Dossier : T-423-15
Référence : 2015 CF 1214
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Toronto (Ontario), le 27 octobre 2015
En présence de madame la juge Mactavish
ENTRE : |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION |
demandeur |
et |
PRABAGARAN CHINNAPPAN |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
(Motifs prononcés de vive voix à Toronto, le 26 octobre 2015)
[1] Comme je l’ai expliqué à M. Chinnappan pendant l’audience, lorsque je contrôle judiciairement une décision rendue par un juge de la citoyenneté, mon rôle n’est pas de décider si oui ou non, M. Chinnappan serait un bon citoyen du Canada. Mon rôle se limite à déterminer si la décision du juge de la citoyenneté était raisonnable ou non, compte tenu du dossier dont il était saisi.
[2] Lorsqu’il a approuvé la demande de citoyenneté canadienne de M. Chinnappan, le juge de la citoyenneté a conclu que M. Chinnappan avait donné une explication satisfaisante de la raison pour laquelle il avait seulement été en mesure de produire un nombre limité d’éléments de preuve documentaire confirmant sa présence au Canada pendant la période pertinente. Le juge de la citoyenneté a aussi été convaincu par l’explication de M. Chinnappan relativement à : la perte de ses passeports, l’absence non déclarée du Canada en février 2007, l’utilisation d’un nom différent dans son profil LinkedIn. Le juge de la citoyenneté pouvait raisonnablement tirer de telles conclusions sur la foi du dossier dont il était saisi, et rien ne justifie l’intervention de la Cour à cet égard.
[3] Toutefois, le juge de la citoyenneté a été saisi d’autres éléments de preuve qui remettaient en question la preuve produite par M. Chinnappan relativement à sa présence physique au Canada pendant la période située entre mars 2006 et mars 2010 et que le juge de la citoyenneté n’avait ni mentionné ni analysé. En particulier, il ressort du dossier que M. Chinnappan détenait un passeport de l’Inde qui avait été délivré à Singapour en octobre 2009. Toutefois, M. Chinnappan n’a pas déclaré de voyage à Singapour en 2009 ou en fait à un moment quelconque de la période pertinente.
[4] De plus, le passeport de l’Inde de M. Chinnappan avait été examiné par les fonctionnaires de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) en 2008, comme faisant partie de la demande de parrainage de la fille de M. Chinnappan. Dans ses notes du Système de soutien des opérations des bureaux locaux (SSOBL) relatives à cet examen, CIC relève que le passeport de l’Inde de M. Chinnappan contient [traduction] « de nombreuses estampilles de séjours en Nouvelle-Zélande, aux États-Unis, en Chine, en Malaisie, à Singapour, au Brésil, en Inde, aux Pays-Bas, etc. ». Toutefois, M. Chinnappan n’a pas déclaré de voyages en Nouvelle-Zélande, en Chine, en Malaisie, à Singapour, ou au Brésil pendant la période visée par sa demande de citoyenneté. Aucune mention n’a été faite de cet élément de preuve par le juge de la citoyenneté, et M. Chinnappan n’a pas nié avoir visité ces pays pendant la période visée.
[5] Il est vrai qu’un tribunal n’est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve versés au dossier et il sera présumé avoir examiné l’ensemble des éléments de preuve dont il disposait : Hassan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1992] ACF no 946, 147 NR 317 (CAF). Cela dit, plus les éléments de preuve que le tribunal a omis de mentionner ou d’analyser explicitement dans ses motifs sont importants, plus la Cour sera disposée à conclure que le tribunal n’en a pas tenu compte (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1425, 157 FTR 35, aux paragraphes 14 à 17.
[6] En l’espèce, il y avait des éléments de preuve importants dont le juge de la citoyenneté disposait qui contredisaient directement les allégations de M. Chinnappan selon lesquelles il avait été physiquement présent au Canada pendant 1282 jours au cours de la période visée par sa demande de citoyenneté. Le défaut du juge de la citoyenneté de prendre en compte ces éléments de preuve signifie que la décision d’approuver la demande de citoyenneté de M. Chinnappan est dépourvue de transparence, de justification et d’intelligibilité, caractéristiques requises pour qu’une décision soit jugée raisonnable.
[7] En conséquence, la demande du ministre est accueillie, la décision du juge de la citoyenneté est annulée et la demande de citoyenneté de M. Chinnappan sera renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour qu’il rende une nouvelle décision.
[8] Les deux parties se sont vu accorder l’occasion de proposer une question qui se prête à la certification, et aucune d’elles n’a proposé de question qui satisfasse aux critères de certification établis par la Cour d’appel fédérale au paragraphe 23 de l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CAF 113. De plus, je suis d’avis que la présente affaire est un cas d’espèce. En conséquence, aucune question ne sera certifiée.
LA COUR STATUE que :
1. La décision du juge de la citoyenneté est annulée et la demande de citoyenneté du demandeur est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour qu’il rende une nouvelle décision.
« Anne L. Mactavish »
Traduction certifiée conforme
L. Endale
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
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dossier : |
T-423-15 |
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INTITULÉ : |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ c PRABAGARAN CHINNAPPAN
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
TORONTO (ONTARIO)
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DATE DE L’AUDIENCE : |
Le 26 octobre 2015
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Jugement et motifs : |
La juge MACTAVISH
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DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS : |
Le 27 octobre 2015
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COMPARUTIONS :
Charles J. Jubenville
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Pour le demandeur
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Agissant pour son propre compte
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Pour le défendeur
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
William F. Pentney Sous‑procureur général du Canada
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Pour le demandeur
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S/O
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Pour le défendeur
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