dizaine d’années. Par conséquent, il n’était pas anormal qu’il assiste à la conférence de 2015.

[116]       En ce qui concerne le comportement des parties – le deuxième facteur du paragraphe 38.1(5) – les demanderesses ont insinué par erreur que M. MacIntosh avait pris part à la décision de Conservatory Canada de modifier la combinaison de couleurs ainsi que le style de reliure de sa série. En fait, ces changements ont été apportés avant le début de la relation professionnelle entre M. MacIntosh et Conservatory Canada. Je ne crois pas que les allégations d’irrégularité aient résisté à une analyse rigoureuse.

[117]       En troisième lieu, en examinant les facteurs de dissuasion énoncés au paragraphe 38.1(5), il est difficile d’évaluer dans quelle mesure l’octroi de dommages-intérêts élevés préviendra d’autres violations au droit d’auteur, puisque la violation en cause semble provenir d’une mauvaise tenue de livres et de gestion des droits de la part des deux parties. Au mieux, cette affaire nous permet de constater que le défaut de conserver des ententes essentielles sème la confusion quant aux droits et aux demandes fondées sur la violation du droit d’auteur en découlant. Les défendeurs ne devraient pas, à eux seuls, assumer le poids de ce laxisme, car les demanderesses ont contribué à parts égales à l’incapacité de fournir à la Cour le principal document en cause.

[118]       Pour ces motifs, les dommages-intérêts pour chacune des œuvres seront établis en fonction de l’échelon le plus bas prévu dans les cas de violations commises à des fins commerciales, ou 500 $ pour chaque œuvre, pour un montant total de 10 500 $ accordé à titre de dommages-intérêts, en plus des intérêts avant jugement. Comme je l’ai également mentionné au cours de l’audience, peu d’éléments de preuve au sujet des ventes ont été présentés à la Cour, à savoir les chiffres des ventes des publications des demanderesses et des défendeurs provenant du seul magasin de Vancouver. Ces chiffres n’ont pas donné une idée exacte des ventes à l’échelle du pays ou à l’étranger (le cas échéant). Selon ces données limitées sur les ventes, les défendeurs semblent recevoir un faible pourcentage des ventes des livres de musique par rapport aux ventes des demanderesses de leur série Celebration.

En bref, bien que le paragraphe 38(1) de la Loi ne l’exige pas officiellement, les demanderesses n’ont fourni aucun état comptable des profits ou d’autres données financières de l’incidence réelle ou probable des violations. Incidemment, voici quelques brèves observations sur la preuve en matière de dommages-intérêts préétablis :

[119]       Dans la décision Polsat c. Radiopol Inc., 2006 CF 584, au paragraphe 45, le juge Lemieux, citant John S. McKeown, Fox on Canadian Law of Canadian Copyright and Industrial Design, 4e éd. (Scarborough : Thomson/Carswell, 2003, au paragraphe 24.77), a mentionné qu’« [i]l doit exister une certaine corrélation entre les dommages réellement subis et les dommages‑intérêts préétablis et ce, même si l’article 38.1 ne parle pas des dommages réellement subis ». Voir également la décision Nicholas c. Environmental Systems (International) Limited, 2010 CF 741, au paragraphe 105 : « La fixation de dommages-intérêts préétablis exige une appréciation de la réalité de l’affaire et un résultat juste »; ainsi que la décision Pinto, au paragraphe 195 : « ll doit y avoir un certain lien entre les dommages‑intérêts normalement évalués et les dommages‑intérêts préétablis ». En l’espèce, aucun lien ni aucune orientation quant aux dommages-intérêts n’a été soumis à la Cour.

[120]       Commentant sur la difficulté inhérente que présentent les dommages-intérêts préétablis dans l’ouvrage Intellectual Property Disputes: Resolutions & Remedies publié sous la direction de Ronald E. Dimock, (Toronto, Ontario : Thomson Reuters Canada, 2016) (feuilles mobiles, à la page 5), ch. 3 au paragraphe 3-38, ce dernier a souligné que la corrélation entre les dommages probables et les dommages-intérêts préétablis permet de s’assurer que les montants sont justes et proportionnels 

[TRADUCTION]

Bien que les dommages-intérêts préétablis visent à indemniser une partie pour les pertes difficiles à quantifier, dans la décision Polsat c. Radiopol Inc., la Cour a déclaré qu’en tentant d’établir le montant des dommages-intérêts préétablis, le montant des dommages réels que le demandeur aurait été susceptible de recevoir devrait être pris en considération. En examinant les pertes probables, le juge Lemieux s’était fondé sur la jurisprudence américaine et sur les commentaires formulés dans Fox on Canadian Copyright and Industrial Design. À première vue, l’importance accordée aux pertes probables estompe la distinction entre les dommages-intérêts préétablis et les dommages-intérêts généraux qui sont par ailleurs disponibles. Cependant, toute estimation des dommages probables n’est pas déterminante, et l’utilisation de cette estimation dans la détermination des dommages-intérêts préétablis vise probablement à s’assurer que les dommages-intérêts accordés sont justes et proportionnels. [Non souligné dans l’original]

[121]       Plus récemment, le juge Labbé de la Cour supérieure du Québec a formulé les commentaires suivants sur la difficulté de déterminer les dommages-intérêts préétablis dans la décision Paré c. Taxis Coop de la Mauricie 1992, 2015 QCCQ 11581, aux paragraphes 35 et 36 :

L’article 38.1 LDA mentionné plus haut prévoit des dommages préétablis qui se situent entre 500 $ et 20 000 $ que le Tribunal doit fixer de façon équitable. Le Tribunal peut donc exercer une certaine discrétion, mais évidemment de façon judiciaire selon la preuve faite.

C’est de cette disposition [art 38.1] dont se prévaut le demandeur de sorte qu’il n’a pas le fardeau d’établir des dommages réels. Le minimum prévu dans le cas de violation à des fins commerciales est de 500 $.

[122]       En somme, plus la Cour dispose d’éléments de preuve des dommages probables, plus il lui sera facile d’arriver à accorder des dommages-intérêts préétablis justes et proportionnels.

(2)               Autres recours

[123]       Compte tenu de la conclusion de violation, la décision de la Cour comprendra également ce qui suit :

                                  i.          une injonction interdisant aux défendeurs ou à leur éditeur de publier une quelconque des 21 œuvres – du moins jusqu’à ce que les demanderesses accordent l’autorisation appropriée;

                                ii.          la remise aux demanderesses par les défendeurs, au frais de ces derniers, de toutes les copies papier ou numériques des volumes contrefaits de l’édition 2014 actuellement en vente dans les canaux de distribution.

G.                Dépens

[124]       Les défendeurs demandent à notre Cour de leur adjuger les dépens sur une base avocat-client. Ils invoquent plusieurs motifs à l’appui de cette demande exceptionnelle.

[125]       D’abord, les défendeurs soutiennent que les demanderesses savaient que des redevances leur étaient dues pendant huit ans et demi, mais n’ont fait aucun effort pour obtenir ce paiement pendant toute cette période. Ce n’est plutôt qu’à partir du moment où elles ont pris connaissance de la relation entre M. MacIntosh et Conservatory Canada qu’elles ont engagé des procédures, fort probablement en raison des hostilités persistantes entourant le départ de M. MacIntosh de chez Frederick Harris, et du litige qui s’en est suivi il y a plusieurs années.

[126]       En second lieu, les défendeurs prétendent que les demanderesses ont intenté les présentes procédures de manière injuste – qu’elles savaient que Mme Warwick avait été congédiée et que cela avait causé des perturbations majeures au sein de Conservatory Canada. À titre d’exemple, elles ont présenté la présente demande au moment où les employés de Conservatory Canada s’étaient absentés pour le congé des Fêtes, pendant l’échange avec M. Oger. Puisque la décision d’avoir recours aux tribunaux a été prise à la mi-janvier 2015 et que les procédures judiciaires ont été engagées [traduction] « sans autre avis ni avertissement », le 5 février 2015, les demanderesses ont placé les défendeurs dans une situation nettement défavorable.

[127]       En troisième lieu, les défendeurs allèguent qu’en raison du caractère expéditif des présentes procédures, la diligence raisonnable n’avait pas été respectée – les demanderesses ont « présumé » sans vérifier que la nouvelle publication avait eu lieu, plutôt qu’une nouvelle édition d’une publication existante, et n’ont pris aucune mesure pour vérifier les éditions précédentes de la série afin de savoir si le contenu était essentiellement le même ou non.

[128]       Bien que, dans l’ensemble je sympathise avec les défendeurs, et même s’il y a sans contredit une animosité entre les parties, je ne vois aucun fondement justifiant l’octroi des dépens aux défendeurs, encore moins sur la base avocat-client. Je conviens que la demande fondée sur la commercialisation trompeuse est faible, mais ce n’était pas l’objet principal de la présente demande, comme l’avocat des demanderesses l’a indiqué de façon éminemment claire à l’audience, où l’accent était mis presque exclusivement sur la violation.

[129]       En bref, je ne vois aucune raison de prendre la mesure inhabituelle de condamner aux dépens une partie qui obtient gain de cause. Comme le comportement des demanderesses n’était pas abusif, elles ne doivent pas être pénalisées du simple fait que la Cour n’a pas accepté un ou plusieurs des arguments qu’elle a présentés (Johnson & Johnson inc. c. Boston Scientific ltd., 2008 CF 817, au paragraphe 3).

[130]       De plus, je trouve que l’argument des défendeurs selon lequel des circonstances exceptionnelles justifieraient l’adjudication des dépens sur une base avocat-client est sans fondement (voir Canada (Procureur général) c. Chrétien, 2011 CAF 53, au paragraphe 3).

V.                Conclusion

[131]       La présente demande doit être accueillie en partie. Les défendeurs ont reproduit les 21 œuvres sans avoir obtenu l’autorisation des demanderesses. Les dommages-intérêts préétablis pour la violation du droit d’auteur sont fixés selon la limite inférieure de la fourchette dans les cas de violations commises à des fins commerciales.

[132]       La demande fondée sur la commercialisation trompeuse est rejetée. Les demanderesses n’ont présenté aucun élément de preuve laissant entendre que la combinaison de couleurs précise utilisée dans la série Celebration est suffisamment distincte, et n’ont pas non plus établi que la série Celebration et l’édition Anniversary sont semblables au point de semer la confusion.

[133]       Malgré les vaillants efforts de l’avocat des défendeurs de convaincre la Cour du contraire, je ne vois aucune raison de m’écarter de la règle habituelle voulant que les demanderesses aient droit aux dépens.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.      La présente demande en vertu de l’alinéa 34(4)a) de la Loi est accueillie en partie.

2.      Le droit d’auteur des demanderesses a été violé en ce qui concerne les 21 œuvres musicales énumérées à l’annexe B et, pour cette raison, une injonction sera accordée interdisant aux défendeurs ainsi qu’à leurs dirigeants, administrateurs, préposés et mandataires de violer les droits d’auteur de Frederick Harris quant à ces 21 œuvres, de distribuer ou de publier une quelconque de ces 21 œuvres – du moins jusqu’à ce que les demanderesses accordent l’autorisation appropriée.

3.      Les défendeurs, à leurs frais, doivent remettre aux demanderesses les volumes de l’édition 2014 actuellement en vente ou dans les canaux de distribution (à l’exception des volumes déjà vendus aux étudiants ou aux programmes de musique, ou encore entre les mains des utilisateurs finaux).

4.      Conformément à l’alinéa 38.1(1)b) de la Loi, les défendeurs doivent verser aux demanderesses des dommages-intérêts préétablis de 500 $ pour chacune des œuvres, pour un montant total de 10 500 $.

5.      Des intérêts avant jugement sur les dommages-intérêts préétablis sont imposés.

6.      Les dépens sont adjugés en faveur des demanderesses.

« Alan S. Diner »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-172-15

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

ROYAL CONSERVATORY OF MUSIC ET THE FREDERICK HARRIS MUSIC CO, LIMITED c. CLARKE MACINTOSH FAISANT AFFAIRE SOUS LE NOM DE NOVUS VIA MUSIC GROUP INC ET CONSERVATORY CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 9 et 10 février 2016

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE DINER

 

DATE DES MOTIFS :

Le 12 août 2016

 

COMPARUTIONS :

Peter E.J. Wells

Joanna Vatavu

 

Pour les demanderesses

 

Howard P. Knopf

 

Pour les défendeurs

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

McMillan S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demanderesses

 

Macera & Jarzyna LLP

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

Pour les défendeurs

 


ANNEXE A

Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. (1985), ch. C-42

[…]

3 (1) Le droit d’auteur sur l’oeuvre comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l’oeuvre, sous une forme matérielle quelconque, d’en exécuter ou d’en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l’oeuvre n’est pas publiée, d’en publier la totalité ou une partie importante; ce droit comporte, en outre, le droit exclusif :

a) de produire, reproduire, représenter ou publier une traduction de l’oeuvre;

b) s’il s’agit d’une oeuvre dramatique, de la transformer en un roman ou en une autre oeuvre non dramatique;

c) s’il s’agit d’un roman ou d’une autre oeuvre non dramatique, ou d’une oeuvre artistique, de transformer cette oeuvre en une oeuvre dramatique, par voie de représentation publique ou autrement;

d) s’il s’agit d’une oeuvre littéraire, dramatique ou musicale, d’en faire un enregistrement sonore, film cinématographique ou autre support, à l’aide desquels l’oeuvre peut être reproduite, représentée ou exécutée mécaniquement;

e) s’il s’agit d’une oeuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique, de reproduire, d’adapter et de présenter publiquement l’oeuvre en tant qu’oeuvre cinématographique;

f) de communiquer au public, par télécommunication, une oeuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique;

g) de présenter au public lors d’une exposition, à des fins autres que la vente ou la location, une oeuvre artistique — autre qu’une carte géographique ou marine, un plan ou un graphique — créée après le 7 juin 1988;

h) de louer un programme d’ordinateur qui peut être reproduit dans le cadre normal de son utilisation, sauf la reproduction effectuée pendant son exécution avec un ordinateur ou autre machine ou appareil;

i) s’il s’agit d’une oeuvre musicale, d’en louer tout enregistrement sonore;

j) s’il s’agit d’une oeuvre sous forme d’un objet tangible, d’effectuer le transfert de propriété, notamment par vente, de l’objet, dans la mesure où la propriété de celui-ci n’a jamais été transférée au Canada ou à l’étranger avec l’autorisation du titulaire du droit d’auteur.

Est inclus dans la présente définition le droit exclusif d’autoriser ces actes.

(1.1) Dans le cadre d’une communication effectuée au titre de l’alinéa (1)f), une oeuvre est fixée même si sa fixation se fait au moment de sa communication.

[…]

13(4) Le titulaire du droit d’auteur sur une oeuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d’une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n’est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l’objet, ou par son agent dûment autorisé.

(5) Lorsque, en vertu d’une cession partielle du droit d’auteur, le cessionnaire est investi d’un droit quelconque compris dans le droit d’auteur, sont traités comme titulaires du droit d’auteur, pour l’application de la présente loi, le cessionnaire, en ce qui concerne les droits cédés, et le cédant, en ce qui concerne les droits non cédés, les dispositions de la présente loi recevant leur application en conséquence.

[…]

(7) Il est entendu que la concession d’une licence exclusive sur un droit d’auteur est réputée toujours avoir valu concession par licence d’un intérêt dans ce droit d’auteur.

[…]

27 (1) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d’un acte qu’en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d’accomplir.

[…]

34 (1) En cas de violation d’un droit d’auteur, le titulaire du droit est admis, sous réserve des autres dispositions de la présente loi, à exercer tous les recours — en vue notamment d’une injonction, de dommages-intérêts, d’une reddition de compte ou d’une remise — que la loi accorde ou peut accorder pour la violation d’un droit.

[…]

(4) Les procédures suivantes peuvent être engagées ou continuées par une requête ou une action :

a) les procédures pour violation du droit d’auteur ou des droits moraux;

b) les procédures visées aux articles 44.12, 44.2 ou 44.4;

c) les procédures relatives aux tarifs homologués par la Commission en vertu des parties VII et VIII ou aux ententes visées à l’article 70.12.

Le tribunal statue sur les requêtes sans délai et suivant une procédure sommaire.

[…]

38.1 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le titulaire du droit d’auteur, en sa qualité de demandeur, peut, avant le jugement ou l’ordonnance qui met fin au litige, choisir de recouvrer, au lieu des dommages-intérêts et des profits visés au paragraphe 35(1), les dommages-intérêts préétablis ci-après pour les violations reprochées en l’instance à un même défendeur ou à plusieurs défendeurs solidairement responsables :

a) dans le cas des violations commises à des fins commerciales, pour toutes les violations — relatives à une oeuvre donnée ou à un autre objet donné du droit d’auteur —, des dommages-intérêts dont le montant, d’au moins 500 $ et d’au plus 20 000 $, est déterminé selon ce que le tribunal estime équitable en l’occurrence;

b) dans le cas des violations commises à des fins non commerciales, pour toutes les violations — relatives à toutes les oeuvres données ou tous les autres objets donnés du droit d’auteur —, des dommages-intérêts, d’au moins 100 $ et d’au plus 5 000 $, dont le montant est déterminé selon ce que le tribunal estime équitable en l’occurrence.

[…]

38.1 (5) (5) Lorsqu’il rend une décision relativement aux paragraphes (1) à (4), le tribunal tient compte notamment des facteurs suivants :

a) la bonne ou mauvaise foi du défendeur;

b) le comportement des parties avant l’instance et au cours de celle-ci;

c) la nécessité de créer un effet dissuasif à l’égard de violations éventuelles du droit d’auteur en question;

d) dans le cas d’une violation qui est commise à des fins non commerciales, la nécessité d’octroyer des dommages-intérêts dont le montant soit proportionnel à la violation et tienne compte des difficultés qui en résulteront pour le défendeur, du fait que la violation a été commise à des fins privées ou non et de son effet sur le demandeur.

[…]

41 Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 41.1 à 41.21.

contourner

a) S’agissant de la mesure technique de protection au sens de l’alinéa a) de la définition de ce terme, éviter, supprimer, désactiver ou entraver la mesure — notamment décoder ou déchiffrer l’œuvre protégée par la mesure — sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur;

b) s’agissant de la mesure technique de protection au sens de l’alinéa b) de la définition de ce terme, éviter, supprimer, désactiver ou entraver la mesure. (circumvent)

mesure technique de protection Toute technologie ou tout dispositif ou composant qui, dans le cadre normal de son fonctionnement :

a) soit contrôle efficacement l’accès à une œuvre, à une prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou à un enregistrement sonore et est autorisé par le titulaire du droit d’auteur;

b) soit restreint efficacement l’accomplissement, à l’égard d’une œuvre, d’une prestation fixée au moyen d’un enregistrement sonore ou d’un enregistrement sonore, d’un acte visé aux articles 3, 15 ou 18 ou pour lequel l’article 19 prévoit le versement d’une rémunération. (mesure technique de protection)

[…]

41.23 (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le titulaire d’un droit d’auteur ou quiconque possède un droit, un titre ou un intérêt acquis par cession ou concession consentie par écrit par le titulaire peut, individuellement pour son propre compte, en son propre nom comme partie à une procédure, soutenir et faire valoir les droits qu’il détient, et il peut exercer les recours prévus par la présente loi dans toute l’étendue de son droit, de son titre et de son intérêt.

(2) Lorsqu’une procédure est engagée au titre du paragraphe (1) par une personne autre que le titulaire du droit d’auteur, ce dernier doit être constitué partie à cette procédure sauf :

a) dans le cas d’une procédure engagée en vertu des articles 44.12, 44.2 ou 44.4;

b) dans le cas d’une procédure interlocutoire, à moins que le tribunal estime qu’il est dans l’intérêt de la justice de constituer le titulaire du droit d’auteur partie à la procédure;

c) dans tous les autres cas où le tribunal estime que l’intérêt de la justice ne l’exige pas.

(3) Le titulaire du droit d’auteur visé au paragraphe (2) n’est pas tenu de payer les frais à moins d’avoir participé à la procédure.

(4) Le tribunal peut, sous réserve de toute entente entre le demandeur et le titulaire du droit d’auteur visé au paragraphe (2), répartir entre eux, de la manière qu’il estime indiquée, les dommages-intérêts et les profits visés au paragraphe 35(1).

[…]

43.1 (1) Sous réserve du paragraphe (2), le tribunal ne peut accorder de réparations à l’égard d’un fait — acte ou omission — contraire à la présente loi que dans les cas suivants :

a)  le demandeur engage une procédure dans les trois ans qui suivent le moment où le fait visé par le recours a eu lieu, s’il avait connaissance du fait au moment où il a eu lieu ou s’il est raisonnable de s’attendre à ce qu’il en ait eu connaissance à ce moment;

b)  le demandeur engage une procédure dans les trois ans qui suivent le moment où il a pris connaissance du fait visé par le recours ou le moment où il est raisonnable de s’attendre à ce qu’il en ait pris connaissance, s’il n’en avait pas connaissance au moment où il a eu lieu ou s’il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce qu’il en ait eu connaissance à ce moment.

[…]

3 (1) For the purposes of this Act, copyright, in relation to a work, means the sole right to produce or reproduce the work or any substantial part thereof in any material form whatever, to perform the work or any substantial part thereof in public or, if the work is unpublished, to publish the work or any substantial part thereof, and includes the sole right

(a) to produce, reproduce, perform or publish any translation of the work,

(b) in the case of a dramatic work, to convert it into a novel or other non-dramatic work,

(c) in the case of a novel or other non-dramatic work, or of an artistic work, to convert it into a dramatic work, by way of performance in public or otherwise,

(d) in the case of a literary, dramatic or musical work, to make any sound recording, cinematograph film or other contrivance by means of which the work may be mechanically reproduced or performed,

(e) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to reproduce, adapt and publicly present the work as a cinematographic work,

(f) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to communicate the work to the public by telecommunication,

(g) to present at a public exhibition, for a purpose other than sale or hire, an artistic work created after June 7, 1988, other than a map, chart or plan,

(h) in the case of a computer program that can be reproduced in the ordinary course of its use, other than by a reproduction during its execution in conjunction with a machine, device or computer, to rent out the computer program,

(i) in the case of a musical work, to rent out a sound recording in which the work is embodied, and

(j) in the case of a work that is in the form of a tangible object, to sell or otherwise transfer ownership of the tangible object, as long as that ownership has never previously been transferred in or outside Canada with the authorization of the copyright owner,

and to authorize any such acts.

(1.1) A work that is communicated in the manner described in paragraph (1)(f) is fixed even if it is fixed simultaneously with its communication.

[…]

13(4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner’s duly authorized agent.

(5) Where, under any partial assignment of copyright, the assignee becomes entitled to any right comprised in copyright, the assignee, with respect to the rights so assigned, and the assignor, with respect to the rights not assigned, shall be treated for the purposes of this Act as the owner of the copyright, and this Act has effect accordingly.

[…]

(7) For greater certainty, it is deemed always to have been the law that a grant of an exclusive licence in a copyright constitutes the grant of an interest in the copyright by licence.

[…]

27 (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

[…]

34 (1) Where copyright has been infringed, the owner of the copyright is, subject to this Act, entitled to all remedies by way of injunction, damages, accounts, delivery up and otherwise that are or may be conferred by law for the infringement of a right.

[…]

(4) The following proceedings may be commenced or proceeded with by way of application or action and shall, in the case of an application, be heard and determined without delay and in a summary way:

(a) proceedings for infringement of copyright or moral rights;

(b) proceedings taken under section 44.12, 44.2 or 44.4; and

(c) proceedings taken in respect of

(i) a tariff certified by the Board under Part VII or VIII, or

(ii) agreements referred to in section 70.12.

[…]

38.1 (1) Subject to this section, a copyright owner may elect, at any time before final judgment is rendered, to recover, instead of damages and profits referred to in subsection 35(1), an award of statutory damages for which any one infringer is liable individually, or for which any two or more infringers are liable jointly and severally,

(a) in a sum of not less than $500 and not more than $20,000 that the court considers just, with respect to all infringements involved in the proceedings for each work or other subject-matter, if the infringements are for commercial purposes; and

(b) in a sum of not less than $100 and not more than $5,000 that the court considers just, with respect to all infringements involved in the proceedings for all works or other subject-matter, if the infringements are for non-commercial purposes.

[…]

38.1 (5) In exercising its discretion under subsections (1) to (4), the court shall consider all relevant factors, including

(a) the good faith or bad faith of the defendant;

(b) the conduct of the parties before and during the proceedings;

(c) the need to deter other infringements of the copyright in question; and

(d) in the case of infringements for non-commercial purposes, the need for an award to be proportionate to the infringements, in consideration of the hardship the award may cause to the defendant, whether the infringement was for private purposes or not, and the impact of the infringements on the plaintiff.

[…]

41 The following definitions apply in this section and in sections 41.1 to 41.21.

circumvent means,

(a) in respect of a technological protection measure within the meaning of paragraph (a) of the definition technological protection measure, to descramble a scrambled work or decrypt an encrypted work or to otherwise avoid, bypass, remove, deactivate or impair the technological protection measure, unless it is done with the authority of the copyright owner; and

(b) in respect of a technological protection measure within the meaning of paragraph (b) of the definition technological protection measure, to avoid, bypass, remove, deactivate or impair the technological protection measure. (contourner)

technological protection measure means any effective technology, device or component that, in the ordinary course of its operation,

(a) controls access to a work, to a performer’s performance fixed in a sound recording or to a sound recording and whose use is authorized by the copyright owner; or

(b) restricts the doing — with respect to a work, to a performer’s performance fixed in a sound recording or to a sound recording — of any act referred to in section 3, 15 or 18 and any act for which remuneration is payable under section 19. (technological protection measure)

[…]

41.23 (1) Subject to this section, the owner of any copyright, or any person or persons deriving any right, title or interest by assignment or grant in writing from the owner, may individually for himself or herself, as a party to the proceedings in his or her own name, protect and enforce any right that he or she holds, and, to the extent of that right, title and interest, is entitled to the remedies provided by this Act.

(2) If proceedings under subsection (1) are taken by a person other than the copyright owner, the copyright owner shall be made a party to those proceedings, except

(a) in the case of proceedings taken under section 44.12, 44.2 or 44.4;

(b) in the case of interlocutory proceedings, unless the court is of the opinion that the interests of justice require the copyright owner to be a party; and

(c) in any other case in which the court is of the opinion that the interests of justice do not require the copyright owner to be a party.

(3) A copyright owner who is made a party to proceedings under subsection (2) is not liable for any costs unless the copyright owner takes part in the proceedings.

(4) If a copyright owner is made a party to proceedings under subsection (2), the court, in awarding damages or profits, shall, subject to any agreement between the person who took the proceedings and the copyright owner, apportion the damages or profits referred to in subsection 35(1) between them as the court considers appropriate.

[…]

43.1 (1) Subject to subsection (2), a court may award a remedy for any act or omission that has been done contrary to this Act only if

(a) the proceedings for the act or omission giving rise to a remedy are commenced within three years after it occurred, in the case where the plaintiff knew, or could reasonably have been expected to know, of the act or omission at the time it occurred; or

(b) the proceedings for the act or omission giving rise to a remedy are commenced within three years after the time when the plaintiff first knew of it, or could reasonably have been expected to know of it, in the case where the plaintiff did not know, and could not reasonably have been expected to know, of the act or omission at the time it occurred.

 


Règles des Cours fédérales, DORS/98-106

[…]

60 La Cour peut, à tout moment avant de rendre jugement dans une instance, signaler à une partie les lacunes que comporte sa preuve ou les règles qui n’ont pas été observées, le cas échéant, et lui permettre d’y remédier selon les modalités qu’elle juge équitables.

[…]

300 La présente partie s’applique :

a) aux demandes de contrôle judiciaire de mesures administratives, y compris les demandes présentées en vertu des articles 18.1 ou 28 de la Loi, à moins que la Cour n’ordonne, en vertu du paragraphe 18.4(2) de la Loi, de les instruire comme des actions;

b) aux instances engagées sous le régime d’une loi fédérale ou d’un texte d’application de celle-ci qui en prévoit ou en autorise l’introduction par voie de demande, de requête, d’avis de requête introductif d’instance, d’assignation introductive d’instance ou de pétition, ou le règlement par procédure sommaire, à l’exception des demandes faites en vertu du paragraphe 33(1) de la Loi sur la responsabilité en matière maritime;

c) aux appels interjetés en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté;

d) aux appels interjetés en vertu de l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce;

e) aux renvois d’un office fédéral en vertu de la règle 320;

f) aux demandes présentées en vertu du Code d’arbitrage commercial qui sont visées au paragraphe 324(1);

g) aux actions renvoyées à la Cour en vertu des paragraphes 3(3) ou 5(3) de la Loi sur le divorce;

h) aux demandes pour l’enregistrement, la reconnaissance ou l’exécution d’un jugement étranger visées aux règles 327 à 334.

[…]

(2) Le dossier du demandeur contient, sur des pages numérotées consécutivement, les documents suivants dans l’ordre indiqué ci-après :

[…]

g) une description des objets déposés comme pièces qu’il entend utiliser à l’audition

[…]

 

[…]

60 At any time before judgment is given in a proceeding, the Court may draw the attention of a party to any gap in the proof of its case or to any non-compliance with these Rules and permit the party to remedy it on such conditions as the Court considers just.

[…]

300 This Part applies to

(a) applications for judicial review of administrative action, including applications under section 18.1 or 28 of the Act, unless the Court directs under subsection 18.4(2) of the Act that the application be treated and proceeded with as an action;

(b) proceedings required or permitted by or under an Act of Parliament to be brought by application, motion, originating notice of motion, originating summons or petition or to be determined in a summary way, other than applications under subsection 33(1) of the Marine Liability Act;

(c) appeals under subsection 14(5) of the Citizenship Act;

(d) appeals under section 56 of the Trade-marks Act;

(e) references from a tribunal under rule 320;

(f) requests under the Commercial Arbitration Code brought pursuant to subsection 324(1);

(g) proceedings transferred to the Court under subsection 3(3) or 5(3) of the Divorce Act; and

(h) applications for registration, recognition or enforcement of a foreign judgment brought under rules 327 to 334.

[…]

(2) An applicant’s record shall contain, on consecutively numbered pages and in the following order,

[…]

(g) a description of any physical exhibits to be used by the applicant at the hearing; and

[…]

 

Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. (1985), ch. F-7 

[…]

20 (2) Elle a compétence concurrente dans tous les autres cas de recours sous le régime d’une loi fédérale ou de toute autre règle de droit non visés par le paragraphe (1) relativement à un brevet d’invention, un droit d’auteur, une marque de commerce, un dessin industriel ou une topographie au sens de la Loi sur les topographies de circuits intégrés.

 

[…]

20 (2) The Federal Court has concurrent jurisdiction in all cases, other than those mentioned in subsection (1), in which a remedy is sought under the authority of an Act of Parliament or at law or in equity respecting any patent of invention, copyright, trade-mark, industrial design or topography referred to in paragraph (1)(a).

Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13

[…]

7 Nul ne peut :

[…]

b) appeler l’attention du public sur ses produits, ses services ou son entreprise de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada, lorsqu’il a commencé à y appeler ainsi l’attention, entre ses produits, ses services ou son entreprise et ceux d’un autre;

 

[…]

7 No person shall

[…]

(b) direct public attention to his goods, services or business in such a way as to cause or be likely to cause confusion in Canada, at the time he commenced so to direct attention to them, between his goods, services or business and the goods, services or business of another;


ANNEXE B : LES 21 OEUVRES

Droits de type 1 – Cession du droit d’auteur, y compris les droits de publication exclusifs à l’échelle mondiale

Compositeur/compositrice

Titre

  1. Stephen Chatman

Katherine

  1. Stephen Chatman

Celebration

  1. Anne Crosby

Starfish at Night

  1. Anne Crosby

Little Elves and Pixies

  1. Anne Crosby

Robots

  1. Anne Crosby

Can’t Catch Me

  1. Alexina Louie

Shooting Stars

  1. Alexina Louie

Blue Sky I

  1. Alexina Louie

Moonlight Tocata

  1. Linda Niamath

Spider’s Web

  1. Linda Niamath

It’s Raining

  1. Lorna Patterson

Doves

  1. Clifford Poole

Mist

  1. Chee-Hwa Tan

Pirate Story

  1. arr. Nancy Telfer

A Great Big Sea

  1. arr. Nancy Telfer

Alouette


Droits de type 2 – Droits de publication exclusifs à l’échelle mondiale

Compositeur/compositrice

Titre

  1. Stephen Chatman

Bozo’s Flippity-Flop

  1. Stephen Chatman

Sneaky

  1. Linda Niamath

Butterflies

  1. Linda Niamath

Peacock

  1. Linda Niamath

Masquerade

 

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