Date: 20150421
Dossier : IMM-2529-14
Référence : 2015 CF 508
Toronto (Ontario), le 21 avril 2015
En présence de monsieur le juge Hughes
ENTRE : |
JANOS LAKATOS JANOSNE LAKATOS |
demandeurs |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION |
défendeur |
JUGEMENT ET MOTIFS
[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision datée du 6 mars 2014 par laquelle un commissaire de la Section de la protection des réfugiés a rejeté la demande d’asile des demandeurs.
[2] Les demandeurs sont mariés. Ils sont tous deux Hongrois et d’origine ethnique rom. Ils ont quatre enfants et plusieurs petits-enfants. Certains de leurs enfants et de leurs petits-enfants ont obtenu l’asile au Canada.
[3] Lorsque les demandeurs sont arrivés au Canada en mars 2014, ils n’ont pas immédiatement demandé l’asile. Ils ont attendu jusqu’au mois d’août 2014 pour présenter leur demande parce que, disent‑ils, ils espéraient que leur fils quitte la Hongrie pour venir au Canada et qu’ils puissent présenter leurs demandes conjointement. Il n’est jamais venu.
[4] Les demandeurs ont invoqué deux motifs à l’appui de leur demande. Le premier consistait en une série d’incidents non reliés survenus en Hongrie entre 1976 et 2013 au cours desquels l’un ou l’autre d’entre eux a été frappé ou injurié en raison de son appartenance au groupe ethnique rom. Le deuxième motif invoqué était la crainte qu’ils ont d’une personne qu’ils disent faire partie de la mafia, et qui a enlevé l’un de leurs fils en 2004. Ce dernier a été gardé en otage quelques jours, jusqu’à qu’il réussisse à s’échapper.
[5] La demande des demandeurs a été rejetée pour le motif principal qu’ils se sont rendus par le passé aux États‑Unis et au Canada, et qu’ils n’ont jamais présenté de demande d’asile; ils se sont plutôt réclamés de nouveau de la protection de la Hongrie. Les deux demandeurs se sont rendus aux États‑Unis en 2012. La demanderesse est aussi venue au Canada en 2009. Chaque fois, ils sont retournés en Hongrie.
[6] Lorsque la demande des demandeurs a été rejetée, ils ont fait l’objet d’une mesure de renvoi. Ils ont demandé en vain la suspension de la mesure, et ils ont été renvoyés en Hongrie le 6 juin 2014. Pour cette raison, le défendeur a présenté une requête au début de l’audience visant à faire rejeter la présente demande parce qu’elle est devenue théorique par suite du renvoi des demandeurs en Hongrie.
[7] Je n’examinerai pas la requête du défendeur pour divers motifs. Premièrement, elle n’a été présentée que deux jours ouvrables avant l’audience alors que la date de l’audition était fixée depuis un certain temps déjà. Deuxièmement, le juge Fothergill a traité de la question dans l’affaire Molnar c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2015 CF 345, dans laquelle une question a été certifiée et un appel interjeté. Troisièmement, étant donné l’issue de la présente instance, il n’est pas nécessaire que j’examine cette requête.
[8] Les demandeurs ont soulevé quatre questions lors de l’audience :
• Le commissaire a‑t‑il commis une erreur dans son analyse de la crainte subjective?
• Le commissaire a –t‑il fait erreur en ce qui concerne le fait que les demandeurs n’ont pas demandé l’asile dans un pays tiers sûr?
• Le commissaire a‑t‑il commis une erreur en concluant que les demandeurs s’étaient de nouveau réclamés de la protection de la Hongrie?
• Le commissaire a‑t‑il omis de tenir dûment compte du fait que les demandes d’asile du fils et de la fille du demandeur avaient été accueillies?
[9] Toutes ces questions doivent être examinées selon la norme de la décision raisonnable.
[10] Une autre question – celle de la partialité – a été soulevée dans les observations écrites, mais l’avocat des demandeurs n’a pas fait valoir ce point lors de l’audience.
[11] Les trois premières questions, bien qu’elles aient été débattues séparément lors de l’audience, concernent toutes le fait que les demandeurs ont à un faible degré subi du harcèlement, à certaines occasions, peu fréquentes, sur une période de plusieurs années. Le commissaire a conclu que ces incidents, pris isolément ou ensemble, ne justifiaient pas l’octroi de l’asile. Je suis d’avis que cette décision fait partie des issues possibles raisonnables au sens où on l’entend dans la jurisprudence, notamment dans l’arrêt Nouveau‑Brunswick c Dunsmuir, [2008] 1 RCS 190. Les demandeurs auraient pu à plusieurs occasions demander l’asile aux États‑Unis ou au Canada, mais ils ne l’ont pas fait. L’explication selon laquelle ils attendaient de voir si la situation allait s’améliorer en Hongrie ne constitue pas une excuse valable.
[12] L’argument voulant que le commissaire n’ait pas accordé suffisamment d’importance au fait que le fils et la fille du demandeur avaient tous deux obtenu l’asile au Canada quelques années auparavant ne tient pas non plus. Des facteurs additionnels entraient en jeu en ce qui concerne leur fils et leur fille, pour le premier, liés à la religion de sa femme et, pour la seconde, à son orientation sexuelle. Le fait qu’un membre d’une famille ait pu obtenir l’asile ne fait pas en sorte que les autres membres de la famille doivent forcément l’obtenir.
[13] Je suis d’avis que les conclusions auxquelles est arrivé le commissaire étaient raisonnables, et elles ne seront pas annulées.
[14] Il n’y a aucune question à certifier.
JUGEMENT
LA COUR STATUE que :
1. La demande est rejetée;
2. Aucune question n’est certifiée;
3. Aucuns dépens ne sont adjugés.
« Roger T. Hughes »
Juge
Traduction certifiée conforme
Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
DOSSIER : |
IMM-2529-14
|
INTITULÉ : |
JANOS LAKATOS, JANOSNE LAKATOS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
Toronto (Ontario)
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DATE DE L’AUDIENCE : |
le 20 avril 2015
|
JUDGEMENT ET MOTIFS : |
LE JUGE HUGHES
|
DATE DES MOTIFS: |
LE 21 avril 2015
|
COMPARUTIONS :
Joseph S Farkas |
POUR LES DEMANDEURS
|
Aleksandra Lipska
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POUR LE DÉFENDEUR
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AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Joseph S Farkas Avocat Toronto (Ontario)
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POUR LES DEMANDEURS
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William F. Pentney Sous-procureur général du Canada Ottawa (Ontario) |
POUR LE DÉFENDEUR
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