Date : 20150107
Dossier : IMM-5429-13
Référence : 2015 CF 16
[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]
Ottawa (Ontario), le 7 janvier 2015
En présence de monsieur le juge Zinn
ENTRE : |
SHUZHEN ZHENG (alias SHU ZHEN ZHENG) SHUYI ZHENG SULING LIANG (alias SU LING LIANG) WEIFENG ZHENG |
demandeurs |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
[1] Les membres de la famille de demandeurs contestent la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié par laquelle cette dernière a rejeté leurs demandes d’asile. Shuzhen Zheng, son épouse Suling Liang et leurs enfants, Shuyi Zheng et Weifing Zheng, sont des citoyens de la République populaire de Chine originaires de la province du Guangdong. Les demandeurs soutiennent craindre d’être persécutés en Chine à cause de leur foi chrétienne. Suling Liang craint également d’être persécutée en raison de sa maladie mentale.
[2] Le commissaire a posé des questions plutôt précises sur le christianisme aux demandeurs et a conclu, à la lumière de leurs témoignages, qu’ils ne sont pas des chrétiens comme ils soutiennent l’être, malgré le fait qu’ils prétendent fréquenter l’église au Canada et lire la Bible sur une base régulière :
Les demandeurs d’asile semblent avoir appris certains faits sur le christianisme; toutefois, lorsqu’il s’agit d’expliquer des éléments simples de la religion, ils en sont incapables. Bien que de nombreux chrétiens possèdent une connaissance limitée de leur religion et de la Bible, le tribunal doit établir si la connaissance des demandeurs d’asile est raisonnable au regard du profil religieux qu’ils affirment avoir. Compte tenu du dévouement du demandeur d’asile principal dans sa lecture de la Bible et de son assiduité à l’église et aux cours d’étude de la Bible, il est raisonnable de s’attendre à ce qu’il possède un haut degré de connaissance et de compréhension de la religion chrétienne. Or, ses connaissances étaient limitées. Le demandeur d’asile aurait facilement pu acquérir les connaissances qu’il possède pendant son séjour au Canada. Le tribunal tire une conclusion défavorable de la connaissance limitée du demandeur d’asile, compte tenu du profil religieux qu’il affirme avoir.
Le tribunal conclut, selon la prépondérance des probabilités, et compte tenu des constatations susmentionnées, que les demandeurs d’asile ont joint les rangs d’une église chrétienne au Canada dans le seul but d’appuyer une demande d’asile frauduleuse. Dans le contexte décrit précédemment, à la lumière de l’ensemble de la preuve présentée, et compte tenu des connaissances du demandeur d’asile sur le christianisme, le tribunal juge que les demandeurs d’asile ne sont pas des chrétiens pratiquants authentiques et qu’ils ne seraient pas perçus ainsi en Chine.
[3] Les demandeurs soutiennent que la Cour a déclaré que le fait de déterminer si une personne est un adepte d’une religion donnée constitue un critère très peu exigeant ne nécessitant pas une analyse approfondie de la sincérité ou de la capacité du demandeur d’asile à démontrer ses connaissances religieuses : voir Huang c Canada (Citoyenneté et Immigration), [2012] CF 1002, et Lin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 288. Ils ajoutent que le commissaire leur a imposé une exigence déraisonnablement élevée pour ce qui est de démontrer qu’ils sont véritablement des chrétiens. Ils soulignent avoir été en mesure de répondre aux questions de base sur leur religion et ils ont soumis des baptistaires ainsi qu’une lettre de leur abbé.
[4] À mon avis, il n’est pas approprié qu’un commissaire accepte tout simplement l’affirmation d’un demandeur d’asile concernant sa foi religieuse sans procéder à une vérification en bonne et due forme. En l’espèce, le commissaire a posé des questions aux demandeurs d’asile au sujet de leurs pratiques religieuses et a signalé, à juste titre, que le demandeur principal avait déclaré qu’il lisait régulièrement la bible, qu’il fréquentait l’Église sur une base hebdomadaire et qu’il suivait des cours d’étude de la Bible. Compte tenu de ces circonstances et de la période durant laquelle le demandeur soutient avoir été un adepte du christianisme, la conclusion de la Commission selon laquelle on se serait attendu à ce qu’il ait une connaissance et une compréhension profondes du christianisme n’est pas déraisonnable. D’après l’examen de la transcription des témoignages des demandeurs, la connaissance qu’ont ces derniers de leur religion professée se décrirait au mieux comme étant superficielle. Ce n’est pas ce à quoi l’on pourrait s’attendre compte tenu des témoignages qu’ils ont livrés au sujet de leur dévouement à l’égard de cette religion. Par conséquent, la conclusion du commissaire ne peut être qualifiée de déraisonnable.
[5] Quoi qu’il en soit, la conclusion du commissaire selon laquelle les demandeurs seraient libres de pratiquer le christianisme dans la province du Guangdong est fondée sur une analyse approfondie de la preuve objective dont il disposait. Il a traité de chacun des documents en précisant pourquoi il était convaincant ou non. Bien que l’on puisse être en désaccord avec l’analyse, le raisonnement et la conclusion sont raisonnables et possèdent les qualités de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité.
[6] Le dernier point de préoccupation est celui de la façon dont la Commission a traité de la maladie mentale de Suling Liang. Le commissaire a conclu que cette dernière « devrait guérir complètement », à la lumière d’une déclaration de son médecin selon laquelle [traduction] « elle pourrait avoir besoin d’un traitement à plus long terme avant que ses symptômes disparaissent complètement ». Selon la décision, l’avocat a convenu qu’il s’agissait d’une conclusion raisonnable. Les demandeurs soutiennent que l’avocat n’a aucunement acquiescé de la sorte et ajoutent que la conclusion est déraisonnable lorsqu’elle est examinée à la lumière d’une seconde lettre d’un autre médecin, qui est formulée ainsi :
[traduction] Son état a commencé à s’améliorer, mais elle ne comprend toujours pas que ses pensées et son comportement sont attribuables à une maladie. Comme elle demeure paranoïaque, je ne crois pas qu’elle puisse, à l’heure actuelle, saisir la nature des procédures liées à sa demande d’asile. Son jugement est influencé par des croyances psychotiques, alors elle ne peut dûment mandater son avocat. En tant que médecin, je ne lui permettrais pas non plus de témoigner dans le cadre d’une audience dans un tel état.
J’espère que cela répond à vos questions. Je m’attends à ce que l’état de cette patiente s’améliore à l’aide du bon traitement. À ce moment-là, elle sera probablement en mesure d’accomplir tout ce dont il a été question. [non souligné dans l’original]
[7] L’avis sur lequel s’est fondé le commissaire est le plus récent. Il a été rédigé 17 mois après la lettre sur laquelle se fondent les demandeurs. Il est allégué que la façon dont le commissaire a interprété la lettre, soit l’affirmation que la demanderesse « guérir[a] complètement », pose problème. Je conviens qu’il n’y a rien au dossier qui appuie la déclaration du commissaire selon laquelle l’avocat était d’accord avec cette interprétation. Toutefois, la lettre en soi appuie effectivement fortement cette interprétation, même en l’absence d’une approbation. Par conséquent, on ne peut dire qu’il s’agit d’une interprétation déraisonnable de la preuve.
[8] Pour ces motifs, la demande sera rejetée. Aucune question n’a été proposée aux fins de certification.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée et qu’aucune question n’est certifiée.
« Russel W. Zinn »
Juge
Traduction certifiée conforme
Stéphanie Pagé, traductrice
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
IMM-5429-13
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INTITULÉ : |
SHUZHEN ZHENG ET AL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE : |
LE 11 DÉcembrE 2014
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JUGEMENT ET MOTIFS : |
LE JUGE ZINN
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DATE DES MOTIFS : |
LE 7 JANVIER 2015
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COMPARUTIONS :
Michael Korman
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POUR LES DEMANDEURS
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Julie Waldman
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Otis & Korman Avocats Toronto (Ontario)
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POUR LES DEMANDEURS
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William F. Pentney Sous‑procureur général du Canada Toronto (Ontario)
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POUR LE DÉFENDEUR
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